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Communications privilégiées

Appel d’une décision de la Cour fédérale (C.F.) (2018 CF 1184) déterminant que l’intimé, le Conseil canadien de la magistrature (Conseil), n’était pas tenu de remettre à l’appelant 10 documents du fait qu’ils étaient protégés par le secret professionnel avocat-client, par le secret du délibéré et par le privilège d’intérêt public —L’appelant avait demandé ces documents en se prévalant de la règle 317 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 — L’appelant, nommé juge à la Cour supérieure du Québec en 2010, a fait l’objet de deux enquêtes devant le Conseil et ses comités d’enquête — Le Conseil a adopté les constatations d’un comité d’enquête selon lesquelles l’appelant avait manqué à l’honneur et à la dignité et a recommandé qu’il soit révoqué au motif qu’il était inapte à remplir utilement ses fonctions — L’appelant a logé de multiples demandes de contrôle judiciaire à l’encontre des décisions rendues par les comités d’enquête ainsi que de la décision du Conseil recommandant sa révocation — Lors d’une requête en radiation de ces demandes déposée par le Conseil, la C.F. a ordonné au Conseil une liste certifiée « de tous les documents publics que le décideur avait pour prendre la décision » et une « liste de tous les documents que le décideur avait pour prendre la décision » — Le Conseil a invoqué le secret professionnel de l’avocat-client et/ou le secret du délibéré et/ou le privilège d’intérêt public à l’égard de plusieurs documents — La C.F. a procédé en trois étapes pour déterminer la validité des privilèges revendiqués par le Conseil  : la prise de connaissance des raisons sérieuses soumises par l’appelant; la prise de connaissance de l’affidavit confidentiel du Conseil; et l’examen des documents si les deux premières étapes ne sont pas satisfaites — Elle a confirmé pour l’essentiel les privilèges revendiqués par le Conseil — Elle a conclu que l’argumentation de l’appelant rencontrait le test des « raisons sérieuses » et que le secret professionnel avocat-client et le secret du délibéré s’appliquaient à certains documents — Elle a estimé qu’il n’était pas nécessaire de passer à la troisième étape et d’examiner les documents eux-mêmes (sauf pour l’un d’entre eux) — L’appelant a soutenu que la C.F. a erré en ne prenant pas connaissance de tous les documents à propos desquels le Conseil réclamait un privilège — Il s’agissait de savoir si la procédure suivie par la C.F. était appropriée dans les circonstances et contrevenait au principe fondamental de la publicité des débats, et si la C.F. a correctement appliqué les privilèges revendiqués aux documents en litige — La C.F. a commis une erreur dans l’application du processus qu’elle avait élaboré pour se prononcer sur le caractère privilégié ou non des documents contestés — Les règles 317 et 318 ne précisent pas la démarche qui doit être suivie lorsqu’une partie s’oppose à la transmission d’un document — Tout au plus, le paragraphe 318(3) précise que la C.F. « peut donner aux parties et à l’office fédéral des directives sur la façon de procéder »,  ce qu’elle a fait en établissant les trois étapes — La C.F. doit veiller à trouver une solution qui concilie l’examen valable de la décision administrative qui fait l’objet d’un contrôle; l’équité procédurale; et la protection de tout intérêt légitime à l’égard de la confidentialité — La procédure établie par la C.F. dans la présente affaire était tout à fait conforme à l’état du droit, et le juge n’a pas commis d’erreur révisable en procédant comme il l’a fait en trois étapes — Il était approprié d’établir que les documents eux-mêmes ne seraient consultés que dans l’hypothèse où la C.F. ne s’estimerait pas capable de se prononcer sur les privilèges revendiqués sur la seule base des représentations des parties — La question qui se posait était plutôt celle de savoir si la C.F. pouvait raisonnablement conclure qu’il ne lui était pas nécessaire de prendre connaissance des documents (sauf un) dans les circonstances — La C.F. se devait de consulter les documents avant de prendre sa décision, compte tenu des faits et des circonstances particulières de ce dossier — Les conséquences draconiennes qu’emportent pour l’appelant la recommandation du Conseil imposent le respect le plus strict des principes d’équité procédurale — La C.F. ne pouvait se satisfaire d’une preuve secondaire plutôt que d’examiner les documents qui ont fait l’objet même de la revendication de privilèges — L’examen des documents n’était pas susceptible de retarder indûment les procédures ou de porter autrement préjudice aux parties — Après avoir soigneusement examiné les documents faisant l’objet du présent appel, la Cour était satisfaite dans les présentes qu’ils étaient en tous points conformes aux représentations faites par le Conseil devant la C.F. et qu’ils étaient effectivement couverts par les privilèges revendiqués — Ceci étant, l’appel a été rejeté malgré l’erreur commise par la C.F. dans l’application du processus qu’elle avait élaboré — Cette erreur était sans conséquence — Appel rejeté.

Girouard c. Conseil canadien de la magistrature (A-394-18, 2019 CAF 252, juge de Montigny, motifs du jugement en date du 11 octobre, 2019, 15 p.)

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