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BREVETS

Pratique

Apotex Inc. c. Merck & Co., Inc.

T-294-96

2002 CFPI 626, juge McKeown

31-5-02

24 p.

Requête visant à arrêter les termes du jugement sommaire en faveur de la défenderesse, statuant qu'Apotex avait contrefait le brevet de Merck--Jugement sommaire fondé sur l'autorité de la chose jugée ou sur l'irrecevabilité pour cause d'identité des questions en litige--L'affaire concernait les mêmes parties, les mêmes questions et à peu près les mêmes faits que l'affaire antérieure qui avait été jugée par le juge MacKay (Merck & Co. c. Apotex Inc. (1994), 59 C.P.R. (3d) 133 (C.F. 1re inst.)), Cour d'appel fédérale ([1995] 2 C.F. 723)--La seule différence résidait dans le fait que le maléate d'énalapril contrefaisant a été acquis en mai et en octobre 1994, alors qu'il avait été acquis en mars 1993 dans l'affaire précédente-- Cette différence n'était pas significative, puisque dans les deux cas, il avait été acquis après que la loi ait mis fin à la licence obligatoire--1) La principale question concerne le point de savoir si les questions de fait devraient être tranchées dans le cadre d'un renvoi ou à la suite d'une instruction complète--D'après la jurisprudence de la Cour d'appel de l'Ontario, la requête en jugement sommaire a une portée étroite--Mais une instruction complète sur les réparations n'est pas nécessaire dans la présente affaire--La disposition des Règles de la Cour fédérale sur le jugement sommaire (règle 216) a une portée plus large que la disposition des règles de l'Ontario--Selon l'art. 20 des règles de l'Ontario, le tribunal ne peut faire de constatations de faits qui peuvent avoir fait l'objet d'un différend entre les parties, il ne peut que trancher les questions de droit--Il est possible d'établir une distinction entre la jurisprudence citée par Apotex relative au critère du jugement sommaire sur la question de la responsabilité et l'espèce qu'il s'agit de trancher, car il a déjà été satisfait au critère quant à la responsabilité--La seule question qui reste est celle de la réparation--Le renvoi dans la présente affaire n'est pas régi seulement par les règles sur le jugement sommaire, mais aussi par les règles relatives au renvoi (règles 153(1), 216(2))--Ces règles définissent expressément une procédure pour ordonner un renvoi après une ordonnance de jugement sommaire--La jurisprudence ontarienne n'est pas applicable à une ordonnance de renvoi selon ces dispositions--Des motifs de principe étayent cette conclusion--Le principe qui sous-tend la règle de la chose jugée est qu'il faut mettre un terme aux litiges et éviter les dépenses et les délais inutiles, et l'abus de procédure--Ce principe serait mis en échec si une partie pouvait intenter une action essentiellement sur les mêmes faits qu'une action antérieure, obtenir un jugement sur la responsabilité et néanmoins être forcée de subir les dépenses et les délais de l'instruction pour déterminer la réparation--Le principe général d'interprétation des règles justifie également cette position--La règle 3 dispose que les Règles sont interprétées et appliquées de façon à permettre d'apporter une solution au litige qui soit juste et la plus expéditive et économique possible--Obliger les parties à subir maintenant les dépenses et les délais d'une instruction complète est contraire à la lettre et à l'esprit de la règle 3--À supposer même que la jurisprudence ontarienne soit applicable, il n'y a pas de véritable question litigieuse--La preuve suffit amplement pour conclure qu'il y a eu une contravention délibérée et flagrante de l'injonction, ce qui justifie l'attribution de dommages-intérêts punitifs--Obliger maintenant la Cour à entendre la preuve et se prononcer encore sur la même question serait un abus du temps et des ressources de la Cour--2) Le pouvoir d'accorder les dommages-intérêts ou la restitution des bénéfices est expressément prévu dans la Loi sur les brevets (art. 55 et 57)--C'est la réparation ordinairement accordée, à moins de circonstances justifiant de la refuser au demandeur ayant obtenu gain de cause au fond qui en fait la demande--Merck avait le droit de choisir la restitution des bénéfices après un interrogatoire préalable et la communication de documents par Apotex--Comme toute autre réparation d'equity, la restitution des bénéfices relève de l'appréciation souveraine de la Cour--Il n'y a pas de différence significative dans l'espèce qui justifierait qu'il en soit autrement de l'ordonnance même qui a été prononcée dans la décision antérieure--Merck n'a pas perdu, du fait de sa conduite, le droit à la réparation d'equity--L'argument du retard dans l'instruction de sa demande a été jugé mal fondé--Tout retard a reçu une explication satisfaisante--La Cour a déjà jugé que le brevet est valide et Apotex ne peut maintenant chercher à soulever à nouveau la question en la présentant sous la forme d'une question se rattachant aux réparations--3) Des dommages-intérêts punitifs peuvent être accordés dans une affaire de contrefaçon de brevet lorsque le demandeur réclame des dommages-intérêts ou la restitution des bénéfices--Ils ont été attribués dans des affaires de brevet lorsque le défendeur a violé délibérément, de façon flagrante et avec désinvolture une injonction interlocutoire--La preuve établit clairement qu'Apotex était au courant de l'injonction, qu'elle a sciemment violé l'injonction et qu'elle a dissimulé à la Cour et à Merck les acquisitions d'énalapril intervenues après l'instruction--En outre, Apotex n'a à aucun moment demandé de directives à la Cour quant au caractère approprié de sa conduite--Il serait approprié en l'espèce de conclure que Merck a droit à des dommages-intérêts punitifs, dont le montant, le cas échéant, sera déterminé dans le cadre du renvoi une fois que les dommages-intérêts généraux à accorder ou les bénéfices à restituer auront été déterminés--La Cour doit évaluer les dommages-intérêts généraux avant d'évaluer les dommages-intérêts exemplaires afin de déterminer si l'octroi de dommages-intérêts punitifs en sus est nécessaire pour dissuader efficacement l'appelante, de même que toute autre personne, d'adopter un comportement aussi outrageant: Lubrizol Corp. c. Imperial Oil Ltd., [1996] 3 C.F. 40 (C.A.F.) --Ce principe serait respecté si la Cour décidait au stade actuel que la conduite d'Apotex justifie une punition telle qu'il puisse être indiqué d'accorder des dommages-intérêts punitifs--Puis, dans le cadre du renvoi, une fois que les autres dommages-intérêts auront été évalués, on pourra décider s'ils constituent une punition suffisante ou s'il faut accorder des dommages-intérêts additionnels--Même s'il n'y a pas eu une instruction complète, la Cour dispose d'un dossier complet sur les faits lui permettant de statuer sur le droit à des dommages-intérêts punitifs--La conduite d'Apotex a manifesté une complète indifférence à l'injonction qui justifie des dommages-intérêts punitifs--4) Pour ce qui est de la question de l'enquête préalable, Merck ne devrait pas avoir à se soumettre à l'enquête préalable à moins qu'elle ne choisisse les dommages-intérêts--Il faut prendre en compte la règle 3 ainsi que les considérations de temps et d'efficacité--À moins que Merck ne choisisse les dommages-intérêts, tous les renseignements relatifs à la restitution des bénéfices seraient connus d'Apotex et en sa possession--Comme il est peu probable que Merck pourrait avoir des renseignements sur cette question, le fait de la soumettre à l'enquête préalable entraînerait des frais et des délais inutiles--La règle 230 autorise la Cour à dispenser une partie de la production de certains documents pour examen s'ils concernent les questions en litige et s'il serait trop onéreux de les produire--Compte tenu du fait que Merck peut choisir la restitution des bénéfices, l'obliger à se soumettre à l'enquête préalable n'aurait guère de sens--Règles de la Cour fédérale (1998), DORS/98-106, règles 3, 153, 216, 230--Règles de procédure civile de l'Ontario, R.R.O. 1990, Reg. 194, art. 20--Loi sur les brevets, L.R.C. (1985), ch. P-4, art. 55 (mod par L.C. 1993, ch. 15, art. 48), 57.

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