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Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA FRANÇOIS ALBERT ANGERS APPELLANT; 1956 AND May24 1957 THE MINISTER OF NATIONAL RESPONDENT. Mar.4 REVENUE 1 RevenueIncome TaxExemptionsFamily AllowancesDependent child "qualified for family allowances"—Constitutional LawThe Income War Tax Act, R.S.C. 1927, c. 97, ss. 2(1)(a), 5(1)(d) as amended by S. of C. 1947, c. 63, ss. 1 and 4The Family Allowances Act, 1944, S. of C. 1944-45, c. 40 as amended by S. of C. 1946, c. 60, s. 1B.N.A. Act, ss. 91, 92(13), 93. The appellant, who as a matter of principle omitted to register his dependent children under The Family Allowances Act, 1944, in his 1948 income tax return claimed an exemption of $300 for each such child. The Minister reduced the exemption to $100 for each child and the taxpayer appealed from the assessment to the Income Tax Board. The Board dismissed his appeal and ruled that although the children were ineligible for allowances because they were not registered under the Family Allowances Act, they could have been so registered, and under the Income War Tax Act, s. 2(1), each was "a child qualified for family allowances", and under s. 5(1) (d) of that Act the exemption allowed for such a child was $100. The appellant appealed from the Board's decision on the grounds that The Family Allowances 89511-1ia
84 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1957] '1957 Act, 1944 as amended, and ss. 2(1) and 5(1).(d) of the Income War Tax ANGERS Act as amended, are ultra vires the Parliament of Canada in that the allowances provided by The Family Allowances Act, 1944 constitute MINISTER OF an attack upon the legislative attributes of the Provinces in the matter NATIONAL of civil rights and family authority; and that ss. 2(1) (a) and 5(1) (d) ' REVENUE of the Income War Tax Act as amended is a coercive measure whose effect is to compel a taxpayer to register his dependent children under The Family Allowances Act or be penalized, something the Family Allowances Act itself does not do. Held: That both the Family Allowances Act, 1944, and all the sections of the Income War Tax Act are within the legislative competence of the Parliament of Canada. 2. That The Family Allowances Act, 1944, a national benevolent measure assimilated in the "good government of Canada" clause (s. 91, the British North America Act), does not tend to establish compulsory school attendance nor to reserve to itself the supervision or training of the child student and in no way alters the base of parental authority or of family law in the Province of Quebec, nor was any proof adduced that it did so. 3. That s. 91(3) of the British North America Act vests in the Parliament of Canada the authority to raise money by any mode or system of taxation and under such authority Parliament's right to exempt from taxation is equal to its right to impose taxation. 4. That when the Income War Tax Act by direct or nominal reference to another statute imposes a tax however onerous in the circumstances, the latter statute is not altered or changed in any way but takes effect within the strict limits of its own context. APPEAL from a decision of the Income Tax Appeal Board (1). The appeal was heard before the Honourable Mr. Justice Dumoulin at Montreal. Jean Casgrain, Q.C. for appellant. A. J. Campbell, Q.C. and Guy Favreau, Q.C., for respondent. DUMOULIN J.:—Cette cause fut entendue à Montréal le 24 mai 1956. L'appelant interjette appel d'une décision de la Commission d'appel de l'Impôt sur le revenu, rendue le 19 jan-vier 1951 (1), qui maintenait l'imposition sur ses revenus taxables pour l'année 1948, d'une somme de $509.31. En 1948, M. François-Albert Angers avait à sa charge quatre enfants dont les âges s'échelonnaient de 11 à 2 ans. (1) (1951) 3 Tax A.B.C. 333; 51 D.T.C. 83. (1) (1951) 3 Tax A.B.C. 333; 51 D.T.C. 83.
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA "Volontairement, et par respect de ses principes, écrit 1957 l'appelant à l'article 2 de l'avis d'appel (Les Faits), il ANGERS, omit d'inscrire ou enregistrer ses quatre enfants . . . sous MIN STEA OF le régime de la Loi de 1944 sur les allocations familiales NATzo NAI. IiEVE NIIE et aucune allocation familiale n'a jamais été réclamée ou Dumoulin.". perçue de leur chef ..." A l'article 3, nous lisons que "dans la déclaration de son revenu imposable pour l'année 1948, aux fins de la loi de l'impôt de guerre sur le revenu, l'appelant déduisit la somme de $1,200 correspondant dans l'espèce à l'exemption statutaire de $300 pour chaque enfant âgé de moins de 18 ans et entièrement à la charge du contribuable; et sur cette base il établit et paya son impôt pour ladite année en la somme de $349.31." Il s'ensuivit des tractations entre M. Angers et le dépar-tement qui, finalement, fixa à $509.31 l'impôt pour l'année 1948, avec supplément de $167.34 à titre d'intérêts et de pénalité. Lors de l'audition, l'appelant a déclaré que le motif de sa contestation en était un d'ordre moral bien plus que d'ordre pratique. Cette contestation peut se subdiviser comme ci-après: 1En ma qualité de chef de famille, soutient l'appelant, je refuse les prestations mensuelles prévues par la Loi de 1944 sur les allocations familiales, la tenant pour attentatoire aux attributions législatives des provinces en matière de droits civils et de puissance paternelle; 2Je réclame, par ailleurs, l'exemption de $300 que la Loi de l'impôt de guerre sur le revenu accorde en certains caspour chacun des enfants à charge; 3Enfin, je tiens pour invalide la partie amendée de l'article 5 de la loi précitée limitant l'exemption à $100 "si l'enfant ... était qualifié aux fins des allocations familiales", parce que pareille restriction rendrait coercitive la mesure permissive des allocations fami-liales. D' ces conclusions: "Que la loi de 1944 sur les allocations familiales est ultra vires du Parlement fédéral, inconstitutionnelle et nulle;
86 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1957] 1957 Et, tout particulièrement, que les dispositions contenues ANGERS dans les articles 2(1) (a) et 5(1) (d) de la Loi de l'impôt de MINIs v m ' E R OF guerre sur le revenu ayantpour effetde P p énaliser, en u x .a l réduisant l'exemption normale, le contribuable dont l'enfant âgé de moins de 16 ans et à sa charge n'est pas inscrit sous ]Dumoulin J. l e régime de la Loi des allocations familiales, sont irrégu-lières, inconstitutionnelles et nulles". L'étude à faire se scinde donc en deux parties, portant sur: A) La légalité de la Loi des allocations familiales en ses textes applicables à l'espèce, ceux du statut fédéral de 1944-45 (8-9 Geo. VI, c. 40) et de l'amendement apporté en 1946 (10 Geo. VI, c. 50); B) La légalité des dispositions fiscales contenues dans les articles 2 (1) (a) et 5 (1) (d) de la Loi de l'impôt de guerre sur le revenu (S.R.C. 1927, c. 97 et les amende-ments applicables à l'année d'imposition 1948, ceux, notamment, apportés en 1947 par le statut 11 Geo. VI, c. 63) . A) LA LOI DES ALLOCATIONS FAMILIALES Citons dès maintenant les principales dispositions que l'appelant argue d'illégalité. S.R.C. 1944-45, 8-9 Geo. VI, c. 40. 3. A compter du premier jour de juillet mil neuf cent quarante-cinq et sous réserve des dispositions de la présente loi et des règlements d'exécution, il peut être versé ... à l'égard de chaque enfant résidant au Canada et entretenu par un parent, l'allocation mensuelle suivante: (cédule des prestations). Quant à la définition de l'expression "parent", nous la lisons au sous-paragraphe f) de l'article 2: f) "parent" désigne un père, un beau-père (stepfather), un père adoptif, un père nourricier, une mère, une belle-mère (stepmother), une mère adoptive, une mère nourricière ou toute autre personne qui entretient un enfant ou en a la garde, mais ne comprend pas une institution. * * * 4. L'allocation n'est payable qu'après l'enregistrement de l'enfant; .. . elle doit être versée à un parent en conformité des règlements (édictés par le gouverneur en conseil conformément à la présente loi: 2(h)), ou à l'autre personne autorisée à la recevoir sous le régime ou en vertu des règlements. * * *
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 87 5. La personne qui reçoit l'allocation doit l'affecter exclusivement. à 1957 l'entretien, au soin, à la formation, à l'instruction et à l'avancement de A N "- G -Exs l'enfant, et, si le Ministre, ou le fonctionnaire que les règlements autorisent v. à cet égard, est convaincu que l'allocation n'est pas ainsi affectée, le verse- Mn isTEa os ment en doit être discontinué ou fait à quelque autre personne ou NATIONAL organisme . Dumoulin J. S.R.C. 1946, 10 Geo. VI, c. 50. 4. (2) a) L'allocation cesse d'être payable si l'enfant ne fréquente pas assidûment l'école selon les prescriptions des lois de la province il réside, ou ne reçoit pas la formation qui, de l'avis de l'autorité compétente en matière d'enseignement désignée par cette province ... constitue une formation équivalente à celle qu'il recevrait s'il fréquentait l'école; toute-fois, lorsque l'autorité compétente de la province en matière d'enseignement ne fournit pas les renseignements qui peuvent être demandés sur la fréquentation scolaire ou la formation équivalente, le gouverneur en con-seil peut prescrire la manière d'obtenir lesdits renseignements. Les griefs de l'appelant à l'égard de ces dispositions législatives sont résumés à l'article 6 de l'avis d'appel; je pense qu'il suffira de reproduire ce raccourci pour en donner une idée juste: 6. En somme, fait-il, la Loi des allocations familiales tend à établir la fréquentation scolaire obligatoire, jusqu'à l'âge de 16 ans [4)2) (c) de 1946, c. 50] ; s'assure la direction, ou du moins depuis 1946 la surveillance, de la formation des enfants qui ne fréquentent pas l'école; modifie les principes du droit civil relativement à la puissance paternelle, et trans-forme le droit familial de la province. Est-il besoin d'ajouter que la pièce précitée fait allusion au paragraphe 13 de l'article 92 de l'Acte de l'Amérique Britannique du Nord, édictant le monopole législatif des provinces à l'endroit de la propriété et des droits civils, et l'article 93 qui confère aux états provinciaux une action exclusive en fait de législation éducationnelle. Il arrive que l'ardeur des convictions projette des reflets qui imprécisent le sens coutumier des expressions, laissant pressentir des conséquences la cause même fait défaut. Plus simplement, que de fois, et sans intention préconçue, n'impose-t-on pas aux vocables de tous les jours un langage qui leur est étranger! Et que de fois encore, ne prend-on pas pour établi précisément ce qu'il fallait démontrer. En plein Conseil d'Etat, Bonaparte reprochait aux juristes de faire témoigner les mots et non les faits. Cette réserve dûment posée, recherchons premièrement si la Loi des allocations familiales, dans son essence, sub-stantivement, est une mesure éducative.
88 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1957] 1957 A moins de nier à l'autorité centrale toute initiative sauf ANGERS celles de taxer, d'administrer, d'assurer la défense du pays, MIN STEROF il faut bien lui reconnaître, en thèse générale, la faculté NATIONAL d'affecter certaines sommes d'argent à des nécessités sociales, REVENUE "relativement à toutes les matières ne tombant pas dans les Dumoulin J. catégories de sujets exclusivement assignés aux législatures des provinces", selon l'avertissement de la constitution. A ce point, une question primordiale surgit: qu'est-ce qu'une loi scolaire? quels en doivent être les traits spécifi-ques et individualisants? Sans prétendre à une définition, laissons plutôt à l'expé-rience usuelle le soin de répondre. Serait une loi sco-laire, celle qui, sur un territoire donné, tracerait les cadres organiques de l'instruction, arrêterait les qualifications du corps enseignant, désignerait les éléments du programme, graduerait l'ordre diversifié des études, déterminerait les attestations officielles: immatriculation, baccalauréat et les conditions de réussite, qui, enfin, décréterait l'âge et la nature de la fréquentation scolaire, telle, par exemple, la Loi de l'Instruction publique de la Province de Québec. Il importe ensuite de ne pas confondre la sanction d'une loi impérative (mandatory law) avec la condition d'une mesure facultative d'assistance (directory law), comme il en va de la Loi des allocations familiales. La première astreint sous peine de ... , la seconde offre pourvu que ... Cette approximation, je l'ose croire, semble assez juste. Le Parlement canadien, que rien n'oblige à ce faire, porte cependant une loi pour aider "à l'entretien, au soin, à la formation, à l'instruction et à l'avancement de l'enfant ...". Rien de bien étrange à ce que l'autorité, qui dispensera mensuellement ces deniers publics, veuille le faire à bon escient, recherche un récipiendaire convenable, écartant les parents indignes ou imprévoyants, comme le sort veut qu'il s'en rencontre parfois. On n'attente point pour autant au droit familial; la puissance paternelle et l'indignité sont des réalités antinomiques, exclusives l'une de l'autre. Le légis-lateur estime aussi que l'enfant de moins de 16 ans, sain de corps et d'esprit, qui n'irait pas à l'école, en serait un dont "le soin, la formation et l'avancement" accuseraient d'inquiétantes lacunes. Qui pourrait y contredire? Avons-nous ici une stipulation coercitive de scolarité obligatoire
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 89 ou simple déclaration que la loi entend souscrire à la forma-1957 tion des adolescents quand formation sérieuse il y a. ANGEL V. Puis, quelle est l'école dont la fréquentation constituera, MINISTER OF NA TIG NAL au regard de la loi, la norme d'appréciation d'une formation REVENIIE adéquate? Nous l'avons vu, ce sera l'école régie "selon les Dumoulin J. prescriptions des lois de la province l'enfant réside". Est-ce porter atteinte à l'autorité exclusive des provinces en matières scolaires? ou, plutôt, ne serait-ce point la reconnaissance explicite et tangible de cette unicité législative? Advenant que l'enfant n'irait pas à l'école, le. "parent" touchera quand même les allocations à une condition près. Quelle condition? Que le "moins de seize ans" reçoive, par ailleurs, une formation qui "de l'avis de l'autorité com-pétente en matière d'enseignement désignée par cette pro- vince ... constitue une formation équivalente à celle qu'il recevrait s'il fréquentait l'école . . ." [S.R.C. 1946, 10 Geo. VI, c. 50, art. 4(2)a)]. Notons bien la réitération presque redondante, emphati-que en tout cas, que le régime des allocations familiales sera conditionné par l'absolue reconnaissance des prescriptions provinciales quant au degré d'assiduité à l'école il faudra s'inscrire, à l'intégralité de fond et de forme de l'instruction dispensée, enfin, quant à la désignation du fonctionnaire compétent à décider, le cas échéant, de l'équivalence d'une éducation extra-scolaire. L'article 4(2)a) dit encore: . . . toutefois, lorsque l'autorité compétente de la province en matière d'enseignement ne fournit pas les renseignements qui peuvent être demandés sur la fréquentation scolaire ou la formation équivalente, le gouverneur en conseil peut prescrire la manière d'obtenir lesdits renseignements. Quelles raisons "l'autorité provinciale compétente en matière d'enseignement" pourrait-elle avoir de taire ces informations au sujet de l'assiduité des enfants ou de ce qui constituerait une formation équivalente à l'enseignement régulier? Aucune raison, assurément, au sujet de l'équiva-lence de l'instruction. Affaire de discrétion peut-être dans le cas de la présence à l'école, mais de solution facile.
90 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1957] 1957 Cependant, avec ou sans motifs, le fonctionnaire pro- ANGEss vincial demeure libre comme l'air de fournir ou de refuser s v. MIN TEE ces précisions. Donc aucune entreprise d'un pouvoir sur NATIONAL REVENUE l'autre. Dumoulin J. La seule sanction de communications défavorables entraî-nerait le tarissement des mensualités versées par le trésor fédéral, mais elle ne saurait influer sur les lois scolaires des provinces ni sur les dispositions des parents. Enfin, on formule ce reproche que ... même après 1946 la loi fédérale n'en continue pas moins à confier au gouvernement fédéral la haute surveillance de la fréquentation scolaire et le droit d'apprécier la formation équivalente, en lui permettant d'intervenir directement à la place de l'autorité provinciale compétente, pour se ren-seigner et porter jugement en matières purement éducationnelles. Reprenons patiemment chacun des griefs articulés en fonction de l'ultime disposition incluse dans le paragraphe 2(a) de la loi de 1946 (10 Geo. VI, c. 50) et dont la teneur suit: 2(a) . . . lorsque l'autorité compétente de la province en matière d'enseignement ne fournit pas les renseignements qui peuvent être demandés sur la fréquentation scolaire ou la formation équivalente, le gouverneur en conseil peut prescrire la manière d'obtenir lesdits renseignements. Or que peut-on ainsi prescrire, par suite du refus préalable de l'autorité provinciale à renseigner sur des faits de nature aussi peu secrète que les indices de fréquentation scolaire ou les programmes d'études? Rien d'autre chose, d'abord que de rechercher si tel enfant suit avec une suffisante assiduité l'école "selon les prescriptions des lois de la province il réside". Il semblerait que des précisions de pareil ordre soient objets de statistiques, accessibles au grand public comme aux institutions scientifiques américaines, l'Institut Rockefeller, entre autres, qui, nul ne l'ignore, proportionne ses subventions au nombre des inscriptions universitaires. On ne m'a pas fait voir que le gouverne-ment du Canada dût être sur un pied de défaveur à cet égard et moins bien traité que tel organisme du New Jersey ou du Michigan, ni que l'Institut Rockefeller exerçât pour ' autant "la haute surveillance de la fréquentation scolaire". Et que faut-il entendre par "le droit d'apprécier la formation équivalente" sinon que l'expression "droit", en fonction
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 91 de la loi attaquée, n'est assurément pas usitée selon son 1957 acception technique et signifie tout simplement cette libre ANGERS faculté à qui veut en user de comparer entre eux les sys- MINIs x OF tèmes éducationnels des provinces. NATIONAL REVENUE Supposé que, dans l'opinion de ce problématique fonc- in°,11ir<J' tionnaire fédéral, l'éducation extra-curriculum de l'enfant n'équivaille point à celle des écoles provinciales, quelle sanction appliquera-t-on? Voici la pierre de touche. Le gou-vernement fédéral voudra-t-il insinuer, en tierce partie, entre le programme officiel de la province et le choix, médiocre ou mauvais, des parents, son propre système? la loi n'indique rien de tel; elle ne prévoit d'autre con-séquence que l'interruption de l'aide mensuelle. Intéressé à la formation adéquate et saine des générations crois-santes, le gouvernement du pays engage les chefs de famille à respecter les directives de l'autorité provinciale pour tout ce qui relève de la scolarité. Et s'il en va de la sorte, le gouvernement central se déclare prêt à aider pécuniairement, sinon l'aide, devenue inopérante, sera discontinuée. Une fois encore, le moyen de diagnostiquer en tout ceci une initiative d'ordre scolaire? Au surplus on n'a déféré à mon examen aucun fait attentatoire à l'autorité des parents ni à la répartition constitutionnelle des attributions législatives. Que, par la suite, des irrégularités ou certaines manoeuvres abusives, viennent à se produire, la chose reste possible. Les juges du temps en décideront. En ce qui me concerne, je ne puis préjuger l'avenir et, je le répète, aucun incident repréhensible ne me fut relaté en preuve. A l'égard de cette première proposition, la conclusion sera que la loi des allocations familiales, mesure de bien-faisance nationale, qui s'assimile aux exigences du "bon gouvernement du Canada" (Acte de l'Amérique britanni-que du Nord, art. 91), ne tend pas à établir la fréquenta-tion scolaire obligatoire, ne s'arroge point la surveillance ni la formation de l'enfance étudiante, et ne modifie, en aucune manière, les bases de la puissance paternelle ou le droit- familial de la Province de Québec. Joignez que ce premier point n'en était pas uniquement un de droit, mais requérait la corroboration d'incidences de fait. On n'attente pas à des principes fondamentaux comme ceux de la puissance paternelle, du droit familial;
92 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1957] 1957 on ne modifie point le système scolaire de l'Etat, sans ANGERS creuser pour autant des traces perceptibles. Or, aucune MINI6 v T ' E ft OF preuve ne fut tentée, nul exemp l e concret ne fut rap l~ p P o rté. NATIONAL REVENUE B) LA LOI DE L'IMPÔT DE GUERRE SUR LE Dumoulin J. REVENU S.R:C., 1927, c. 97 et ses amendements applicables à l'année d'imposition 1948, notamment la loi 1.1 Geo. VI (1947), c. 63, articles 2(1)a) et 5(1)d). En fonction de cette seconde proposition de droit, l'appelant demande: Subsidiairement, que toute disposition législative tendant à rendre ou ayant pour effet de rendre obligatoire l'application de la loi de 1944 sur les allocations familiales est ultra vires du Parlement fédéral, inconstitu-tionnelle et nulle. Cette conclusion s'étaye sur des prémisses dont l'inclusion partielle est nécessaire à la compréhension de l'argument. L'on soumet que: 8.... dans l'hypothèse que la Loi des allocations familiales, qui elle-même n'impose pas son application, serait considérée valide dans sa forme permissive, l'appelant soutient que l'intervention d'une autre loi fédérale pour la rendre obligatoire constitue une combinaison irrégulière et inconstitutionnelle. ... Aux termes de l'article 5(1)d), en effet, le contribuable n'a droit qu'à une exemption de $100 par enfant dit "qualifié aux fins des allocations familiales", alors que tout autre enfant âgé de moins de 18 ans et à sa charge lui donne droit à une exemption de $300. 10. Il résulte donc de ces dispositions de la Loi de l'impôt de guerre sur le revenu que l'enfant âgé de moins de 16 ans qui n'est pas inscrit sous le régime de la Loi des allocations familiales et ne bénéficie pas d'allocations, tels les 4 enfants susnommés de l'appelant, est censé, contre toute vérité, avoir été ainsi inscrit et avoir bénéficié d'allocations. L'impôt sur le revenu, décrété par la loi fiscale, grève im revenu qui, de son propre aveu, n'existe pas. Et la perte d'exemption infligée au contribuable le pénalise d'avoir éludé une loi familiale qui ne l'obligeait pas. Reproduisons maintenant les textes de loi incriminés, savoir les articles 2(1) (a) et 5 (1) (d) du Statut de 1947, 11 Geo. VI, chapitre 63. 2a) l'expression "enfant qualifié aux fins des allocations familiales" signifie un enfant qui, dans le dernier mois de l'année d'imposition à l'égard de laquelle s'applique l'expression, était qualifié ou aurait pu l'être par l'enregistrement sous le régime de la Loi de 1911 sur les allocations familiales, de sorte qu'une allocation en vertu de cette loi était ou aurait pu être payable à l'égard de ce mois ou du mois suivant. * * * 5(1)d) pour chaque enfant ou petit-fils ou petite-fille du contribuable; lequel était, pendant l'année d'imposition, entièrement à la charge de ce dernier pour son soutien, et était
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA 93 (i) âgé de moins de dix-huit ans, [ce contribuable aura droit à 1557 une exemption del cent dollars si l'enfant ou le petit-fils ou ANGERS la petite-fille était un enfant qualifié aux fins des allocations v. familiales et trois cents dollars si l'enfant ou le petit-fils ou la MINISTER OF NATIONAL petite-fille n'était pas un tel enfant. REVENUE L'appelait, on le sait, a refusé les prestations mensuelles, Dumoulin J. déférant en cela à ses opinions, pour s'en tenir aux déduc- tions statutaires de $300 par tête, consenties, dans les hypothèses prévues, aux contribuables dont les enfants ne sont plus "qualifiés aux fins des allocations familiales". L'article 91 de la constitution de 1867 édicte que: . . . l'autorité législative exclusive du Parlement du Canada s'étend à toutes les matières tombant dans les catégories de sujets ci-dessous énumérés ... 3. Le prélèvement de deniers par tous modes ou systèmes de taxation. Ce rappel d'une disposition législative aussi générale-ment connue n'avait d'autre objet que de souligner l'autonomie absolue du Parlement canadien dans les mesures fiscales de son ressort. Du reste cette souveraineté même ne fait, que je sache, l'objet d'aucune attaque; seul est incriminé le facteur subsidiaire et incident d'une exemption, $300, qui rendrait obligatoire l'acceptation de la Loi des allocations familiales. En tout ceci, il se glisse une part de confusion. Si le législateur, et l'avis contraire paraît insoutenable, est maître chez lui en l'occurrence, et qu'il faille le reconnaître pour seul arbitre de sa volonté, il importe non moins d'admettre comme de la plus intime essence de toute législation budgétaire le pouvoir de dresser, en regard des impôts, la cédule des dégrèvements appropriés. Raisonner autrement serait amputer cette prérogative d'un indispensable attribut. Pour tout dire, une loi générale de taxation serait-elle concevable ou élémentairement possible, sans ce complexe mécanisme de contrepoids que sont l'ensemble des déductions. Je ne puis me rallier à une opinion dif-férente. Le Parlement du Canada, dans l'exercice de sa responsabilité administrative, définit quelles seront les exemptions. La détaxe ressortit à son autorité au même titre que la taxe, avec une égale liberté de choix, Qui peut imposer peut aussi exempter. En pareil domaine une étanchéité absolue existe, déjouant toute interdépendance
94 EXCHEQUER COURT OF CANADA [1957] 1957 des lois, quels que soient, du reste, l'indice, l'assiette, la ANGERS norme, de la détaxe. Le principe de causalité manquant, v. MLN ISTER OF aucun pont ne relie une loi à l'autre. R EVENUE Quand donc l'impôt de guerre sur le revenu, par l référence littérale ou nominative à tel autre statut, gradue Dumou in J. un prélèvement, diversement onéreux selon les éventua-lités, il ne modifie pour autant ou n'informe en rien ce statut, mais il agit dans les strictes limites de son évolution propre. Je ne saurais accueillir pour fondée en droit l'allégation que les dispositions précitées de la Loi de l'impôt de guerre sur le revenu aient le sens et l'effet que l'avis d'appel leur suppose erronément. Cet avis réfère à trois causes. Celle du Procureur général du Manitoba et du Procureur général du Canada (1), le Conseil privé a déclaré inconstitutionnelle une loi à l'aide de laquelle cette province prétendait soumettre à l'autorisation préalable de la Commission des utilités publiques la vente de titres et valeurs par des compagnies possédant l'incorporation fédérale. Celle ensuite qui, par voie de référence à la Cour Suprême puis au Conseil privé, attaquait la validité de la Loi de l'assurance-chômage, avec le résultat que cet acte de législation fédérale fut infirmé, comme dérogeant à la prérogative provinciale en fait "de propriété et de droits civils" (2). La dernière référence traite encore d'un litige cons-titutionnel entre le Procureur général de l'Alberta et le Procureur général du Canada (3) . L'Alberta fut empêchée de frapper de droits le commerce de banque, pareille faculté relevant de la législation fédérale seule-ment. L'autorité des décisions rendues en dernière instance et, l'on me permettra de l'ajouter, mon intime conviction, font que j'adhère bien volontiers au principe énoncé en ces trois causes. En effet, il demeure interdit aux législa-tures fédérale ou provinciales de rechercher, par voies latérales, ce que la constitution soustrait à leur atteinte directe. Au surplus, ce n'était pas innover. Mais avais- (1) [1929] A.C. 260 à 267, 268. (2), [1937] A.C. 355, à 367. (3) [1939] A.C. 117, à 130.
Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA je une difficulté de cette nature à trancher, quant à savoir si la Loi des allocations familiales empiète ou pas sur l'initiative et le contrôle exclusif des provinces en matière d'éducation? Dans l'instance présente, l'examen des textes, l'analyse des faits, m'induisent à proclamer la constitutionnalité de la Loi des allocations familiales, celle aussi, et en tous ses articles, de la Loi de l'impôt de guerre sur le revenu, toutes deux de la compétence du Parlement canadien. Par les motifs qui précèdent, l'appel est rejeté; l'intimé aura droit à tous ses honoraires taxables. Jugement en conséquence. 95 1957 Ahanas MINIER OF NATIONAL REVENUE Du oulm. J.
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