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PREUVE

Canada (Commission des droits de la personne) c. Territoires du Nord-Ouest

T-1571-00, T-923-00

juge MacKay

11-10-00

22 p.

Demande fondée sur l'art. 37 de la Loi sur la preuve au Canada sollicitant une ordonnance de rejet d'une opposition à la divulgation de certains documents faite par le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (le GTN-O) pour des motifs de privilège de l'exécutif; demande de contrôle judiciaire du GTN-O contre la décision du tribunal lui ordonnant de produire les copies des documents pour lesquels il a revendiqué le privilège de l'exécutif (l'immunité d'intérêt public)--Demandes découlant de procédures d'un tribunal canadien des droits de la personne portant sur une plainte déposée contre le GTN-O par l'Alliance de la fonction publique du Canada (l'AFPC) qui alléguait que le gouvernement, en tant qu'employeur, faisait de la discrimination dans la classification et la rémunération des groupes à prédominance féminine comparativement aux groupes à prédominance masculine contrairement aux art. 7, 10 et 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne--demande relative à l'opposition faite par le GTN-O pour des raisons d'intérêt public contre la divulgation des renseignements contenus dans les documents en question accueillie en grande partie, de sorte que ces documents doivent être produits au tribunal à l'exception des parties visées par l'ordonnance; demande de contrôle judiciaire accueillie--1) Les coûts ne peuvent pas constituer à eux seuls un motif permettant de déterminer si la question est d'intérêt public au point où l'immunité contre la divulgation doit s'appliquer --Procédure à deux étapes permettant de déterminer si les renseignements doivent être divulgués en vertu de l'art. 37 de la LPC: la première porte sur la question de savoir si la Cour doit examiner les documents prétendus privilégiés en vertu de l'immunité d'intérêt public; dans l'affirmative, la deuxième consiste en l'examen des renseignements prétendus privilégiés et en l'audition d'autres arguments, qui portent sur la pondération des intérêts publics en jeu--Le GTN-O ne s'est pas opposé à l'examen des documents par la Cour--La preuve par affidavits n'a pas convaincu la Cour que la revendication d'immunité d'intérêt public pouvait être acceptée sans examen des documents--Les affidavits décrivent le GTN-O et ses opérations comme s'apparentant aux gouvernements provinciaux et à leurs opérations--Ils ne précisent pas les intérêts publics en jeu, ne faisant état que de l'apparence de l'importance de la non-divulgation relativement aux questions de politique de gestion du personnel, de négociation collective, de classification des emplois, des taux de rémunération et de parité salariale à la lumière de l'enquête en cours sur la plainte de l'AFPC et des rondes successives de négociation collective depuis le dépôt de la plainte--Ils décrivent les documents de façon générique--L'intérêt public général relatif à la préservation de la confidentialité de documents en vue du fonctionnement efficace du Cabinet ne l'emporte pas, sans autre intérêt public mentionné, sur l'intérêt public relatif à l'administration de la justice, qui est en cause en l'espèce dans l'enquête du tribunal relativement à une plainte majeure de traitement discriminatoire illicite de certains employés--Dans Carey c. Ontario, [1986] 2 R.C.S. 637, le juge La Forest a affirmé que les documents du Cabinet doivent être divulgués à moins que cela ne porte atteinte à l'intérêt public, que la Cour doit agir avec prudence étant donné le palier du processus décisionnel dont il s'agit, la nature de la politique en question, la teneur précise des documents et le moment de leur divulgation, et que cette détermination doit être soupesée par rapport à l'importance qu'il y a à produire les documents dans l'intérêt de l'administration de la justice--L'art. 37 porte sur les renseignements gouvernementaux--Les documents désignés pertinents par le GTN-O doivent être divulgués sauf lorsque les renseignements qu'ils contiennent sont privilégiés en vertu d'un intérêt public mentionné autre que l'intérêt public relatif à la préservation de la confidentialité des documents du Cabinet--Dans le cadre de la pondération des intérêts publics, l'intérêt public invoqué par le GTN-O réside dans la négociation collective avec les syndicats des employés du secteur public et dans les questions liées touchant les intérêts des employés, comme les systèmes de classification des emplois--Bien qu'il soit nécessaire d'exonérer de divulgation la stratégie et la planification relatives aux éléments ayant normalement trait à la négociation collective, l'immunité d'intérêt public visant ces renseignements ne s'étend pas au-delà de la conclusion d'une convention collective à moins que les renseignements ne portent sur une question litigieuse non résolue susceptible de faire l'objet de négociations ultérieures--À moins que les renseignements généraux concernant la négociation collective ou les systèmes de classification des emplois ne semblent porter sur des questions précises quant à une négociation en cours ou à venir ou qu'ils ne semblent contenir des admissions défavorables à l'intérêt en jeu devant le tribunal, l'intérêt public relatif à ces renseignements ne peut pas l'emporter sur l'importance d'une procédure transparente et équitable dans l'examen de la plainte de l'AFPC devant le tribunal--Il est ordonné au tribunal d'examiner les revendications de privilège relatives aux documents en cause, à l'exception de la revendication d'immunité d'intérêt public--Généralement, lorsque des documents sont produits relativement à un litige, il y a un engagement implicite de la part des avocats de ne les utiliser que dans le cadre du litige pour les fins auxquelles ils sont produits--2) En règle générale, les décisions qui sont rendues dans le cours d'une instance devant un tribunal ne devraient pas être contestées tant que l'instance engagée devant le tribunal n'a pas été menée à terme: Citron c. Zundel, [2000] 4 C.F. 225 (1re inst.)--L'art. 37 de la LPC prévoit expressément un processus d'examen des oppositions à la divulgation de renseignements gouvernementaux fédéraux pour des raisons d'intérêt public--L'opposition du GTN-O à la divulgation des documents est expressément visée par l'art. 37 et la procédure applicable à cette opposition est établie dans l'art. 37(2) et (3)--L'AFPC et la CCDP prétendent que les modifications apportées en 1998 à la Loi canadienne sur les droits de la personne, en particulier l'art. 50, autorisent un tribunal à agir comme une cour supérieure et à statuer sur les oppositions aux termes de l'art. 37--Le pouvoir du tribunal en matière d'administration de la preuve ainsi que son pouvoir d'ordonner la production de documents, qui sont prévus à l'art. 50, font simplement en sorte que le tribunal soit considéré, aux fins de l'art. 37(3), comme un organisme investi du pouvoir de contraindre à la production de renseignements en vertu d'une loi fédérale--Même si ces modifications précisent le rôle d'un tribunal lorsqu'il examine des questions de preuve et qu'elles ont été adoptées après l'art. 37 de la LPC, cet article porte expressément sur les oppositions à la divulgation de renseignements gouvernementaux et restreint le rôle d'un tribunal fédéral lorsqu'il examine des oppositions à la divulgation de renseignements gouvernementaux fédéraux--Dans le cas des oppositions à la divulgation de renseignements de la part du gouvernement fédéral ou de ses organismes, y compris le GTN-O, les dispositions générales de la Loi sur les droits de la personne ne créent aucune exception à l'application des art. 37 à 39--Lorsque le GTN-O soulève une opposition, le tribunal doit laisser à la Cour le soin de déterminer si l'opposition fondée sur des raisons d'immunité d'intérêt public doit être accueillie--Cette interprétation est conforme à l'application de l'art. 58 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, qui autorise la CCDP à demander à la Cour qu'elle statue sur une opposition à la divulgation de renseignements gouvernementaux lorsqu'un enquêteur ou un membre instructeur du tribunal sollicite la divulgation de renseignements et essuie un refus--La demande de contrôle judiciaire de la décision du tribunal relative aux oppositions du GTN-O à la divulgation n'est pas prématurée--Demande accueillie quant au fond--Le tribunal a commis une erreur de droit en concluant qu'il avait le pouvoir de statuer sur les oppositions à la divulgation de renseignements gouvernementaux pour des raisons d'immunité d'intérêt public lorsque celles-ci étaient formulées par le gouvernement fédéral--Une opposition de cette nature doit être traitée conformément aux art. 37 à 39--Loi canadienne sur les droits de la personne, art. 7, 10 (mod. par L.C. 1998, ch. 9, art. 13), art. 11, 50 (mod., idem, art. 27), 58 (mod., idem, art. 30)--Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. (1985), ch. C-5, art. 37.

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