Fiches analytiques

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Canadien Pacifique Ltée c. Bande indienne de Matsqui

A-391-96

juge Décary, J.C.A.

2-7-98

37 p.

Appels d'une ordonnance infirmant les avis d'évaluation foncière au motif qu'ils outrepassent le pouvoir de taxation conféré aux bandes indiennes intimées ([1996] 3 C.F. 373)-Le CN détient des certificats provinciaux de titre incontestable sur ces terres se fondant sur les lettres patentes délivrées par la Couronne du chef du Canada-Les lettres patentes ont été délivrées après que le gouverneur en conseil eut approuvé la cession des terres ou la prise obligatoire des terres autorisée par des ordonnances rendues aux termes de la Loi sur les Indiens-Pour chacune des trois parcelles de terrains prises, l'approbation du conseil de bande avait été demandée et obtenue-L'art. 83(1)a) de la Loi sur les Indiens autorise les conseils de bande à prendre des règlements administratifs pour l'imposition de taxes sur les immeubles situés dans la réserve-Les compagnies de chemin de fer contestent la validité des avis d'évaluation sur les biens immeubles qui ont été émis au nom de plusieurs bandes indiennes relativement à des terres détenues par les compagnies et comprenant les plates-formes de chemin de fer, les gares et d'autres terres-La question était de savoir si les terres en question sont situées «dans la réserve»-L'accent devrait être placé sur ce qui était, dans le contexte des opérations considérées dans leur ensemble, l'objet véritable de ce que recherchaient les bandes et la Couronne à l'époque-Les concepts de fief simple et de servitude sont rejetés-La Cour doit rechercher «l'objet de l'opération»-Lorsque la cession d'une partie d'une réserve est en cause, la Cour doit déterminer si la nature de la cession et le contexte dans lequel elle a été faite montrent bien que l'intention véritable de la bande était de se départir des terres en cause de façon absolue-Lorsque la prise de possession obligatoire d'une partie d'une réserve est en cause, la Cour doit être convaincue que l'intention de la Couronne d'éteindre le titre indien dans la parcelle prise est claire et expresse-Quand l'approbation de la bande a été demandée et obtenue avant la prise de possession, la Cour doit être convaincue que la bande comprenait bien l'étendue du droit auquel elle acceptait de renoncer-Peu d'importance a été accordée aux certificats de titre incontestable pour déterminer quelle était l'intention véritable des bandes au moment des prises de possession parce qu'ils ont été délivrés après le fait par les autorités provinciales-La Cour a par ailleurs accordé de l'importance aux lettres patentes qui ont été délivrées parce qu'elles renferment certains détails (par exemple le prix versé) qui complètent les arrêtés en conseil et qui reflètent les discussions qui ont eu lieu et les ententes qui ont été conclues-Afin de déterminer la nature et l'étendue du droit d'une compagnie de chemin de fer sur les terres des réserves, il faut examiner le texte des lois, toutes les ententes entre les parties initiales, ainsi que les actions et déclarations subséquentes des parties-Par suite des modifications apportées en 1988 à l'art. 83(1)a), les terres cédées sont demeurées dans la réserve lorsque la cession était analogue à un bail ou «à d'autres formes limitées de cession, comme un droit de passage» et elles ne faisaient plus partie de la réserve lorsque la cession était analogue à une vente ou à «d'autres formes de cessions permanentes, comme l'échange ou le don»-Les modifications de 1988 ne traitaient que des cessions faites en vertu des art. 37 et 38 de la Loi-Elles ne traitaient pas des prises de possession obligatoires faites en vertu de l'art. 35-Il n'est fait nulle part référence à la taxation possible par les bandes indiennes de terres utilisées pour le chemin de fer qui ont été prises par la Couronne et qui sont détenues par les compagnies de chemin de fer-La principale préoccupation des bandes et des gouvernements était de s'assurer que les pouvoirs de gouvernement local des conseils de bandes seraient étendus aux «terres louées»-Comme les bandes indiennes ne peuvent pas à toutes fins pratiques «gérer effectivement» les parcelles de terre prises et utilisées par les compagnies de chemin de fer, elles n'ont pas prévu en 1988 la possibilité d'exercer au regard de ces terres des pouvoirs de gouvernement local, notamment le pouvoir de taxation-Il est clair et manifeste que les bandes indiennes ne s'attendaient véritablement pas à ce que le nouveau régime fiscal leur permette de taxer les terres du chemin de fer-Pour ce qui a trait aux terres cédées, «l'intention véritable des parties» était clairement de céder les terres à la Couronne pour les vendre au CN-Les termes utilisés, le prix versé, le caractère durable du chemin de fer pour la construction duquel la cession a été consentie font manifestement foi d'une intention de se départir des terres utilisées pour le chemin de fer de façon absolue-Même si le CN avait demandé un droit de passage à travers la réserve, l'expression «droit de passage», dans le contexte duquel elle a été utilisée, décrit simplement les terres prises et ne qualifie pas le droit consenti sur les terres qui ont été cédées-L'expression a été utilisée pour définir précisément quelles terres étaient prises; elle n'a pas été utilisée pour décrire à quel droit la bande consentait à renoncer sur cette terre-L'expression a été utilisée dans tous les documents dans le contexte d'une vente ferme-L'art. 35 de la Loi sur les Indiens appuie également la conclusion que ce qui était envisagé par la Couronne, par la bande et par le CN participait davantage de la nature d'une vente que de la nature d'une servitude-Des statuts différents doivent être reconnus en droit aux «droits de passage» qui exigent le droit exclusif d'utiliser et d'occuper les terres des réserves, par exemple pour les chemins de fer, et les «droits de passage» oú l'usage exclusif des terres n'est pas exigé, par exemple pour les services d'utilité publique-Le droit de passage cédé en l'espèce appartient manifestement à la première catégorie-En cédant les terres, la bande comprenait pleinement qu'elle ne pourrait plus utiliser et occuper cette partie de sa réserve-Même si les terres ont été obligatoirement prises plutôt que cédées, il ne fait pas de doute, si l'on examine les textes d'origine législative et la preuve documentaire, que toutes les parties comprenaient que le résultat final serait le même que s'il s'était agi d'une cession-Les bandes savaient, comprenaient et ont accepté qu'elles n'auraient plus «l'usage ou le profit» des terres cédées ou qui leur ont été prises pour la construction du chemin de fer; que ces terres ne faisaient plus partie de leur réserve, qu'à toutes fins pratiques elles ne pouvaient plus effectivement exercer leurs pouvoirs de gouvernement local sur ces terres ni prendre des règlements administratifs, y compris des règlements de taxation, au sujet de ces terres-Appels rejetés-Loi sur les Indiens, L.R.C. (1985), ch. I-5, art. 35, 37 (mod. par L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 17, art. 2), 38 (mod., idem), 83(1)a) (mod., idem, art. 10).

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.