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Langues officielles

Demande de recours fondé sur l’art. 77 de la Loi sur les langues officielles, L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 31 (Loi), à l’encontre de la défenderesse, en vue d’obtenir un jugement déclaratoire, des dommages‑intérêts et une lettre d’excuses au motif que la défenderesse ne s’est pas conformée aux obligations que la Loi lui impose — La Loi relative aux cessions d’aéroports, L.C. 1992, ch. 5, permet au gouvernement de céder un aéroport à une « administration aéroportuaire désignée » et précise les modalités de l’application de certaines lois à cette administration — L’art. 4(1) de la Loi relative aux cessions d’aéroports prévoit l’application de la Loi — L’affaire en l’espèce tirait son origine de plaintes déposées par le demandeur reprochant à la défenderesse, entre autres choses, de n’être présente qu’en anglais sur les médias sociaux, de publier ses communiqués de presse en anglais seulement et de rendre certains documents, dont ses rapports annuels et son plan de développement, disponibles en anglais seulement sur son site Web — Il s’agissait de savoir si le demandeur a établi une violation de la Loi au moment de ses plaintes — La défenderesse a violé la Loi — Les art. 22 et 23 de la Loi, respectivement, imposaient au siège ou à l’administration centrale de la défenderesse de communiquer avec le public dans les deux langues et imposaient à l’aéroport d’offrir des services aux voyageurs dans les deux langues — En principe, une administration aéroportuaire doit se conformer à toutes les dispositions d’une partie de la Loi qui lui est rendue applicable — Le législateur a utilisé à dessein les termes « administration » et « aéroport » à l’art. 4(1) — Les administrations aéroportuaires sont assimilées à toute autre institution fédérale assujettie à la Loi — Les mots « l’aéroport est assimilé aux bureaux de cette institution, à l’exclusion de son siège ou de son administration centrale » à l’art. 4(1) énoncent une présomption selon laquelle l’aéroport est considéré comme un bureau et non comme le siège de l’administration, peu importe où le siège se trouve par rapport à l’aéroport — L’application de la Loi ne dépend donc pas du fait que le siège de l’administration aéroportuaire est situé dans les locaux de l’aéroport ou ailleurs — Rien à l’art. 4(1) ne suggère qu’une administration aéroportuaire serait dépourvue de siège aux fins de l’art. 22 de la Loi — Si l’achalandage annuel d’un aéroport dépasse le million de passagers, c’est l’art. 23 qui s’applique — En l’espèce, l’aéroport de St. John’s a satisfait aux critères de la demande importante uniquement en ce qui a trait à l’art. 23 — Afin de déterminer si un service ou une communication est visé par l’art. 23, il ne faut pas se demander s’il est « utile aux voyageurs », en ce sens que le service ou la communication est lié au voyage lui‑même — Il faut plutôt se demander si ce service ou cette communication est offert ou destiné aux voyageurs, en ce sens que ses destinataires ou bénéficiaires sont en totalité ou en partie importante des voyageurs — La défenderesse a admis qu’au moment des plaintes, de nombreuses pages n’étaient pas disponibles en français ou ne présentaient pas un contenu de qualité égale dans les deux langues — Elle a également admis que ces renseignements « utiles aux voyageurs » auraient dû être publiés dans les deux langues sur les médias sociaux — La défenderesse a violé l’art. 22 de la Loi en publiant ses rapports annuels et ses plans de développement en anglais seulement — La préparation et la publication de rapports annuels, de plans de développement et de communiqués de presse est une fonction intimement rattachée au siège de la défenderesse — La défenderesse a violé l’art. 22 en ne publiant ces documents qu’en anglais — La grille d’analyse proposée par la Cour suprême dans l’arrêt Vancouver (Ville) c. Ward, 2010 CSC 27, [2010] 2 R.C.S. 28, a été appliquée dans la présente affaire pour déterminer s’il était convenable et juste de condamner la défenderesse à payer des dommages‑intérêts — La défenderesse a fait valoir que l’absence de préjudice personnel empêche le demandeur de réclamer des dommages‑intérêts à quelque titre que ce soit — Toutefois, cette position était incompatible avec la structure de la Loi et les fonctions de dissuasion et de défense des droits qui sous‑tendent l’octroi de dommages‑intérêts en vertu de l’art. 77 de la Loi — La conception étroite de la défenderesse rendrait en pratique impossible l’octroi de dommages‑intérêts et découragerait le recours à l’art. 77 — En l’espèce, l’octroi de dommages‑intérêts poursuit un objectif de dissuasion — À la lumière de l’ensemble de ces circonstances, il était convenable et juste de condamner la défenderesse à verser des dommages‑intérêts au demandeur — Demande accueillie.

Thibodeau c. Administration de l’aéroport international de St. John’s (T-1023-19, 2022 CF 563, juge Grammond, motifs du jugement en date du 21 avril 2022, 37 p.)

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