Fiches analytiques

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CITOYENNETÉ ET IMMIGRATION

Statut au Canada

Raisons d'ordre humanitaire

Cheema c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)

IMM-2187-01

2002 CFPI 638, juge Gibson

4-6-02

19 p.

Demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle une fonctionnaire de l'immigration a rejeté la demande présentée en vue d'obtenir le droit d'établissement à partir du Canada pour des raisons d'ordre humanitaire--Le demandeur est né en Inde en 1987--Le tuteur à l'instance du demandeur est également né en Inde, mais est maintenant citoyen canadien--En 1993, une cérémonie d'adoption a été célébrée en Inde, l'acte d'adoption a été enregistré et le tuteur à l'instance du demandeur a déposé un engagement d'aide pour parrainer l'admission du demandeur au Canada en tant que fils adoptif--La demande de visa a été rejetée--Le demandeur a continué à vivre en Inde avec ses grands-parents, même s'il a rendu régulièrement visite à ses parents--En 1998, le demandeur est arrivé illégalement au Canada--Une ordonnance d'adoption a été rendue en Ontario en 1999--Les notes STIDI de la fonctionnaire de l'immigration indiquent qu'elle a demandé à l'avocate du demandeur de quitter la salle à cause de ses interruptions constantes qui perturbaient l'entrevue--L'entrevue du demandeur s'est poursuivie en l'absence d'un conseil (technicienne parajuridique)--La fonctionnaire a conclu que l'adoption n'était pas authentique, mais n'a pas mentionné l'adoption faite en Ontario--Demande accueillie--La norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable simpliciter--1) Étant donné que l'entrevue n'est pas requise, rien n'exige, si elle est tenue, qu'elle ait les caractéristiques d'un processus judiciaire: Charles c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 241 N.R. 398 (C.A.F.)--La jurisprudence subséquente, dont l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, n'a pas rendu caduc l'arrêt Charles--Dans l'arrêt Baker, le juge L'Heureux-Dubé a indiqué clairement que la tenue d'une audience ou d'une entrevue ne constitue pas une composante essentielle du devoir d'équité qui s'applique dans le cas des demandes fondées sur des raisons d'ordre humanitaire--Lorsqu'une entrevue est accordée, elle doit se dérouler de manière à assurer que l'intéressé et les personnes dont les intérêts sont profondément touchés par la décision aient réellement la possibilité de faire valoir leur point de vue--Le fonctionnaire de l'immigration peut décider, à sa discrétion, de tenir ou non une entrevue--En l'espèce, il était loisible à la fonctionnaire de l'immigration de refuser à l'avocate ou assistante d'être présente à l'entrevue--Dans la façon dont elle a mené l'entrevue, la fonctionnaire n'a pas manqué à son obligation d'agir avec équité--2) Bien qu'une adoption faite en conformité avec les lois d'une province ne constitue pas, en matière d'immigration, une preuve déterminante de l'existence d'un lien de filiation entre l'enfant adoptif et ses parents adoptifs, il s'agit d'un facteur pertinent dont il y a lieu de tenir compte, surtout lorsque l'intérêt supérieur de l'enfant est en jeu--L'art. 136(2) de la Loi sur les services à l'enfance et à la famille (LSEF) énumère les facteurs dont il faut tenir compte dans une requête en adoption introduite en Ontario--Ces facteurs se rapportent à l'intérêt supérieur de l'enfant et pas simplement à l'aptitude du requérant à adopter un enfant--La liste des facteurs est suffisamment large pour englober le cas du demandeur, lequel se caractérise notamment par ses relations avec ses parents biologiques, son séjour illégal au Canada et ses rapports avec ses parents adoptifs proposés--L'art. 157 de la LSEF prévoit que l'ordonnance d'adoption rendue en vertu de cette loi est définitive et irrévocable, sous réserve seulement de tout appel prévu par la Loi, et il prévoit en outre que l'adoption ne peut être révisée par un tribunal--La révision d'une ordonnance d'adoption dans le cadre d'une procédure discrétionnaire visant une loi et une politique validement adoptées en matière d'immigration ne tombe manifestement pas sous le coup de l'art. 157--La fonctionnaire de l'immigration ne disposait d'aucun élément de preuve au sujet de la preuve qui avait été soumise au juge ontarien qui avait fait droit à la requête en adoption et au sujet des facteurs, s'il en est, dont ce juge a tenu compte pour apprécier l'intérêt supérieur du demandeur--L'obligation de la fonctionnaire de l'immigration d'«examiner avec beaucoup d'attention» l'intérêt supérieur du demandeur en tant qu'enfant, couplée à celle qu'elle avait de respecter les lois validement adoptées d'une province ainsi que les mesures prises par des tribunaux, régulièrement constitués conformément à ces lois, imposaient à la fonctionnaire de l'immigration l'obligation de reconnaître l'adoption ontarienne dans ses notes tenant lieu de motifs de décision; si elle n'était pas convaincue que les éléments d'information portés à sa connaissance au sujet de cette adoption étaient suffisants pour lui permettre de bien apprécier l'intérêt supérieur de l'enfant par suite de l'adoption, la fonctionnaire de l'immigration avait l'obligation d'en informer le demandeur et de lui fournir la possibilité raisonnable de recueillir ces renseignements et de les lui transmettre--En l'absence d'une preuve dans les motifs de la fonctionnaire de l'immigration qu'elle a dûment tenu compte des incidences de l'adoption ontarienne en s'acquittant de sa tâche d'examiner «avec beaucoup d'attention» l'intérêt supérieur du demandeur, la décision qu'elle a rendue est entachée d'une erreur qui en justifie le contrôle judiciaire--3) La fonctionnaire de l'immigration n'a pas tenu compte de facteurs non pertinents--L'appréciation de tous les facteurs pertinents était une tâche incombant à une fonctionnaire de l'immigration--Loi sur les services à l'enfance et à la famille, L.R.O. 1990, ch. C.11, art. 136(2), 157.

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