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MARQUES DE COMMERCE

Contrefaçon

Warner-Lambert Co. c. Concord Confections Inc.

T-1562-98

2001 CFPI 139, juge Lemieux

2-3-01

28 p.

La demanderesse, Warner-Lambert Company, est le propriétaire inscrit au Canada d'une famille de marques de commerce déposées qui comportent le mot «Chiclets», employé depuis 1919 en liaison avec de la gomme à mâcher--Warner-Lambert Canada Inc. est la licenciée canadienne exclusive--La défenderesse fabrique de la gomme à mâcher pour la vente au Canada en liaison avec la marque de commerce «Chicle Bytes»--Les demanderesses allèguent que la gomme à mâcher «Chicle Bytes» est de présentation pratiquement identique à la gomme à mâcher «Chiclets»--Requête en jugement sommaire dans une action pour usurpation de marque de commerce et imitation frauduleuse--La défenderesse n'emploie plus la marque de commerce «Chicle Bytes» depuis juillet 1998, mais en 2000, les demanderesses ont eu connaissance de l'emploi par la défenderesse de «Chicle Chewing Gum» depuis juillet 1998--Les demanderesses font valoir que l'emploi par la défenderesse des marques «Chicle Bytes» et «Chicle Chewing Gum» est susceptible de créer de la confusion et que cette confusion est susceptible d'entraîner la diminution de la valeur de l'achalandage; elles affirment en outre que cet emploi, en liaison avec une gomme à mâcher pratiquement identique à la gomme à mâcher «Chiclets», fait en sorte que la défenderesse appelle l'attention du public sur ses marchandises et les fait passer pour d'autres de manière à causer de la confusion--Les règles 213 à 217 des Règles de la Cour fédérale (1998) traitent du jugement sommaire--La règle 216(1) prévoit que la Cour, lorsqu'elle est convaincue qu'il n'existe pas de véritable question litigieuse quant à une déclaration ou à une défense, rend un jugement sommaire en conséquence--La règle 216(2) prévoit que la Cour, lorsqu'elle est convaincue que la seule véritable question litigieuse est un point de droit, peut statuer sur celui-ci et rendre un jugement sommaire en conséquence--La règle 216(3) prévoit que la Cour, lorsqu'elle conclut qu'il existe une véritable question litigieuse, peut néanmoins rendre un jugement sommaire en faveur d'une partie, si elle parvient à partir de l'ensemble de la preuve à dégager les faits nécessaires pour trancher les questions de fait et de droit--Les dispositions relatives aux jugements sommaires ont pour but de permettre à la Cour de se prononcer par voie sommaire sur les affaires qu'elle n'estime pas nécessaire d'instruire parce qu'elles ne soulèvent aucune question sérieuse à instruire, c'est-à-dire que l'un des critères applicables consiste à déterminer si le succès de la demande est tellement douteux que celle-ci ne mérite pas d'être examinée par le juge des faits dans le cadre d'un éventuel procès; le tribunal ne peut rendre de jugement sommaire si l'ensemble de la preuve ne comporte pas les faits nécessaires et, lorsqu'une question sérieuse est soulevée au sujet de la crédibilité, le tribunal devrait instruire l'affaire, parce que les parties devraient être contre-interrogées devant le juge du procès, bien que l'existence d'une apparente contradiction de preuves n'empêche pas de prononcer un jugement sommaire, le tribunal devant se pencher de près sur le fond de l'affaire: Granville Shipping Co. c. Pegasus Lines Ltd., [1996] 2 C.F. 853 (1re inst.)--Il est indiqué de tenir compte des décisions rendues par un juge d'une cour supérieure d'une province relativement à l'interprétation de règles similaires en matière de jugement sommaire: Feoso Oil Ltd. c. Sarla (Le), [1995] 3 C.F. 68 (C.A.)--Un jugement sommaire n'est accordé que dans les cas où les faits sont clairs: Nature Path Foods Inc. c. Country Fresh Enterprises Inc. (1998), 85 C.P.R. (3d) 286 (1re inst.)--En décidant s'il existe une question litigieuse en ce qui concerne les faits substantiels, la Cour n'évalue jamais la crédibilité, n'apprécie jamais la preuve et ne formule jamais de déductions factuelles, car ce sont là des fonctions réservées au juge des faits--Dans sa demande reconventionnelle, la défenderesse fait valoir que les enregistrements des marques de commerce des demanderesses sont invalides au motif de leur caractère non distinctif, sur le fondement d'allégations que «Chiclets» est le terme générique d'une espèce de gomme à mâcher, que «Chicle» est une composante courante d'autres marques et un terme de métier et que les demanderesses n'ont pas exercé de contrôle sur la concession de licences sur les marques de commerce--La défenderesse n'a produit aucun élément de preuve à l'appui de sa prétention que «Chiclets» a perdu son caractère distinctif en devenant un terme générique désignant une sorte de gomme à mâcher de forme rectangulaire, à coque dure, qui se présente dans une gamme de couleurs, dont le blanc--Allégation rejetée--Les faits substantiels à l'appui des deux motifs d'invalidité avancés par la défenderesse soulèvent une question sérieuse, dans l'hypothèse où l'on suppose que la date à laquelle il faut apprécier la perte du caractère distinctif est la date de la demande reconventionnelle plutôt que la date d'enregistrement des marques de commerce «Chiclets»--La question de savoir si le terme «Chicle» est couramment employé dans le métier pour désigner le format d'une sorte particulière de gomme à mâcher ou est une composante courante de marques de commerce en usage pour la gomme à mâcher vendue au Canada ou encore est un terme de métier doit s'apprécier en fonction de la preuve d'emploi de la marque sur le marché canadien--Comme la preuve d'emploi de la marque sur le marché canadien est contradictoire, il est nécessaire de tenir un procès pour trancher la question, particulièrement en l'espèce, du fait que l'établissement des faits nécessaires peut reposer sur une question de crédibilité--Les éléments de preuve des demanderesses ne l'emportent pas si largement que la Cour soit en mesure de conclure que les allégations de la défenderesse ne sont pas fondées sur des faits--La défenderesse ne s'est pas acquittée du fardeau de la preuve sur la question de la perte du caractère distinctif par défaut de contrôle--Allégation que les demanderesses étaient au courant, dès 1996, de l'usage au Canada par la défenderesse de «Chicle Bytes» et que le fait qu'elles n'ont pas fait valoir leurs droits au Canada pendant au moins 19 mois annihile les droits des demanderesses à la réparation principale recherchée--Les éléments de preuve apportés par la défenderesse ont été suffisants pour faire obstacle à un jugement sommaire sur cette question--La Cour ne peut conclure à l'existence des faits nécessaires pour étayer une décision d'absence de consentement, car cela impliquerait une appréciation de la preuve qui n'est pas autorisée en l'espèce car les faits ne sont pas clairs, et des déductions factuelles importantes, pour appuyer la conclusion que les demanderesses n'étaient pas informées des ventes de la défenderesse au Canada et qu'elles ont fait preuve de négligence en ne s'en préoccupant pas--La requête en jugement sommaire sur le moyen tiré de la confusion est rejetée--Les demanderesses souhaiteraient que la Cour applique tous les critères de l'art. 6 de la Loi sur les marques de commerce au dossier pour conclure à l'usurpation de la marque de commerce au motif qu'elle est susceptible de causer de la confusion--Le dossier ne permet pas d'en arriver à une telle conclusion--La défenderesse a présenté suffisamment d'éléments de preuve (différences entre les gommes à mâcher et les emballages, différences dans les circuits de distribution en ce qui concerne la vente en vrac par opposition à la vente sous emballage, surtout depuis que les demanderesses ne vendent plus leur gomme à mâcher en vrac) d'absence de cas effectifs de confusion pour susciter une question sérieuse à instruire par un procès sur le fond--La poursuite soulève également des questions de droit non résolues, dont la plus importante est de savoir si la présentation ou l'emballage constitue un facteur pertinent à considérer dans une action en usurpation de marque de commerce déposée, par opposition à une action en imitation frauduleuse au titre de l'art. 7 de la Loi--Constitue également une autre question de droit importante le fait de décider si la marque de commerce qu'utilise actuellement la défenderesse pour sa gomme à mâcher «Dubble Bubble Chicle» forme une seule marque, comme l'affirme la défenderesse, ou deux marques--Les demanderesses sollicitent également une injonction empêchant la défenderesse de faire usage au Canada du mot «Chicle», d'usurper les marques de commerce déposées des demanderesses et de faire tout acte susceptible d'entraîner une diminution de la valeur de l'achalandage attaché aux marques de commerce déposées--Les demanderesses n'ont pas établi de manière évidente le dommage irréparable qu'elles subiraient, sans injonction, et auquel il serait impossible de remédier par la voie de dommages-intérêts--Le témoignage de l'expert était fondé sur des faits dont il a présumé la véracité--L'analyse de l'expert comporte un élément hypothétique quand il mentionne la possibilité que le produit de la défenderesse soit d'une qualité inférieure et que d'autres sociétés soient encouragées à entrer sur le marché--L'expert a admis que la perte des ventes était quantifiable--La perte de l'achalandage pose une difficulté, car elle repose sur la conclusion d'une confusion basée sur des hypothèses incertaines--La prépondérance des inconvénients joue en faveur de la défenderesse, du fait que la défenderesse a clairement avisé les demanderesses qu'elle avait changé l'emballage sept mois avant l'introduction de la requête en injonction interlocutoire--Le statu quo, dans la mesure où il doit être maintenu, joue en faveur de la défenderesse, de même que le retard important de la demande de redressement par voie d'injonction--Règles de la Cour fédérale (1998), DORS/98-106, règles 213 à 217--Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13, art. 6, 7.

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