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GRC

Pensions — Contrôle judiciaire d’une décision rendue par le Centre des pensions du gouvernement du Canada (le Centre des pensions) au titre de la Loi sur la pension de retraite de la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C. (1985), ch. R-11 (la Loi sur la pension de retraite), selon laquelle l’appelant n’avait droit qu’au remboursement des contributions avec intérêts à la suite de sa démission — Le demandeur était un agent de la GRC qui a été déclaré coupable par le comité de déontologie de la GRC d’avoir contrevenu au code de déontologie établi en vertu de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C. (1985), ch. R-10 (la Loi sur la GRC) — Le demandeur a démissionné dans le délai de 14 jours qui lui a été accordé par le comité de déontologie — Il a subséquemment reçu du Centre des pensions deux trousses d’information l’avisant de ses droits aux termes de la Loi sur la pension de retraite — À la lumière de la première trousse, le demandeur a choisi le paiement en une somme globale de la valeur de transfert — Il s’est désisté de l’appel qu’il avait déposé à l’égard de la décision du comité de déontologie, parce qu’il ne pourrait toucher la valeur de transfert pendant que son appel serait en cours — Le défendeur a affirmé que l’avis du Centre des pensions concernant le droit du demandeur à un transfert de la valeur reposait sur une compréhension erronée du droit à pension de celui-ci — En conséquence, le Centre des pensions a fait parvenir au demandeur une seconde trousse d’information fondée cette fois-ci sur l’application de l’art. 11(4) de la Loi sur la pension de retraite au droit à pension du demandeur — Le paiement d’une valeur de transfert n’était pas mentionné dans cette trousse — Le demandeur a demandé un remboursement de contributions avec intérêts en signant un formulaire en ce sens et il a expressément renoncé à son droit à une éventuelle annuité viagère — Le demandeur a contesté l’application de l’art. 11(4) par le Centre des pensions, soutenant qu’il avait droit à la valeur de transfert de sa pension — Le Centre des pensions a déclaré dans sa décision que l’emploi ayant pris fin par suite d’une inconduite, l’art. 11(4) a été appliqué — Le demandeur a soutenu qu’il avait droit à la valeur de transfert de ses droits à pension en raison de l’art. 12.1 de la Loi sur la pension de retraite, qui s’applique, selon les mots introductifs de cette disposition, « [m]algré les autres dispositions de la présente loi » — Il s’agissait principalement de savoir si la décision du Centre des pensions était raisonnable — Le demandeur a droit, en vertu de la disposition légale, à une valeur de transfert, parce qu’il respecte les cinq conditions préalables énoncées à l’art. 12.1(1) de la Loi sur la pension de retraite — Les mots introductifs de l’art. 12.1 ont une importance cruciale en ce qui a trait à la contrainte juridique en l’espèce — L’ajout des mots « [m]algré les autres dispositions de la présente loi » a pour effet d’éliminer toute ambiguïté entre l’art. 12.1 et les autres dispositions de la Loi sur la pension de retraite — L’art. 12.1 s’applique malgré « les autres dispositions de la » Loi sur la pension de retraite., ce qui comprend l’art. 11(4) — De plus, le paiement de la valeur de transfert d’une pension à un contributeur (même à celui qui est retraité pour motif d’inconduite) va de pair avec le principe d’interprétation général selon lequel une loi conférant des avantages devrait recevoir une interprétation libérale et généreuse en faveur de ceux qui ont droit aux avantages de cette loi — Les pensions à prestations déterminées sont une forme de rémunération différée — Il faut une disposition légale explicite pour priver le contributeur d’un régime de retraite de façon générale de son droit à la rémunération différée qu’il a gagnée et qu’il toucherait par ailleurs — Par suite de la décision du Centre des pensions, les contributions personnelles du demandeur au titre de sa pension sont remboursées avec intérêts, mais la rémunération différée qu’il a gagnée est perdue — Ce résultat doit être fondé sur une disposition légale claire et explicite — Non seulement le texte explicite nécessaire pour priver le demandeur de la rémunération différée à laquelle il aurait droit ne figure-t-il pas à l’art. 12.1, mais cette disposition énonce précisément le contraire en raison de l’exception introduite dès le départ par les mots « [m]algré les autres dispositions de la présente loi » — Compte tenu de la contrainte juridique, il était déraisonnable de la part du Centre des pensions de nier au demandeur le droit à la valeur de transfert de sa pension — Les mots introductifs « [m]algré les autres dispositions de la présente loi » de l’art. 12.1(1) sont précis et non équivoques — L’interprétation qu’a donnée le Centre des pensions à l’art. 11(4) de la Loi sur la pension de retraite allait à l’encontre de la jurisprudence qui fait autorité (Re Thompson and Town of Oakville, Re Ruelens and Town of Oakville, [1964] 1 O.R. 122, (1963), 41 D.L.R. (2d) 294 (H.C.J.)) et de l’objet que visait le législateur en prévoyant une pénalité moindre à l’art. 11(4), soit la démission dans le délai de grâce de 14 jours — La décision en litige en l’espèce constitue une nouvelle interprétation qui, en pratique, signifie que les membres de la GRC ne peuvent recevoir qu’un remboursement de contributions, indépendamment de la question de savoir s’ils démissionnent dans le délai de grâce de 14 jours ou s’ils sont congédiés — L’interprétation qu’a donnée le Centre des pensions à l’art. 11(4) a réuni les concepts distincts de la démission et du congédiement en un seul — En raison de sa démission, le demandeur n’était pas visé par l’art. 11(4), eu égard à la contrainte juridique applicable — L’affaire a été renvoyée au Centre des pensions pour qu’il établisse la valeur précise de la prestation de valeur de transfert — Demande accueillie.

Girard c. Canada (Procureur général) (T-1269-21, 2022 CF 578, juge Brown, motifs du jugement en date du 21 avril 2022, 40 p.)

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