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MARQUES DE COMMERCE

Contrefaçon

Veuve Clicquot Ponsardin c. Boutique Cliquot Ltée

T-2080-98

2003 CFPI 103, juge Tremblay-Lamer

30-01-03

36 p.

Enregistrement--Action en contrefaçon de marques de commerce enregistrées, en concurrence déloyale et en délit de substitution--Subsidiairement, la demanderesse demande la radiation des marques des défenderesses--L'art. 20 de la Loi sur les marques de commerces (la Loi) prévoit que le droit à l'emploi exclusif est réputé être violé par une personne non admise à l'employer selon la Loi et qui vend, distribue ou annonce des marchandises en liaison avec une marque de commerce créant de la confusion--Il n'est pas nécessaire que les marchandises soient de la même catégorie générale-- L'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque lorsque l'emploi des deux marques serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques sont fabriquées ou vendues par la même personne--Pour décider si des marques créent de la confusion, le tribunal doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris celles qui sont énumérées à l'art. 6(5) de la Loi--Tout d'abord, en ce qui concerne le caractère distinctif inhérent des marques de commerces--Une marque de commerce avec un mot d'usage courant possède un caractère distinctif inhérent moindre et le degré de protection accordé par le tribunal est limité--Par contre, une marque composée d'un mot unique ou inventé a un caractère distinctif inhérent plus considérable, méritant une protection étendue--Le tribunal est d'avis que les marques de la demanderesse («Veuve Clicquot» et «clicquot») possèdent un caractère distinctif inhérent marqué et méritent une portée de protection étendue--Le mot «Clicquot» est inventé, et la preuve révèle que hormis les marques des défenderesses, il n'existe au Canada aucune marque semblable sur le marché--Ensuite, en ce qui concerne la période d'emploi, une marque qui est employée depuis longtemps est présumée avoir fait une certaine impression parmi les consommateurs--En l'espèce, le tribunal est d'avis que ce critère favorise la demanderesse--L'enregistrement de la demanderesse pour la marque «Veuve Clicquot» indique une revendication d'emploi au Canada de la marque pour des vins de champagne depuis au moins 1899--Les défenderesses revendiquent un emploi beaucoup plus récent pour les marques «Cliquot» et «Cliquot "Un monde à part"», soit un emploi depuis 1995 en liaison avec la vente au détail de vêtements pour dames--En ce qui concerne le degré de ressemblance entre les marques de commerce, le tribunal doit évaluer l'impression que ces marques font sur le public--Il faut examiner la marque comme un tout, et non la disséquer pour en faire un examen détaillé--Le test de confusion doit être analysé du point de vue du consommateur qui n'est pas sur ses gardes et qui a simplement un souvenir imparfait d'avoir vu ou entendu la marque usurpée--Le fait que la marque des défenderesses s'écrive sans la lettre «c» ne fait rien pour éliminer le risque de confusion du point de vue du consommateur ayant un souvenir imparfait des marques de commerce--Il existe un grand degré de similarité entre les marques de la demanderesse et celles des défenderesses--En ce qui concerne le genre de marchandises, services ou entreprises ainsi que la nature du commerce, le degré de similitude entre les marchandises qui portent ces marques constitue un facteur important pour déterminer s'il existe vraisemblablement une confusion--La preuve n'établit pas que la demanderesse ait l'intention d'exploiter les secteurs autres que celui du champagne--Si la demanderesse voulait vraiment étendre ses marques à l'univers de la mode, ses plans de stratégie l'auraient reflété--Pour ces raisons, il n'y a aucune connexion entre les activités de la demanderesse et celles des défenderesses--Le facteur clef est la différence considérable entre les marchandises de la demanderesse et celles des défenderesses--Les activités de la demanderesse et des défenderesses sont tellement différentes qu'il n'y a aucun risque de confusion chez les consommateurs--Les marques «Cliquot» et «Cliquot "Un monde à part"» des défenderesses ne créent aucune confusion avec celles de la demanderesse-- Par conséquent, l'utilisation de ces marques ne constitue pas une usurpation des marques de la demanderesse au sens de l'art. 20 de la Loi--La demanderesse prétend également que l'usage par les défenderesses de la marque constitue une infraction à l'art. 7(b) et (c) de la Loi--Afin de réussir une action en délit de substitution, la demanderesse doit établir trois éléments: l'existence d'un achalandage, la représentation trompeuse induisant le public en erreur, et des dommages actuels ou possibles pour la demanderesse--En l'espèce, la preuve révèle que la marque de la demanderesse est une marque notoire, possédant un achalandage relatif à la vente des vins de champagne--Cependant, la preuve ne démontre pas que cette marque possède un achalandage relatif à l'univers de la mode féminine--Il n'y a aucune connexion entre ses marchandises et l'univers de la mode féminine--La preuve démontre que l'association de la demanderesse avec l'univers de la mode se limite à cibler le marché de la femme comme consommatrice de ses produits de champagne--Le principe est à l'effet qu'il y a risque de confusion lorsqu'un commerçant utilise le nom, la marque de commerce ou encore l'emballage d'un produit de manière a créer chez le consommateur, l'impression que son commerce est celui d'un autre déjà bien établi, qu'il est une filiale ou encore, qu'il y est relié d'une façon quelconque--Il n'est pas vraisemblable qu'un consommateur croirait que les boutiques opérées par les défenderesses sont liées à la demanderesse--Les marchandises et les canaux de distribution des deux parties sont tellement différents qu'il n'y a aucun risque de confusion --Par conséquent, l'utilisation par les défenderesses de la marque de commerce ne constitue pas une infraction de l'art. 7(b) de la Loi--Étant donné la différence entre les marchan-dises de la demanderesse et celles des défenderesses, il n'y a aucune infraction à l'art. 7(c) de la Loi--La demanderesse soutient en outre que l'usage par les défenderesses de la marque de commerce diminue la valeur de l'achalandage attaché a sa marque--L'art. 22 de la Loi prévoit que nul ne peut employer une marque de commerce déposée par une autre personne d'une manière susceptible d'entraîner la diminution de la valeur de l'achalandage attaché à cette marque de commerce--Il faut qu'un consommateur soit capable de faire une association entre les parties pour que la diminution de la valeur de l'achalandage attaché à la marque de commerce ait lieu--La demanderesse a comme seul objectif la vente de champagne, et qu'elle n'est pas intéressée à exploiter d'autres secteurs--Un consommateur, ayant vu le mot «Cliquot» utilisé dans les boutiques des défenderesses, ne fera aucun lien de connexion avec la demanderesse--Par conséquent, aucune association entre la marque de luxe «Clicquot» et les marchandises «non-luxe» des défenderesses --Les marques de commerces des défenderesses ne diminuent pas la valeur de l'achalandage attaché à la marque de commerce «Clicquot», et qu'il n'y a aucune infraction à l'art. 22 de la Loi--Subsidiairement, la demanderesse demande la radiation des enregistrements--Les art. 18(1)a) et 12(1)d) de la Loi indiquent que l'enregistrement d'une marque de commerce est invalide si la marque crée de la confusion avec une marque de commerce déposée--Étant donné que les marques des défenderesses ne créent pas de confusion, ses marques sont valides--Les défenderesses pouvaient enregis-trer leurs marques parce qu'il n'y a aucune confusion entre ses marques de commerce et celles de la demanderesse--Rien dans la preuve appuie la prétention que les marques de commerces des défenderesses sont non distinctives--La demanderesse n'a fourni aucune preuve valable indiquant comment les marques de commerce des défenderesses sont devenues non distinctives--Pour ces raisons, il n'y a aucun motif valable pour la radiation des marques de commerce des défenderesses--L'action de la demanderesse est rejetée--Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13, art. 6(5), 7b), c), 12(1)(d), 18(1)a), 20 (mod. par L.C. 1994, ch. 47, art. 196), 22.

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