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Canada c. Cragg & Cragg Design Group Ltd.

T-2942-94

protonotaire Hargrave

22-7-98

16 p.

La défenderesse réclame le rejet de l'action (appel d'une décision par laquelle le Tribunal canadien du commerce international (le Tribunal du commerce) a annulé une cotisation du MRN) pour cause d'inaction ou de défaut de poursuivre-La requête est accueillie-Compte tenu de l'ensemble des circonstances, la demanderesse s'est rendue coupable d'un retard excessif et inexcusable, de même que d'un préjudice d'ordre commercial-Qui plus est, comme les présomptions sur lesquelles la demanderesse se fonde sont complètement fausses (en estimant que la charge de la preuve repose sur la défenderesse et que celle-ci se trouve dans la position d'un demandeur et qu'elle a de ce fait l'obligation de faire avancer l'action), la Cour est forcée de conclure que la demanderesse n'a pas réellement l'intention ou la volonté de faire avancer l'action-La défenderesse a construit sur un bien-fonds un complexe domiciliaire intégré appelé Illahee-Illahee est un grand ensemble intégré linéaire, plutôt qu'une tour d'habitation massive-Il est toutefois enregistré comme un immeuble en copropriété de la même façon qu'un ensemble résidentiel en copropriété-La viabilité d'Illahee dépendait dans une large mesure du remboursement de la taxe de vente (50 % ou 75 %, selon l'état d'avancement des travaux de construction du grand ensemble au 1er janvier 1991)-Après s'être renseignée auprès de Revenu Canada, la défenderesse a cru comprendre qu'elle obtiendrait un remboursement de 75 % (427 237,50 $), si elle avait terminé 50 % du coût des travaux de l'ensemble du projet-Au 1er janvier 1991, la défenderesse avait achevé 55 % du coût des travaux et elle a réclamé un remboursement-Revenu Canada lui a accordé un remboursement uniquement pour les parties privatives du grand ensemble dont la construction était achevée-En d'autres termes, il lui fallait avoir achevé 50 % des travaux de chaque immeuble composant le grand ensemble au lieu de 50 % du grand ensemble au complet-En mai 1991, la défenderesse a déposé un avis d'opposition, qui a été rejeté 22 mois plus tard-L'appel interjeté de cette décision devant le Tribunal du commerce a été accueilli en octobre 1993-Sa Majesté a interjeté appel juste avant l'expiration du délai d'appel, en décembre 1994-La thèse de la défenderesse, qui repose sur le fait que la présente instance est un appel interjeté sous forme de nouveau procès d'une décision rendue par le Tribunal du commerce et que le contribuable se trouve dans la position d'une demanderesse, est mal fondée-Bien que le contribuable doive effectivement présenter sa preuve au début de l'instruction, cette obligation ne transforme pas pour autant le contribuable en partie demanderesse, pas plus que l'inversement ou le déplacement du fardeau de la preuve ne fait d'un demandeur un défendeur ou d'un défendeur un demandeur ou n'inverse les rôles que chacun doit jouer pour faire instruire l'action-C'est l'ancienne Règle 440, qui énonçait les règles régissant le rejet d'une action pour défaut de poursuivre (péremption d'instance), qui s'applique-Pour obtenir gain de cause, le défendeur doit démontrer qu'il y a eu un retard excessif qui est susceptible de lui causer un grave préjudice-C'est au demandeur qu'il incombe d'invoquer une excuse acceptable pour expliquer le retard-Ce critère est énoncé dans les arrêts Allen v. Sir Alfred McAlpine, [1968] 2 Q.B. 229 (C.A.) et Birkett v. James, [1978] A.C. 297 (H.L.)-La présente affaire n'est pas complexe-On aurait dû depuis longtemps faire les diligences nécessaires pour la faire instruire-En l'espèce, la défenderesse a subi un préjudice d'ordre économique et sa capacité de faire des affaires a été sérieusement entravée en raison de l'incertitude découlant de l'inaction de la demanderesse-L'action devrait être rejetée non seulement pour défaut de poursuivre, mais également pour cause de retard injustifié et de défaut d'intention de procéder selon les principes posés par la Chambre des lords dans l'arrêt Grovit v. Doctor, [1997] 1 W.L.R. 640-La Cour fédérale peut fort bien appliquer les Règles de 1998 de manière à reconnaître qu'un mépris total des Règles et des délais fixés par les Règles constitue un abus de procédure et que l'inaction, comme celle qui s'est produite en l'espèce, constitue un motif distinct permettant de rejeter une action sans qu'il soit nécessaire de faire la preuve d'un préjudice ou de démontrer qu'un procès équitable n'est plus possible-La seule autre considération qui pourrait entrer en ligne de compte, lorsqu'on est en présence d'une inaction pure et simple, est celle de savoir s'il est juste de rejeter l'action-La Cour peut toutefois se demander si cette mesure serait juste envers les autres justiciables qui souhaitent faire valoir leur point de vue devant la Cour, envers la Cour elle-même, qui doit tâcher d'administrer la justice équitablement avec des ressources limitées, et envers le contribuable, qui doit payer la note en cas de retards inutiles-Règles de la Cour fédérale, C.R.C., ch. 663, Règle 440-Règles de la Cour fédérale (1998), DORS/98-106.

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