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Droit d’auteur

Pratique

Requête en vue d’obtenir une injonction interlocutoire à l’encontre des tierces parties intimées, les fournisseurs d’accès Internet (FAI), afin d’obliger les tierces parties intimées innocentes à prendre des mesures pour empêcher leurs clients d’accéder aux sites Web et aux services Internet exploités par les défendeurs anonymes — Les demanderesses et requérantes sont des sociétés canadiennes de radiodiffusion qui sont soit propriétaires des droits de diffusion canadiens d’une panoplie d’émissions de télévision, soit titulaires exclusives de ces droits — Les émissions sont diffusées par l’entremise de services de radiodiffusion et de diffusion en ligne ou en continu — Malgré la délivrance d’injonctions provisoires et interlocutoires, certains des services des défendeurs demeurent fonctionnels et la contrefaçon alléguée se poursuit — Les demanderesses sollicitent une « ordonnance de blocage de site », que les tribunaux canadiens n’ont encore jamais rendue — Il s’agissait principalement de savoir si la Cour a compétence pour rendre une ordonnance de blocage de site — La compétence en equity de la Cour lui confère le pouvoir de délivrer une injonction de la nature de celle que sollicitent les demanderesses —  Les art. 4 et 44 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), c. F‑7 disposent que la Cour fédérale est une cour d’equity, et lui accordent le pouvoir de délivrer des injonctions sous réserve du respect d’une seule condition, c’est‑à‑dire que l’injonction soit « just[e] [et] opportun[e] » — Les injonctions sont des réparations en equity; les pouvoirs des tribunaux ayant compétence en equity sont illimités et  ne sont pas limités à un domaine de droit substantiel, et ces injonctions peuvent être exécutées au moyen du pouvoir judiciaire en matière d’outrage — Les ordonnances de type Norwich et les injonctions Mareva sont  imposées aux parties qui ne sont pas directement impliquées dans les actes répréhensibles, mais qui sont en position de favoriser le préjudice — C’est ce raisonnement qu’a appliqué la Cour d’appel d’Angleterre et du Pays de Galles lorsqu’elle a rendu une ordonnance de blocage de sites à l’égard de FAI —  La question en litige dans la présente requête ne se limite pas à celle du blocage de sites — La réparation par voie d’injonction demandée ne peut être simplement séparée du caractère essentiel de l’action sous‑jacente en violation de droit d’auteur — La Loi sur les télécommunications, L.C. 1993, c. 38, et l’existence d’un débat sur le rôle des mécanismes de blocage de sites dans le régime canadien de réglementation des télécommunications ne permettent pas à la Cour de s’abstenir d’exercer son pouvoir discrétionnaire en l’espèce — Les demanderesses doivent satisfaire au critère établi dans les arrêts Manitoba (P.G.) c. Metropolitan Stores Ltd., [1987] 1 R.C.S. 110, et RJR-Macdonald Inc. c Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311, selon lequel l’injonction interlocutoire sera délivrée s’il y a une question sérieuse à trancher; un préjudice irréparable sera causé si l’injonction n’est pas accordée; la prépondérance des inconvénients joue en faveur du demandeur — Le recours à la jurisprudence britannique est approprié — L’arrêt Cartier International AG v. British Sky Broadcasting Ltd., [2016] EWCA Civ. 658 (BAILII) (Cartier) a adopté plusieurs principes ou facteurs pertinents afin de déterminer la proportionnalité d’une ordonnance de blocage de site, notamment la nécessité, l’efficacité et l’effet dissuasif — Le facteur de la nécessité est étroitement lié au volet du préjudice irréparable du critère — Les facteurs restants seront utiles pour évaluer la prépondérance des inconvénients et déterminer ce qui est juste et équitable en examinant les intérêts légitimes, mais opposés, dans les présentes — En ce qui concerne la question sérieuse, il existe une preuve prima facie solide de violation des droits d’auteur par les défenderesses — Les demanderesses ont démontré qu’elles subiraient un préjudice irréparable si l’injonction n’était pas accordée — En ce qui concerne la prépondérance des inconvénients, l’ordonnance demandée est susceptible de réduire l’accès général aux services en infraction et est un moyen efficace de protéger les droits des demanderesses et de limiter le préjudice subi par celles-ci — Ayant examiné les facteurs Cartier et reconnu les intérêts concurrents légitimes découlant de la mesure de redressement demandée, la Cour a conclu que la prépondérance des inconvénients milite en faveur des demanderesses — Les modalités de l’ordonnance ont été modifiées — Requête accueillie.

Bell Média Inc. c. GoldTV.Biz (T-1169-19, 2019 CF 1432, juge Gleeson, motifs du jugement en date du 15 novembre 2019, 45 p.)

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