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FONCTION PUBLIQUE

Pratique

Harquail c. Canada (Commission de la fonction publique)

T-736-04

2004 CF 1549, juge Kelen

4-11-04

15 p.

Demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Commission de la fonction publique (la Commission) dans laquelle la Commission a refusé une demande de congé sans traitement qui aurait permis à la demanderesse de poser sa candidature aux élections fédérales de 2004 et d'être éventuellement candidate--La demanderesse est à l'heure actuelle employée en qualité d"avocate aux Poursuites environnementales et réglementaires du ministère de la Justice du Canada--La demande-resse a présenté une demande de congé sans solde conformément à l'art. 33(3) de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique dans le but de poser sa candidature dans la circonscription de St. Catharines en Ontario pour les élections fédérales de 2004--L'art. 33(3) de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique énonce que la Commission peut accorder à un fonctionnaire un congé non payé si celui-ci souhaite se porter ou être choisi comme candidat à une élection, si elle estime que la candidature du fonctionnaire ne nuira pas par la suite à son efficacité dans la fonction publique--Les supérieurs de la demanderesse ont appuyé sa demande de congé non payé--Selon le sous-ministre de la Justice, la demanderesse n'exerçait pas un pouvoir considérable de façon visible, ni très publique, et que, par conséquent, il n'y avait aucune raison de lui refuser sa demande de congé--La Commission a envoyé au supérieur de la demanderesse un courriel dans lequel il demandait des précisions concernant certaines tâches énumérées dans la description de travail de la demanderesse--La Commission a par la suite informé la demanderesse que sa demande de congé était refusée compte tenu de la visibilité et du degré d'autorité de son poste--Par conséquent, elle ne s'est pas portée candidate à l'élection fédérale--Les questions à trancher sont celles de savoir si la demande est théorique et si la Cour devrait examiner cette affaire au fond--Le critère permettant d'apprécier le caractère théorique d'une question est double : il faut se demander si le différend concret et tangible a disparu et, si c'est le cas, le tribunal doit-il exercer son pouvoir discrétionnaire et entendre l'affaire--Aucun différend concret et tangible n'oppose les parties en l'espèce--La demanderesse souhaitait présenter sa candidature et éventuellement être candidate aux élections fédérales de 2004, mais comme les élections fédérales ont eu lieu, la demanderesse n'a plus besoin d'un congé et la raison d'être du litige a disparu--La Cour peut néanmoins exercer son pouvoir discrétionnaire et entendre l'affaire si les circonstances s'y prêtent--Quant à l'exercice du pouvoir discrétionnaire, la Cour doit décider s'il existe un débat accusatoire, si la décision attaquée aura un effet concret sur les droits des parties et ne donnera pas lieu à un gaspillage des ressources judiciaires, et enfin, si un jugement risque de constituer un empiétement sur la fonction législative--Il y a débat contradictoire lorsque les parties ont débattu à fond et avec vigueur les questions soulevées--Les parties à la présente demande ont participé à un débat contradictoire et ont présenté leurs arguments avec détermination--La réparation sollicitée par la demanderesse n'a aucun effet pratique sur ses droits, étant donné qu'elle n'a plus besoin d'un congé pour les élections fédérales de 2004--La Cour peut décider de consacrer des ressources judiciaires à l'examen d'une affaire qui est de nature récurrente mais qui se prête mal à un examen judiciaire--La présente demande se prête mal à un examen judiciaire à cause des délais très stricts qui en marquent le contexte--Toutefois, d'autres affaires concernant une demande de congé en vue de se porter candidat ne se prêteront pas nécessairement mal à un examen judiciaire--La Cour peut également exercer son pouvoir discrétionnaire si la demande soulève une question qui touche l'intérêt public ou l'intérêt national--La présente affaire soulève certes des valeurs importantes mais la décision est très factuelle; elle vise le cas particulier de la demanderesse et ne touche pas concrètement l'intérêt public--Étant donné que la décision de la Cour n'aurait aucun effet concret pour la demanderesse ou pour le public, il n'est pas approprié de consacrer des ressources judiciaires à l'instruction de la présente demande--Il n'appartient pas à la Cour de prononcer une décision qui n'aura aucun effet concret sur les droits des parties et qui est de nature purement théorique--Même si l'affaire est théorique, le fond de l'affaire est abordé dans le cas où une telle analyse serait utile en appel--La norme d'examen appropriée est le caractère raisonnable simpliciter de la décision--La décision qui est examinée selon la norme de la décision raisonnable simpliciter ne doit être modifiée que si elle ne repose sur aucun motif capable de résister à une analyse assez poussée--Les motifs de la Commission ne résistent pas à une analyse assez poussée et ne sont pas justifiés par les preuves--La Commission a utilisé une méthode trop simpliste pour effectuer son analyse sur la possibilité que le congé du fonctionnaire nuise à la fonction publique--Bien que l'enquête doit être axée sur l'avenir puisqu'il s'agit de savoir si le retour du fonctionnaire dans son poste ne nuira pas à son efficacité, il n'est pas raisonnable que la Commission ait envisagé toutes les responsabilités que le fonctionnaire serait susceptible d'exercer à un moment donné, même si cela est peu probable--L'enquête doit être effectuée dans un contexte réaliste--La Commission aurait dû tenir compte des responsabilités qui auraient pu être attribuées à la demanderesse dans un avenir proche--La Commission ne pouvait pas se contenter de fonder sa conclusion sur le fait que la demanderesse occupait un poste ayant une visibilité publique importante pour la simple raison qu'elle était « susceptible » d'agir en tant qu'avocat principal dans des poursuites importantes, complexes ou de nature politiquement sensible--La Commission aurait plutôt dû effectuer une enquête plus globale pour déterminer s'il était probable que des dossiers de ce genre soient confiés à la demanderesse dans un proche avenir--La Commission n'aurait pas dû écarter la recommandation du sous-ministre d'accorder à la demande-resse un congé sans traitement--Les supérieurs de la demanderesse sont les mieux placés pour connaître l'étendue des responsabilités de la demanderesse et pour évaluer la visibilité de son poste, actuel ou futur--Il aurait été raisonnable que la Commission n'écarte la recommandation du sous-ministre qu'après avoir elle-même procédé à une enquête approfondie sur les responsabilités de la demanderesse--La décision est déraisonnable--La demande est théorique et sans objet; elle est donc rejetée--Loi sur l'emploi dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-33, art. 33(3).

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