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RELATIONS DU TRAVAIL

Contrôle judiciaire de la décision de l’arbitre accueillant la plainte de congédiement injuste déposée par le défendeur, ordonnant sa réintégration et le paiement de la moitié de ses frais de justice—La demanderesse, à titre de mandataire de Sa Majesté, est régie par la Loi sur la gestion des finances publiques et se trouve sous la tutelle du Ministre des Approvisionnements et Services—En avril 2003, le défendeur a été rétrogradé, de gestionnaire, à un poste de coordonnateur de marchés, étant donné les difficultés qu’il éprouvait dans le cadre de ses responsabilités de gestionnaire et d’adminis-trateur, et il a été congédié en mai 2003—À titre d’explication, on lui a dit que la Société exerçait son droit à mettre fin à son emploi sans justification à la suite des relations tendues entretenues avec ses collègues de travail et le client, le ministère de la Défense nationale—Plus tard, au cours de l’enquête, la demanderesse a motivé le congédiement en disant que le rendement du défendeur était insatisfaisant dans plusieurs domaines, soit des mauvaises relations avec les clients, une incapacité à bien gérer son personnel, des mauvaises relations avec ses collègues et supérieurs, un travail peu satisfaisant, et des absences inexpliquées du travail— L’arbitre a d’abord décidé, s’appuyant sur la décision Jennings c. Shaw Cablesystems Ltd., 2003 CF 1206, qu’il pouvait, et même qu’il devait, accepter des motifs supplémen-taires à ceux qui étaient invoqués au moment du congédiement —Ensuite, il a conclu que la preuve n’appuyait pas les prétentions de l’employeur; il a jugé que le congédiement n’était pas approprié dans les circonstances et a plutôt ordonné une suspension de longue durée—S’appuyant sur les arrêts Énergie atomique du Canada Ltée c. Shekholeslami, [1998] 3 C.F. 349 (C.A.) et Chalifoux c. Première nation de Driftpile, 2002 CAF 521, l’arbitre posa comme prémisse qu’il devait ordonner la réintégration du défendeur à moins qu’il ait été d’avis que la relation de confiance ne pouvait être rétablie, et, compte tenu du cas, il l’ordonna—Enfin, il a refusé d’accorder des dommages‑intérêts—Les questions en litige étaient la norme de contrôle applicable à la décision de l’arbitre; l’évaluation de la preuve par l’arbitre; les délais dans lesquels l’employeur doit communiquer à l’employé ses motifs de congédiement; et si, en cas de congédiement injuste, la réintégration doit se présumer—Demande accueillie—L’art. 240 du Code canadien du travail octroie aux employés non syndiqués une protection contre le congédiement injuste analogue à celle que se réservent habituellement les employés syndiqués dans leur convention collective; il permet d’éviter l’arbitraire de l’employeur et d’assurer une continuité de l’emploi—Pour ce qui concerne l’évaluation des faits par l’arbitre, ainsi que le choix de la réparation appropriée, la norme de contrôle applicable est la décision manifestement déraisonnable—Par contre, la question de savoir si l’arbitre a mal interprété le droit en se disant tenu de réintégrer le défendeur à moins que l’employeur puisse démontrer que le lien de confiance était rompu, ainsi que la question de savoir si l’employeur peut ajouter, jusqu’à l’audition de la plainte par l’arbitre, aux motifs de congédiement initialement communiqués à l’employé sont assujetties à la norme de la décision correcte— En l’espèce, l’arbitre n’a pas commis d’erreur déraisonnable dans l’appréciation des motifs de congédiement, notamment en décidant que les absences répétées du défendeur ne constituaient pas un motif valable de congédiement, bien qu’il s’agisse d’une faute grave—Il ressort des décisions Howard c. Maritime Telephone and Telegraph Co., [2000] A.C.F. no 1758 (1re inst.) (QL) et Jennings c. Shaw Cablesystems Ltd. que les motifs allégués par l’employeur doivent être révélés dans les 15 jours de la demande faite par la personne congédiée ou l’inspecteur; il est souhaitable que l’inspecteur puisse prendre connaissance des véritable motifs du congédiement pour que ses tentatives de conciliation puissent produire des fruits; tout formalisme excessif doit être évité, et c’est la raison pour laquelle l’arbitre est maître de sa procédure—Voilà pourquoi il faut accepter qu’en certaines circonstances, l’employeur soit admis à fournir de nouvelles explications après les délais prescrits—Toutefois, plus les motifs subséquents s’éloigneront de l’explication originale, plus leur crédibilité sera sujette à caution—Aussi, l’employé devra toujours avoir l’opportunité de se défendre pleinement et de répondre aux allégations de l’employeur—En l’espèce, l’arbitre aurait dû faire preuve d’une plus grande circonspection et exiger de l’employeur de meilleures explications avant de considérer tous ces motifs— Mais comme il les a tous rejetés (sauf les absences) au terme d’une analyse rigoureuse de la preuve, cette erreur s’est révélée sans conséquence et ne justifiait pas à elle seule que l’on écarte sa décision—Pour ce qui concerne la réintégration, la Cour n’était pas convaincue que l’arbitre n’a pas été indûment influencé dans sa décision par sa prémisse de départ, à savoir qu’il devait ordonner la réintégration si le lien de confiance n’était pas irrémédiablement rompu—Ce faisant, il a clairement commis une erreur de droit qui peut avoir eu des répercussions sur l’issue du litige—Le dossier devait donc lui être retourné pour qu’il puisse évaluer la réparation appropriée sans appliquer la présomption fautive, mais en tenant compte des facteurs généralement considérés (voir England et al., Employment Law in Canada, 4e éd., vol. 2, LexisNexis Canada, éd. à feuille mobile, par. 17.153)—Il n’y avait pas lieu d’intervenir en ce qui concerne la décision de l’arbitre sur le remboursement de la moitié des frais de justice encourus dans le cadre de la procédure d’arbitrage—Loi sur la gestion des finances publiques, L.R.C. (1985), ch. F‑11—Code canadien du travail, L.R.C. (1985), ch. L‑2 , art. 240 (mod. par L.R.C. (1985) (1er suppl.), ch. 9, art. 15).

Defence Construction Canada Ltd. c. Girard (T‑1298‑04, 2005 CF 1177, juge de Montigny, ordonnance en date du 29‑8‑05, 33 p.)

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