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DROIT MARITIME

Privilèges et hypothèques

Holt Cargo Systems Inc. c. Brussel (Le)

T-738-96

juge MacKay

11-2-00

54 p.

Demandes visant à l'obtention d'ordonnances de paiement des montants réclamés sur le produit consigné au greffe de la Cour à la suite de la vente du Brussel, au mois de juillet 1996, ainsi que des intérêts imputés à ce produit (le fonds)--Le Brussel avait été saisi en dehors du port de Halifax au mois de mars 1996 à la suite d'une action par laquelle la demanderesse réclamait le paiement des frais d'arrimage relatifs aux services fournis au navire aux États-Unis--On avait prononcé la faillite du propriétaire et de l'exploitant belges du navire en Belgique--Les défendeurs, qui avaient été désignés pour agir comme syndics de faillite en Belgique, avaient obtenu une ordonnance de la Cour supérieure du Québec, qui avait déclaré que l'ordonnance de faillite belge était exécutoire au Canada, et avaient demandé à prendre possession du navire à titre de bien du propriétaire aux fins de la liquidation et de la répartition du produit entre les créanciers--La demanderesse avait obtenu un jugement par défaut de la Cour fédérale du Canada dans l'action réelle intentée contre le navire, un jugement déclaratoire prévoyant le recouvrement du montant réclamé sur le produit de la vente et un jugement déclaratoire portant qu'elle détenait un privilège maritime garantissant le paiement des montants dûs, avec intérêts sur le solde impayé au taux de 7 p. 100--La question du rang de la créance avait été reportée à une date ultérieure--Une ordonnance prévoyait que les créanciers devaient déposer et étayer leurs réclamations contre le Brussel au plus tard au mois de septembre 1997--Le navire a été vendu pour la somme de 5 682 978 $--Le créancier hypothécaire réclamait un montant de 68 000 000 $ en vertu d'hypothèques enregistrées--La Cour avait rejeté la demande des syndicats visant à l'obtention d'une ordonnance portant que le produit de la vente devait être remis à ceux-ci, plutôt que d'être remis aux créanciers qui avaient présenté des réclamations contre le navire; une ordonnance avait été rendue, prévoyant que les créanciers garantis qui avaient présenté des réclamations contre le navire occuperaient le rang qui leur est assigné sous le régime du droit maritime tel que la Cour l'appliquait--Cette décision a été confirmée par la Cour d'appel fédérale, et l'autorisation de pourvoi a été accordée par la C.S.C. le 9-12-99--Eu égard aux circonstances qui existent maintenant, la Cour énoncera dans ses motifs de jugement ce sur quoi elle se fonde pour fixer les modalités de règlement des réclamations--À ce stade, la Cour ordonnera le paiement uniquement à l'égard des réclamations qui seraient reconnues quelle que soit l'issue de la cause devant la C.S.C.--La Cour n'ordonnera pas le paiement de la plupart des réclamations tant que la C.S.C. n'aura pas rendu sa décision et tant qu'un juge de la Cour n'aura pas rendu une ordonnance--Depuis que le navire a été saisi et vendu, des ordonnances ont été rendues aux fins du paiement de certaines sommes à valoir sur le produit en vue de permettre certains débours liés à la garde du navire, aux annonces et à la vente du navire ainsi que les débours se rapportant à la liquidation de la cargaison non réclamée--(A) Questions ou considérations générales--1) Privilèges d'origine législative et créances prioritaires reconnus sous le régime du droit maritime canadien--Tout créancier détenant un privilège canadien d'origine législative a priorité sur le produit comme le prévoit la législation pertinente--2) Privilèges maritimes qui ont pris naissance aux États-Unis--La plupart des créanciers soutiennent que les réclamations qui ont été présentées contre le Brussel se rapportent à des privilèges maritimes américains en vertu de la Commercial Instruments and Maritime Liens Act--Les privilèges maritimes fondés sur le droit américain sont reconnus et leur exécution peut être assurée par la Cour de la même façon qu'ils le sont sous le régime du droit américain: Todd Shipyards Corp. c. Altema Compania Maritima S.A., [1974] R.C.S. 1248--3) Navires frères et réclamations y afférentes--L'art. 43(8) de la Loi sur la Cour fédérale prévoit la présentation de réclamations contre les navires frères, mais selon la preuve qui a été fournie au sujet du droit étranger, les privilèges maritimes américains ne grèvent pas les navires frères--La disposition relative aux navires frères de la Loi sur la Cour fédérale ne peut pas être interprétée de façon à reconnaître aux titulaires de privilèges maritimes qui peuvent faire valoir une réclamation contre un navire le même rang que celui qui est assigné à un privilège maritime grevant un navire frère saisi au Canada, et ce, peu importe que les réclamations aient pris naissance au Canada ou à l'étranger--En l'absence de dispositions législatives, le rang spécial attribué aux privilèges maritimes ne peut pas être transmis aux navires frères--Les titulaires de privilèges maritimes grevant les navires frères du Brussel peuvent faire valoir leurs réclamations contre le Brussel en vertu de l'art. 43(8) de la Loi sur la Cour fédérale, mais leur statut n'est pas le même que celui des titulaires de privilèges maritimes traditionnels sur le navire--Les titulaires de ces privilèges maritimes ont un droit réel reconnu par la loi et occupent le même rang qu'un créancier qui peut faire valoir une réclamation réelle ordinaire contre un navire frère du Brussel--4) Taux d'intérêt applicables--Compte tenu des contrats, la loi provinciale s'applique aux intérêts avant jugement et la Loi sur les intérêts fédérale s'applique également--Pour assurer le traitement équitable des parties à l'égard des intérêts avant et après jugement, la Cour ordonnera que les sommes versées à tous les créanciers comprennent les intérêts fixés comme suit: si un taux est fixé par contrat, ce taux s'appliquera à compter de la date de la violation jusqu'au 24 juillet 1996, soit la date à laquelle le navire a été vendu; si aucun taux n'est fixé par contrat, le taux applicable, entre la date de la violation et le 24 juillet 1996, sera de 7 p. 100; en ce qui concerne toutes les réclamations, les intérêts qui seront payés entre le 24 juillet 1996 et la date du paiement le seront au taux imputés au fonds pendant qu'il était consigné au greffe de la Cour--5) Taux de change--Il est clairement établi en droit qu'en ce qui concerne les réclamations dont le montant est exprimé en monnaie étrangère, le taux de change applicable est celui qui était en vigueur à la date établie de la violation--Dans le cas des réclamations contractuelles, la date applicable serait la date à laquelle les comptes y afférents étaient dûs--En l'absence de preuve de la date, pour plus de commodité et afin d'assurer le traitement équitable des créanciers, les montants des réclamations exprimés en monnaie étrangère devraient être convertis en dollars canadiens au taux de change qui existait à la date de la vente du navire, le 24 juillet 1996, soit 1,37 dollar canadien pour un dollar américain--(B) Réclamations ayant en totalité ou en partie priorité sur les hypothèques grevant le navire--Réclamations canadiennes prévues par la loi--a) Société du port de Halifax--Les réclamations d'un montant de 2 448,47 $ pour les frais liés aux services fournis au Brussel à Halifax sont fondées sur un privilège maritime reconnu par la Loi sur la Société canadienne des ports; des intérêts au taux annuel de 18 p. 100 sont également réclamés jusqu'au 24 juillet 1996, les intérêts devant par la suite être payés au taux imputé au fonds consigné au greffe de la Cour, jusqu'à la date du paiement--Ces réclamations ont priorité--La Société du port de Halifax réclame également les montants qui lui sont dûs pour les services fournis aux navires qui seraient censément les navires frères du Brussel--La Cour peut uniquement faire droit à la réclamation si elle est conforme au droit qui s'applique ici à toutes les autres réclamations--La Société peut faire valoir une réclamation contre le fonds, mais elle vient après le créancier hypothécaire--b) Administration de pilotage de l'Atlantique--L'Administration revendique un privilège maritime prioritaire d'un montant de 2 197,38 $ sur le navire pour les services de pilotage--La jurisprudence reconnaît l'existence d'un privilège maritime ayant priorité sur les hypothèques grevant le navire--La réclamation contre le fonds pour les services fournis au navire frère vient après les hypothèques qui grèvent le navire--Privilèges maritimes américains--a) Holt Cargo Systems Inc.--La demanderesse a déjà obtenu un jugement par défaut lui accordant la somme de 527 128,06 $ avec des intérêts au taux annuel de 7 p. 100, le jugement renfermant une déclaration portant que le droit de Holt à l'égard de Brussel donne naissance à un privilège maritime--Le paiement a été suspendu en attendant la détermination du rang des créanciers et l'issue de l'appel interjeté contre l'ordonnance rendue par la Cour au sujet de la vente du navire--Les frais d'avocat associés à l'évaluation, aux annonces et à la vente du navire devraient être payés au moment où ils sont facturés, à valoir sur le fonds, et devraient avoir priorité sur l'hypothèque--b) Les approvisionnements nécessaires fournis au Brussel aux États-Unis donnent lieu à un privilège maritime qui a priorité sur les hypothèques--Les réclamations se rapportant aux marchandises et services fournis aux navires frères donnent lieu à des réclamations réelles prévues par la loi contre le Brussel, mais elles n'ont pas priorité sur les hypothèques--Les réclamations contre des navires autres que des navires frères ne peuvent pas être présentées contre le Brussel--Le créancier hypothécaire vient ensuite (68 100 000 $)--Puis viennent les autres réclamations, prenant rang après l'hypothèque (à l'égard desquelles il ne reste plus d'argent dans le fonds)--Halterm Ltd.--Réclamation pour les services fournis au Brussel dans le cadre de l'exploitation d'un terminal conteneurs ainsi que d'une installation d'amarrage et d'entreposage de conteneurs--En vertu du contrat passé entre Halterm et la Société du port de Halifax, Halterm verse à la Société les droits de quai et de débarcadère que les navires lui doivent habituellement directement--Les montants que Halterm a versés à la Société sont facturés aux navires par Halterm et les navires versent à cette dernière les montants facturés--Halterm ne peut pas avoir la même priorité que la Société étant donné qu'aucun élément de preuve ne laisse entendre qu'il existait une garantie ou que le droit de la Société de faire valoir ses réclamations au moyen d'un privilège sur les navires avait expressément été cédé--La fourniture du mazout au Brussel par Bridge Oil Ltd. en Belgique donne naissance à des «droits privilégiés» sous le régime du droit belge, mais non à un privilège maritime--La réclamation n'a pas priorité sur les hypothèques grevant le navire, puisqu'il n'a pas été établi qu'elle donnait naissance à un privilège maritime sur le navire--Les réclamations déposées par les locateurs de conteneurs en vertu d'ententes conclues avec ABC Containerline prévoyant l'existence d'un privilège contractuel contre les navires d'ABC n'occupent pas un rang spécial par rapport aux réclamations d'un tiers, et notamment par rapport au créancier hypothécaire--Certaines réclamations ont été présentées, mais elles n'ont pas été poursuivies à l'audience--Certains créanciers n'ont pas fourni de preuve au sujet du droit étranger--Certaines réclamations ont été présentées contre des navires autres que des navires frères--Certaines réclamations n'ont pas été prouvées et sont réputées avoir été abandonnées--Commercial Instruments and Maritime Liens Act, 46 U.S.C. §31342--Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 43(8).

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