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RELATIONS DU TRAVAIL

Il y trois questions en litige : demande de contrôle judiciaire présentée par le Syndicat des travailleurs en télécommuni-cations (STT) en vue d’obtenir l’annulation d’une ordonnance du Conseil canadien des relations industrielles (Conseil) par laquelle celui‑ci a rejeté une allégation de partialité visant le président et le Conseil; demande de contrôle judiciaire présentée par le STT qui tente de rétablir une ordonnance d’arbitrage obligatoire que le Conseil avait imposée pour régler les questions relatives à la convention collective opposant le STT et Telus Communications Inc. (Telus), ordonnance qui a été supprimée après réexamen; demande de contrôle judiciaire présentée par Telus pour obtenir l’annulation d’une ordonnance définitive du Conseil interdisant toute communication dans le but d’empêcher Telus d’entraver l’action du STT dans sa tâche consistant à représenter ses employés en général—Demandes rejetées— Des conflits de travail fort complexes opposent depuis longtemps les parties et ces conflits ont été compliqués par des fusions, des acquisitions, la décision quant à savoir qui serait l’agent de négociation unique, la scission des activités en deux volets—La convention collective signée par Telus et le STT a expiré en 2000 et depuis lors, les parties négocient une nouvelle convention collective—À la suite d’une plainte déposée par le STT, le Conseil a rendu, le 17 janvier 2004, une ordonnance provisoire de cesser et de s’abstenir après avoir constaté que le STT avait prouvé prima facie que Telus avait violé l’art. 94 du Code canadien du travail en communiquant avec les employés représentés par le STT—Le 28 janvier 2004, le Conseil a rendu une décision imposant l’arbitrage obligatoire (CCRI LD 1004)) dans laquelle il ordonnait à Telus d’offrir l’arbitrage obligatoire pour régler les clauses de la convention collective—En février 2004, Telus a demandé le réexamen de la décision imposant l’arbitrage obligatoire—En mars 2004, le STT a présenté une demande (demande de récusation) dans laquelle il alléguait que le président était partial et qu’il existait une crainte raisonnable de partialité à l’égard de l’ensemble des autres membres du Conseil—La demande de récusation a été rejetée en août 2004—Une demande de réexamen a été accueillie en février 2005 annulant la décision d’imposer l’arbitrage obligatoire, et rétablissant, avec modifications, l’ordonnance de non‑communication rendue le 17 janvier 2004—Décision relative à la récusation—Rejet de la demande de contrôle judiciaire de la décision de récusation visant le président parce qu’elle est devenue théorique, car le président ne faisait pas partie de la formation qui a prononcé la décision relative au réexamen—Toutefois, le président n’aurait pas dû écarter sommairement la preuve par ouï‑dire : Bande indienne Wewaykum c. Canada, [2003] 2 R.C.S. 259—Le président aurait dû déposer une déclaration—Il aurait été également prudent d’annoncer publiquement qu’il allait déléguer à quelqu’un d’autre le pouvoir de choisir les membres de la formation chargée du réexamen—Quant aux autres membres de la formation, le STT n’a présenté aucune preuve susceptible de répondre à la condition exigée en matière de partialité pour ce qui est de la formation chargée du réexamen et il se fonde uniquement sur la délégation de pouvoirs effectuée par le président pour fonder cette accusation contre la formation de trois membres—Accuser de partialité tous les membres du Conseil pour la raison qu’un des membres aurait fait certains commentaires sape la présomption d’impartialité et d’équité dont bénéficie chacun des membres du Conseil et compromet l’intégrité du Conseil tout entier—Enfin, le « principe de nécessité » interdit au Conseil de se déclarer inhabile à examiner à nouveau ses propres décisions, étant donné que le processus de réexamen est une fonction que le Code attribue au Conseil—De plus, en attendant (environ six mois), sans contester, les résultats de l’instruction de la demande de réexamen, le STT a renoncé à son droit de présenter des allégations de partialité à l’égard des membres de la formation chargée du réexamen—Décision relative au réexamen—En ce qui concerne la procédure utilisée par le Conseil pour réexaminer ses propres décisions et la capacité du Conseil d’infirmer ses décisions dans le cadre d’une demande de réexamen, la norme de contrôle applicable est celle de la décision manifestement déraisonnable— Contraire-ment à ce que prétend le STT, le Code ne contient aucune disposition obligeant le Conseil à siéger en formation plénière  Le Conseil n’a jamais siégé en formation plénière depuis 1999, année où le Code a été modifié—Le Conseil a suivi sa procédure habituelle, la décision de constituer une formation composée de trois membres n’était pas manifestement déraisonnable—De plus, le Conseil est le maître de sa propre procédure—Ordonnance imposant l’arbitrage obligatoire—Le Conseil n’a pas agi de façon manifestement déraisonnable lorsqu’il a infirmé son ordonnance imposant l’arbitrage obligatoire—Distinction faite d’avec l’arrêt Royal Oak Mines Inc. c. Canada (Conseil des relations du travail), [1996] 1 R.C.S. 369, qui fait autorité au sujet de la compétence du Conseil pour imposer des réparations comme l’arbitrage obligatoire—L’arbitrage obligatoire est l’exception plutôt que la règle parce qu’il va à l’encontre de la politique de la libre négociation collective qui sous‑tend le Code—Compte tenu de la complexité et de la durée du différend qui nous occupe, des conclusions de fait auxquelles en est arrivé le Conseil, du caractère extraordinaire d’une ordonnance imposant l’arbitra-ge obligatoire, ainsi que de la déférence dont le législateur entendait qu’on fasse montre à l’égard des décisions du Conseil et de l’importance du principe de la libre négociation collective, il ne convenait pas de modifier la décision qui a annulé l’ordonnance imposant l’arbitrage obligatoire—Les motifs formulés par le Conseil étaient logiques et se fondaient sur son expertise dans le domaine des relations de travail—La décision n’était pas manifestement déraisonnable— Ordonnance de non‑communication—En ce qui concerne la question de savoir si le Conseil a contrevenu à la Charte en émettant une ordonnance de non‑communication, la norme de contrôle est celle de la décision correcte; en ce qui concerne la question de savoir si le Conseil aurait dû prononcer une ordonnance de non‑communication, la norme de la décision manifestement déraisonnable s’applique—Bien que l’ordon-nance de non‑communication viole la liberté d’expression que lui garantit l’art. 2b) de la Charte, cette limitation pouvait se justifier en vertu de l’article premier de la Charte, car Telus a violé l’art. 94(1)a) du Code (lequel interdit à l’employeur de participer à la formation d’un syndicat ou à la représentation des employés, ou d’intervenir dans ces activités)— L’ordonnance de non‑communication constituait une limite raisonnable susceptible d’être imposée à l’employeur et une façon efficace de protéger le pouvoir exclusif que possède le syndicat de négocier une convention collective au nom de ses membres—L’ordonnance de non‑communication n’avait pas une portée trop large—Le Conseil a tenu compte à bon droit de la question du déséquilibre; rien de déraisonnable dans la conclusion à laquelle en est arrivé le Conseil sur cette question—Le Conseil avait le pouvoir de rendre une ordonnance interdisant la poursuite de cette pratique à l’avenir —La décision de rendre l’ordonnance de non‑communication n’était pas manifestement déraisonnable—Le Conseil n’était pas autorisé à présenter des arguments concernant le bien‑fondé de sa décision relative à la partialité, le bien‑fondé de sa décision de ne pas verser de renseignements factuels au dossier et le bien‑fondé de la décision relative au réexamen— Le Conseil a été autorisé à aborder de façon générale les autres questions soulevées par la présente espèce, notamment celles qui touchent sa compétence et la norme de contrôle—Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.‑U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44], art. 1, 2b)—Code canadien du travail, L.R.C. (1985), ch. L‑2, art. 94.

TELUS Communications Inc. c. Syndicat des travailleurs en télécommunications (A‑84‑04, A‑85‑04, A‑242‑04, A‑65‑05, A‑99‑05, A‑185‑05, A‑187‑05), 2005 CAF 262, juge Sexton, J.C.A., jugement en date du 25‑7‑05, 49 p.)

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