Fiches analytiques

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Contenu de la décision

DesFossés c. Canada ( Ministre de la Justice )

T-1945-95

juge Dubé

16-10-96

21 p.

Requête en ordonnance portant annulation de la décision d'extradition aux États-Unis et en libération du requérant du Centre de prévention Parthenais par application de l'art. 24(1) de la Charte-Requérant recherché en Floride sous cinq chefs d'accusation graves, dont le meurtre au premier degré-Dans des procédures d'habeas corpus, les juges canadiens saisis se sont assurés que le fugitif était bien la personne recherchée par l'État requérant, que l'infraction en question était bien un crime donnant lieu à l'extradition, et qu'il y avait des preuves suffisantes pour justifier l'incarcération-Le processus d'extradition comporte donc deux phases distinctes: en premier lieu, il y a la phase judiciaire devant le juge de l'extradition qui examine si les points de fait et de droit sont tels qu'il y a lieu à mandat de dépôt-La seconde phase, politique, relève de la compétence du ministre, qui doit examiner les moyens de défense du fugitif au regard des obligations que le Canada tient d'un traité international (le Traité d'extradition entre le Canada et les États-Unis d'Amérique)-Il échet d'examiner si les motifs de recours contre la décision du ministre portent sur un «vice de fond»-Demande rejetée-Le juge de l'extradition ne s'est pas conformé aux prescriptions de la loi, faute d'avoir envoyé un rapport au ministre, de lui avoir communiqué une copie certifiée conforme des éléments de preuve, du mandat étranger ou de la dénonciation ou plainte, ainsi qu'un certificat d'incarcération et une copie des pièces ou transcriptions de témoignages-Cependant, la Loi ne dit nulle part que le défaut de transmettre ces documents est un motif d'annulation de l'arrêté d'extradition-Le simple fait qu'un rapport n'a pas été transmis ne constitue pas un vice de fond qui invalide la décision subséquente du ministre, lequel disposait déjà de la plupart des documents nécessaires-L'argument que le mandataire du procureur général du Canada n'a pas été dûment retenu par le gouvernement des États-Unis n'est pas fondé, puisque selon un usage de longue date au Canada, pareils mandataires représentent l'État requérant dans les procédures d'extradition-L'argument que le mandataire de l'État requérant a fait preuve de préjugé faute d'avoir produit toutes les preuves n'est pas fondé, puisque ce dernier n'y est pas tenu-Il lui suffit de produire assez de preuves pour constituer un dossier apparemment fondé-L'allégation de parjure faite contre le témoin ne présente aucun intérêt pour le ministre; elle pourrait être un facteur dans le contexte du procès éventuel-L'argument que l'infraction (felony murder) dont le requérant est inculpé aux États-Unis n'est plus un crime au Canada n'est pas valable-L'art. 2 du Traité ne vise pas nommément l'infraction reprochée, mais le fait commis par le fugitif-Le verdict de double criminalité relève du juge de l'extradition, et non du ministre-Quant à l'argument que le mandat de dépôt est invalide, le ministre n'est pas habilité à contrôler le mandat décerné par le juge de l'extradition et la Cour fédérale n'a pas de pouvoir de contrôle judiciaire à l'égard des décisions d'une cour supérieure du Québec-L'allégation d'identification fautive n'est pas fondée-Contrairement aux prétentions du requérant, le ministre n'est pas tenu de le protéger en tout état de cause-Le requérant était dûment représenté devant les tribunaux canadiens et ses droits d'appel dûment exercés-Que la seconde mise en accusation ait eu ou non pour effet juridique d'annuler la première ordonnance de prise de corps, voilà une question qui relève de la justice de l'État requérant, et non du ministre de la Justice-Il s'ensuit que le défaut par le ministre de considérer la lettre de l'avocat du requérant, qui conteste la validité de la seconde mise en accusation, ne constitue pas un vice de fond-L'art. 9 du Traité ne dit nulle part que les documents afférents à la demande d'extradition doivent être transmis par la voie diplomatique-Le ministre n'a pas pour responsabilité de contrôler les agissements du poursuivant américain de l'État de Floride ou de son représentant, qui est un fonctionnaire du ministère de la Justice du Canada-Que le signalement donné du fugitif dans la demande d'extradition des États-Unis soit fautif ou non, le juge de l'extradition a identifié le requérant comme étant le fugitif recherché par les autorités américaines et, dans le cadre de l'extradition, sa décision est valide-La livraison n'est pas refusée puisque les autorités poursuivantes compétentes de la Floride ont fait savoir qu'elles ne requerraient pas la peine de mort contre le requérant-L'extradition d'une personne ne vaut pas violation des droits que lui garantit l'art. 7 de la Charte, à condition que cette extradition soit conforme aux principes de justice fondamentale-S'il est vrai que le dossier monté par les autorités américaines fourmille de contradictions, d'incohérences, voire de faux témoignages, le requérant aura la possibilité de le prouver devant la juridiction compétente-Entre-temps, l'État requérant a présenté des éléments d'information suffisants pour constituer un commencement de preuve justifiant l'extradition, et le requérant n'a pu faire valoir aucun vice de fond pour annuler la décision du ministre-Traité d'extradition entre le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis d'Amérique, 3 décembre 1971, [1976] R.T. Can. no 3-Loi sur l'extradition, L.R.C. (1985), ch. E-23-Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44], art. 7, 24.

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