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[2001] 2 C.F. 288

A-652-99

Banque Nationale de Grèce (Canada) (appelante/ demanderesse)

c.

Banque de Montréal (intimée)

et

Association canadienne des paiements (intimée/ intervenante)

Répertorié : Banque Nationale de Grèce (Canada) c. Banque de Montréal (C.A.)

Cour d’appel, juges Stone, Linden et Evans, J.C.A.— Ottawa, 13 décembre 2000.

Droit administratif — Contrôle judiciaire — Certiorari — Un groupe de l’Association canadienne des paiements a ordonné à l’appelante de payer à la Banque de Montréal (BM) le montant d’un chèque refusé pour le motif qu’il était sans provision — Le juge des requêtes a rejeté la demande de contrôle judiciaire sans se demander au préalable quelle était la norme de contrôle applicable — Une cour de justice doit toujours se pencher sur la norme de contrôle applicable avant d’examiner la décision d’un tribunal administratif — Le juge des requêtes aurait dû seulement se demander si la décision du groupe de l’observation selon laquelle la BM avait subi une « perte » était déraisonnable — Il n’a pas commis d’erreur en rejetant la demande — La conclusion du groupe selon laquelle la BM avait subi une « perte » n’était pas déraisonnable.

Institutions financières — Un groupe mis sur pied par l’Association canadienne des paiements (ACP) a jugé que la Banque Nationale de Grèce (Canada) avait contrevenu aux règles de l’ACP en retournant un effet impayé par la compensation plus d’un jour après le moment où elle avait été en mesure de décider de l’honorer ou non — Le juge des requêtes a fait droit à l’argument de l’ACP selon lequel la BM avait subi une perte — Il aurait dû seulement se demander si la décision du groupe était déraisonnable — Le groupe se composait de personnes familiarisées avec le système — Les dispositions législatives en cause sont propres aux institutions financières et ne font pas appel à des notions juridiques de portée générale — L’ordonnance n’excluait pas les recours en droit privé — Le système de compensation des chèques pourrait être compromis par des demandes de contrôle judiciaire — L’ACP est un organisme créé par une loi, et les banques sont légalement tenues d’en faire partie — La Cour est réticente à s’immiscer dans un régime de réglementation à caractère « intérieur ».

L’appel vise une décision de la Section de première instance rejetant une demande de contrôle judiciaire d’une décision d’un groupe de l’observation de l’Association canadienne des paiements (ACP) ordonnant à l’appelante, la Banque Nationale de Grèce (Canada) (BNG), de payer à l’intimée, la Banque de Montréal (BM), le montant d’un chèque qu’un client avait tiré sur l’appelante, mais que cette dernière a refusé de payer, le compte n’étant pas suffisamment provisionné. Le groupe a jugé que la BNG avait contrevenu à l’article 5 de la Règle A4 des Règles de compensation de l’ACP en retournant un effet impayé par la compensation plus d’un jour après le moment où elle avait été en mesure de décider de l’honorer ou non. Le juge des requêtes a rejeté la demande de contrôle judiciaire pour le motif que, aux fins de déterminer si la BM avait subi ou non une « perte » au sens de l’alinéa 8(2)d) de la Règle A11, il importait peu que la BM ait été en mesure ou non de contre-passer la somme créditée dans le compte de son client. Il a fait droit à l’argument de l’ACP selon lequel la BM avait subi une perte. La Cour d’appel devait déterminer si le groupe a commis une erreur de droit lorsqu’il a sanctionné l’inobservation en rendant l’ordonnance contestée.

Arrêt : l’appel est rejeté.

Le juge des requêtes a rejeté la demande de contrôle judiciaire visant la décision du groupe sans se demander tout d’abord quelle était la norme de contrôle applicable. Une cour de justice doit toujours se pencher sur la norme de contrôle applicable avant d’examiner la décision d’un tribunal administratif. Si elle ne le faisait pas et devait conclure ultérieurement, à partir d’une analyse pragmatique et fonctionnelle, que la retenue judiciaire est de mise, elle se serait méprise sur son rôle véritable et se serait posé la mauvaise question : la décision du tribunal administratif était-elle la bonne? En omettant de déterminer tout d’abord quelle est la norme de contrôle applicable, une cour de justice peut, sans le vouloir, entraver l’administration d’un cadre législatif par un tribunal dont les décisions ne sont pas assujetties à la norme de la décision correcte. Si la cour de justice saisie d’une demande de contrôle judiciaire conclut que l’interprétation de la loi habilitante par le tribunal est correcte, cette interprétation lie les autres formations et empêche subséquemment le tribunal d’adopter un point de vue différent. Par contre, si la cour conclut que, sans être déraisonnable, l’interprétation du tribunal n’est pas correcte, il sera extrêmement difficile pour le tribunal de s’en tenir à cette interprétation jugée « incorrecte » même si elle n’a pas justifié l’immixtion de la cour. Partant, il convient de circonscrire au préalable la norme de contrôle applicable à l’interprétation, par le groupe, de l’alinéa 8(2)d) de la Règle A11, lequel autorise le groupe à rendre une ordonnance de « restitution » lorsque le non-respect d’un règlement par un membre a infligé une perte à un autre membre.

Un certain nombre de raisons auraient dû inciter le juge des requêtes à se demander uniquement si la décision du groupe de l’observation selon laquelle la BM avait subi une « perte » était déraisonnable. Premièrement, le groupe se composait de trois employés de membres de l’ACP qui étaient familiarisés avec les systèmes de compensation et de règlement. Deuxièmement, le différend porte sur l’interprétation d’une disposition de la loi habilitante, laquelle n’est pas une « loi d’application générale », mais bien un ensemble de règles propres à un régime de réglementation spécialisé. Troisièmement, l’ordonnance contestée n’a pas dépouillé l’appelante de ses recours en droit privé soit contre la BM, soit contre le payeur ou le bénéficiaire du chèque. Quatrièmement, la raison d’être du régime de réglementation permet de conclure que le contrôle judiciaire doit être limité. La compensation des chèques et le règlement des opérations de manière expéditive pourraient être compromis si la partie lésée par une décision du groupe de l’observation pouvait présenter une demande de contrôle judiciaire afin que la Cour tranche de novo la question en litige. Cinquièmement, l’ACP est un organisme créé par une loi fédérale qui établit ses pouvoirs et ses obligations, et les banques sont tenues d’en faire partie. Les décisions du groupe de l’observation de l’ACP relèvent donc du droit public. Vu le caractère « intérieur » ou « privé » de ce régime de réglementation, la Cour devrait être plus réticente à modifier la décision ainsi rendue que celle d’un organisme de réglementation créé par la loi et dont la nature est manifestement plus externe, gouvernementale. Le juge des requêtes n’a pas commis d’erreur en rejetant la demande de contrôle judiciaire. La conclusion du groupe selon laquelle la BM avait subi une « perte » aux fins de l’alinéa 8(2)d) de la Règle A11 n’était pas déraisonnable. Pour déterminer si une perte avait été subie et si une ordonnance de restitution devait être rendue, il n’était pas déraisonnable que le groupe mette uniquement l’accent sur le compte de règlement de la BM auprès de la Banque du Canada et sur le compte de règlement de la BNG auprès de son agent de compensation, la Banque Royale.

LOIS ET RÈGLEMENTS

Loi sur l’Association canadienne des paiements, L.R.C. (1985), ch. C-21, art. 4 (mod. par L.C. 1999, ch. 28, art. 111), 5, 8, 9 (mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 46; 1999, ch. 28, art. 112), 18, 19.

Loi sur les lettres de change, L.R.C. (1985), ch. B-4.

APPEL d’une décision de la Section de première instance ((1999), 175 F.T.R. 232) rejetant la demande de contrôle judiciaire d’une décision d’un groupe de l’observation de l’Association canadienne des paiements ordonnant à l’appelante de payer à l’intimée, la Banque de Montréal, le montant d’un chèque refusé parce qu’il était sans provision. Appel rejeté.

ONT COMPARU :

Vassilios Giannis, pour l’appelante (demanderesse).

Personne n’a comparu pour le compte de l’intimée.

M. Lynn Starchuk, pour l’intimée (intervenante).

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Vassilios Giannis, Montréal pour l’appelante (demanderesse).

Meighen Demers s.r.l., Toronto pour l’intimée.

Osler, Hoskin & Harcourt s.r.l., Ottawa pour l’intimée (intervenante).

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement prononcés à l’audience par

[1]        Le juge Evans, J.C.A. : Aux fins du présent appel, la question est de savoir si un groupe de l’observation mis sur pied par le Comité national de compensation de l’Association canadienne des paiements (l’ACP) a commis une erreur en ordonnant à l’appelante, la Banque Nationale de Grèce (Canada) (la BNG) de payer à la Banque de Montréal (la BM) le montant d’un chèque (plus l’intérêt) qu’un client avait tiré sur l’appelante, mais que cette dernière a refusé de payer, le compte n’étant pas suffisamment provisionné.

[2]        Le groupe a jugé que la BNG avait contrevenu à l’article 5 de la Règle A4 (Effets retournés et réacheminés) de l’ACP en retournant un effet impayé par la compensation plus d’un jour après le moment où elle avait été en mesure de décider de l’honorer ou non. La conclusion du groupe selon laquelle l’appelante a omis d’observer cette disposition n’est pas contestée en l’espèce.

[3]        La Cour d’appel doit plutôt déterminer si le groupe a commis une erreur de droit lorsqu’il a sanctionné l’inobservation en exerçant le pouvoir que lui conférait l’alinéa 8(2)d) de la Règle A11 (Contrôle de la conformité) de rendre

Une ordonnance exigeant la restitution à un membre qui a subi une perte découlant directement du fait des actes ou des omissions d’un membre relevant de l’ACP. [Non souligné dans l’original.]

[4]        L’appelante fait valoir que la BM n’a subi aucune perte puisque le compte de son client, le bénéficiaire du chèque, renfermait suffisamment de fonds pour qu’elle contre-passe la somme créditée et s’indemnise ainsi de toute perte qu’elle aurait subie après avoir initialement porté au crédit de son client le montant du chèque subséquemment refusé.

[5]        Le juge des requêtes [(1999), 175 F.T.R. 232] a rejeté la demande de contrôle judiciaire pour le motif que, aux fins de déterminer si la BM a subi ou non une « perte » au sens de l’alinéa 8(2)d) de la Règle A11, il importait peu que la BM ait été en mesure ou non de contre-passer la somme créditée dans le compte de son client. L’ACP administre le système de compensation des chèques et de règlement des opérations entre ses membres conformément à la Loi sur l’Association canadienne des paiements, L.R.C. (1985), ch. C-21 (la Loi sur l’ACP), ainsi qu’aux règlements et règles adoptés par elle en vertu des articles 18 et 19. L’ordonnance rendue par un groupe de l’observation pour sanctionner le non-respect d’un règlement ou d’une règle ne prive pas les banques ou leurs clients de leurs droits et recours en droit privé pour ce qui concerne les titres négociables ou les rapports contractuels entre une banque et son client.

[6]        Le juge des requêtes a fait droit à l’argument de l’ACP selon lequel la BM avait subi une perte, car après que la BNG eut retourné par la compensation le chèque impayé, la BM a effectivement perdu auprès de la Banque du Canada le crédit qu’elle avait obtenu en créditant le compte de son client du montant du chèque et en présentant le chèque pour la compensation. Il a en outre invoqué le fait que, après que la BNG eut retourné le chèque contrairement aux règles, son compte de règlement auprès de son agent de compensation, la Banque Royale du Canada, avait été crédité de la somme en question. Même si elle a été constituée partie intimée, la BM n’a pas participé à la demande de contrôle judiciaire ni à l’appel.

[7]        Il est une question préjudicielle que ni les parties dans leurs mémoires ni le juge des requêtes n’ont examinée : quelle est la norme de contrôle applicable à l’interprétation de l’alinéa 8(2)d) de la Règle A11 par le groupe. On semble avoir tenu pour acquis que si la BNG établissait le caractère non fondé de son interprétation, le groupe serait réputé avoir commis une erreur de droit. Lorsque, à l’audience, la Cour a soulevé la question de la norme de contrôle applicable, l’avocat de l’appelante a soutenu que la norme de la décision correcte devait s’appliquer, car la question de savoir si la BM avait ou non subi une « perte » était une question de compétence que le groupe devait trancher correctement. Appelée à se prononcer à ce sujet, l’avocate de l’intimée a fait valoir que la Cour ne devait s’immiscer que si elle arrivait à la conclusion que l’interprétation du mot « perte » par le groupe était déraisonnable.

[8]        À notre avis, une cour de justice doit toujours se pencher sur la norme de contrôle applicable avant d’entreprendre l’examen de la décision d’un tribunal administratif. Si elle ne le faisait pas et devait conclure ultérieurement, à partir d’une analyse pragmatique et fonctionnelle, que la retenue judiciaire est de mise, elle se serait méprise sur son rôle véritable et se serait posé la mauvaise question : la décision du tribunal administratif était-elle la bonne?

[9]        En omettant de déterminer tout d’abord quelle est la norme de contrôle applicable, une cour de justice peut, sans le vouloir, entraver l’administration d’un cadre législatif par un tribunal dont les décisions ne sont pas assujetties à la norme de la décision correcte. Par conséquent, si la cour de justice saisie d’une demande de contrôle judiciaire concluait que l’interprétation de la loi habilitante par le tribunal est correcte, cette interprétation lierait les autres formations et empêcherait subséquemment le tribunal d’adopter un point de vue différent. Par contre, si la cour concluait que, sans être déraisonnable, l’interprétation du tribunal n’est pas correcte, il serait extrêmement difficile pour le tribunal de s’en tenir à cette interprétation jugée « incorrecte » même si elle n’a pas justifié l’immixtion de la cour. En outre, si la cour saisie d’une demande de contrôle judiciaire devait considérer au départ qu’il lui incombe d’interpréter correctement les dispositions en cause, elle n’aurait pas l’état d’esprit voulu pour jouer le rôle restreint qui lui est dévolu en matière d’interprétation.

[10]      Partant, il convient en l’espèce de circonscrire au préalable la norme de contrôle applicable à l’interprétation, par le groupe, de l’alinéa 8(2)d) de la Règle A11, lequel autorise le groupe à rendre une ordonnance de « restitution » lorsque le non-respect d’un règlement par un membre a infligé une perte à un autre membre. Précisons que nul ne conteste le pouvoir de l’ACP, suivant les articles 18 et 19 de la Loi sur l’ACP, d’établir une règle ou de prendre un règlement autorisant le groupe à ordonner la restitution.

[11]      Pour les motifs énoncés ci-après, il ressort d’une analyse pragmatique et fonctionnelle que le juge des requêtes aurait dû seulement se demander si la décision du groupe de l’observation selon laquelle la BM avait subi une « perte » aux fins de l’alinéa 8(2)d) était déraisonnable, même si les décisions du groupe ne sont pas protégées par une clause privative.

[12]      Premièrement, le groupe se composait de trois employés de membres de l’ACP étrangers au différend. La connaissance qu’ont les membres du groupe du fonctionnement des systèmes de compensation et de règlement, en raison des fonctions que ces personnes exercent au sein d’institutions financières membres, est pertinente pour l’interprétation des règles de l’ACP, bien que le groupe ne soit essentiellement appelé à rendre des décisions que de manière ponctuelle. De plus, avant de rendre une décision, le groupe a tenu une audience à laquelle l’appelante était représentée par avocat.

[13]      Deuxièmement, le différend porte sur l’interprétation d’une disposition de la loi habilitante qui régit le fonctionnement du groupe. Il ne s’agit pas d’une « loi d’application générale », mais d’une loi qui ne s’applique qu’aux banques et aux autres institutions financières qui ont adhéré volontairement à l’ACP lorsqu’elles en utilisent le système de compensation. Les dispositions législatives qui régissent le fonctionnement technique des systèmes de compensation et de règlement sont propres à ce régime de réglementation spécialisé et ne font pas appel à des notions ou à des valeurs juridiques de portée générale.

[14]      Troisièmement, même si l’ordonnance de restitution a porté préjudice aux intérêts financiers de la BNG, elle n’a pas dépouillé l’appelante de ses recours en droit privé soit contre la BM, soit contre le payeur ou le bénéficiaire du chèque. En effet, dans le cadre de son argumentation quant aux motifs pour lesquels l’appel devait être accueilli, l’avocat de la BNG a soutenu que la décision du groupe était [traduction] « stérile » ou « absurde », car l’appelante pouvait compenser toute somme qu’elle était tenue de verser suivant l’ordonnance du groupe grâce à la somme à laquelle elle avait droit de la part de la BM sur le fondement de la Loi sur les lettres de change, L.R.C. (1985), ch. B-4.

[15]      Quatrièmement, la raison d’être du régime de réglementation de la compensation des chèques et du règlement des opérations entre les banques membres permet de conclure que le contrôle judiciaire doit être limité. La prise de décisions expéditives et définitives qu’exigent la compensation rapide des chèques et des effets apparentés dans le cadre du système bancaire canadien et le règlement des opérations pourrait être compromise si la partie lésée par une décision du groupe de l’observation pouvait présenter une demande de contrôle judiciaire afin que la Cour tranche de novo la question en litige.

[16]      Cinquièmement, l’ACP est un organisme créé par une loi fédérale qui établit ses pouvoirs et ses obligations. De plus, les banques sont légalement tenues de faire partie de l’ACP (article 4 [mod. par L.C. 1999, ch. 28, art. 111] de la Loi sur l’ACP). Les décisions du groupe de l’observation de l’ACP relèvent donc du droit public.

[17]      Par contre, l’ACP tient lieu également d’organisme d’autoréglementation dans un secteur vital des services financiers au Canada, soit la compensation des chèques et des effets apparentés entre les institutions financières membres. Les membres élisent donc les administrateurs de l’APC, sauf celui nommé par la Banque du Canada (articles 8 et 9 [mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 46; 1999, ch. 28, art. 112] de la Loi sur l’ACP). Par ailleurs, l’adhésion à l’ACP est facultative pour les institutions financières autres que des banques, tout comme l’utilisation, par les membres, du système de compensation de l’ACP. Toutefois, sur la plan pratique, il est nécessaire que les institutions financières qui offrent les avantages d’un compte-chèques à leur clientèle se prévalent du système de compensation.

[18]      En conséquence, vu le caractère « intérieur » ou « privé » de ce régime de réglementation suivant lequel, après la tenue d’une audience, un groupe mis sur pied par un comité de l’ACP interprète et applique les règles établies par l’ACP, la Cour devrait être plus réticente à modifier la décision ainsi rendue que celle d’un organisme de réglementation créé par la loi et dont la nature est manifestement plus externe, gouvernementale. Dans un contexte analogue, le caractère consensuel de l’arbitrage d’un grief en matière de relations de travail, ainsi que la nécessité que des décisions expéditives et définitives soient prises, ont incité les cours de justice à moins s’immiscer dans l’interprétation de la convention collective par l’arbitre, même si la loi régit également de larges pans de la procédure.

[19]      Selon nous, le juge des requêtes n’a pas commis d’erreur en rejetant la demande de contrôle judiciaire. Cependant, nous fondons notre décision sur le fait que la conclusion du groupe selon laquelle la BM avait subi une « perte » aux fins de l’alinéa 8(2)d) de la Règle A11 n’était pas déraisonnable. Nous arrivons à cette conclusion en nous fondant sur l’article 5 de la Loi sur l’ACP, qui dispose que l’Association a pour mission d’établir et de mettre en oeuvre un système national de compensation et de règlement. Ce système ne vise que les banques et les institutions financières apparentées et, comme l’a reconnu l’avocat de l’appelante, les décisions du groupe de l’observation n’ont aucune incidence sur les droits et les obligations, en droit privé, des banques, de leurs clients ainsi que des payeurs et des bénéficiaires de chèques, non plus que sur les recours y afférents.

[20]      Par conséquent, pour déterminer si une perte avait été subie et si une ordonnance de restitution devait être rendue, il n’était pas déraisonnable que le groupe juge non pertinent le lien ou l’état des comptes entre la banque négociatrice et son client et qu’il mette uniquement l’accent sur le compte de règlement de la BM auprès de la Banque du Canada et sur le compte de règlement de la BNG auprès de son agent de compensation, la Banque Royale. De ce point de vue, il est incontestable que, en raison du retour du chèque par la compensation, contrairement aux règles de l’ACP, la BNG a été créditée d’une somme et la BM a été débitée de la somme correspondante.

[21]      Pour ces motifs, l’appel est rejeté avec dépens.

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