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[2017] 1 R.C.F. F-2

Preuve

Demande présentée par des amici curiae afin que la Cour examine et tranche deux questions soulevées dans le contexte de la demande faite par le procureur général du Canada en vertu de l’art. 38 de la Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. (1985), ch. C-5, malgré que cette demande ait été abandonnée — La Cour suprême de la Colombie-Britannique (C.S.C.B.) a déclaré les défendeurs coupables de deux chefs d’accusation liés au terrorisme découlant d’événements qui ont eu lieu en juillet 2013 — Les défendeurs ont par la suite demandé une suspension d’instance pour provocation policière et abus de procédure — Au départ, ils demandaient la production de documents détenus par le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) peu après la conclusion du procès au criminel en juin 2015; cependant, en raison de la nature des renseignements demandés et l’adoption récente de la nouvelle disposition en cause de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, L.R.C. (1985), ch. C-23, les défendeurs ont présenté une requête à la Cour en vertu de l’art. 18.1 de la Loi en vue d’obtenir l’information — La Cour a rejeté la demande fondée sur l’art. 18.1 en raison d’un manque de compétence; les défendeurs ont alors présenté une demande à la C.S.C.B. pour obtenir la production et de la divulgation des renseignements détenus par le SCRS — La C.S.C.B. a conclu que les dossiers en possession du SCRS seraient vraisemblablement pertinents et a ordonné au SCRS de produire les documents afin qu’elle les examine; elle a jugé qu’ils étaient effectivement pertinents et a déterminé quelles parties de ces dossiers devraient être divulguées aux défendeurs — Après avoir été avisé de l’ordonnance de la C.S.C.B., le demandeur a déposé un avis de demande devant la Cour en vertu de l’art. 38.04(1) de la Loi afin d’obtenir une ordonnance au titre de l’art. 38.06(3) visant à confirmer l’interdiction de divulgation des renseignements visés par l’avis et l’ordonnance de la C.S.C.B. — Des avocats ont été nommés pour agir à titre d’amici curiae et aider la Cour à trancher la demande relative à l’art. 38 de la Loi — Plus tard, en raison du retard qui serait causé dans le procès criminel en cours des défendeurs par le règlement de la demande relative à l’art. 38, les défendeurs ont décidé d’abandonner leur demande de divulgation des renseignements détenus par le SCRC — La C.S.C.B. a donc annulé l’ordonnance de divulgation — Le demandeur a par la suite déposé un avis d’abandon de sa demande présentée en vertu de l’art. 38 — Les amici curiae ont demandé à la Cour de tenir compte de leurs observations relativement aux questions soulevées à la conclusion de l’audience sur la demande relative à l’art. 38 étant donné l’importance de ces questions — Les questions soulevées par les amici curiae étaient celles de savoir si la Cour fédérale, relativement à une demande déposée en vertu de l’art. 38, a compétence pour élargir la liste du matériel couvert par la demande et si la Cour fédérale a compétence pour ordonner la divulgation aux amici curiae de tout renseignement additionnel pertinent afin de fournir un contexte à la question visée à l’art. 38.6 — En l’espèce, il s’agissait de déterminer si la Cour devait exercer son pouvoir discrétionnaire pour examiner les questions soulevées par les amici curiae, même si elles étaient théoriques — Pour trancher les questions dans la présente affaire, il fallait prendre en considération les facteurs énoncés dans l’arrêt Borowski c. Canada (Procureur général), [1989] 1 R.C.S. 342 — En ce qui concerne le contexte contradictoire, dans le cas présent, les défendeurs n’étaient pas des participants à part entière dans la procédure relative à l’art. 38 et n’étaient pas au courant des questions soulevées par les amici curiae — Dans une procédure relative à l’art. 38, un amicus curiae devrait soulever des questions qui ne seraient autrement pas portées à l’attention de la Cour — Le rôle du procureur général dans les demandes relatives à l’art. 38 diffère de celui qu’il assume lorsqu’il est également le poursuivant — Dans une demande présentée en vertu de l’art. 38, le procureur général cherche à s’assurer que les renseignements dont la divulgation porterait préjudice aux relations internationales, à la défense nationale ou à la sécurité nationale sont protégés, et que l’interdiction de divulgation résultant de l’avis donné au titre de l’art. 38 est confirmée par la Cour — Quant aux ressources judiciaires dépensées pour trancher les questions actuelles, les défendeurs pourraient être intéressés par les questions et appuyer leur résolution s’ils étaient au courant de celles-ci — Toutefois, en raison de l’annulation de l’ordonnance de divulgation et de l’abandon de la demande présentée en vertu de l’art. 38, le fait que la Cour tranche ces questions n’aurait aucun effet concret sur les parties — Même si des précisions concernant la compétence de la Cour pour ordonner la production à la Cour de renseignements additionnels pourraient aider d’éventuelles parties, dans l’éventualité où des circonstances similaires se reproduiraient, il était préférable d’attendre pour trancher cette question dans le contexte de faits précis d’une demande réelle — La Cour n’outrepasserait pas son rôle judiciaire et n’empiéterait pas sur le rôle du pouvoir législatif si elle décidait d’examiner et de trancher les questions soulevées par les amici curiae en l’espèce — Cependant, il serait inapproprié de trancher ces questions sans contexte contradictoire ni « litige actuel » et en l’absence d’effets concrets pour les parties — Aucun facteur ne l’emporte sur l’autre quand vient le temps de déterminer si la Cour devrait exercer son pouvoir discrétionnaire — Dans les circonstances, il ne restait aucune partie à la procédure devant la Cour, même si les amici curiae demeuraient en place pour garantir la bonne administration de la justice — Toute décision que pourrait rendre la Cour n’aurait aucune incidence sur les parties et ne pourrait avoir qu’une incidence minime sur des demandes futures — Par conséquent, étant donné les circonstances et tous les facteurs pertinents, il serait inapproprié pour la Cour d’exercer son pouvoir discrétionnaire afin d’examiner et de trancher les questions soulevées par les amici curiae — La Cour a rendu une ordonnance dans laquelle elle a rejeté l’idée d’exercer son pouvoir discrétionnaire pour trancher les questions de compétence vu l’abandon de la demande déposée en vertu de l’art. 38.

Canada (Procureur général) c. Nuttall (DES-2-16, 2016 CF 850, juge Kane, jugement en date du 21 juillet 2016, 29 p.)

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