Fiches analytiques

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CITOYENNETÉ ET IMMIGRATION

Exclusion et renvoi

Personnes interdites de territoire

Thuraisingam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)

IMM-4506-03

2004 CF 607, juge Mactavish

26-4-04

20 p.

Contrôle judiciaire de la décision d'un délégué du ministre qui a confirmé un avis de danger délivré précédemment selon lequel le demandeur avait commis des actes de grande criminalité et constituait un danger pour le public au Canada --Le demandeur conteste cette décision pour deux motifs: 1) le délégué du ministre a commis une erreur en concluant qu'il était membre d'une organisation criminelle; 2) le délégué du ministre a commis une erreur en concluant qu'il ne risquait pas d'être persécuté ou d'être torturé s'il était renvoyé au Sri Lanka--Le demandeur est arrivé au Canada en 1989, et il s'est vu reconnaître le statut de réfugié au sens de la Convention peu de temps après--Il a obtenu le statut de résident permanent en 1990--En ce qui concerne le premier motif, aucune disposition de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés n'exige que le défendeur se serve de l'art. 44(2) lorsqu'il considère qu'une personne constitue un danger pour le public à cause de son appartenance à une organisation criminelle--Le défendeur pouvait donc utiliser l'art. 115--Un avis de danger ne peut être émis en application de l'art. 115 que si deux éléments sont établis--L'intéressé doit être interdit de territoire pour grande criminalité et il doit, selon le ministre, constituer un danger pour le public au Canada--Il n'est pas contesté que le demandeur a été déclaré coupable de plusieurs infractions criminelles, dont l'une est punissable d'un emprisonnement maximal de dix ans--Cela suffit à établir l'élément de «grande criminalité» exigé par l'art. 115(2)--Le délégué du ministre pouvait-il se fonder sur des allégations non prouvées concernant la prétendue appartenance du demandeur à un gang pour conclure que ce dernier constituait un danger présent ou futur pour autrui au Canada?--Le fait qu'une personne a été déclarée coupable d'une infraction criminelle grave n'est pas suffisant en soi pour justifier un avis de danger--Le délégué du ministre a conclu que le demandeur constituait clairement un danger présent et futur pour le public au Canada en raison du poste élevé qu'il occupait au sein d'un gang criminel--La première question qui se pose est de savoir si un délégué du ministre peut fonder un avis de danger sur des accusations qui n'ont pas entraîné une condamnation--Il faut établir une distinction entre le fait de se fonder sur le fait qu'une personne a été accusée d'une infraction criminelle et le fait de se fonder sur la preuve qui sous-tend les accusations en question--Le fait qu'une personne a été accusée d'une infraction ne prouve rien car il s'agit seulement d'une allégation--Par contre, la preuve sous-tendant l'accusation peut être suffisante pour justifier qu'un avis selon lequel une personne constitue un danger présent ou futur pour autrui au Canada soit émis de bonne foi --Le demandeur n'a pas été accusé d'appartenir à une organisation criminelle, et aucune preuve ne permettait de croire qu'il fait actuellement l'objet d'autres types d'accusa-tions criminelles--On ne peut donc pas se fonder sur l'existence d'accusations en l'espèce--En fait, la question qui se pose est de savoir si la preuve dont il disposait permettait au délégué du ministre de conclure que le demandeur constituait un danger présent ou futur pour autrui au Canada en raison du poste élevé qu'il occupait au sein d'un gang criminel--La conclusion du délégué du ministre était étayée par la preuve-- En ce qui concerne le deuxième motif, l'art. 115 prévoit une exception au principe du non-refoulement--Une personne qui s'est vu reconnaître le statut de réfugié au sens de la Convention ne peut être renvoyée dans un pays où elle risque la persécution--L'évaluation des risques excède largement l'expertise des tribunaux de révision et ne possède pas une dimension juridique importante--Par conséquent, l'évaluation des risques doit faire l'objet d'une grande retenue--Pour évaluer le risque que courrait le demandeur s'il était renvoyé au Sri Lanka, le délégué du ministre a examiné la situation générale des réfugiés tamouls qui retournent dans ce pays, et il a conclu que cette situation s'était grandement améliorée et que des mesures étaient prises afin de faciliter la vie des personnes expulsées qui reviennent au Sri Lanka--La situation particulière du demandeur n'a pas été prise en compte, ni le risque précis qu'il courait d'être la cible des autorités sri-lankaises--L'avis de danger est annulé--L'affaire est renvoyée au délégué du ministre pour qu'une nouvelle évaluation des risques soit effectuée--Demande accueillie-- Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, art. 44(2), 115.

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