Fiches analytiques

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CITOYENNETÉ ET IMMIGRATION

Exclusion et renvoi

Renvoi de résidents permanents

Ali c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)

IMM-2993-99

juge Gibson

20-7-00

23 p.

Contrôle judiciaire d'une décision de la section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut du réfugié, par laquelle elle accueillait l'appel du défendeur et ordonnait la délivrance d'une mesure de renvoi à l'encontre du défendeur --Le demandeur, un citoyen du Kenya, a reçu le statut de résident permanent au Canada en 1992--Lors d'un voyage d'affaires au Kenya en 1994, le demandeur a été impliqué dans une altercation avec deux hommes, au cours de laquelle l'un d'entre eux a été poignardé à mort par le demandeur--Le demandeur a été accusé de meurtre--Il est parti précipitamment du Kenya, suite aux craintes que lui inspiraient les pratiques policières du pays--Un rapport d'Amnistie internationale de 1995 indique que les suspects en matière criminelle au Kenya sont régulièrement torturés pour obtenir leurs confessions--Le demandeur a fait l'objet d'un rapport indiquant qu'il est un résident permanent au sens de l'art. 27(1)a.1)(ii), qui aurait commis un acte qui constitue une infraction dans le pays où il a été commis et qui, s'il était commis au Canada, constituerait une infraction qui pourrait être punissable d'un emprisonnement maximal égal ou supérieur à dix ans--Lors de l'enquête, l'arbitre a conclu que le demandeur n'était pas une personne décrite à l'art. 27(1)a.1)(ii); que les déclarations des policiers du Kenya n'étaient pas fiables parce que non signées et parce que les personnes les ayant souscrites n'ont pas été contre-interrogées; le renvoi pourrait se solder par l'imposition de la peine capitale--Suite à un appel sur une question de droit, le tribunal a repris l'audience pour entendre le témoignage du demandeur--La majorité a choisi de privilégier la version des événements que l'on trouve dans les déclarations non signées des témoins, de préférence à celle du demandeur--Elle a conclu que les déclarations non signées avaient été attestées par un témoin, bien que rien dans les déclarations mêmes n'indique que les originaux ont vraiment été signés, et certainement pas qu'ils auraient été signés devant un témoin--Elle ne voyait pas pourquoi il aurait été nécessaire de fuir le Kenya, bien que le rapport d'Amnistie internationale faisait partie du dossier du tribunal --La demande est accueillie suite à une erreur de droit au sujet du fardeau de la preuve--1) C'est le défendeur qui avait le fardeau de démontrer à l'arbitre que le demandeur est une personne décrite à l'art. 27(1)a.1)(ii)--Ce fardeau ne s'est pas déplacé lors de l'appel au tribunal--Le fardeau de la preuve en droit ne se déplace pas, même s'il peut être suspendu jusqu'à ce que la partie adverse se soit déchargée d'une autre obligation de preuve en vertu de la loi--La majorité a conclu que l'arbitre a utilisé le critère approprié pour examiner si le défendeur pouvait plaider la légitime défense, puisque «si ce dernier avait prouvé la légitime défense», son geste n'aurait pas été illégal--Ceci constitue une indication que la majorité aurait conclu à l'existence d'un fardeau conditionnel pour le demandeur--C'est le défendeur qui avait le fardeau de la preuve, y compris le fardeau de réfuter le plaidoyer de légitime défense--La majorité n'était pas convaincue que le demandeur «avait démontré, tout bien pesé, que sa version des faits correspond raisonnablement à ce qui s'est produit»--Le fardeau de prouver que sa version des faits était la plus vraisemblable n'incombait pas au demandeur, le défendeur devant démontrer, au vu de la prépondérance des probabilités, que la version des événements présentée par les policiers du Kenya était conforme à ce qui s'était produit--La majorité du tribunal a commis une erreur de droit en imposant au demandeur un fardeau qui ne lui incombait pas--2) L'appel porté au tribunal de la décision de l'arbitre donne lieu à un procès de novo--L'art. 72 de la Loi sur l'immigration autorise la section d'appel à rouvrir une enquête pour la réception d'autres éléments de preuve--On ne peut interpréter l'art. 72 pour lui faire dire que la section d'appel ne peut demander une nouvelle comparution d'une personne qui a témoigné devant l'arbitre--La règle 39 des Règles de la section d'appel de l'immigration autorise la section d'appel à prendre les mesures voulues pour assurer une instruction approfondie de l'affaire et le règlement expéditif des questions qui lui sont soumises--La démarche de la section d'appel de citer le demandeur à témoigner devant elle était de sa compétence--Le fait que l'appel n'ait porté que sur une question de droit ne restreignait pas le pouvoir discrétionnaire de la section d'appel d'assurer une instruction approfondie--La majorité du tribunal pouvait raisonnablement arriver à sa conclusion au sujet de la crédibilité, car elle avait entendu le témoignage du demandeur et observé son comportement--3) Le plaidoyer de légitime défense fait partie de la décision à prendre quant à savoir si l'acte commis par l'accusé était illégal et n'est pas une question à part à régler après une conclusion que l'acte commis par l'accusé était illégal: R. c. Baker (1988), C.C.C. (3d) 368 (C.A.C.-B.)--La majorité s'est d'abord demandée si l'acte du demandeur était illégal, avant d'examiner la légitime défense comme une question à part--Le fait que le principe de droit énoncé dans R. c. Baker n'a pas été appliqué correctement ne met rien d'essentiel en cause--4) La majorité semble ne pas avoir tenu compte de la preuve convaincante qu'on lui a présentée en provenance d'Amnistie internationale, expliquant pourquoi le demandeur avait senti le besoin de fuir le Kenya--L'erreur ne va pas au coeur de la décision et ne donne pas droit au contrôle--Le tribunal était saisi d'une mince preuve d'expert au sujet de la blessure mortelle, mais il a conclu que la blessure semblait avoir été causée intentionnellement plutôt qu'accidentellement--Le fardeau de cette preuve incombait au défendeur--En l'absence de cette preuve, les spéculations du tribunal au sujet de la blessure mortelle, à savoir si elle avait été infligée accidentellement ou intentionnellement, constituent une erreur de droit--Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, art. 27(1)a.1)(ii) (mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 16), 72 (mod. par L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 28, art. 18)--Règles de la section d'appel de l'immigration, DORS/93-46, règle 39.

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