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PRATIQUE

Communications privilégiées

British Columbia Hydro & Power Authority c. CSL Cabo (Le)

T-1194-98

protonotaire Hargrave

31-12-99

12 p.

Action faisant suite à une panne d'électricité survenue après que le navire CSL Cabo eut endommagé le câble sous-marin de transport d'électricité de la demanderesse en jetant l'ancre dessus--La demanderesse a retenu les services d'avocat le lendemain de la panne d'électricité--L'avocat n'a pas immédiatement engagé la procédure parce qu'il savait, par l'expérience acquise dans un cas antérieur de panne d'électricité, qu'il faudrait un certain temps à B.C. Hydro pour effectuer les réparations puis documenter la demande de dédommagement--Dans les semaines qui suivirent, ses avocats ont demandé à B.C. Hydro un rapport en vue du litige éventuel--B.C. Hydro a demandé à son ingénieur de projet d'établir un rapport «pour archives et pour fins de contentieux»--Requête en communication de ce rapport--Application du critère de l'objectif principal pour examiner s'il est protégé par le secret professionnel--Ce critère a été adopté pour parvenir à un juste équilibre entre la pleine communication des pièces et la reconnaissance des prétentions légitimes au secret--Le précédent Bhadrachalam Paperboards Ltd. c. Philippine Victory (Le) (1991), 49 F.T.R. 211 (C.F. 1re inst.), où il était question des rapports d'expertise établis dans le cours normal de l'instruction de réclamations d'avarie après le déchargement de la cargaison, se différencie de l'affaire en instance où le rapport a été commandé par les avocats chargés du dossier--Dans Le Philippine Victory, la Cour s'attachait à la question de savoir si c'était en vue du procès que les rapports d'expertise avaient été établis--Y a été évoquée la cause Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. McPhail's Equipment Co., [1978] 1 C.F. 595 (C.A.), dans laquelle la demanderesse, déterminée à exproprier la défenderesse, avait fait évaluer le terrain avant de consulter ses avocats--Jugé que l'évaluation n'était pas protégée parce qu'au moment où elle eut lieu, il n'y avait aucune éventualité raisonnable de procès--Noté que rien n'indiquait que le service du contentieux de l'appelante était intervenu avant que l'expropriation ne fût déjà bien avancée--Au mieux, il y avait certaines indications que le CN considérait les expropriations comme potentiellement litigieuses, mais on ne pourrait parler de «raisonnable éventualité d'un procès» que si toutes les tentatives de règlement avaient échoué--Une expropriation, comme dans C.N. c. McPhail's Equipment où le seul litige véritable portait sur la valeur du terrain, est très différente d'un accident maritime qui donne lieu à de nombreuses questions litigieuses, dont celle de la responsabilité civile, et où la partie lésée retient les services d'un avocat pour aller voir l'autre partie et demander un cautionnement réel--Dans ce contexte maritime, il y a toutes les raisons de s'attendre à un procès--Très peu d'incidents touchant les câbles de transport d'électricité, pipelines et autres équipements sous-marins de ce genre sont réglés à l'amiable sans que la justice ait à intervenir, ne serait-ce que pour forcer la constitution d'un cautionnement ou pour assurer un tribunal où chaque partie peut contester les prétentions de l'autre--Le critère de l'objectif principal, exposé dans Jordan c. Towns Marine Electronics Ltd. (1996), 110 F.T.R. 22 (C.F. 1re inst.); conf. par (1996), 113 F.T.R. 226 (C.F. 1re inst.), reprend le critère défini par la Chambre des lords dans Waugh v. British Railways Board, [1980] A.C. 521 (H.L.)-- Certains lords juges y ont adopté, pour pierre de touche en matière de secret professionnel, le critère de l'objectif principal dégagé par la Cour d'appel d'Australie dans Grant v. Downs (1976), 135 C.L.T. 674, et qui est moins restrictif que celui du seul objectif qui était en vigueur jusque là--Le critère de l'objectif principal comporte deux conditions, l'une relative à l'objectif du rapport, l'autre étant la prévision ou possibilité raisonnable d'un procès au moment où le rapport est commandé--L'objectif principal peut être voulu soit par l'auteur du rapport soit par la personne qui l'a commandé--En commandant le rapport en question, les avocats entendaient principalement s'en servir comme outil en vue du litige--En dépit de la qualification ambiguë employée par l'ingénieur de projet, le rapport avait pour objectif principal d'éclairer les avocats en vue du litige à venir--S'il y a quelque doute sur l'objectif principal qui se dégagerait des instructions données par B.C. Hydro à son ingénieur de projet, c'est l'intention de ses avocats qui doit compter--Une contestation judiciaire était au moins une «éventualité raisonnable» au moment où le rapport fut commandé--Les deux conditions du critère de l'objectif principal étant remplies, le rapport en cause est protégé par le secret professionnel.

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