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MARQUES DE COMMERCE

Contrefaçon

Alticor Inc. c. Nutravite Pharmaceuticals Inc.

T-1489-99

2004 CF 235, juge Snider

16-2-04

59 p.

Action en contrefaçon, prétendant que la marque «Nutravite» est susceptible d'être confondue avec la marque «Nutrilite» de la demanderesse et action en commercialisation trompeuse, sur le fondement de la vente et de la distribution par la défenderesse de ses produits en liaison avec les deux marques «Nutravite» et «A Perfect Blend Of Science and Nature»--La défenderesse, par voie de demande reconventionnelle, allègue que la marque «Nutrilite» n'est pas valide parce qu'à la date de son enregistrement, elle n'était pas enregistrable--Si la marque est jugée non enregistrable, il ne peut y avoir de contrefaçon ou de commercialisation trompeuse--Par conséquent, la validité de la marque «Nutrilite» est traitée en premier--La marque «Nutrilite» a été enregistrée au Canada le 28 mars 1952--À l'époque, la Loi sur la concurrence déloyale (LCD) prévoyait qu'un mot servant de marque est enregistrable s'il n'est pas le nom dans quelque langue que ce soit, d'un des produits au sujet desquels il est question de s'en servir (art. 26e)) et s'il ne constitue pas une désignation de la nature ou de la qualité des produits au sujet desquels il est question de s'en servir (art. 26c))--La défenderesse n'a pas présenté de preuve établissant que le mot «nutrilite» était connu du consommateur canadien moyen en 1952--Les divers articles de revues scientifiques de cette époque qui ont été présentés étaient surtout d'origine étrangère et il n'y a pas eu de preuve concernant l'étendue de leur diffusion au Canada--Donc, le juge ne pouvait conclure que même la communauté scientifique canadienne connaissait le mot «nutrilite»--Il incombe à la défenderesse de prouver que la marque «Nutrilite» n'était pas enregistrable en mars 1952--La preuve n'est pas suffisante pour satisfaire au fardeau dont il faut s'acquitter pour invalider la marque de commerce--Par conséquent la demande reconventionnelle est rejetée--Quant à la confusion, l'emploi par la défenderesse de la marque «Nutravite» en liaison avec les suppléments vitaminiques, minéraux et d'herbes crée-t-il de la confusion dans la mesure où cet emploi serait susceptible de faire conclure que les produits «Nutravite» et les produits «Nutrilite» sont fabriqués ou vendus par la même personne, ainsi qu'il est prévu à l'art. 6(2) de la Loi sur les marques de commerce (LMC)--Pour apprécier le risque de confusion, le juge doit tenir compte des facteurs énumérés à l'art. 6(5) de la LMC et des circonstances de l'espèce--Quant au caractère distinctif inhérent et la mesure dans laquelle les marques de commerce sont devenues connues, une marque de commerce originale sera distinctive à compter du début et recevra une protection plus forte--Par contre, lorsque la marque manque d'originalité, elle est moins distinctive et l'étendue de la protection accordée est beaucoup moindre que dans le cas d'une marque forte, et l'enregistrement d'autres marques comportant des différences relativement petites peut être permis--L'absence de caractère distinctif de la marque «Nutrilite» et l'absence de preuve des demanderesses établissant que la marque est devenue bien connue jouent en faveur de la défenderesse--En ce qui a trait à la période pendant laquelle la marque a été en usage, les demanderesses ont présenté des éléments de preuve établissant la vente de produits au Canada depuis 1948--La meilleure preuve de l'emploi du produit de marque sur un marché donné, c'est la preuve des ventes--Le premier exercice pour lequel on dispose de chiffres sur les ventes est 1994--En 1994, les ventes de vitamines et de minéraux «Nutrilite» et d'herbes «Nutrilite» se sont chiffrées à 12 786 000 $--Des documents relatifs aux ventes établissent que le produit s'est vendu de manière continue au Canada depuis 1994--Toutefois, la preuve des ventes antérieures à 1994 est moins utile, dans la mesure où elle se compose de témoignages anecdotiques et de quelques références dans des documents à des ventes au Canada--Néanmoins, si les produits ont été en usage comme le prétendent les demanderesses, une meilleure preuve aurait pu être produite--Il appert de la preuve que les produits en question n'ont pas été utilisés au Canada avant 1974--La preuve donne à penser que la première distribution au Canada en vue de la vente est intervenue en 1973 ou 1974--Puisque les produits de la défenderesse ne sont vendus au Canada que depuis 1992, cet avantage sur le marché de 14 ans joue en faveur des demanderesses--Quant au genre de marchandises, la défenderesse admet que les produits des deux parties sont identiques à cette exception que la défenderesse ne vend pas de tablettes ou de boissons alimentaires--Par conséquent, cela joue en faveur des demanderesses--Quant à la nature du commerce, les produits «Nutravite» sont vendus dans des pharmacies et des établissements de détails--Les produits «Nutrilite» ne sont pas vendus dans les établissements de détail et il est peu probable qu'ils soient vendus autrement que par l'entremise du système de commercialisation à paliers multiples en place à l'heure actuelle--Les produits «Nutrilite» sont inextricablement liés à leur méthode de vente--L'entrée des demanderesses sur le marché du détail est purement hypothétique--Par conséquent, la nature du commerce des produits «Nutrilite» présente des différences importantes avec celle des produits «Nutravite»--L'élément important qui ressort de l'analyse, c'est la façon dont la commercialisation des demanderesses définit et décrit effectivement l'acheteur hypothétique--Il est quasi certain qu'un tel acheteur serait au courant que les produits «Nutrilite» ne se vendent que dans le cadre du programme de commercialisation à paliers multiples des demanderesses, et non dans des magasins--Étant donné le lien entre la méthode de vente et les produits, même un souvenir imparfait de la marque «Nutrilite» retiendrait l'élément que les ventes ne se font que par l'entremise de propriétaires de commerce indépendants--Le consommateur hypothétique des produits «Nutrilite» sera au courant de la façon d'acheter les produits étant donné que ce n'est pas dans un établissement de détail--La possibilité de confusion est ténue--En ce qui a trait au degré de ressemblance, la prononciation, bien qu'elle soit très proche, ne sera pas un facteur créant de la confusion dans la plupart des cas-- S'agissant de la présentation, la combinaison des lettres différentes crée des différences entre les deux mots--La morphologie des mots semble la méthode la plus holistique d'analyse du degré de ressemblance--Les marques présentent une certaine ressemblance entre elles--Les différences qui existent, considérées dans un exercice linguistique, sont relativement mineures--Cela pourrait jouer en faveur des demanderesses dans la mesure où le consommateur qui possède un souvenir imparfait pourrait confondre les deux marques--Relativement aux autres circonstances de l'espèce, il n'y a pas eu de cas de confusion effective malgré 10 ans de coexistence--En outre, les sondages des demanderesses n'étayent pas la conclusion qu'il existe un risque de confusion entre les deux marques--Ces conclusions jouent en faveur de la défenderesse--Le facteur auquel il faut accorder la plus grande importance en l'espèce, c'est la nature du commerce-- Si l'on ajoute à ce facteur les éléments tenant aux circonstances de l'espèce, soit la présence du préfixe d'usage courant «Nutri» au début de la marque et la coexistence des deux marques pendant plus de dix ans sans confusion, on arrive à la conclusion que les demanderesses ne se sont pas acquittées du fardeau qui leur incombait d'établir le risque de confusion entre les deux marques--«Nutravite» n'est donc pas une marque qui crée de la confusion et il n'y a pas eu contrefaçon de la marque «Nutrilite»--Enfin, quant à l'action en commercialisation trompeuse, les demanderesses n'ont pas établi les trois éléments nécessaires--La Cour met en doute que l'on puisse établir un achalandage pour une marque employée de manière non uniforme et sans promotion active--La reconnaissance par la défenderesse du fait qu'elle a arrêté d'employer la marque «parce que la demanderesse a fait valoir ses droits sur celle-ci et nous ne voulons pas violer les droits de la demanderesse» ne peut pas s'interpréter comme une reconnaissance du fait que la défenderesse employait la marque en vue d'amener les consommateurs à penser qu'elle vend un produit «Nutrilite»--Il n'y a pas de preuve d'un dommage réel causé aux demanderesses et, la défenderesse ayant cessé d'employer la marque il y a plus de trois ans et n'ayant pas l'intention de l'employer de nouveau, il n'y a pas de possibilité de dommage--La demande des demanderesses est rejetée et la demande reconventionnelle de la défenderesse est rejetée--Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13, art. 6, 19 (mod. par L.C. 1993, ch. 15, art. 60), 20 (mod. par L.C. 1994, ch. 47, art. 196)--Loi sur la concurrence déloyale S.R.C. 1952, ch. 274, art. 26.

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