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MARQUES DE COMMERCE

Contrefaçon

Tommy Hilfiger Licensing Inc. c. International Clothiers Inc.

T-2036-95

2003 CF 1087, juge MacKay

19-9-03

35 p.

Les demanderesses reprochent à la défenderesse d'avoir fait passer ses marchandises pour les leurs et d'avoir contrefait deux de leurs marques de commerce déposées, toutes deux à l'égard du même Crest Design (dessin d'écusson), mais chacune relativement à différentes marchandises et à différents articles de vêtement--Elles lui reprochent également d'avoir porté atteinte à leur droit d'auteur enregistré à l'égard du même dessin d'écusson--La défenderesse nie toute contrefaçon et soutient que les enregistrements des marques de commerce et du droit d'auteur en litige sont invalides--La défenderesse demande non seulement que l'action soit rejetée avec dépens, mais également, par demande reconventionnelle, que l'enregistrement des marques de commerce relatives à l'écusson et l'enregistrement du droit d'auteur connexe soient radiés de leurs registres respectifs et sollicite aussi des dépens avocat-client--Pour les besoins de la présente action, les parties se sont entendues sur un exposé des faits détaillé--Les demanderesses formulent quatre allégations concernant la contrefaçon de leurs marques de commerce: 1) la défenderesse a violé les droits des demanderesses en vertu de l'art. 19 de la Loi sur les marques de commerce (la Loi); 2) la défenderesse a violé les droits afférents aux marques de commerce des demanderesses en vertu de l'art. 20 de la Loi en utilisant son écusson qui prête à confusion; 3) la défenderesse a utilisé son écusson d'une manière susceptible d'entraîner la diminution de la valeur de l'achalandage attaché aux marques de commerce des demanderesses, contrairement à l'art. 22 de la Loi; 4) en raison de l'utilisation de son écusson, la défenderesse est tenue de dédommager les demanderesses des préjudices qu'elles ont subis de ce fait--Avant d'examiner chacune de ces allégations, il convient de se pencher sur la défense et la demande reconventionnelle d'International Clothiers Inc. (INC), lesquelles affirment que le dessin d'écusson de Tommy Hilfiger Licensing Inc's (THLI) n'est pas valablement enregistré comme marque de commerce parce qu'il n'a pas été utilisé pour distinguer les marchandises des demanderesses des autres marchandises--La marque a longtemps figuré et continue à figurer sur une partie importante des marchandises des demanderesses non seulement comme élément décoratif, mais pour distinguer leurs marchandises de celles des autres--De plus, malgré l'existence d'autres dessins d'écusson utilisés comme marques de commerce ou simplement comme emblèmes ou éléments décoratifs par d'autres au moment du dépôt de l'action des demanderesses ainsi que de la défense et de la demande reconventionnelle, le dessin d'écusson des demanderesses avait acquis un caractère distinctif en raison de son utilisation prolongée et continue--Les marques de commerce relatives au dessin d'écusson des demanderesses n'ont donc pas été enregistrées de manière invalide ou n'ont pas perdu leur caractère distinctif lorsque la validité de leur enregistrement a été mise en doute par la défense et la demande reconvention-nelle d'INC--En conséquence, cette demande reconvention-nelle doit être rejetée--L'art. 19 de la Loi confère au propriétaire d'une marque de commerce déposée le droit exclusif d'utiliser ladite marque dans tout le Canada à l'égard des marchandises ou services qui y sont associés, à moins que l'enregistrement soit invalide--L'écusson figurant sur les polos de la défenderesse n'est pas identique à celui des demanderesses--En conséquence, l'emploi n'est pas celui des demanderesses--La défenderesse ajoute qu'elle n'a pas porté atteinte aux droits des demanderesses qui découlent de l'art. 19 ou 20 parce qu'elle n'a pas utilisé son écusson comme marque de commerce, mais plutôt comme un simple élément décoratif sur ses marchandises--Il n'est pas établi que INC a employé son dessin d'écusson comme marque de commerce pour distinguer ses marchandises de celles des autres--Toute conclusion selon laquelle elle voulait que le dessin soit une marque de commerce ne peut être déduite que du fait que tant les chemises achetées à des fins de vente en 1995 que les ensembles shorts achetés en 1998 comportaient un dessin d'écusson similaire à celui qu'employaient les demanderesses sur des chemises pour hommes et ensembles shorts pour garçons généralement similaires--Cette déduction n'est pas appuyée par d'autres facteurs--Aucun élément de preuve n'indique que le dessin d'écusson des demanderesses ou un dessin d'écusson pouvant être considéré comme un dessin prêtant à confusion avec celui-ci a été brodé ou apposé sur d'autres marchandises vendues par INC, exception faite des deux lots de chemises et d'ensembles shorts--Les écussons figurant sur les chemises et ensembles shorts en litige ne faisaient pas partie de ces marchandises, et la défenderesse INC ne s'en est pas servie dans le cadre de la vente des dites marchandises pour distinguer celles-ci de celles d'autres commerçants--La défenderesse n'a pas employé les marques à titre de marques de commerce--Toutefois, si la défenderesse avait utilisé son dessin d'écusson comme marque de commerce à l'égard des chemises et ensembles shorts, cet emploi aurait créé un risque de confusion dans l'esprit du consommateur qui connaissait la marque de commerce correspondant au dessin d'écusson des demanderesses, mais ne se la rappelait pas de manière précise--À ce stade, il importe de se pencher sur l'allégation des demanderesses selon laquelle les dessins d'écusson figurant sur les polos et ensembles shorts de la défenderesse ont eu pour effet d'entraîner la diminution de la valeur de l'achalandage attaché à leurs marques de commerce déposées au sens de l'art. 22(1) de la Loi--Les demanderesses reconnaissent que, selon la jurisprudence prépondérante, la portée de l'art. 22(1) se limite, comme dans le cas de demandes fondées sur les art. 19 et 20, à des situations pour lesquelles le défendeur a employé la marque déposée du demandeur conformément aux art. 2 et 4 et ce, même s'il n'est pas nécessaire de prouver que l'emploi de la marque a pour effet de distinguer les marchandises du défendeur de celles des autres--À la lumière de la jurisprudence, l'art. 22(1) ne couvre pas la présente affaire où la défenderesse a employé la marque de commerce correspondant au dessin d'écusson enregistré des demande-resses sur ses marchandises, alors qu'aucun élément de preuve n'indique qu'elle l'a fait pour distinguer ses ensembles shorts--La dernière allégation des demanderesses en ce qui concerne la contrefaçon des marques de commerce porte sur l'infraction de commercialisation trompeuse de l'art. 7b) de la Loi--Il appert clairement de la preuve que les demanderesses avaient acquis une renommée ou une valeur importante à l'égard de leurs différentes marques de commerce déposées, compte tenu de leurs ventes élevées, tant au Canada qu'aux États-Unis, sur le marché des vêtements modes pour hommes et garçons--De plus, la défenderesse a agi d'une manière susceptible de créer de la confusion dans l'esprit du consommateur qui connaissait les marchandises portant le dessin de l'écusson vendus par les demanderesses--Il y a des éléments indiquant que les demanderesses ont subi un préjudice--Ces éléments ont été présentés par le dirigeant de Tommy Hilfiger Canada responsable des ventes de Hilfiger au Canada, qui recevait des comptes rendus des détaillants offrant le produit Hilfiger--La Cour arrive à la conclusion que l'allégation des demanderesses est établie, à savoir que la défenderesse a appelé l'attention du public sur ses marchandises, ses services ou son entreprise de manière à vraisemblablement causer de la confusion au Canada entre ses marchandises, ses services ou son entreprise et ceux des demanderesses--Ce faisant, la défenderesse a contrevenu à l'interdiction énoncée à l'art. 7b) de la Loi--En ce qui a trait à l'allégation de violation du droit d'auteur des demanderesses, conformément à l'art. 3(1) de la Loi sur le droit d'auteur, les demanderesses revendiquent le droit exclusif de produire ou de reproduire leur dessin d'écusson, l'oeuvre artistique enregistrée et certifiée sous le no 448012 --Selon l'art. 27(2) de la Loi sur le droit d'auteur, seule la personne ayant une connaissance réelle ou imputée de la violation du droit d'auteur est responsable de la contrefaçon de l'oeuvre--En l'espèce, la vente de chemises sur lesquelles figurait l'écusson de la défenderesse en 1995 ne constituait pas une violation du droit d'auteur--Cependant, lorsque les demanderesses ont modifié leur déclaration en 1995 en y ajoutant une allégation de violation du droit d'auteur, INC, la défenderesse, était au courant de l'existence du droit d'auteur afférent au dessin d'écusson des demanderesses--Le droit de propriété des demanderesses sur le droit d'auteur n'est pas touché par le fait qu'elles n'ont présenté aucun élément de preuve au sujet de la création du dessin--Le dessin d'écusson figurant sur les ensembles shorts est similaire pour l'essentiel au dessin d'écusson visé par le droit d'auteur des demanderesses--INC a vendu ou distribué des copies de l'oeuvre alors qu'elle aurait dû savoir que cette vente constituait une violation du droit d'auteur en question--Un droit d'auteur continue d'exister sur le dessin d'écusson des demanderesses qui est visé par le certificat d'enregistrement --Par conséquent, la défense de la défenderesse quant à l'allégation de violation du droit d'auteur et sa demande reconventionnelle visant à obtenir une ordonnance de radiation de l'enregistrement du droit en question des registres du Bureau du droit d'auteur sont rejetées--En résumé, les demandes des demanderesses sont accueillies en partie en ce qui a trait à leur allégation de commercialisation trompeuse-- Leur allégation quant à la violation du droit d'auteur est admise dans le cas des ventes par INC d'ensembles shorts pour garçons en 1998--La demande des demanderesses en vue d'obtenir un jugement déclaratoire portant que leurs deux marques de commerce en litige à l'égard de leur dessin d'écusson ont été contrefaites est accueillie--La Cour conclut également que le droit d'auteur sur ledit dessin, qui appartient à THLI et est enregistré au moyen du certificat n 448012, daté du 29 novembre 1995, continue à exister--La demande reconventionnelle de la défenderesse en vue d'obtenir des ordonnances portant rejet de l'action des demanderesses et lui accordant les dépens avocat-client est rejetée--La demande d'injonction des demanderesses est accueillie--La demande de dommages- intérêts des demanderesses au titre du préjudice causé par la défenderesse est accueillie selon le montant que la Cour déterminera par une ordonnance supplémentaire--Les demanderesses ont droit à des intérêts avant jugement et après jugement--La demande des demanderesses en vue d'obtenir une ordonnance enjoignant à la défenderesse de leur remettre ou de détruire sous serment toutes les marchandises et le matériel connexe dont l'utilisation irait à l'encontre de leurs droits est rejetée--Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13, art. 2, 4, 7b), 19 (mod. par L.C. 1993, ch. 15, art. 60), 20 (mod. par L.C. 1994, ch. 47, art. 196), 22--Loi sur le droit d'auteur, L.R.C. (1985), ch. C-42, art. 3 (mod. par L.C. 1997, ch. 24, art. 3), 34.1 (édicté, idem, art. 20).

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