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Community Before Cars Coalition c. Commission de la capitale nationale

T-1830-96 / T-2481-96 / T-2865-96 / T-2886-96

juge Muldoon

7-8-97

81 p.

Demande de contrôle judiciaire de quatre décisions que la Commission de la capitale nationale (CCN) concernant le projet établi par la CCN en vue d'élargir le pont, qui enjambe la rivière des Outaouais, de deux à trois voies, dans le cadre de réparations importantes et nécessaires-Après des études préliminaires, la CCN a retenu les services d'une société d'expertsconseils en 1994 en vue d'étudier la faisabilité des exigences de conception fonctionnelle relatives à la remise en état et à l'élargissement du pont Champlain-L'étude a été menée conformément au Décret sur les lignes directrices visant le processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement (le Décret sur les lignes directrices) et à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale-L'ébauche d'attributions, préparée par la CCN, a été remise à divers groupes, dont la requérante-Le personnel de la CCN a mis la dernière main aux attributions après avoir reçu des commentaires sur leur version préliminaire en janvier 1995-La participation et la consultation du grand public étaient destinées à être un élément important de cette étude-La première étape devait servir à définir la nécessité et la justification de la reconstruction dans le contexte des besoins de transport interprovinciaux-La seconde étape de cette initiative devait servir à évaluer d'autres moyens de régler les besoins et les problèmes relevés à la première étape, ainsi qu'à recommander l'option privilégiée-Le comité consultatif public (CCP) a tenu six réunions au cours de l'étude-Des représentants de tous les niveaux de gouvernement et d'organismes de réglementation ont participé-La société d'experts-conseils a procédé à une étude subsidiaire intitulée Champlain Bridge Reconstruction Option Reassessment (Reconstruction du pont Champlain-Réévaluation des options), qui a pris fin en avril 1996, dans laquelle cinq options à deux voies et six à trois voies ont été relevées-Dans le rapport définitif de juin 1996, il a été tenu compte de quatre grands facteurs: le milieu naturel, le milieu social, les transports et les coûts-C'est la méthode dite de comparaison-élimination qui a été retenue pour analyser les facteurs-Compte tenu de la recommandation de la société d'experts-conseils, la CCN a préparé un rapport dans lequel elle a recommandé l'option à trois voies-Par une majorité de six contre quatre, les commissaires de la CCN ont adopté la recommandation du personnel comme étant «l'intention de décision» de la CCN et l'ont communiquée au public pour que celui-ci puisse faire part de ses commentaires-L'évaluation environnementale a mené à une détermination selon laquelle les effets néfastes que la proposition pourrait avoir sur l'environnement étaient minimes ou pourraient être atténués par l'application de mesures techniques connues-Le public a également été informé de cette décision pour qu'il puisse faire part de ses commentaires-Un rapport supplémentaire a été rédigé par la société d'experts-conseils afin de remédier aux problèmes signalés par la requérante-Le personnel de la CCN a établi un autre rapport dans lequel l'option recommandée a de nouveau été celle d'un pont à trois voies, mais cette fois-ci, d'une largeur d'un mètre de moins-En septembre 1996, les commissaires de la CCN ont voté, à sept contre cinq, en faveur de l'adoption des recommandations présentées dans le rapport modifié du personnel sur la reconstruction, ainsi que l'additif s'y rapportant, comme étant une «intention de décision»-Dans son analyse de préoccupations publiques, le personnel de la CCN a recommandé que les commissaires de la CCN décident de ne pas soumettre le projet à une commission d'examen public, au motif qu'il y avait peu de chances que le fait qu'une commission procède à un examen public de l'évaluation procure, au sujet de la proposition ou des solutions de rechange à cette dernière, de nouvelles informations importantes dont ne disposent pas déjà les décisionnaires-Le 15 octobre 1996, les commissaires de la CCN se sont rencontrés et, à neuf contre quatre, ont pris la décision définitive de faire reconstruire le pont sous la forme d'un pont à trois voies, mais fonctionnant comme un pont à deux voies jusqu'à ce que la Municipalité régionale d'Ottawa-Carleton et la Communauté urbaine de l'Outaouais puissent s'entendre, de pair avec la CCN, sur le choix définitif d'un pont à deux ou à trois voies; si la CCN et les deux administrations municipales ne parvenaient pas à s'entendre avant le 15 octobre 1997, la CCN étudierait et trancherait la question-Les questions soulevées dans ces demandes se répartissent comme suit: 1) la CCN a-t-elle compétence pour ajouter une troisième voie au pont Champlain?; 2) l'une quelconque des décisions est-elle entachée de partialité en raison d'un présumé conflit d'intérêts personnel de la part du président de la CCN?; 3) l'«intention de décision» de septembre 1996 a-t-elle été établie sur la base de renseignements inexacts, non objectifs et incomplets? 4) la CCN s'est-elle conformée aux art. 12 et 13 du Décret sur les lignes directrices?-Demandes rejetées-1) Compétence-L'arrêt prépondérant sur la compétence de la CCN est Munro v. National Capital Commission, [1966] R.C.S. 663-La réponse se trouve dans la Loi sur la capitale nationale et le Plan d'utilisation des terrains fédéraux (PUTF)-La compétence de la CCN pour transformer le pont Champlain en une structure à trois voies est clairement ancrée dans les art. 10 et 11 de la Loi-Le PUTF confère clairement à la CCN les pouvoirs appropriés-Le dossier ne comporte aucun élément de preuve qui donne le moindrement à penser que l'ajout d'une troisième voie, réservée aux véhicules à plusieurs occupants dans un sens, modifierait le caractère de la promenade de l'Outaouais, laquelle assure l'accès au pont Champlain, au point de mettre en péril l'équilibre établi par le plan entre ce qui est utile et ce qui est esthétique-2) Partialité-Le président de la CCN avait des intérêts (détenus, depuis 1993, par son épouse) dans des terrains d'une superficie d'environ 1 000 acres, situés à un peu plus de 3 km de l'extrémité nord du pont-En ce qui concerne le critère applicable en matière de partialité, la CCN se situe à l'extrémité de l'échelle qui concerne l'élaboration des politiques-Le président a divulgué tous ses intérêts conformément aux exigences du Code et, suivant l'avis du conseiller en éthique, il s'est retiré de toutes les délibérations et décisions relatives au pont Champlain-Il n'existe aucune preuve établissant que le président a influencé les commissaires lors de la prise des décisions-Il n'existe aucune preuve qui permettrait à la Cour d'inférer que la présence de la personne visée à titre de président de la CCN pendant les quatre années précédentes a eu une incidence quelconque sur les commissaires au moment oú ceux-ci ont pris les décisions-Une personne bien renseignée et raisonnable ne pourrait pas conclure que le président a été influencé, consciemment ou non, par les intérêts de propriétés qu'il possède (et qui appartiennent aujourd'hui à son épouse) dans l'exercice de ses fonctions officielles-Il est ressorti de la preuve que le président n'avait rien à gagner d'un élargissement du pont-Il n'existe aucune preuve que le président a influencé le personnel de manière telle qu'un pont à trois voies a été proposé comme étant la meilleure solution-Il n'existe pas de preuve que l'issue du processus de planification d'ensemble a été fixée à l'avance ni que le personnel de la CCN et les commissaires avaient l'esprit fermé-Rien dans le dossier ne montre qu'il n'y avait pas de motifs raisonnables pour prendre les décisions-Le personnel n'a fait montre d'aucune partialité, appréhendée ou non-3) La légalité de l'«intention de décision» de septembre 1996: reposait-elle sur des renseignements objectifs, minutieux et complets?-La décision n'est pas théorique, même si elle a été suivie d'une décision définitive-La décision de septembre constituait un point de jonction critique dans le processus-Les renseignements réunis pour le décisionnaire en l'espèce étaient minutieux, complets et objectifs-La société d'experts-conseils a convenablement traité de l'obligation d'assurer une gestion efficace de la circulation-4) La CCN s'est-elle conformée aux exigences des art. 12 et 13 du Décret sur les lignes directrices?-Le processus de consultation publique a satisfait au critère nécessaire en l'espèce, car il a été utile et complet-L'on ne s'attendait pas de façon légitime à ce qu'une méthode particulière soit utilisée-Les attributions relatives à l'évaluation laissaient à la société d'experts-conseils le soin de choisir l'une ou l'autre méthode-Il n'y a pas eu de manquement à une expectative légitime, car ni la CCN ni la société d'experts-conseils n'ont promis que l'on recourrait à la méthode de pondération-Aucune expectative légitime n'a été créée-La seule promesse faite était que le public participerait à l'étude en faisant des commentaires-Aucune preuve n'étaye la prétention de la requérante que le projet a été «partagé» pour permettre la modification ultérieure de l'intersection de la promenade Island Park-La CCN n'a pas commis d'erreur lorsqu'elle a décidé, en exécution de l'art. 12c) du Décret sur les lignes directrices, que la proposition aurait des effets minimes ou qui pourraient être atténués-La décision des commissaires de ne pas soumettre la proposition à une commission en vue de la tenue d'un examen public était parfaitement légale, car elle a été prise de bonne foi en tenant compte des facteurs pertinents, eu égard aux objets du Décret sur les lignes directrices-Le personnel de la CCN a formulé sa recommandation sur la foi de toutes les réponses du public qu'elle a reçues au sujet de la proposition-Aucune préoccupation n'a été ignorée ou mise de côté-Il n'existe aucune preuve que les commissaires se sont fiés à des questions dénuées de pertinence-L'argument que la décision finale sur la reconstruction était illégale parce qu'elle différait censément la décision véritable n'est pas fondé-Au vu de l'ensemble des éléments de preuve, l'évaluation a eu lieu à un stade oú il était possible de tenir entièrement compte des effets sur l'environnement-Décret sur les lignes directrices visant le processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement, DORS/84-476, art. 12, 13-Loi sur la capitale nationale, L.R.C. (1985), ch. N-4, art. 10 (mod. par L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 45, art. 3), 11-Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, L.R.C. (1985), ch. C-15.

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