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ENVIRONNEMENT

Environmental Resource Centre c. Canada (Ministre de l'Environnement)

T-274-99, T-1799-99, T-100-00

2001 CFPI 1423, juge Heneghan

20-12-01

66 p.

Les demandeurs, des groupes de défense de l'intérêt public ayant pour objectif de promouvoir la protection de l'environnement et la gestion profitable des ressources naturelles, présentent trois demandes de contrôle judiciaire à l'encontre d'un vaste projet d'exploitation de sables bitumineux (Projet Millennium) entrepris par Suncor Energy Inc. dans le nord de l'Alberta--Ils contestent la légalité de la décision prise par le ministre de l'Environnement en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale (LCEE) et de la décision prise par le ministre des Pêches et des Océans (MPO) de délivrer les autorisations prévues par la Loi sur les pêches qui doivent permettre à Suncor de détériorer ou de détruire l'habitat du poisson pour la construction et l'exploitation du projet--Le ministre de l'Environnement de l'Alberta a obtenu l'autorisation de participer à titre d'intervenant vu le rôle important qu'a joué le Ministère albertain dans le processus réglementaire global utilisé par la province de l'Alberta pour contrôler l'exploitation et le développement des ressources naturelles dans la province, y compris l'exploitation des sables bitumineux--Suncor devait soumettre une demande officielle d'examen et d'approbation à Alberta Environment en vertu de la Environmental Protection and Enhancement Act (EPEA) et à l'Alberta Energy and Utility Board (l'office) en vertu de la Oil Sands Conservation Act--Suncor a préparé une seule évaluation d'impact sur l'environnement (EIE) au soutien de la demande relative au Projet--L'office a tenu une audience publique-- Suncor a obten u deux approbations à la suite du processus suivi en Alberta qui ont été délivrées par l'office et par Alberta Environmental Protection (AEP)--L'office s'est dit convaincu que si Suncor et toutes les autres compagnies exploitant les sables bitumineux de la région continuaient de participer à la stratégie régionale de développement durable (SRDD) et à l'initiative de gestion des effets cumulatifs sur l'environnement (IGECE), ces initiatives pourraient s'avérer suffisantes pour contrôler efficacement les effets environne-mentaux cumulatifs dans la région--Il a été question du processus environnemental fédéral parce que le Projet exigeait une autorisation du MPO au motif de la détérioration, de la destruction ou de la perturbation de l'habitat du poisson--À l'appui de la demande soumise au MPO a été versée la même EIE qui avait été produite devant l'office--L'évaluation environnementale devait prendre la forme d'un examen d'étude approfondie (EEA) qui devait être mené conformément aux exigences de l'art. 16(1) et (2) de la LCEE --Il apparaît, à la lecture de l'EIE, que l'autorité responsable, auteure du rapport, était parfaitement au courant des initiatives entreprises en Alberta par le gouvernement et l'industrie en vue de corriger les effets négatifs de l'exploitation des sables bitumineux sur l'environnement-- Lorsque l'EEA examine les éventuels effets du Projet sur l'environnement, il est fait mention à plusieurs reprises des initiatives mises en oeuvre par l'Alberta--Les dernières mesures prises ont été la délivrance par l'autorité responsable de deux autorisations autorisant les forages d'exploration (17 août 1999) et autorisant Suncor à mettre en oeuvre le Projet (21 décembre 1999)--Demandes accueillies--Les demandeurs ont satisfait au deuxième et au troisième volet du critère applicable à la qualité pour agir défini par la CSC dans Conseil canadien des Églises c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1992] 1 R.C.S. 236--Ils contestent la validité des décisions prises par les ministres défendeurs et la présente Cour est l'instance appropriée pour trancher la question--Dans la mesure où la décision du ministre de l'Environnement est fondée sur l'interprétation de la loi, la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte --Dans la mesure où les questions ont trait à l'exercice du pouvoir discrétionnaire par l'autorité responsable, la norme de contrôle applicable est celle du caractère raisonnable--La détermination de la portée du Projet est une question qui est laissée à la discrétion de l'autorité responsable--La décision prise par le ministre de l'Environnement d'agir en vertu de l'art. 23a) ou b) constitue aussi une décision discrétionnaire dans les limites de son pouvoir--L'évaluation de l'importance des effets environnementaux est également une décision de nature discrétionnaire--Le ministre de l'Environnement avait effectivement tenu compte de la SRDD pour rendre sa décision et il avait jugé qu'il s'agissait de mesures d'atténuation--Puisque la LCEE exige du ministre de l'Environnement qu'il tienne compte de l'EEA et puisque l'art. 16 de la LCEE exige de l'autorité responsable qu'elle tienne compte des mesures d'atténuation pour préparer l'EEA, reste à savoir si la décision du ministre de l'Environnement de s'appuyer sur la stratégie régionale de SRDD constitue une interprétation correcte de l'art. 16 de la Loi ou si elle représente plutôt une décision raisonnable dans l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire--Le fait que le ministre ait décidé de s'appuyer sur les pouvoirs et les initiatives de réglementation provinciaux, y compris la SRDD, et les initiatives du secteur privé telles que la CEEMI, qui échappent au pouvoir d'application et de contrôle du gouvernement fédéral, constitue une erreur d'interprétation de son obligation de tenir compte des mesures d'atténuation dans le cadre de l'examen d'étude approfondie--Il a donc commis une erreur d'interprétation de la Loi--Même si cette conclusion se révélait erronée, la décision de s'en remettre à des processus sur lesquels le ministre n'a aucun contrôle ne constitue pas un exercice raisonnable de son pouvoir discrétionnaire--Ni l'art. 12 ni aucune autre disposition de la LCEE ne prévoit que le ministre de l'Environnement ou toute autre autorité fédérale peut se dégager de ses obligations en participant volontaire-ment aux processus et aux initiatives de réglementation provinciaux--Le MPO a commis une erreur de droit additionnelle en délivrant les autorisations--L'effet conjugué des art. 17, 20(1), 23a) et 37(1) est que l'autorité responsable assume une obligation impérative non susceptible de délégation de veiller à l'application des mesures d'atténuation--Le dossier montre que le MPO s'est fié aux mesures d'atténuation proposées et mises en oeuvre par l'Alberta--Il s'agissait de confiance mal placée et la délivrance des autorisations par le MPO était déraisonnable-- Quant aux mesures de réparation, les travaux visés par les deux autorisations avaient déjà été exécutés au moment où ces demandes étaient entendues--Rendre une ordonnance d'interdiction ne ferait aucun sens--Et il n'y aurait aucun avantage à rendre une ordonnance annulant la décision prise par le ministre de l'Environnement puisqu'une telle décision n'aurait aucune conséquence utile--Cependant, il est déclaré que la décision du ministre est entachée d'une erreur de droit--Il est déclaré que les décisions du MPO étaient déraisonnables et que, si cela pouvait s'avérer d'une utilité quelconque, elles devraient être annulées--Il est déclaré en outre que, pour le cas où le besoin s'en ferait sentir, les ministres défendeurs devraient prendre les mesures qui s'imposent pour satisfaire aux obligations qui leur sont imposées dans la LCEE--Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, L.C. 1992, ch. 37, art. 17, 20(1), 23a), 37(1) (mod. par L.C. 1994, ch. 46, art. 3)--Environmental Protection and Enhancement Act, S.A. 1992, ch. E-13.3--Oil Sands Conservation Act, S.A. 1983, ch. O-5.5.

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