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PÊCHES

Radil Bros. Fishing Co. c. Canada (Ministère des Pêches, Région du Pacifique)

T-382-99

juge McKeown

21-11-00

24 p.

Déclaration--Appel du rejet par le protonotaire d'une requête en radiation de la déclaration ([1999] 4 C.F. F-51)--La demanderesse (Radil) était propriétaire d'un navire de pêche, le Seacrest, et d'un permis T.8 en vertu duquel elle s'adonnait à la pêche au poisson de fond jusqu'en 1993--En janvier 1993, la défenderesse B.C. Packers a demandé le permis T.8 au nom de Radil--En août 1993, B.C. Packers a demandé le transfert du permis «A» détenu par le Pacific Eagle en faveur du Seacrest--Le Pacific Eagle détenait à l'origine un permis «AT», qui combine un permis «T» et un permis «A»--Il était contraire à la politique du ministère des Pêches et Océans (le Ministère) de transférer ces permis séparément--Ayant reçu l'assurance que le transfert n'aurait aucune incidence sur le dossier de prises des navires, B.C. Packers a effectué le transfert par lequel elle a acquis le permis A et a échangé les permis T.8 et T.92--Par la suite, des quotas individuels de bateau (QIB) ont été introduits--Les QIB étaient fondés à 70 p. 100 sur le dossier de prises pour les années 1988 à 1992 et à 30 p. 100 sur la longueur du bateau--Ce n'est qu'en 1997 que Radil s'est rendu compte que le QIB du Seacrest était calculé en fonction du dossier de prises du Pacific Eagle--Ne recevant pas de réponse du Ministère auquel elle avait demandé de lui délivrer le permis T.8 et de rajuster le QIB du Seacrest en conséquence, Radil a introduit une demande de contrôle judiciaire sollicitant un bref de mandamus et un jugement déclaratoire--Le juge Campbell a ordonné que l'affaire soit instruite comme une action--En vertu de cette ordonnance, Radil a déposé une déclaration dans laquelle elle réclamait un jugement déclaratoire et des dommages-intérêts--Le juge Rouleau a ordonné la radiation de la demande de réparation sous forme de dommages-intérêts parce qu'elle ne faisait pas partie des réparations demandées à l'origine dans la demande de contrôle judiciaire--L'auteur d'une demande de contrôle judiciaire ne peut pas, lorsqu'il devient demandeur dans la même instance qui se poursuit sous forme d'action, demander une nouvelle réparation--Radil a modifié sa déclaration pour en exclure la demande de dommages-intérêts--En 1999, Radil a intenté la présente action pour demander des dommages-intérêts en se fondant sur les mêmes faits--Appel accueilli--1) Le protonotaire a-t-il commis une erreur en statuant que la Section de première instance de la Cour fédérale avait compétence pour trancher une demande de jugement déclaratoire de la nature d'un contrôle judiciaire dirigée contre le ministre en vertu des art. 18 et 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale et introduite dès le départ au moyen d'une déclaration?--En refusant de radier la partie de la demande de réparation sollicitant un jugement déclaratoire contre la Couronne, le protonotaire a conclu que la Section de première instance de la Cour fédérale avait compétence pour déterminer s'il y avait lieu d'accorder cette réparation dans une instance introduite au moyen d'une déclaration--Il s'est appuyé sur la décision Johnson c. Ramsay Fishing Co. (1987), 47 D.L.R. (4th) 544 (C.F. 1re inst.)--Toutefois, l'affaire Johnson a été tranchée sous le régime de la version de la Loi sur la Cour fédérale en vigueur en 1987, qui ne contenait pas les art. 18(3) et 18.1 actuels, en application desquels les recours sollicitant un jugement déclaratoire contre un office fédéral sont exercés par présentation d'une demande de contrôle judiciaire--En 1987, les règles prévoyaient qu'un jugement déclaratoire contre un ministre devait être obtenu au moyen d'une action, et non d'un avis de requête introductif d'instance comme l'exigent les règles actuelles--De plus, les anciennes Règles de la Cour fédérale étaient de simples règles de pratique--Les art. 18(3) et 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale ont été édictés par le législateur--Il est clair que le protonotaire a commis une erreur en refusant de radier la demande de jugement déclaratoire--2) Le protonotaire a-t-il commis une erreur en statuant que le critère applicable à l'existence d'une cause d'action valable consiste à déterminer si l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire du ministre ou une décision administrative du ministre sont assujettis au contrôle judiciaire?--Le protonotaire a dit que, lorsque le ministre exerce son pouvoir discrétionnaire en tant qu'acte administratif et que sa décision est contestée, le critère permettant de savoir s'il existe une cause d'action valable est celui de savoir si la décision du ministre est susceptible d'un contrôle judiciaire--La possibilité d'examiner les décisions administratives des ministres sur le plan de la procédure en vertu de la Loi sur la Cour fédérale donne naissance à une procédure de contrôle judiciaire, mais elle ne crée pas de cause d'action--Le protonotaire a débuté son enquête en se demandant si la décision discrétionnaire du ministre était ou non assujettie au contrôle judiciaire--Il aurait plutôt dû se demander d'abord si la déclaration révélait une cause d'action--Le critère à appliquer pour radier un acte de procédure consiste à savoir si la demande ne révèle manifestement aucune cause d'action valable--Une action fondée uniquement sur la possibilité de présenter une demande de contrôle judiciaire ne révèle aucune cause d'action reconnue en droit--La demanderesse réclame principalement que lui soit reconnu le droit à un permis de pêche et à un quota donné; ses dommages découleraient du fait qu'elle n'a pas reçu ce permis et ce quota--Les questions soulevées dans la déclaration sont régies par la Loi sur les pêches et par le Règlement de pêche du Pacifique--L'art. 7 de la Loi prévoit que le ministre a un pouvoir discrétionnaire absolu d'accorder des permis de pêche et que la durée des permis ne peut dépasser neuf ans--La décision Joliffe c. La Reine, [1986] 1 C.F. 511 (1re inst.) souligne qu'il n'existe pas de droit de propriété rattaché à un permis de pêche--Le Ministère n'a pas d'obligation de fiduciaire ni d'obligation légale de veiller à ce que le permis «T» de la demanderesse lui attribue les prises les plus élevées possible de sorte qu'elle gagne le plus d'argent possible--La décision du ministre d'exercer son pouvoir discrétionnaire absolu de délivrer un permis de pêche relève clairement de l'exercice de son pouvoir administratif--L'octroi d'un permis de pêche n'emporte la dévolution d'aucun droit ni bien à son titulaire--Il n'existe pas de droit au renouvellement automatique d'un permis de pêche--La demanderesse ne peut établir l'existence des trois éléments d'une obligation fiduciaire parce que le ministre ne tire aucun avantage personnel direct ou indirect en associant le dossier de prises du permis T.8 au Pacific Eagle plutôt qu'au Seacrest--3) Les faits substantiels invoqués étayaient-ils une cause d'action fondée sur la négligence?--La possibilité d'exercer un recours administratif sous forme de contrôle judiciaire exclut généralement l'existence d'une obligation de diligence--Le protonotaire a commis une erreur en concluant qu'une décision du ministre donnant ouverture au contrôle judiciaire équivalait ou donnait naissance à une cause d'action--La décision prise par le ministre, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire absolu, de délivrer un permis de pêche dont la Couronne demeure propriétaire, ou d'en autoriser la délivrance, ne crée pas un droit entre le ministre et la demanderesse--Aucune cause d'action ne prend naissance du fait que cette décision discrétionnaire peut être révisée sur présentation d'une demande de contrôle judiciaire--4) Le protonotaire a-t-il commis une erreur en statuant que l'application par le ministre de la politique concernant les quotas dans le cadre de sa décision discrétionnaire de délivrer un permis de pêche à la demanderesse pouvait être contestée dans une action si la demanderesse invoquait l'abus d'autorité?--Pour prouver le délit d'abus d'autorité dans l'exercice d'une charge publique, il faut établir que le ministre a agi soit avec malveillance, soit en sachant qu'il n'avait pas le pouvoir d'agir comme il agissait; que le ministre a agi dans l'intention délibérée de causer un préjudice aux demandeurs; qu'un dommage en a résulté--La demanderesse n'a pas fait valoir les faits substantiels sur lesquels elle se fonde pour invoquer la cause d'action d'abus d'autorité dans l'exercice d'une charge publique--Le protonotaire a commis une erreur en permettant à la demanderesse de modifier sa déclaration pour invoquer le moyen de l'abus d'autorité--La décision discrétionnaire du ministre n'est susceptible de contrôle judiciaire que dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire fondée sur les moyens prévus à l'art. 18.1(4) de la Loi sur la Cour fédérale, qui englobent l'abus d'autorité, à l'art. 18.1(4)e)--Le protonotaire aurait dû radier la déclaration au motif que la décision discrétionnaire du ministre ne peut être révisée que dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire--L'autorisation de modifier la déclaration n'aurait pas dû être accordée, car aucune modification possible n'aurait pu créer une cause d'action en l'espèce--Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 18 (mod. par L.C 1990, ch 8, art. 4), 18.1 (édicté, idem, art. 5)--Loi sur les pêches, L.R.C. (1985), ch. F-14, art. 7--Règlement de pêche du Pacifique (1993), DORS/93-54.

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