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Ticketnet Corp. c. Canada

T-2185-88

juge Evans

11-6-99

33 p.

Appel de la décision de rejeter la demande d'un crédit d'impôt à l'investissement pour des dépenses de 2 millions de dollars effectuées à des fins de recherche et de développement-La demanderesse a conclu un contrat avec Air Canada afin d'obtenir le financement nécessaire au développement d'un logiciel de billetterie automatisée pour des spectacles ayant lieu n'importe oú au pays-Le contrat prévoit le développement du logiciel moyennant un montant fixe de 2 millions de dollars et la remise de factures sur une base régulière-Air Canada accepte aussi de «faire crédit» du montant de 2 millions de dollars à être facturé, montant qui doit être remboursé conformément à la clause 3.1-La clause 3.1 prévoit que l'avance doit être remboursée au taux de 5 sous par billet vendu-La demanderesse serait propriétaire du logiciel-Dans Ticketnet Corp. c. Air Canada, [1993] O.J. No. 289 (Div. gén.) (QL), la Cour de l'Ontario (division générale) a conclu que le contrat était valide et obligatoire, et que Air Canada avait commis une violation de l'entente relative au développement du logiciel qui constituait une répudiation de celle-ci-Au moment d'accorder les dommages-intérêts, elle a déduit la somme de 2 millions de dollars relativement à l'obligation contractuelle de la demanderesse de payer Air Canada, même si le paiement n'était pas encore exigible-Il a été ordonné à Air Canada de remettre le logiciel à la demanderesse-Le contrat impose-t-il une obligation inconditionnelle, rendant ainsi la dépense effectuée pour la recherche et le développement admissible en tant que crédit d'impôt à l'investissement?-Demande rejetée-La demanderesse soutient que l'entente relative au développement du logiciel comprenait deux parties distinctes et indépendantes: un contrat prévoyant la fourniture de services pour le développement du logiciel moyennant une somme d'argent et un prêt sans intérêt afin de permettre à la demanderesse de payer à Air Canada les coûts des services offerts (le prêt devait être remboursé par l'entremise d'une redevance sur la vente des billets)-Mais l'entente n'emploie nulle part les mots «prêt» ou «montant prêté»-En outre, une des caractéristiques essentielles d'un prêt est la promesse de rembourser le montant prêté-Au 30 avril 1986, il n'était pas clair que la demanderesse aurait un jour l'obligation de «rembourser» les 2 millions de dollars à Air Canada, étant donné que le «remboursement» ne devait avoir lieu qu'après l'approbation du logiciel par la demanderesse et que si les ventes de billets parvenaient à générer un montant minimum de 2 millions de dollars-Le contrat ne traite nulle part de l'éventualité que la demanderesse n'approuve jamais le logiciel, comme c'est le cas en l'espèce-Une obligation en ce sens ne peut pas être présumée-Peu importe les raisons qui feraient que la demanderesse n'effectuerait pas les paiements, l'entente prévoyait l'option pour Air Canada d'acheter le logiciel pour la somme de 2 millions de dollars, option selon laquelle la demanderesse devait payer le solde du 2 millions de dollars qu'elle n'avait toujours pas remboursé à Air Canada grâce à la vente des billets-Le contrat ne prévoyait pas qu'Air Canada pouvait poursuivre la demanderesse en justice pour recouvrer la partie du prêt n'ayant pas été «remboursée»-Tout comme dans Alberta and Southern Gas Co. Ltd. c. La Reine (1976), 76 DTC 6362 (C.F. 1re inst.) oú la demanderesse a cherché à obtenir son remboursement à même les matières pétrolières et oú la Cour a conclu qu'il ne s'agissait pas d'un prêt, Air Canada pouvait ultimement recourir à la possibilité d'acheter le logiciel pour obtenir son remboursement, dans l'éventualité oú elle ne recevrait pas les paiements convenus devant provenir de la vente des billets-Si les modalités du contrat ne sont pas claires quant à savoir si une relation de prêteur et d'emprunteur a été créée, en l'absence d'une justification commerciale autre que l'obtention du crédit d'impôt, la Cour ne devrait pas s'efforcer d'interpréter le contrat de la façon proposée par la demanderesse-La demanderesse allègue qu'un certain poids devrait être accordé à la façon dont les vérificateurs ont qualifié son obligation dans ses états financiers, préparés en conformité avec les principes comptables généralement reconnus-La question de droit qui dépend de l'interprétation du contrat est de savoir si l'obligation de la demanderesse envers Air Canada naît d'un prêt ou de la fourniture de services, ou est une obligation inconditionnelle ou une obligation éventuelle-Cela ne relève pas des principes comptables généralement reconnus-La question de savoir si l'obligation de la demanderesse était «éventuelle» ou celle de savoir si l'avance était un prêt ne peut être tranchée péremptoirement par son inclusion dans les états financiers sous la rubrique «dette à long terme»-L'objet d'un état financier est de donner aux investisseurs une description complète et précise de la situation financière de la compagnie-Il serait avisé d'inclure une dette, peu importe qu'il s'agisse d'une dette éventuelle ou d'une dette échue-Mais, aux fins de l'impôt, la distinction entre obligation éventuelle et obligation inconditionnelle est déterminante-La façon apparemment imprécise et peu diligente dont certains des relevés ainsi que les factures ont été établis peut tendre à démontrer que cela ne revêtait pas une grande importance sur les plans comptable et commercial pour Air Canada-L'argument qu'il serait injuste de refuser à la demanderesse le bénéfice du crédit d'impôt simplement parce que Air Canada fournissait tant le service que le financement de ce service fait abstraction de l'essentiel-Le problème n'est pas que le fournisseur du service et le prêteur soient la même personne, mais bien que les modalités du contrat n'imposent pas une obligation non équivoque de rembourser l'argent prêté, l'une des caractéristiques juridiques déterminantes d'un prêt-Les obligations légales assumées par la demanderesse en vertu du contrat n'étaient pas celles d'un emprunteur-Subsidiairement, la demanderesse soutient que son obligation contractuelle de payer pour les services qu'elle a obtenus de Air Canada ne dépendait pas de son approbation du logiciel, c.-à.-d. que le contrat portait sur la fourniture de services, et non sur la livraison d'un produit-Dans le jugement dans lequel elle a déduit 2 millions de dollars des dommages-intérêts accordés, la Cour de l'Ontario n'a pas jugé qu'au 30 juin 1986, l'obligation de la demanderesse envers Air Canada était inconditionnelle; elle s'est plutôt fondée sur une estimation des profits nets qui auraient été tirés si le contrat avait été exécuté; dans cette éventualité, les profits de la demanderesse auraient été réduits d'une somme de 2 millions de dollars qu'elle aurait dû payer à Air Canada à même le produit de la vente de billets par l'entremise du logiciel-Il n'y a rien dans le jugement qui contredise le fait que le contrat portait sur le développement et la livraison d'un produit-De plus, jusqu'à ce que le produit fini soit livré, l'obligation de payer de la demanderesse n'était qu'éventuelle-Le fait que la demanderesse ne serait pas tenue de payer si Air Canada manquait à son obligation de livrer le logiciel ou si le logiciel n'était pas approuvé pour une raison valable suffit pour considérer la dette comme une éventualité-L'approbation était une condition nécessaire «à la naissance» de l'obligation-Il ressort du contrat que la demanderesse n'assumait aucune obligation inconditionnelle de payer avant que le logiciel ne soit approuvé et que des billets ne soient vendus-Si le logiciel était approuvé, mais que des paiements moindres que ceux stipulés étaient faits, la demanderesse aurait alors eu l'obligation de vendre à Air Canada les droits sur le logiciel-L'incertitude quant à l'obligation est différente de l'incertitude quant au montant de l'obligation.

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