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PRATIQUE

Actes de procédure

Requête en radiation

Leblanc c. Canada

T-436-03

2003 CFPI 736, protonotaire Tabib

24-6-03

27 p.

Requête en vue d'obtenir la radiation de la déclaration des demandeurs au motif que la Cour n'a pas compétence pour entendre la cause d'action, que la demande est sans fondement, frivole et vexatoire et qu'il s'agit d'un abus de procédure à cause de l'irrecevabilité résultant de l'identité des questions en litige et qu'il s'agit également d'une attaque indirecte contre le jugement de la Cour d'appel de l'Ontario dans l'affaire Robb v. St. Joseph's Health Centre; Rintoul v. St. Joseph's Health Centre; Farrow v. Canadian Red Cross Society (2001), 9 C.C.L.T. (3d) 131--Le demandeur, atteint d'hémophilie, a été infecté par le VIH en recevant des concentrés de facteurs de coagulation--Dès l'automne 1984, les membres avertis de la collectivité médicale savaient que le VIH était transmissible par les concentrés de facteurs de coagulation--À l'automne 1984, il a été établi que le traitement thermique des concentrés de facteurs de coagulation permettait d'inactiver le VIH--À la suite de cette découverte, le Bureau des produits biologiques (BPB), a émis une directive à la Société canadienne de la Croix-Rouge (SCCR) en novembre 1984, indiquant qu'il n'y avait plus lieu d'utiliser des concentrés de facteurs non chauffés et exigeant que le passage aux concentrés chauffés se fasse le plus rapidement possible--À l'initiative du Comité canadien du sang (CCS), composé de représentants des provinces, des territoires et du gouvernement fédéral et créé depuis 1981, une conférence consensuelle de tous les acteurs clés dans l'industrie des produits sanguins a été convoquée à la fin de 1984 afin de discuter de la mise en oeuvre de la directive du BPB--La pratique du CCS consistant à enregistrer les délibérations sur cassettes audio et à en élaborer la transcription intégrale a été modifiée en 1989, lorsque le CCS a donné l'ordre d'effacer tous les enregistrements existants des réunions antérieures et de détruire toutes les transcriptions --Par la suite, les procès-verbaux des décisions constituaient la seule source documentaire existante au sujet des délibérations du CCS--Bien qu'une demande d'avis de conformité ait été déposée en juillet 1984 pour le concentré de facteur, le BPB n'a délivré l'avis de conformité que le 10 avril 1985--Le premier concentré de facteur chauffé fabriqué aux É.-U. est arrivé au Canada le 30 mai 1985 et a été distribué pour la première fois par la SCCR au début du mois de juillet 1985--Le demandeur M. Leblanc, ayant reçu un traitement faisant appel au concentré de facteur non chauffé, a découvert qu'il avait été infecté par le VIH en mars 1986--En 1992, les demandeurs ont entrepris en Ontario une action fondée sur la négligence contre la SCCR et le gouvernement de l'Ontario-- Le Canada n'était pas l'un des défendeurs dans l'action devant la Cour de l'Ontario car les demandeurs avaient accepté les compensations du Canada en vertu d'un plan sans égard à la faute--Tant la SCCR que l'Ontario ont demandé que le Canada soit mis en cause afin qu'il les indemnise au sujet de toute responsabilité qu'ils pourraient avoir eue à l'égard des défendeurs--Avant le début du procès, les demandeurs ont demandé de modifier leur demande pour ajouter, contre l'Ontario, une réclamation s'appuyant sur le délit de destruc-tion de la preuve (donner l'ordre de détruire les transcriptions et les cassettes audio)--Dans l'affaire Endean c. Canadian Red Cross Society (1998), 157 D.L.R. (4th) 465, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a décidé que la destruc-tion de la preuve ne faisait que donner naissance à une règle de preuve créant une présomption à l'encontre de la partie coupable d'une telle destruction sans toutefois constituer un délit indépendant--Au procès (Robb c. Canadian Red Cross Society, [2000] O.J. No. 2396 (C.S.J.)), le juge de première instance a rejeté l'action contre l'Ontario, condamné la SCCR à payer des dommages-intérêts aux demandeurs et a tenu le Canada responsable d'indemniser la SCCR dans une proportion de 25 pour 100 des dommages-intérêts octroyés aux défendeurs--En appel, les défendeurs ont obtenu la permission d'inclure, dans leur appel incident, des réclamations précises contre l'Ontario au sujet du délit de destruction de la preuve--La Cour d'appel de l'Ontario a renversé la décision du juge de première instance eu égard à la responsabilité de la SCCR et du Canada; les appels incidents des demandeurs ont été rejetés--Elle a conclu, entre autres, que les demandeurs n'avaient pas prouvé les dates où ils avaient été contaminés; par conséquent, même si les conclusions du juge de première instance avaient été maintenues en ce qui a trait à la négligence de la SCCR, les demandeurs n'ont pu prouver que cette négligence était la cause de leur contamination au VIH--En l'espèce, les demandeurs allèguent que les trois défendeurs, employés du gouvernement fédéral, ont pris l'initiative et ont exécuté la décision du CCS de détruire les bandes audio et les transcriptions des délibérations du CCS--Les demandeurs réclament donc des dommages-intérêts contre les trois défendeurs particuliers pour les délits d'actions fautives en tant que titulaires d'une charge publique, pour atteinte directe, faute et pour manquement à leurs obligations fiduciaires; et des dommages-intérêts de la part du Canada en raison de sa participation à titre de membre du CCS et en tant que responsable du fait des défendeurs particuliers--Les demandeurs allèguent qu'ils avaient droit à la conservation des dossiers conformément à la Loi sur l'accès à l'information, (la LAI) et à la Loi sur les Archives nationales du Canada, (la LANC)--Suivant l'application du critère de la compétence (attribution de compétence par une loi, ensemble de règles de droit fédérales, loi du Canada) énoncé dans l'arrêt ITO--International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics Inc. et al., [1986] 1 R.C.S. 752, la Cour n'a pas compétence concernant la demande présentée par les demandeurs à l'encontre des défendeurs particuliers--Un présumé abus d'un pouvoir émanant d'une loi fédérale par un fonctionnaire fédéral, ou un présumé manquement à une obligation créée par une loi fédérale n'est pas en soi suffisant pour respecter le deuxième volet du critère de compétence-- Les demandeurs n'ont présenté aucune demande d'accès en vertu de la LAI--Le droit d'accès ne doit pas être confondu avec le droit à la conservation des documents--Les demandeurs n'ont jamais acquis aucun droit conformément à la LAI, et les défendeurs n'avaient aucune obligation particulière envers les demandeurs en vertu de la Loi-- S'agissant de la LANC, son objet explicite consiste à conserver les documents d'importance nationale pour des fins d'archivage et non pas afin de faciliter la préservation de la preuve en cas de litige; les obligations créées par la LANC sont de nature publique uniquement--La doctrine de l'attaque indirecte ne trouve pas application en l'espèce--Les critères de la préclusion pour même question en litige sont les suivants: la même question a déjà été tranchée; la décision judiciaire était finale; les parties en cause ou leurs ayants droit étaient les mêmes que dans la procédure donnant lieu à la préclusion: Angle c. M.R.N., [1975] 2 R.C.S. 248--La question de la destruction de la preuve par le Canada demeure une question non résolue entre les demandeurs et les défendeurs, mais les questions de l'obligation de diligence et du lien de causalité sont identiques aux questions soulevées en l'espèce--La décision de la Cour d'appel de l'Ontario est finale à la suite de la demande de pourvoi refusée par la Cour suprême--Il existe suffisamment de lien de droit entre les demandeurs et le Canada dans l'action devant la Cour de l'Ontario (où le Canada a le statut de tiers mis en cause) afin de respecter les critères du troisième volet du critère portant sur la préclusion pour même question en litige--Il n'existe aucune circonstance particulière dans la présente affaire pouvant laisser croire que l'application de la doctrine de la préclusion pour même question en litige constituerait une injustice--Même si la doctrine de la préclusion pour même question en litige ne s'appliquait pas dans la présente affaire, l'action des demandeurs devrait néanmoins être rejetée car elle constitue un abus de procédure--L'action des demandeurs ne peut réussir en raison des conclusions de l'action devant la Cour de l'Ontario portant sur le lien de causalité, lesquelles ne peuvent plus être remises en question par les demandeurs-- Peu importe le degré de négligence coupable lié à la destruction des dossiers du CCS, cela n'a causé aucun des dommages allégués par les demandeurs--Soit que les parties sont liées par les conclusions de la Cour d'appel de l'Ontario sur les questions de l'obligation de diligence, le lien de causalité et les dommages-intérêts, et dans un tel cas la préclusion pour même question en litige s'applique et l'action des demandeurs doit être rejetée, soit que les parties ne sont pas liées et dans un tel cas la preuve sur ces questions doit être présentée devant la Cour afin qu'elle puisse rendre jugement, ce qui résulterait à reprendre entièrement l'action qui s'est déroulée devant la Cour de l'Ontario, une procédure qui s'est échelonnée sur une période de huit années devant la Cour supérieure de l'Ontario, incluant un procès d'une durée de huit mois--Ce résultat ne peut simplement pas être toléré, et de plus, cela jetterait un discrédit sur l'administration de la justice--Loi sur l'accès à l'information, L.C. 1980-81-82-83, ch. 111, ann. I--Loi sur les Archives nationales du Canada, L.R.C. (1985), (3e suppl.) ch. 1.

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