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Entreprises Ludco Ltée c. Canada

T-742-93

juge Lutfy

9-12-97

41 p.

Appels par voie de procès de novo d'une décision de la Cour canadienne de l'impôt qui confirme les nouvelles cotisations aux termes desquelles la déduction de frais d'intérêt est refusée-Entre 1977 et 1979, les demandeurs ont emprunté la somme de 6 500 000 $ et ont investi 7 500 000 $ dans l'acquisition d'actions de sociétés de placement non résidantes (Justinian Corp. S.A. et Augustus Corp. S.A., deux sociétés panaméennes) dont l'activité consistait à investir dans des valeurs à revenu fixe libellées en dollars canadiens et américains-Les demandeurs ont engagé des frais d'intérêt de 6 000 000 $ et ont touché des dividendes de 600 000 $-Les demandeurs ont déduit les frais d'intérêt des autres revenus déclarés pour les années d'imposition 1981 à 1985 en tenant pour acquis que (1) les dividendes constituaient un revenu tiré d'une entreprise ou d'un bien au sens de l'art. 20(1)c)(i), le critère applicable étant lié au revenu, et non au profit ou au revenu net et que (2) même si le critère applicable est la réalisation d'un profit, en 1977, les demandeurs avaient une expectative raisonnable que (i) le montant des dividendes dépasserait un jour celui des frais d'intérêt ou que (ii) les dividendes, jumelés aux gains réalisés à la disposition, permettraient de réaliser le profit qui, dans les faits, a été dégagé-La défenderesse soutient que l'objet véritable de l'investissement des sommes empruntées par les demandeurs était de permettre à Justinian d'accumuler ses bénéfices, de sorte que, lors de la disposition subséquente des actions, les profits réalisés soient imposés à titre de gains en capital uniquement-Les sommes empruntées n'ont pas servi à tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien, et les demandeurs n'ont jamais eu une expectative raisonnable de profit à l'égard des versements de dividendes-En réponse à la prétention de la défenderesse selon laquelle les investissements ont été effectués à la seule fin de réaliser un gain en capital, les demandeurs font valoir que leurs opérations ne peuvent être assimilées qu'à un risque de caractère commercial et que les frais d'intérêt sont déductibles parce qu'ils ont été engagés à l'égard de prêts qui ont servi à produire un revenu d'entreprise-Appels rejetés-Les principaux objectifs de Justinian étaient le report de l'impôt et l'épargne fiscale grâce, essentiellement, au réinvestissement des bénéfices et au rachat des actions lors de la disposition-Justinian devait être constituée au Panama et gérée à l'extérieur du Canada et des États-Unis, de façon que ses revenus et ses profits ne soient pas imposés dans ces pays-Son conseil d'administration devait être constitué principalement de non-résidents-Lorsque, en 1976, les dispositions de la Loi concernant le revenu étranger accumulé, tiré de biens (RÉATB) sont entrées en vigueur, des mesures ont été prises pour empêcher leur application (la participation de chacun des investisseurs dans Justinian devait être inférieure à 10 % du capital-actions)-L'autre objectif principal était de réduire l'impôt exigible lors de la disposition des actions par les actionnaires de Justinian: le produit de la disposition des actions par les actionnaires canadiens, par voie de vente ou de rachat, serait imposé à titre de gain en capital-En ce qui concerne la politique de dividendes de Justinian, la note explicative révèle qu'elle consistait à déclarer un dividende annuel de 1 $ US, ce qui a été le cas dès 1978, tout au long de son existence-Selon la preuve, les demandeurs n'auraient pas emprunté pour investir dans Justinian s'ils avaient su que les frais d'intérêt n'étaient pas déductibles du revenu-M. Ludmer, l'un des demandeurs, ne peut simplement faire fi de la politique de dividendes et dire qu'il s'agit de verbiage-Le litige résulte en grande partie de l'information donnée dans la note explicative, laquelle résume les principales caractéristiques établies dans les documents de planification-De 1978 à 1985, les frais d'intérêt supportés par les demandeurs ont été supérieurs au revenu versé chaque année par Justinian-Rien ne prouve que l'intention initiale de M. Ludmer était de détenir les actions jusqu'en 1985 ni même par la suite-La preuve relative aux attentes des demandeurs devient encore plus spéculative et moins pertinente dans la mesure oú la demanderesse Les Entreprises Ludco Ltée était disposée à effectuer un investissement entièrement financé par voie d'emprunt à hauteur de 1 400 000 $ en décembre 1980, lorsque les taux d'intérêt avaient doublé par rapport à 1977-Les principaux objectifs de Justinian, le report de l'impôt et l'épargne fiscale, devaient être atteints essentiellement grâce au réinvestissement de la plus grande partie des bénéfices et au rachat des actions lors de la disposition, et non par le versement de dividendes-Selon la preuve, les demandeurs ne s'attendaient pas à ce que les dividendes compensent les frais d'intérêt-En fait, le taux de rendement des actions a chuté constamment-Les demandeurs n'avaient aucune expectative de profit dans la mesure oú ils ne se sont jamais attendus à ce que le montant des dividendes dépasse celui des frais d'intérêt-L'investissement devenait profitable lors de la disposition des actions-Comme signalé dans l'arrêt Bronfman c. La Reine, [1987] 1 R.C.S. 32, l'intérêt sur les emprunts utilisés à des fins non productives de revenu, comme la réalisation de gains en capital, n'est pas déductible-La fin poursuivie en l'espèce était le report de l'impôt par l'accumulation des bénéfices et l'assimilation du profit réalisé lors de la disposition des actions à un gain en capital-La fin véritable de l'utilisation des fonds empruntés n'était pas de toucher un revenu de dividendes-Enfin, lors de la souscription des actions, les demandeurs ont fait valoir que l'acquisition était faite à des fins de placement; les demandeurs, dans le cadre de ces investissements, n'exerçaient pas une activité liée à un risque ou à une affaire de caractère commercial-Loi de l'impôt sur le revenu, L.C. 1970-71-72, ch. 63, art. 20(1)c)(i).

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