Fiches analytiques

Informations sur la décision

Contenu de la décision

FONCTION PUBLIQUE

Relations du travail

Canada (Procureur général) c. L'Association des employé(e)s en sciences sociales

A-691-02

2004 CAF 165, juge Nadon, J.C.A.

26-4-04

30 p.

Contrôle judiciaire d'une décision prise par la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la Commission) concluant que les défendeurs s'étaient acquittés du fardeau de la preuve en établissant que l'employeur avait traité les défendeurs et leurs membres d'une manière discriminatoire, contrairement aux art. 8 et 9 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP)--Les défendeurs ont allégué que le Conseil du trésor a accordé un traitement de faveur à leurs employés non syndiqués au regard de la mise en oeuvre de révisions de salaire avec effet rétroactif--Les conventions collectives sont souvent signées après la date d'expiration de la convention précédente-- L'ancienne convention continue de s'appliquer jusqu'à la signature d'une nouvelle convention--L'application rétroactive d'une nouvelle convention collective entraîne notamment le calcul des salaires comme si la nouvelle convention était entrée en vigueur dès l'expiration de l'ancienne--La question devient plus complexe lorsqu'un employé a été nommé à un autre poste pendant la période visée par l'application rétroactive d'une nouvelle convention --Avant la décision de la Cour dans Canada (Procureur général) c. Lajoie (1992), 149 N.R. 223 (C.A.F.), lorsqu'un employé était promu, muté ou rétrogradé pendant la période visée par l'application rétroactive d'une nouvelle convention, son salaire était calculé de nouveau si la nouvelle convention prévoyait l'application rétroactive des augmentations de salaire--Ce nouveau calcul entraînait soit une augmentation soit une diminution du salaire de l'employé--La convention collective mentionnée aux présentes prévoit que les taux de rémunération sont payés comme si la convention avait été signée à la date d'entrée en vigueur de la révision des taux de rémunération--Un bulletin du Conseil du trésor daté du 8 novembre 2000, dans lequel le Conseil du trésor avisait ses directeurs des ressources humaines que les employés non syndiqués qui avaient été promus, transférés ou mutés pendant une période assujettie à l'application rétroactive des augmentations de salaire devaient être rémunérés en conformité avec la méthode imposée par la Cour dans Lajoie, sauf lorsqu'un tel traitement équivaut à un avantage inférieur--Un bulletin d'information du Conseil du trésor en date du 31 janvier 2001 prévoit que conformément à la décision Lajoie, les taux de rémunération découlant de promotions, de mutations, de déploiements ou de situations intérimaires ne sont pas recalculés pour la période de rétroactivité de la révision d'une échelle de rémunération-- Depuis le 6 mars 2002, le Conseil du trésor applique la décision Lajoie à tous ses employés, tant syndiqués que non syndiqués--La décision de la Commission est manifestement déraisonnable--La Commission a commis une erreur en concluant que la différence de traitement, par le Conseil du trésor, des employés syndiqués et non syndiqués, à savoir l'application de la méthode Lajoie seulement dans le cas des employés syndiqués était, à sa face même, discriminatoire-- Conformément aux art. 7 et 11 de la Loi sur la gestion des finances publiques, le Conseil du trésor avait le droit de fixer les modalités d'emploi de ses employés non syndiqués-- Quant aux employés syndiqués du gouvernement, leurs modalités d'emploi découlent du processus de négociation collective--L'art. 9(1) de la LRTFP qui interdit à un employeur de faire des distinctions injustes à l'égard d'une organisation syndicale ne lui interdit pas de faire des distinctions entre divers groupes d'employés qu'ils soient syndiqués ou non--Même si l'art. 9(1) prévoit que les distinctions découlant du processus de négociation collective qui se retrouvent dans les conventions collectives ne sont pas discriminatoires, la disposition ne mentionne pas les employés non syndiqués et leurs modalités d'emploi-- L'art. 9(1) n'empêche pas un employeur de traiter différemment ses employés syndiqués et ses employés non syndiqués--Lui donner une interprétation différente voudrait dire que chaque fois qu'un employé non syndiqué obtient des modalités d'emploi qui sont plus favorables que celles qui ont été négociées au nom des employés syndiqués, l'employé syndiqué pourrait prétendre qu'il s'agit de discrimination fondée sur l'appartenance à un syndicat--Ce n'est pas possible--Il s'ensuit donc que les distinctions faites entre les conditions d'emploi des employés syndiqués et celles des employés non syndiqués sont parfaitement légitimes et ne peuvent donner lieu à une plainte de discrimination fondée sur les art. 8 et 9 de la LRTFP, sauf s'il est démontré que l'objet de la distinction est de nuire aux syndicats et à leurs membres --La Commission a commis une erreur en concluant que le Conseil du trésor devait justifier la différence de traitement-- Puisqu'il était tout à fait légitime que le Conseil du trésor fasse une distinction entre ces groupes d'employés, la Cour ne voit pas pourquoi il devait justifier la distinction--Aucune disposition de la Loi ni aucune jurisprudence ne vient appuyer l'opinion de la Commission-- La Commission ne pouvait pas conclure à l'existence d'un sentiment antisyndical en se fondant uniquement sur le fait que le Conseil du trésor n'a pas justifié la différence de traitement--Puisque la Commission n'était saisie d'absolument aucune preuve que la distinction découlait d'un sentiment antisyndical, elle ne pouvait pas tirer la conclusion qu'elle a tirée--Aux termes de l'art. 23(1)a) de la Loi, la Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle l'employeur n'a pas observé les interdictions énoncées aux art. 8, 9 ou 10--Il appartient au plaignant de faire la preuve du bien-fondé de sa plainte--En concluant à l'existence d'une volonté antisyndicale en se fondant uniquement sur le fait que le Conseil du trésor n'avait pas justifié la distinction, en fait, la Commission a renversé le fardeau de la preuve--La décision de la Commission n'était fondée sur aucune preuve dont elle était saisie qui lui aurait permis de conclure que le Conseil du trésor avait une intention antisyndicale--La Commission a commis des erreurs parce qu'elle n'a pas bien compris le sens de la décision Lajoie--Dans le contexte de plaintes de discrimination en vertu de l'art. 23 de la LRTFP, le bien-fondé de la décision Lajoie n'est absolument pas pertinent--Demande accueillie--Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35, art. 8, 9, 10 (mod. par L.C. 1992, ch. 54, art. 36), 23 (mod., idem, art. 40)--Loi sur la gestion des affaires publiques, L.R.C. (1985), ch. F-11, art. 7 (mod. par L.C. 1998, ch. 14, art. 103), 11 (mod. par L.R.C. (1985) (1er suppl.), ch. 9, art. 22; 1991, ch. 24, art. 50, ann. II, no 4; 1992, ch. 54, art. 81; 1995, ch. 44, art. 51; 1996, ch. 18, art. 5; 1999, ch. 31, art. 101).

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.