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IMPÔT SUR LE REVENU

Calcul du revenu

James c. Canada

A-678-96

juges Stone, Isaac et Sharlow, J.C.A.

21-12-00

24 p.

Appel d'un jugement de première instance concernant les nouvelles cotisations et l'impôt sur le revenu pour les années 1974, 1975, 1976, 1977--L'appelant est un avocat indépendant, associé dans un cabinet d'avocats; également dirigeant et administrateur de Pedigree Holdings Ltd. qui avait émis deux actions ordinaires, dont l'une était enregistrée au nom de l'appelant mais détenue en fiducie pour un neveu mineur de la conjointe de fait de l'appelant (Mme Kirsten)--La Couronne soutient que l'appelant a fourni des services à un client du cabinet d'avocats, sans passer par le cabinet d'avocats, pour lesquels l'appelant, et non le cabinet d'avocats, avait le droit d'être rémunéré et que, conformément aux directives qui lui ont été données par l'appelant, le client a versé une partie de ces honoraires à Mme Kirsten et à Pedigree Holdings Ltd.--La Couronne soutient également que Mme Kirsten n'a pas fourni des services pouvant justifier les sommes qu'elle a reçues--Le juge de première instance a jugé que l'appelant était imposable sur certaines sommes versées par le client, que les pénalités étaient justifiées et il a rejeté la requête tendant à l'annulation des nouvelles cotisations fondée sur le motif que le ministre n'aurait pas agi avec toute la diligence possible lorsqu'il a examiné les avis d'opposition--Des avis d'opposition ont été produits en 1979, mais en raison de l'enquête criminelle déclenchée à ce sujet, des accusations portées contre l'appelant et de son procès, la Couronne n'a confirmé les nouvelles cotisations qu'en 1989--1) C'est à bon droit que le juge de première instance a rejeté la requête tendant à l'annulation des nouvelles cotisations--Selon l'art. 165(3)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu, le ministre doit, avec toute la diligence possible, examiner de nouveau la cotisation, dès réception de l'avis d'opposition--Cette Loi ne précise pas les conséquences que peut avoir l'omission d'agir de cette façon--Selon Bolton c. Canada (1996), 200 N.R. 303 (C.A.F.), le législateur n'avait pas l'intention de sanctionner par l'annulation de la cotisation le fait que le ministre n'ait pas examiné de nouveau, avec toute la diligence possible, la cotisation en question; en cas d'inaction du ministre, le contribuable peut faire appel conformément à l'art. 169--L'art. 169b) autorise le contribuable à interjeter appel auprès de la Cour de l'impôt pour faire annuler ou modifier la cotisation, après l'expiration des 180 jours qui suivent la signification de l'avis d'opposition sans que le ministre ait notifié au contribuable le fait qu'il a annulé ou ratifié la cotisation ou procédé à une nouvelle cotisation--L'appelant soutient que l'arrêt Bolton ne fait pas autorité parce que d'autres décisions indiquent que l'omission de la part du ministre de se prononcer sur l'avis d'opposition avec toute la diligence possible entraîne l'annulation de la nouvelle cotisation--L'arrêt Bolton a été prononcé après ces décisions et traite directement la question du redressement--Ces décisions ne contiennent aucun élément permettant d'écarter le principe énoncé dans Bolton--2) Au procès, la Couronne a produit des copies de documents bancaires accompagnés d'affidavits souscrits en 1984 (12 ans avant le procès), dans le but de produire des documents conformément à l'art. 29 de la Loi sur la preuve au Canada au cours du procès pénal--Aucun élément n'indique que les documents déclarés admissibles ne sont pas fiables ou ne reflètent pas avec exactitude les opérations dont ils font état--L'art. 29 n'impose aucune condition quant au moment où l'affidavit doit être préparé--La période écoulée entre la rédaction de l'affidavit et le procès peut soulever un doute sur la fiabilité des documents mentionnés dans l'affidavit mais le juge de première instance a toute latitude pour apprécier la force probante de ces documents--La période écoulée en l'espèce est particulièrement longue, mais ce seul fait n'a pas pour effet de rendre inadmissibles les affidavits--Les copies de documents ne sont pas inadmissibles du seul fait que les originaux ont disparu--L'art. 29 autorise la production de copies de documents bancaires sans exiger qu'un représentant de la banque témoigne en personne à leur sujet ni que les documents originaux soient présentés--Cette exception aux règles de preuve habituelles est justifiée par la nécessité et par la présence de circonstances qui garantissent la fiabilité des documents produits--L'art. 29(2) exige que les documents soient sous la garde ou la surveillance de la banque, au moment où l'affidavit est rédigé, et non pas à la date du procès--Aucun déposant ne peut déclarer dans un affidavit, avant le début du procès, que les documents seront sous la garde ou la surveillance de la banque lorsque le procès débutera--3) Nouvelles cotisations fondées sur l'art. 56(2)--L'art. 56(2) s'applique lorsque les conditions qui suivent sont réunies: (i) le paiement doit avoir été fait à une personne autre que le contribuable visé par la nouvelle cotisation; (ii) le paiement doit avoir été effectué suivant les instructions ou avec l'accord du contribuable visé par la nouvelle cotisation; (iii) le versement doit avoir été effectué au profit du contribuable en question ou à celui d'une autre personne que celui-ci souhaite avantager; (iv) le paiement aurait dû être inclus dans le calcul du revenu du contribuable si celui-ci avait été fait au contribuable--Le contribuable prétend qu'il existe une cinquième condition selon laquelle il faut démontrer que le bénéficiaire réel des sommes versées (Mme Kirsten) ne serait pas imposable sur ces sommes--Le contribuable s'appuie sur une remarque incidente prononcée dans Winter c. Canada, [1991] 1 C.F. 585 (C.A.F.) selon laquelle la validité d'une cotisation fondée sur l'art. 56(2) est assujettie à la condition implicite que l'avantage reçu ne soit pas imposable entre les mains de celui qui l'a reçu--Il y a lieu de reconnaître que l'art. 56(2) ne peut s'appliquer à un montant imposable à titre de revenu pour la personne qui l'a véritablement reçu parce que dans ce cas la quatrième condition n'est pas remplie--La quatrième condition exige implicitement que le paiement en question doit être un montant que seul le contribuable a le droit de recevoir à titre de revenu--Les versements qu'a reçus Mme Kirsten ne peuvent à la fois avoir pour objet de la rémunérer pour ses services et de rémunérer en même temps les services de l'appelant--Le juge de première instance a conclu que Mme Kirsten n'avait pas gagné les sommes en question et qu'elles ne constituaient donc pas un revenu pour elle--Les sommes qu'a déclarées Mme Kirsten dans sa déclaration d'impôt n'empêchent pas de conclure que l'art. 56(2) doit s'appliquer si les sommes en question constituent un revenu pour le seul appelant--4) L'appelant soutient que le fait que le juge de première instance soit fréquemment intervenu au cours de l'interrogatoire des témoins soulève une crainte raisonnable de partialité--Un juge peut poser des questions aux témoins pour préciser certaines choses et obtenir des détails mais il ne doit pas intervenir dans l'interrogatoire des témoins au point de donner l'impression qu'il agit comme un avocat--Le juge qui se comporte ainsi compromet son impartialité et risque de nuire à la présentation des arguments par les avocats--Il y a lieu d'examiner dans le contexte général de l'instance, l'allégation selon laquelle le juge serait intervenu de façon irrégulière au cours de l'interrogatoire des témoins--L'objectif est de déterminer si ces interventions amèneraient un observateur raisonnable et bien informé à craindre que l'attitude du juge de première instance empêche celui-ci d'examiner les faits de façon juste et impartiale--L'examen du compte rendu des témoignages révèle que le juge de première instance a, à plusieurs reprises, interrogé les témoins de façon qui pouvait laisser penser qu'il s'agissait d'un contre-interrogatoire--Le juge a demandé aux témoins d'expliquer des contradictions apparentes, a débattu avec les témoins du sens de certains documents ou déclarations antérieures, et il a interrogé les témoins sur des aspects qui n'avaient pas été abordés par les avocats--Il a ainsi agi d'une façon susceptible d'amener un observateur objectif à conclure de façon raisonnable qu'il jouait le rôle du procureur de la Couronne--Certaines interventions du juge de première instance sur la légalité des paiements effectués à Mme Kirsten, la principale question en litige en appel, montrent que celui-ci a outrepassé le rôle normal d'un juge--Appel accueilli, affaire renvoyée pour un nouveau procès--Loi de l'impôt sur le revenu, L.C. 1970-71-72, ch. 63, art. 56(2), 165(3)a), 169b)--Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. (1985), ch. C-5, art. 29 (mod. par L.C. 1994, ch. 44, art. 90).

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