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[2013] 3 R.C.F. F-8

IMPÔT SUR LE REVENU

Pratique

Contrôle judiciaire, en vertu des art. 231.6(4) et 231.6(5) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985) (5e suppl.), ch. 1, d’une décision de l’Agence du revenu du Canada (ARC) par laquelle l’ARC a adressé à la demanderesse une mise en demeure de produire des renseignements étrangers, afin que l’ARC puisse prendre connaissance de certains renseignements et documents conservés à l’étranger—La demanderesse est une société résidant au Canada qui vend des articles chaussants—Le président de la société demanderesse détient 10 p. 100 des actions ordinaires de la demanderesse, alors que l’actionnaire principal en détient 90 p. 100—L’actionnaire principal a élu domicile aux Bahamas et a constitué en personne morale quatre autres sociétés en propriété exclusive qui sont en cause dans la demande—La demanderesse a obtenu des services des quatre sociétés pendant le cours de ses activités, et a versé des sommes considérables pour divers services pendant les années d’imposition en litige—Le ministre du Revenu national (défendeur) a procédé à une vérification fiscale de la demanderesse (vérification de prix de transfert ou VPT), qui comprenait un examen des paiements faits par la demanderesse aux quatre sociétés, en contrepartie des services que celles-ci lui avaient rendus—La VPT visait également à déterminer si les services avaient été fournis aux Bahamas ou au Canada; dans l’hypothèse où ils auraient été fournis aux Bahamas, de quelle façon ils avaient été fournis; et si la demanderesse avait tiré profit de la contrepartie payée; le cas échéant, il s’agissait de déterminer si le prix de transfert payé par la demanderesse constituait un « prix de transfert de pleine concurrence »—La mise en demeure comportait 74 questions relatives aux quatre sociétés—Lorsque l’actionnaire principal résidant aux Bahamas a été mis au courant de la mise en demeure, les quatre sociétés ont refusé de fournir certains des renseignements demandés, au motif que ces renseignements n’existaient pas, qu’ils étaient confidentiels ou que leur communication nuirait à l’avantage concurrentiel des sociétés—Les réponses déjà fournies par la demanderesse par suite des demandes de renseignements ont été considérées incomplètes ou insuffisamment détaillées—Il s’agissait de déterminer si la mise en demeure était déraisonnable, étant donné qu’elle était, notamment, d’une portée trop large, et qu’elle visait l’obtention de renseignements non pertinents—Les renseignements réclamés à la demanderesse étaient nécessaires pour permettre au défendeur de tirer des conclusions précises, et de vérifier les renseignements déjà fournis—Le lien entre l’information et les documents réclamés et les objectifs de la VPT étaient évidents et raisonnables—L’art. 231.6 de la Loi précise bien qu’un « renseignement ou document étranger » s’entend d’un renseignement accessible, ou d’un document situé, à l’étranger, qui peut être pris en compte pour l’application ou l’exécution de la Loi, y compris la perception d’un montant payable par une personne en vertu de la Loi—Les documents exigés dans la mise en demeure doivent être à la fois pertinents et raisonnables, mais le critère minimal à respecter est peu exigeant; le défendeur jouit de vastes pouvoirs—La mise en demeure adressée en l’espèce n’a pas pour effet d’englober par inadvertance des opérations commerciales non pertinentes des quatre sociétés des Bahamas, étant donné que rien ne permet de penser que les sociétés traitent avec d’autre personnes que la demanderesse—La demanderesse est la seule cliente de trois des sociétés en cause, ce qui justifiait la portée de la demande de documents et de renseignements—Compte tenu des ententes commerciales en l’espèce, il était évident que les renseignements réclamés par l’ARC pouvaient faire partie des documents réclamés dans la mise en demeure, et notamment des documents officiels des compagnies; il n’appartenait pas à la demanderesse d’affirmer que ces renseignements pourraient être vérifiés d’une autre manière—Par conséquent, la mise en demeure n’était pas d’une portée trop large étant donné qu’elle visait à obtenir des renseignements pertinents et nécessaires pour mener à terme la VPT pour les années d’imposition en cause, et pour déterminer l’obligation fiscale de la demanderesse—Le fait que les renseignements soient exclusifs ou délicats ne constituait pas une raison justifiant de conclure que la mise en demeure était déraisonnable—La pertinence et le caractère raisonnable de la mise en demeure n’avaient rien à voir avec la contraignabilité des quatre sociétés bahamiennes ou de l’actionnaire principal—Compte tenu du fait que les documents et les renseignements sont conservés à l’extérieur du Canada, l’ARC n’avait guère d’autre choix que d’envoyer la mise en demeure en question—Il n’y avait aucun élément de preuve qui permette de penser qu’il faudrait déployer des efforts considérables pour fournir les renseignements demandés ou que le fait de les communiquer en détruirait la valeur—Rien ne justifiait en l’espèce l’annulation de la mise en demeure—Enfin, les conséquences d’un refus de communiquer les documents et les renseignements réclamés qui sont énumérées à l’art. 231.6(8) de la Loi n’ont rien à voir avec la pertinence ou le caractère raisonnable de la mise en demeure—L’actionnaire principal et les quatre sociétés bahamiennes qu’il contrôle ne sont pas contraignables, mais ils doivent être conscients du fait que l’incapacité de la demanderesse à se conformer pour l’essentiel à la mise en demeure pourrait à l’avenir exposer celle-ci à des conséquences négatives—Voilà essentiellement la raison d’être de toute mise en demeure adressée en vertu de la Loi, et les conséquences envisagées semblaient tout à fait appropriées en l’espèce—Demande rejetée.

Soft-Moc Inc. c. Canada (Procureur Général) (T-502-12, 2013 CF 291, juge Russell, jugement en date du 20 mars 2013, 35 p.)

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