Fiches analytiques

Informations sur la décision

Contenu de la décision

PRATIQUE

Markesteyn c. Canada

T-2346-87

2001 CFPI 792, protonotaire Hargrave

12-7-01

19 p.

Instruction séparée des questions en litige--Requête visant à faire juger séparément une question en vertu de la règle 107 des Règles de la Cour fédérale (1998)--Déclaration modifiée faisant état de dommages à la propriété de la demanderesse par suite d'une érosion des berges par la rivière Rouge qui aurait été causée par l'exploitation du barrage St. Andrew, près du lac Winnipeg--La demanderesse affirmait que l'élévation artificielle du niveau de l'eau provoquée pendant l'été et l'automne par l'exploitation du barrage St. Andrew avait eu pour effet d'excaver les rives sous l'effet des vagues et de saturer en eau les berges de son terrain de sorte que, lorsque le barrage était ouvert à la fin de l'automne pour abaisser le niveau de la rivière à sa valeur naturelle, l'eau de la rivière ne parvenait plus à supporter les lourdes rives saturées d'eau, ce qui en provoquait l'affaissement--La défenderesse soutenait que la perte de l'étendue riveraine du terrain de la demanderesse était imputable à une foule de facteurs, et notamment à des activités humaines autres que celles du barrage, aux crues et à la saturation en eau de crues--Elle affirmait aussi que l'instabilité inhérente du terrain résultait d'anciennes lignes de faille, de la nature du sol ainsi que de la turbulence et du courant naturel de l'eau qui sont à l'origine de l'affouillement de la rive et, par conséquent, d'une perte de support de la rive--Cet aspect de la défense était principalement axé sur la spécificité du site--La règle 107 autorise la Cour à ordonner en tout temps l'instruction d'une question--La question que la demanderesse veut faire instruire séparément est celle de savoir si l'exploitation du barrage St. Andrew a causé des dommages par érosion et glissement des berges des rivières Rouge et Assiniboine, en amont du barrage, comme il est allégué aux paragraphes 7 et 8 de sa déclaration--La requête est rejetée--1) La question proposée est beaucoup trop vaste--Le critère applicable pour obtenir la disjonction de l'instance en vertu de la règle 107 a été énoncé dans le jugement Illva Saronno S.p.A. c. Privilegiata Fabbrica Maraschino «Excelsior», [1999] 1 C.F. 146 (1re inst.): le tribunal doit être convaincu, selon la prépondérance des probabilités que, compte tenu de la preuve et de toutes les circonstances de l'affaire (y compris la nature de la demande, le déroulement de l'instance, les questions en litige et les redressements demandés), la disjonction permettra fort probablement d'apporter au litige une solution qui soit juste et la plus expéditive et économique possible--La question proposée est très vaste et elle concerne des terres se trouvant dans des circonstances et des situations fort différentes--Rien ne semble justifier qu'il faille juger la question des dommages en amont attribuables au barrage, alors que la vraie question en litige est celle des dommages donnant ouverture à des poursuites dans le seul cas de la propriété de la demanderesse--Trancher une question vaste constituerait une mesure rétrograde qui ne faciliterait pas la recherche d'une solution juste et économique, ni même une solution globale--2) La règle 107 constitue une dérogation par rapport à la procédure normale qui exige que la cause soit instruite en entier et au même moment--La partie requérante doit prouver qu'il est justifié de s'écarter de la règle générale--i) Le fait de scinder la question complique l'affaire au lieu de la simplifier--ii) La question proposée est ambiguë et beaucoup trop vaste--Elle se prête à diverses réponses, et pas nécessairement à une réponse positive ou négative--La question proposée suppose que le barrage exerce une érosion néfaste, de façon homogène et permanente, ne variant qu'en gradation d'un site à l'autre--On pourrait répondre à la question en disant que le barrage n'a pas causé d'érosion ni d'affaissement nulle part, que le barrage peut causer de l'érosion ou de l'affaissement, selon le site particulier, mais que cela nécessiterait une analyse propre à ce site, que le barrage peut causer de l'érosion, mais que cela peut être bénéfique ou encore, que le barrage exerce un effet néfaste, de façon homogène et permanente--L'ambiguïté de la question formulée par la demanderesse prolongera et compliquera la procédure que devra suivre le tribunal pour trancher le litige véritable qui existe entre les parties et en augmentera les coûts--iii) La question proposée est étroitement liée aux autres questions, qui se rapportent à l'applicabilité des conclusions générales pouvant être tirées au sujet de la propriété de la demanderesse, de la responsabilité et des dommages--Elle implique une répétition de la preuve--Elle ne permettrait pas de limiter les questions en litige en vue du second procès davantage qu'elles ne le sont déjà par les actes de procédure--iv) La duplication des étapes procédurales entraîne une augmentation des frais--v) Normalement, les épargnes dont il faut tenir compte dans le cas d'une requête présentée en vertu de la règle 107 sont celles qui ont trait à la communication préalable des pièces et aux interrogatoires préalables--Aucune épargne de ce genre ne peut être réalisée en l'espèce, étant donné que l'enquête préalable a déjà eu lieu--vi) Instruire la question proposée causerait à la défenderesse un préjudice du fait qu'elle se retrouverait dans la position d'une partie qui conteste un recours collectif sans bénéficier de quelque interrogatoire préalable que ce soit--Elle subirait aussi un préjudice du fait que ses experts ont concentré leur rapport sur les prétentions et moyens visant la propriété de la demanderesse et non sur les centaines de kilomètres supplémentaires d'étendues riveraines--La demanderesse n'a pas démontré que l'instruction séparée de la question permettrait fort probablement d'apporter au litige une solution qui soit juste et la plus expéditive et économique possible--Règles de la Cour fédérale (1998), DORS/98-106, règle 107.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.