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[2021] 3 R.C.F. F-24

 

Pratique

Communication de documents et interrogatoire préalable

Interrogatoire préalable

Appel formé contre une ordonnance rendue par la juge responsable de la gestion de l’instance, qui a conclu que le paragraphe 237(3) des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106, n’autorisait pas la Cour à ordonner qu’un employé de la filiale d’une société se soumette à un interrogatoire préalable en tant que représentant de la société lorsque la société ne consent pas à ce qu’il intervienne en cette qualité — La juge a refusé d’ordonner qu’un employé de la société McCain Alimentaire SAS (McCain France) soit interrogé au nom de McCain Foods Limited (McCain) — Dans l’action principale, la demanderesse a allégué que les défenderesses ont contrefait un brevet concernant un procédé permettant de traiter des légumes — La demanderesse a désigné Brian Ruff pour la représenter à l’interrogatoire préalable, en application du paragraphe 237(1) des Règles — Les défenderesses ont dit estimer que M. Ruff n’avait pas été en mesure de répondre aux questions — Elles ont présenté une requête en vertu de la règle 237(3) pour que soit rendue une ordonnance enjoignant à Fabrice DeSailly, un employé de McCain France et l’un des inventeurs du brevet en question, de se soumettre à un interrogatoire à la place de M. Ruff — La juge a jugé que M. DeSailly ne pouvait pas remplacer M. Ruff — Elle a conclu que le « représentant » soumis à un interrogatoire préalable doit être un représentant de la personne morale — Elle a estimé que M. DeSailly n’était pas un représentant de la demanderesse, mais un représentant de McCain France, et que le paragraphe 237(3) des Règles n’autorisait donc pas la Cour à ordonner qu’il remplace M. Ruff comme représentant de la demanderesse — Elle a indiqué par ailleurs qu’il serait mal à propos pour la Cour de contraindre une partie à accepter en tant que représentant à un interrogatoire préalable une personne qui n’est pas un employé et sur qui elle n’a ainsi aucune autorité — Il s’agissait de savoir si la juge a commis une erreur en concluant que le paragraphe 237(3) n’autorise pas la Cour à ordonner qu’un employé de la filiale d’une partie soit soumis à un interrogatoire préalable en tant que représentant de ladite partie — La juge n’a pas commis d’erreur en concluant que le paragraphe 237(3) n’autorisait pas la Cour à rendre l’ordonnance demandée — Les principes énoncés dans l’arrêt Anangel Splendour (Navire) c. Canada (Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires), 2006 CAF 212 ont leur importance — Le premier principe mentionné dans cette affaire, celui selon lequel « [l’]autre personne [qui peut être] interrogée », mentionnée au paragraphe 237(3), doit être le même « représentant de la personne morale » mentionnée au paragraphe 237(1) — Dans l’arrêt Anangel Splendour, la Cour d’appel fédérale a appliqué ce principe pour conclure que les représentants de subrogeants qui ne sont pas partie à l’instance n’entrent pas, pour l’application de la règle 237, dans le champ de la définition de « représentant de la personne morale » — La question posée dans le présent appel était de savoir de quelle manière le principe est appliqué dans un autre contexte factuel, celui de l’employé d’une filiale — La réponse se trouve dans le mot « représentant », au paragraphe 237(1), interprété d’après les règles qui s’appliquent aux interrogatoires préalables — Le paragraphe 237(3) n’autorise pas la Cour à ordonner qu’une personne qui n’est pas un « représentant » de la personne morale, pour absence de consentement de la personne morale ou absence d’une relation entre elle et la personne morale, soit soumise à un interrogatoire préalable en remplacement de la personne choisie par celle‑ci — Lorsqu’une personne morale ne consent pas à ce que l’employé d’une société apparentée la représente, cet employé n’est pas son représentant, mais uniquement le représentant d’une tierce partie, à savoir la société apparentée — En l’espèce, la demanderesse n’a pas consenti à ce que M. DeSailly la représente à l’interrogatoire préalable — M. DeSailly était un représentant de McCain France, une tierce partie — Il serait également mal à propos que la Cour contraigne une personne morale à accepter, en vue d’un interrogatoire préalable, un représentant que celle‑ci n’a pas approuvé et sur qui, puisqu’il n’est pas son employé, elle n’a aucune autorité — Une société mère ne peut être considérée comme la même personne que sa filiale, et les employés de la filiale ne sont pas les représentants de la société mère sans que cela ait pour effet de lever le « voile de la personnalité morale » qui sépare chaque entité — La règle 225 dispose que la Cour peut ordonner à une partie de divulguer dans un affidavit l’existence de tout document qui est en la possession, sous l’autorité ou sous la garde d’une filiale, d’une société mère ou d’une société sœur — Aucune formulation du genre n’apparaît dans le paragraphe 237(3) — Le fait que la demanderesse a proposé M. DeSailly pour qu’il témoigne dans un autre État appliquant d’autres règles en matière d’interrogatoire préalable ne signifie pas qu’elle a accepté que M. DeSailly soit son représentant à toutes fins utiles, y compris dans une poursuite devant la Cour fédérale — Il s’agissait de savoir si la juge a commis une erreur en refusant d’ordonner à la demanderesse de désigner et de proposer un autre représentant pour l’interrogatoire préalable — La juge n’a pas commis d’erreur en rendant une ordonnance générale pour la désignation d’un autre représentant — Les défenderesses ont demandé une ordonnance remplaçant M. Ruff par M. DeSailly comme représentant de la demanderesse — Elles n’ont pas demandé une ordonnance désignant qui que ce soit d’autre comme représentant de la demanderesse ou une ordonnance générale obligeant la demanderesse à désigner un autre témoin — L’alinéa 359b) exige de la partie requérante qu’elle précise dans son avis de requête « la réparation recherchée » — L’obligation de préciser dans l’avis de requête la réparation recherchée a pour objet d’informer la partie intimée de la preuve qu’elle devra réfuter relativement à cette requête — Il n’est pas juste d’autoriser les défenderesses à demander aujourd’hui une ordonnance qui n’a pas auparavant été demandée à la juge, et sur laquelle la demanderesse n’a donc pas eu l’occasion de s’exprimer — Enfin, rien ne permet d’affirmer que la juge a rejeté la requête pour cause de prématurité — Requête en appel rejetée.

McCain Foods Limited c. J.R. Simplot Company (T-1624-17, 2021 CF 890, juge McHaffie, motifs de l’ordonnance en date du 27 août 2021, 22 p.)

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