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[2021] 3 R.C.F. F-21

Droit aérien

Contrôle judiciaire d’un arrêté pris par le ministre des Transports interdisant la construction d’un aérodrome sur un terrain acquis par la demanderesse à Saint-Roch-de-l’Achigan, au Québec — La demanderesse est une personne morale sans but lucratif dont l’objectif est la construction et l’exploitation d’un aérodrome dans la municipalité de Saint-Roch-de-l’Achigan — En 2019 elle a fait l’acquisition du terrain nécessaire à la construction d’un aérodrome et a débuté le processus de consultation prévu aux art. 307.01 à 307.10 du Règlement de l’aviation canadien, DORS/96-433 — Lors d’un référendum, la majorité des citoyens se sont opposés au projet d’aérodrome — Le ministre des Transports a pris un arrêté en vertu de l’art. 4.32 de la Loi sur l’aéronautique, L.R.C. (1985), ch. A-2, interdisant à la demanderesse de construire un aérodrome — Le ministre a justifié sa décision notamment à cause du manque de clarté sur les répercussions de l’empreinte sonore de l’aérodrome proposé — La demanderesse a fait réaliser une étude de bruit qui démontre que l’aérodrome proposé n’engendrerait pas un niveau de bruit supérieur aux normes du ministère des Transports — Le dossier de la demanderesse a été étudié à nouveau par les fonctionnaires du ministère des Transports — Le ministre a choisi d’interdire la réalisation du projet — Une note subséquente soulignait, entre autres, la force de l’opposition des citoyens et l’absence d’étude des répercussions économiques — Le ministre a approuvé cette note et a signé l’arrêté — La demanderesse a soutenu que le ministre a outrepassé le pouvoir que l’art. 4.32 de la Loi lui confère, parce qu’il aurait tenu compte de considérations étrangères à la Loi — La demanderesse a aussi soutenu que le ministre ne pouvait tenir compte de l’acceptabilité sociale du projet d’aérodrome en exerçant le pouvoir qui lui est conféré par l’art. 4.32 — Il s’agissait principalement de déterminer si le ministre a outrepassé ses pouvoirs en prenant l’arrêté interdisant la construction d’un aérodrome — La décision du ministre était raisonnable — Un décideur chargé d’évaluer l’intérêt public peut tenir compte d’activités sur lesquelles il n’exerce pas directement de pouvoir réglementaire— Il n’est tout simplement pas réaliste d’examiner l’intérêt public en portant des œillères — Les arguments de la demanderesse sont tous fondés sur la prémisse erronée qu’il n’existe aucun lien entre l’aviation et les préoccupations citoyennes relatives à l’environnement ou à l’aménagement du territoire — L’intérêt public ne se résume pas à la sécurité du public — L’art. 4.32 mentionne séparément la sécurité aérienne et l’intérêt public — La demanderesse n’a pas démontré que la nature du régime législatif établit des contraintes fortes à l’exercice du pouvoir conféré par l’art. 4.32 — Au contraire, rien ne permet de restreindre la gamme des facteurs liés à l’intérêt public dont le ministre peut tenir compte — Un décideur chargé d’évaluer l’intérêt public peut raisonnablement choisir de tenir compte de l’acceptabilité sociale — Cela est particulièrement vrai lorsque, comme en l’espèce, un projet n’est pas assujetti à un processus structuré d’évaluation environnementale ou d’aménagement du territoire — L’art. 4.32 ne limite pas les facteurs que le ministre peut prendre en compte afin de déterminer si un projet est contraire à l’intérêt public — La Loi ne confère pas un droit inconditionnel de construire un aérodrome — La demanderesse ne peut donc invoquer le caractère prétendument permissif de la Loi ou son droit de construire un aérodrome pour restreindre la portée du pouvoir conféré au ministre par l’article 4.32 — Les art. 307.1 à 307.10 du Règlement n’épuisent pas les facteurs que le ministre peut prendre en considération ni ne limitent les catégories de personnes dont le ministre peut écouter la voix — La consultation prévue par le Règlement n’épuise pas l’intérêt public et n’est pas un gage d’acceptabilité sociale — Le ministre pouvait donc, en exerçant le pouvoir prévu à l’art. 4.32, tenir compte de facteurs que la demanderesse range sous la rubrique de l’acceptabilité sociale — De plus, la manière dont le ministre a soupesé ces facteurs était raisonnable dans les circonstances — La demanderesse n’a fait valoir aucun principe de droit constitutionnel susceptible d’étayer une limite aux pouvoirs du ministre — Demande rejetée.

11316753 Canada Association c. Canada (Transports) (T-942-20, 2021 CF 819, juge Grammond, motifs du jugement en date du 4 août 2021, 39 p.)

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