Fiches analytiques

Informations sur la décision

Contenu de la décision

DROIT MARITIME

Créanciers et débiteurs

Neves c. Kristina Logos (Le)

T-1041-95

2001 CFPI 1034, juge MacKay

20-9-01

30 p.

Appels de l'ordonnance du protonotaire établissant le rang occupé par diverses réclamations à l'encontre du produit de la vente du navire défendeur Kristina Logos, la vente ayant été ordonnée par la Cour--La norme de contrôle qui s'applique à une décision discrétionnaire rendue par le protonotaire a été énoncée dans Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd., [1993] 2 C.F. 425 (C.A.): l'ordonnance discrétionnaire d'un protonotaire ne doit être modifiée que si elle est entachée d'une erreur flagrante, en ce sens que le pouvoir discrétionnaire a été exercé en vertu d'un mauvais principe ou d'une mauvaise appréciation des faits--Le défendeur Pratas et les demandeurs Neves avaient acheté le Kristina Logos de Clearwater--Le solde du prix de vente, qui s'élevait à 250 000 $, était garanti par une hypothèque maritime de premier rang grevant le navire, consentie au vendeur en sa qualité de créancier hypothécaire--Les frères Neves affirment avoir payé 49 p. 100 du prix d'achat plus les frais d'équipement du navire à condition que le navire appartienne à Ulybel, une société panaméenne dans laquelle ils détiendraient 49 p. 100 des actions--Le Kristina Logos a été saisi en mer à la suite d'allégations selon lesquelles on se livrait illégalement à des activités de pêche sans permis; il a été détenu jusqu'au mois d'avril 1994--Le capitaine du navire (M. Tavares) et le propriétaire (M. Pratas) avaient également été accusés d'avoir commis des infractions en matière de pêche--Clearwater a intenté une action en vue de réclamer le solde impayé de 125 000 $ qui était dû en vertu de l'hypothèque; elle a engagé des procédures pour que le Kristina Logos soit saisi--Le capitaine Tavares a été déclaré coupable au mois de juillet 1994, ce qui a donné lieu à la délivrance d'une ordonnance de confiscation en faveur de la Couronne à l'encontre du Kristina Logos--La déclaration de culpabilité et la confiscation ont été annulées en 1996 de sorte que le navire est redevenu un bien saisi--Les demandeurs ont intenté la présente action en vue d'obtenir un jugement déclaratoire portant qu'en leur qualité de propriétaires, ils détenaient une part de 49 p. 100 dans le navire défendeur--Les défendeurs admettent que les demandeurs ont droit à une part de 49 p. 100 dans le navire, mais ils affirment que les demandeurs sont tenus de contribuer au prorata au paiement des frais engagés à l'égard de la défense du navire--Ulybel a été déclarée coupable d'avoir permis l'utilisation du Kristina Logos pour des activités de pêche illégales--La Cour suprême de Terre-Neuve a imposé des amendes de 120 000 $ et a ordonné qu'un montant de 50 000 $ soit confisqué en faveur de la Couronne--Après que le protonotaire eut rendu son ordonnance, l'ordonnance de confiscation a été annulée--La Cour suprême du Canada n'a pas encore statué sur l'appel interjeté contre l'annulation de la confiscation--Le Kristina Logos a été vendu pour la somme de 605 000 $--Le produit est entre les mains de la Cour--Le protonotaire a commis une erreur en appliquant les principes de droit maritime et il a donc commis une erreur en déterminant l'ordre de priorité--1) Les frais de mise en vente du navire doivent être payés en premier lieu à l'aide du fonds--On a procédé à la vente conformément à une ordonnance de la Cour--Les frais et honoraires du prévôt ont été approuvés par des ordonnances du protonotaire et ont été payés à l'aide du fonds--La vente a été conclue avant qu'un jugement définitif soit rendu dans l'action intentée par les demandeurs, mais l'exercice par la Cour du pouvoir discrétionnaire qu'elle possède en vue d'ordonner la vente a été confirmé en appel--Les frais de la vente sont payables à l'aide du produit de la vente--2) Les défendeurs contestent la réclamation de Clearwater, en sa qualité de créancière hypothécaire, en alléguant que le solde impayé qui est dû en vertu de l'hypothèque a été compensé par les sommes que Clearwater devait aux défendeurs--La conclusion du protonotaire selon laquelle un solde de 125 000 $ est encore dû en vertu de l'hypothèque est étayée par la preuve--Cette créance garantie de 125 000 $ vient avant toutes les autres créances sauf celles qui sont directement associées à la vente du navire--L'ordonnance visée par l'appel comportait une erreur puisque les créances non garanties des frères Neves et de la Couronne se sont vu attribuer un rang supérieur à celui de la créance hypothécaire de Clearwater--Le protonotaire a refusé d'inclure les intérêts à l'égard de la créance hypothécaire puisque ni le billet à demande ni l'hypothèque ne prévoyaient le paiement d'intérêts pour la durée de l'hypothèque--Bien que les parties n'aient pas précisé, dans leur contrat, que des intérêts seraient dûs en cas de défaut, cela ne veut pas dire que Clearwater convenait qu'il n'y aurait pas d'intérêts en cas de défaut, même s'il avait été convenu que des intérêts ne seraient pas exigés pour la durée relativement courte du contrat--Si le principal de l'hypothèque seulement était payé, les propriétaires du navire bénéficieraient d'un enrichissement sans cause--En outre, la réclamation de Clearwater comprend la perte de possibilité d'utiliser les sommes en cause--Des intérêts peuvent être recouvrés--3) Les frais de rapatriement de l'équipage portugais au moment de la saisie occupaient un rang prioritaire par rapport aux créances non garanties--Il n'y avait pas d'agent maritime connu et il fallait rapatrier les membres de l'équipage au Portugal étant donné que ceux-ci n'avaient pas de moyens de subsistance et qu'ils n'étaient pas admissibles au Canada--Tous les créanciers ayant un droit sur le navire sont responsables de ces frais--La réclamation de la Couronne n'est pas un privilège maritime ou même une créance réelle--Il ne s'agit pas d'une créance des membres de l'équipage, mais d'une créance non garantie dont la Cour, dans l'exercice de la compétence qu'elle possède en équité, reconnaît le rang prioritaire par rapport à toutes les autres créances non garanties--Cette réclamation représente les mesures nécessaires dont les affréteurs auraient pu être tenus responsables s'ils avaient comparu devant la Cour--En leur absence, les propriétaires doivent supporter les frais--4) Si la Cour suprême du Canada rétablit la confiscation, la créance prendrait rang après la créance de la Couronne afférente aux frais de rapatriement de l'équipage et après la créance hypothécaire de Clearwater, plutôt qu'avant cette créance comme le protonotaire l'a ordonné--Si la confiscation est rétablie, la créance y afférente ne sera pas, en droit maritime, une créance réelle, mais une autre créance personnelle non garantie contre le propriétaire du navire--La confiscation, si elle est rétablie, vient avant les créances des demandeurs et du défendeur; elle vient également avant la réclamation relative aux amendes imposées à Ulybel par suite de la déclaration de culpabilité--Le montant confisqué devrait porter intérêt après la vente--5) La réclamation de 120 000 $ de la Couronne, à l'égard des amendes, est reconnue en tant que réclamation présentée par un créancier non garanti, qui n'occupe pas un rang prioritaire si ce n'est ce qui est reconnu en common law par rapport aux autres créanciers ordinaires, dont les réclamations n'ont pas encore été quantifiées, et ce, sans intérêt--6) Le protonotaire a commis une erreur en attribuant à la créance des demandeurs un rang inférieur à celui qui est attribué à l'égard des frais de vente du navire et du montant confisqué, cette créance venant avant la seule créance reconnue à titre de créance garantie, la seule créance réelle, celle du créancier hypothécaire, et avant la réclamation que la Couronne a présentée en vue de recouvrer le montant des amendes imposées--Les demandeurs sont tout au plus des créanciers non garantis--Les droits des demandeurs ne l'emportent pas sur ceux des autres créanciers--La réclamation des demandeurs à titre de bénéficiaires d'une fiducie par interprétation est reconnue, mais elle n'a de l'importance qu'en ce qui concerne Ulybel, qui est propriétaire enregistré--7) S'il y a entente, le solde impayé du fonds peut être versé à Ulybel--Si les demandeurs insistent pour toucher leur part, il est ordonné que 49 p. 100 du solde du fonds leur soit versé--Le reliquat de 51 p. 100 doit être versé au défendeur Pratas--La réclamation que la Couronne a présentée en vue de recouvrer les frais engagés aux fins de l'entretien du navire à compter de la date de la saisie conservatoire jusqu'à la date de la vente n'est pas admise--Les dépenses en question ne résultent pas de la saisie conservatoire du navire dans le cadre de la procédure engagée par la Couronne, mais de la saisie--De 1994 à 1996, la Couronne avait le navire en sa possession en sa qualité de propriétaire--La Couronne a effectué des dépenses sans consulter les autres créanciers et sans demander l'approbation de la Cour ou des parties touchées--Au moment où elles ont été effectuées, ces dépenses n'étaient pas admissibles en tant que dépenses effectuées au profit de toutes les personnes ayant un droit sur le navire--Toutes les réclamations qui ont été admises portent intérêt à compter de la date de la vente jusqu'à la date du paiement.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.