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[2001] 2 C.F. 174

A-90-00

Myles Parsons, Fédération internationale du service des transports, Habilula Mustafa, Bayram Mon, Krassimir Stoykov et Anton Litvichkov (appelants) (défendeurs)

c.

Ruby Trading S.A. (intimée) (demanderesse)

Répertorié : Ruby Trading S.A. c. Parsons (C.A.)

Cour d’appel, juges Rothstein, Sexton et Evans, J.C.A. —Vancouver, 31 octobre, Ottawa 21 novembre 2000.

Compétence de la Cour fédérale — Section de première instance — Appel d’une injonction interlocutoire — Action contractuelle et en responsabilité délictuelle intentée par le propriétaire d’un navire étranger contre des membres d’équipage étrangers, et un syndicat canadien et son représentant — Application du critère à trois volets formulé dans ITO—International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics Inc. et autre — 1) Attribution de compétence par voie législative — L’art. 22 de la Loi sur la Cour fédérale accorde à cette Cour une compétence en matière de droit maritime canadien — 2) et 3) Existence d’un ensemble de règles de droit fédéral essentiel à la solution du litige et fondant l’attribution légale de compétence; la loi invoquée dans l’affaire doit être « une loi du Canada » au sens de l’art. 101 de la Loi constitutionnelle de 1867 — L’art. 2 de la Loi sur la Cour fédérale définit le droit maritime canadien comme étant un ensemble de règles de droit fédéral régissant toutes les demandes concernant les questions maritimes et d’amirauté — Les règles de common law en matière de contrat et de responsabilité délictuelle sont essentielles à la solution du litige — Les demandes de nature contractuelle et délictuelle sont suffisamment reliées aux affaires maritimes pour qu’elles constituent légitimement du droit maritime canadien relevant de la compétence législative fédérale — Deuxième et troisième conditions réunies — La Cour a compétence pour accorder une injonction interlocutoire et entendre les demandes de nature contractuelle et quasi délictuelle présentées dans l’action principale — Elle peut exercer sa compétence en matière personnelle aux termes de l’art. 43 de la Loi sur la Cour fédérale — Cette question n’a pas été expressément attribuée au Conseil canadien des relations industrielles par le Code canadien du travail — Ce Code n’est pas applicable parce qu’il n’a pas pour but de régir les relations de travail entre les propriétaires d’un navire étranger et les membres d’équipage étrangers.

Droit maritime — Action intentée contre un syndicat canadien, son représentant, et des membres d’équipage étrangers pour rupture de contrat entre le propriétaire d’un navire étranger et les membres d’équipage et action fondée sur un complot visant à causer un préjudice pécuniaire relèvent de la compétence de la Cour fédérale en droit maritime — Application du critère à trois volets formulés dans ITO—International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics et autre — Premièrement, l’art. 22 de la Loi sur la Cour fédérale constitue une attribution légale de compétence par le Parlement fédéral — Le droit maritime canadien tel que défini à l’art. 2 de la Loi sur la Cour fédérale constitue un ensemble de règles de droit fédéral régissant toutes les demandes concernant les questions maritimes et d’amirauté — Les règles de common law en matière de contrat et de responsabilité délictuelle sont essentielles à l’examen de l’affaire — Les demandes de nature contractuelle et délictuelle sont suffisamment reliées aux affaires maritimes pour qu’elles constituent légitimement du droit maritime canadien qui relève de la compétence législative fédérale — Deuxième et troisième conditions réunies.

Relations du travail — La Cour fédérale a-t-elle compétence pour entendre une action intentée par le propriétaire d’un navire étranger contre des membres d’équipage étrangers, et un syndicat canadien pour incitation à rupture de contrat, et pour complot en vue de causer un préjudice pécuniaire? — Les membres d’équipage soutenaient que la question de la grève illégale avait été expressément attribuée au CCRI par le Code canadien du travail — Le législateur n’entendait pas que le Code régisse les relations de travail entre les propriétaires d’un navire étranger et les membres d’équipage étrangers.

Injonctions — Le propriétaire de navire intimé, une société libérienne, a obtenu une injonction interlocutoire interdisant aux membres d’équipage étrangers et au représentant d’un syndicat canadien de faire du piquetage, de transmettre des avis de grève concernant le navire enregistré au Panama et se trouvant à quai à Vancouver — Le critère à trois volets énoncé dans ITO—International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics et autre pour apprécier la compétence de la Cour est rempli — La Cour a compétence pour rendre une injonction interlocutoire, entendre des demandes en responsabilité contractuelle et délictuelle.

Pratique — Appel et nouveaux procès — Appel d’une injonction interlocutoire pour défaut de compétence — La Cour d’appel a accepté d’examiner la question de l’opportunité d’émettre l’injonction même si celle-ci n’a plus qu’un intérêt théorique — Façon juste, rapide et peu coûteuse de régler la question — La question aurait de toute façon été soumise à nouveau à notre Cour; question examinée en détail dans les mémoires des parties, parties préparées à en débattre oralement, faits relatifs à la question de la compétence non contestés.

Il s’agit d’un appel d’une injonction interlocutoire pour le motif que la Cour n’avait pas compétence pour l’accorder. Les appelants Mustafa, Mon, Stoykov et Litvichkov, tous non-Canadiens, faisaient partie de l’équipage du Japan Rainbow II, un cargo enregistré au Panama et appartenant à l’intimée, une société libérienne. Selon la déclaration, le navire était à quai dans le port de Vancouver et l’appelant Parsons, représentant la Fédération internationale des ouvriers du transport (organisme qui représente exclusivement des marins marchands), est monté à bord et a invité les membres d’équipage à rompre les contrats qu’ils avaient conclus avec les propriétaires du navire. Les membres d’équipage appelants ont alors rompu leurs contrats en refusant de travailler. L’intimée a immédiatement intenté une action et obtenu une injonction interlocutoire interdisant aux appelants de faire du piquetage et de transmettre des avis de grève. En raison des gestes posés par les appelants, le navire n’a pu embarquer son chargement, son départ a été retardé, ce qui a causé un préjudice à l’intimée.

Il s’agissait de savoir si la Cour fédérale avait compétence pour entendre l’action contractuelle et délictuelle intentée par le propriétaire d’un navire étranger contre quatre des membres d’équipage, et un syndicat canadien et son représentant.

Arrêt : l’appel est rejeté.

Pendant que l’injonction était en vigueur, le navire a terminé son chargement et quitté Vancouver. Par conséquent, la question de la validité du prononcé de l’injonction est maintenant théorique. La question de la compétence à l’égard de l’action principale n’est pas soulevée par le présent appel mais la Cour a convenu, à la demande des parties, de la traiter parce que cela lui paraissait être une façon juste, rapide et peu coûteuse de régler cette question, puisque les parties ont assuré que celle-ci serait de toute façon soumise à nouveau à notre Cour, qu’elles avaient examiné cette question en détail dans leurs mémoires, qu’elles étaient préparées à en débattre oralement, et que les faits relatifs à la question de la compétence n’étaient pas contestés.

Voici les conditions essentielles qui doivent être réunies pour conclure à la compétence de la Cour fédérale telles qu’elles ont été formulées dans l’arrêt ITO—International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics Inc. et autre : 1) il doit y avoir attribution de compétence par une loi du Parlement fédéral, 2) il doit exister un ensemble de règles de droit fédéral qui soit essentiel à la solution du litige et constitue le fondement de l’attribution légale de compétence, 3) la loi invoquée dans l’affaire doit être une « loi du Canada » au sens où cette expression est employée à l’article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867.

1) La Cour fédérale est une juridiction créée par la loi qui ne possède que la compétence qui lui a été expressément attribuée par la loi. Le paragraphe 22(1) de la Loi sur la Cour fédérale attribue à la Cour une compétence en matière de « droit maritime canadien ». Par conséquent, la première condition est remplie si les demandes présentées par l’intimée font partie des règles du droit maritime canadien et si la compétence sur ces questions n’a pas été expressément attribuée à un autre organisme judiciaire.

2) et 3) La Cour fédérale a été créée aux termes de l’article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867 à titre de « tribuna[l] additionne[l] pour la meilleure administration des lois du Canada ». Aux fins de l’article 101, « loi du Canada » s’entend d’une loi fédérale ou d’une autre règle de droit fédéral. Le paragraphe 91(10) attribue au Parlement le pouvoir de légiférer dans le domaine de « la navigation et les bâtiments ou navires » et le droit maritime canadien, tel que défini à l’article 2 de la Loi sur la Cour fédérale, constitue un vaste ensemble de règles de droit fédéral régissant toutes les demandes concernant les questions maritimes et d’amirauté. Il semble que les règles de la common law en matière de contrat et de responsabilité délictuelle soient essentielles à l’examen de la présente affaire. La Cour n’a donc compétence que si les principes de common law applicables à l’affaire ont été incorporés au droit maritime canadien.

Les demandes de nature contractuelle et délictuelle présentées par l’intimée dans l’action principale sont suffisamment reliées aux affaires maritimes pour qu’elles constituent légitimement du droit maritime canadien relevant de la compétence législative fédérale. Par conséquent, la Cour fédérale avait compétence pour accorder l’injonction interlocutoire et pour entendre les demandes de nature contractuelle et délictuelle.

Les appelants soutiennent que la Cour n’a pas compétence pour entendre ces demandes parce qu’elles sont de nature personnelle et non réelle. L’article 43 de la Loi sur la Cour fédérale prévoit que la Cour peut, sous le régime de l’article 22, avoir compétence en matière personnelle dans tous les cas. Par conséquent, si les demandes de nature contractuelle et délictuelle relèvent de la compétence du tribunal, celle-ci peut s’exercer en matière personnelle.

Les appelants soutiennent que la prétention selon laquelle il y a eu rupture de contrat de leur part revient à affirmer qu’ils ont fait une grève illégale, question qui a été « attribuée expressément » au Conseil canadien des relations industrielles par le Code canadien du travail et qu’elle ne relève donc plus de la Cour fédérale. Le Code du travail n’est pas applicable en l’espèce. Le législateur n’a pas voulu que le Code régisse les relations de travail entre les propriétaires d’un navire étranger et les membres d’équipage étrangers. Aucune décision ne permet d’affirmer que le législateur peut légiférer à l’égard d’un contrat extraterritorial de ce type conclu par des sujets de droit étrangers.

LOIS ET RÈGLEMENTS

Code canadien du travail, L.R.C. (1985), ch. L-2, art. 87.7 (édicté par L.C. 1998, ch. 26, art. 37), 91 (mod., idem, art. 40).

Loi constitutionnelle de 1867, 30 & 31 Vic., ch. 3 (R.-U.) (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, no 1) [L.R.C. (1985), appendice II, no 5], art. 91(10), 101.

Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 2 « droit maritime canadien », 22(1), 43(1).

JURISPRUDENCE

DÉCISIONS APPLIQUÉS :

ITO—International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics Inc. et autre, [1986] 1 R.C.S. 752; (1986), 28 D.L.R. (4th) 641; 34 B.L.R. 251; 68 N.R. 241; Bow Valley Husky (Bermuda) Ltd. c. Saint John Shipbuilding Ltd., [1997] 3 R.C.S. 1210; (1997), 153 D.L.R. (4th) 385; 158 Nfld. & P.E.I.R. 269; 37 B.L.R. (2d) 1; 48 C.C.L.I. (2d) 1; 40 C.C.L.T. (2d) 235; 221 N.R. 1; Shibamoto & Co. c. Western Fish Producers, Inc., [1990] 1 C.F. 542 (1989), 63 D.L.R. (4th) 549; 103 N.R. 241 (C.A.).

DÉCISION EXAMINÉE :

Ruby Trading S.A. c. Parsons, [2000] F.C.J. no 1326 (1re inst.) (QL).

DÉCISIONS CITÉES :

Succession Ordon c. Grail, [1998] 3 R.C.S. 437; (1998), 40 O.R. (3d) 639; 166 D.L.R. (4th) 193; 232 N.R. 201; 115 O.A.C. 1; Monk Corp. c. Island Fertilizers Ltd., [1991] 1 R.C.S. 779; (1991), 80 D.L.R. (4th) 58; 123 N.R. 1.

APPEL d’une injonction interlocutoire fondé sur le motif que la Cour n’avait pas compétence pour la prononcer. Appel rejeté.

ONT COMPARU :

G. James Baugh pour les appelants.

H. Peter Swanson et Andrew Mayer pour l’intimée.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

McGrady, Baugh & Whyte, Vancouver, pour les appelants.

Campney & Murphy, Vancouver, pour l’intimée.

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par

Le juge Sexton, J.C.A. :

INTRODUCTION

[1]        La principale question litigieuse en l’espèce est celle de savoir si la Cour fédérale du Canada a compétence pour entendre l’action intentée par le propriétaire d’un navire étranger contre quatre de ses membres d’équipage étrangers et un syndicat canadien et son représentant pour avoir incité les membres d’équipage à rompre les contrats conclus avec le propriétaire du navire, ainsi que contre le représentant syndical et les membres d’équipage pour complot en vue de causer un préjudice pécuniaire.

LES FAITS

[2]        Il y a lieu de mentionner que la description du contexte factuel de la présente affaire est fondée sur les éléments de preuve versés au dossier soumis au juge en chef adjoint Lutfy de la Section de première instance. J’estime que ces éléments sont nécessaires pour replacer la décision dans son contexte mais je tiens à préciser que je ne formule ici aucune conclusion de fait. C’est là une tâche qui revient, bien sûr, au juge de première instance.

[3]        Les appelants Mustafa, Mon, Stoykov et Litvichkov, citoyens de la Turquie (Mon) et de la Bulgarie (les trois autres) étaient membres de l’équipage du Japan Rainbow II, un cargo enregistré à Panama et appartenant à l’intimée, une société libérienne. Le 5 février 2000, le navire était amarré au terminal de la United Grain Growers dans le port de Vancouver pour embarquer un chargement de céréales. Les membres d’équipage défendeurs étaient tous parties à des contrats de travail conclus avec les propriétaires du navire. Ces contrats n’étaient visés par aucune convention collective.

[4]        Vers midi le 5 février, l’appelant Parsons, un inspecteur de la Fédération internationale des ouvriers du transport appelante (la Fédération), organisme qui représente les membres d’équipage des navires de haute mer, est monté à bord du navire disant qu’il représentait M. Mon pour que l’intimée lui donne satisfaction à l’égard d’un certain nombre de plaintes concernant son salaire et son rapatriement en Turquie. En outre, M. Parsons a exigé que soit versée à M. Mon une somme de 3 600 $US, représentant la prétendue différence entre le montant qui lui avait été versé en vertu de son contrat avec l’intimée et celui qu’il aurait reçu s’il avait été rémunéré conformément à une convention collective de la Fédération. Pendant qu’il négociait avec le représentant de l’intimée, M. Parsons a menacé de communiquer avec d’autres membres d’équipage du navire et de les encourager à exiger qu’on leur verse les salaires auxquels ils auraient eu droit en vertu d’un contrat de la Fédération. Pendant cette journée, il a, de fait, pris des dispositions en vue de représenter les trois autres membres d’équipage appelants et les assister pour faire cette demande.

[5]        Vers 22 h 30 cette même journée, un avis de grève a été affiché sur le navire. Le chargement du navire a donc été arrêté. Les quatre membres d’équipage en grève exigeaient notamment la signature d’une convention collective pour laquelle la Fédération serait l’agent négociateur de l’équipage ainsi que le versement rétroactif des salaires calculés selon l’échelle utilisée habituellement dans les conventions de la Fédération.

[6]        Ruby Trading a immédiatement intenté une action contre les appelants devant la Section de première instance de la Cour fédérale. Dans le cadre de cette action, Ruby Trading a présenté une requête tendant, notamment, à interdire aux appelants de faire du piquetage, de transmettre des avis de grève et d’entraver, de quelque manière que ce soit, le chargement ou les mouvements du Japan Rainbow II.

[7]        La requête a été entendue par le juge en chef adjoint Lutfy le 6 février 2000. Le 7 février, il a ordonné aux appelants de s’abstenir de faire du piquetage et d’afficher des avis de grève à l’égard du Japan Rainbow II; il a également ordonné aux membres d’équipage appelants de quitter le navire en attendant leur rapatriement. L’ordonnance devait demeurer en vigueur pendant 14 jours.

[8]        Les appelants ont interjeté appel de cette ordonnance devant notre Cour. Ils affirment que la Cour n’avait pas compétence pour accorder l’injonction, que même si elle en avait la compétence, elle a commis une erreur en l’accordant, et qu’il y a eu violation des principes de la justice naturelle à leur égard au cours de l’audience tenue par le juge en chef adjoint Lutfy.

[9]        En attendant l’audition du présent appel, le déroulement de l’action principale s’est poursuivi devant la Section de première instance. Les appelants ont présenté une requête devant cette section en vue de faire radier la déclaration de l’intimée pour défaut de compétence. Cette requête a été rejetée par le protonotaire Hargrave le 23 août 2000 [[2000] F.C.J. no 1326 (1re inst.) (QL)]. Il a déclaré que la question de la compétence avait déjà été débattue devant le juge en chef adjoint dans le cadre de la requête en injonction, que la question de compétence était par conséquent visée par le principe de l’autorité de la chose jugée et que la mesure de redressement recherchée par les appelants ne pouvait être obtenue que dans le cadre du présent appel.

LA PORTÉE DU PRÉSENT APPEL

[10]      Pendant que l’injonction était en vigueur, le Japan Rainbow II a terminé son chargement et quitté Vancouver. Par conséquent, la question de la validité du prononcé de l’injonction est maintenant théorique. C’est pourquoi notre Cour a refusé, au cours de l’audition, d’examiner les questions suivantes soulevées par les appelants :

1.   Selon les critères applicables en matière d’injonction interlocutoire, l’intimée a-t-elle réussi à démontrer l’existence d’un préjudice irréparable?

2.   selon les critères applicables en matière d’injonction interlocutoire, l’intimée a-t-elle réussi à établir que la prépondérance des inconvénients justifiait l’octroi de l’injonction?

3.   les principes de justice naturelle et le droit à une audience équitable ont-ils été respectés lorsque le juge en chef adjoint Lutfy a entendu la requête des appelants?

4.   l’appelant pouvait-il présenter une nouvelle preuve par affidavit pour étayer l’appel?

[11]      Après avoir été informé de cette décision, toutes les parties ont demandé à notre Cour de déterminer si la Cour fédérale avait compétence pour entendre les diverses demandes contenues dans la déclaration, à savoir les demandes suivantes :

1.   dommages et intérêts pour rupture de contrat et complot visant à causer intentionnellement un préjudice pécuniaire;

2.   injonction interdisant aux défendeurs d’entraver l’exploitation du navire;

3.   ordonnance obligeant les défendeurs à respecter le par. 87.7(1) du Code canadien du travail;

4.   ordonnance obligeant les défendeurs à quitter le navire;

5.   dommages punitifs et exemplaires,

6.   intérêt et dépens.

[12]      Comme je l’ai déjà noté, la question de la compétence sur le fond de l’action principale a été traitée par le protonotaire Hargrave dans sa décision du 23 août. Les appelants ont interjeté appel de cette décision devant la Section de première instance. Cet appel a cependant été suspendu parce que les parties estimaient que cette question serait tranchée dans le cadre du présent appel. Cette opinion semble fondée sur la conclusion du protonotaire selon laquelle la question de la compétence était visée par le principe de l’autorité de la chose jugée, étant donné que le juge en chef adjoint Lutfy a accordé l’injonction demandée.

[13]      Il ressort implicitement de l’ordonnance rendue par le juge en chef adjoint qu’il a estimé qu’il avait compétence pour accorder l’injonction interlocutoire mais rien n’indique qu’il ait examiné la question de savoir si la Cour avait compétence pour entendre les autres questions mentionnées dans la déclaration, et rien le poussait à le faire. Par conséquent, si nous limitions notre analyse à la question de la compétence du juge en chef adjoint Lutfy à l’égard de cette ordonnance, je ne pense pas que cela permettrait de régler la question de la compétence à l’égard du reste de l’action principale.

[14]      À strictement parler, la question de la compétence à l’égard de l’action principale n’est pas soulevée par le présent appel, mais nous avons convenu, à la demande des parties, de la traiter plutôt que de la renvoyer devant la Section de première instance en appel de la décision du protonotaire Hargrave. Cela nous paraît être une façon juste, rapide et moins coûteuse de régler cette question puisque les parties nous ont assurés que celle-ci serait de toute façon soumise de nouveau à notre Cour, qu’elles avaient examiné cette question en détail dans leurs mémoires, qu’elles étaient préparées à en débattre oralement et que les faits relatifs à la question de la compétence n’étaient pas contestés.

Les arguments des appelants

[15]      J’en arrive maintenant aux arguments présentés par les appelants. Ils soutiennent que la Cour fédérale n’a pas compétence sur le fond de l’action pour les raisons suivantes :

1.   La demande de l’intimée est basée sur les règles de common law en matière de responsabilité délictuelle et contractuelle.

2.   Les demandes du demandeur sont toutes de nature personnelle. Le demandeur n’a formulé aucune demande réelle.

3.   Les demandes personnelles de l’intimée fondées sur les règles contractuelles et délictuelles ne relèvent pas de la compétence maritime de la Cour fédérale.

4.   Subsidiairement, la compétence à l’égard des demandes contractuelles formées contre les membres d’équipage appelants (dans lesquelles il est, pour l’essentiel, allégué qu’ils ont entrepris une grève illégale) est « expressément attribuée » au Conseil canadien des relations industrielles conformément à la Division VI du Code canadien du travail. Il est affirmé que le CCRI a seul le pouvoir de déterminer s’il y a grève illégale.

5.   Dans la mesure où l’intimée cherche à imposer aux appelants le respect du paragraphe 87.7(1) du Code canadien du travail, elle doit présenter cette demande au CCRI qui s’est vu attribuer une compétence exclusive sur ce point.

ANALYSE

Généralités

[16]      La Cour suprême du Canada a formulé dans l’arrêt ITO—International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics Inc. et autre[1] la méthode générale qu’il convient d’utiliser pour déterminer si la Cour fédérale du Canada a compétence sur une question donnée. Le juge McIntyre, s’exprimant pour les juges majoritaires, a énuméré les conditions essentielles qui permettent de conclure à la compétence de la Cour fédérale :

1.   Il doit y avoir attribution de compétence par une loi du Parlement fédéral.

2.   Il doit exister un ensemble de règles de droit fédérales qui soit essentiel à la solution du litige et constitue le fondement de l’attribution légale de compétence.

3.   La loi invoqué dans l’affaire doit être « une loi du Canada » au sens où cette expression est employée à l’art. 101 de la Loi constitutionnelle de 1867[2].

[17]      Je me propose d’examiner d’abord ces trois conditions dans le contexte général de la présente affaire.

1.         Attribution de compétence par voie législative

[18]      La première condition découle de fait que la Cour fédérale est une juridiction créée par la loi qui ne possède aucune compétence inhérente. En d’autres termes, la Cour n’a compétence sur une question que si la loi la lui attribue expressément[3].

[19]      La Loi sur la Cour fédérale[4] attribue à la Cour une compétence sur « le droit maritime canadien » :

2. […]

« droit maritime canadien » Droit—compte tenu des modifications y apportées par la présente loi ou par toute autre loi fédérale—dont l’application relevait de la Cour de l’Échiquier du Canada, en sa qualité de juridiction de l’Amirauté, aux termes de la Loi sur l’Amirauté, chapitre A-1 des Statuts revisés du Canada de 1970, ou de toute autre loi, ou qui en aurait relevé si ce tribunal avait eu, en cette qualité, compétence illimitée en matière maritime et d’amirauté.

[…]

22. (1) La Section de première instance a compétence concurrente, en première instance, dans les cas—opposant notamment des administrés—où une demande de réparation ou un recours est présenté en vertu du droit maritime canadien ou d’une loi fédérale concernant la navigation ou la marine marchande, sauf attribution expresse contraire de cette compétence.

Par conséquent, la première condition est remplie si les demandes présentées par l’intimée font partie des règles du droit maritime canadien et si la compétence sur ces questions n’a pas été expressément attribuée à un autre organisme judiciaire.

2 & 3.  Règle de droit fédéral et « loi du Canada »

[20]      La Cour fédérale a été créée aux termes de l’article 101 de la Loi constitutionnelle de 1867 [30& 31 Vict., ch. 3 (R.-U.) (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, no 1) [L.R.C. (1985), appendice II, no 5]] à titre de « tribuna[l] additionne[l] pour la meilleure administration des lois du Canada »[5]. Aux fins de l’article 101, « loi du Canada » s’entend d’une loi fédérale ou d’une autre règle de droit fédéral.

[21]      Le paragraphe 91(10) de la Loi constitutionnelle de 1867 attribue au Parlement le pouvoir de légiférer dans le domaine de « la navigation et les bâtiments ou navires », et il est incontestable que le droit maritime canadien, tel que défini à l’article 2 de la Loi sur la Cour fédérale, constitue un vaste ensemble de règles de droit fédéral régissant toutes les demandes concernant les questions maritimes et d’amirauté[6]. Étant donné la nature des demandes formulées par l’intimée contre les appelants, il semble que les règles de la common law en matière de contrat et de responsabilité délictuelle soient essentielles à l’examen de la présente affaire. De la même façon que pour la première condition, la Cour n’aura compétence que si les principes de common law applicables à l’affaire ont été incorporés au droit maritime canadien.

[22]      Les tribunaux ont déclaré il y a longtemps que la portée du droit maritime canadien n’est limitée que par le partage constitutionnel des compétences législatives de sorte qu’en déterminant si une affaire donnée soulève une question maritime ou d’amirauté, on doit éviter d’empiéter sur ce qui constitue, de par son caractère véritable, une matière relevant de l’article 92 de la Loi constitutionnelle de 1867[7]. La Cour suprême du Canada a formulé, dans l’affaire ITO la première fois, le critère suivant qui permet de déterminer si les deuxième et troisième conditions sont remplies :

Le critère permettant d’établir si la question examinée relève du droit maritime exige de conclure que cette question est entièrement liée aux affaires maritimes au point de constituer légitimement du droit maritime canadien qui relève de la compétence législative fédérale[8].

[23]      Je vais maintenant examiner les différents arguments des appelants.

Les demandes de nature contractuelle et délictuelle relèvent-elles du droit maritime canadien?

[24]      J’estime, en me fondant sur l’analyse qui précède, que la seule question qui reste à trancher sur ce point est de savoir si les sujets sur lesquels portent les demandes de nature délictuelle et contractuelle sont si étroitement liés aux affaires maritimes qu’ils constituent légitimement du droit maritime canadien qui relève de la compétence législative fédérale. Il est utile d’examiner la jurisprudence pour répondre à cette question.

[25]      Dans l’arrêt ITO, qui fait autorité dans ce domaine, la principale question dont était saisie la Cour suprême était de savoir si le demandeur pouvait poursuivre pour négligence devant la Cour fédérale le défendeur, propriétaire de l’entrepôt où avait été volée une partie d’un envoi de calculatrices électroniques qui avait été expédié du Japon pour un autre défendeur. Les juges majoritaires de la Cour ont conclu que la proximité du port de Montréal des activités d’acconage, le rôle que jouait ITO dans les activités portuaires, le rapport existant entre le contrat de transport maritime et le fait que les calculatrices ne devaient être entreposées que pendant une courte période après leur débarquement du navire, constituaient un lien de connexité suffisant entre la question en litige et les affaires maritimes pour faire légitimement relever les demandes du droit maritime canadien et de la compétence de la Cour fédérale.

[26]      L’affaire Bow Valley, précité, portait sur une poursuite en responsabilité civile pour négligence découlant d’un incendie grave survenu sur une plate-forme pétrolière en raison d’une défectuosité d’un système de disjoncteur de fuite à la terre (DFT). Le juge McLachlin, (tel était alors son titre), s’exprimant au nom de la Cour suprême du Canada, a jugé que la question était entièrement liée aux affaires maritimes :

Il s’agit en l’espèce de responsabilité délictuelle dans un contexte maritime. La Cour d’appel, sous la plume du juge Cameron, a statué que [traduction] « [l]es activités de la plate-forme Bow Drill 3 sont essentiellement de nature maritime, quoi qu’il s’agisse d’une activité maritime d’un type moderne » […] La plate-forme n’était pas seulement une plate-forme flottante, mais un bâtiment navigable. Comme l’a dit le juge Cameron [référence omise], la plate-forme [traduction] « peut se propulser par ses propres moyens, même lorsqu’elle fait du forage, elle est vulnérable aux dangers de la mer, elle n’est pas attachée en permanence au fond de l’océan et elle peut voyager à travers le monde afin de forer à la recherche du pétrole ». Subsidiairement, même si la plate-forme n’est pas un bâtiment navigable, la réclamation fondée sur la responsabilité délictuelle qui a été exercée à la suite de l’incendie n’en serait pas moins une question maritime puisque l’objet principal de la plate-forme Bow Drill III était une activité se déroulant dans des eaux navigables. Le fonctionnement du système de réchauffage des conduites de la plate-forme était dangereux parce que le système DFT qui avait été installé ne convenait pas dans un contexte maritime sans mise à la terre. Les réclamations exercées contre les défenderesses pour défaut de mise en garde comportaient des allégations selon lesquelles les défenderesses connaissaient les exigences spéciales concernant le matériel maritime comme l’incombustibilité ou l’ininflammabilité. Dans la présente affaire, les questions relatives à la responsabilité du fait des produits sont clairement dominées par des considérations d’ordre maritime[9].

[27]      Dans Shibamoto & Co. c. Western Fish Producers, Inc.[10], notre Cour a examiné un contrat concernant le traitement du saumon et d’œufs de saumon sur un navire usine. Le juge MacGuigan a écrit ce qui suit lorsqu’il a déterminé que la Section de première instance de la Cour fédérale avait compétence en l’espèce :

Or, contrairement à ce qu’elles allèguent, il est absolument impossible, vu l’arrêt ITO, de soutenir que le sabotage d’une entreprise de transformation du poisson par la fraude, le dol, le complot et l’inexécution de contrat est une matière de droit provincial plutôt que de droit maritime canadien. Étant donné que le droit des contrats et de la responsabilité délictuelle relève du droit maritime canadien dans la mesure où la résolution d’un litige l’exige, on ne saurait soutenir que certaines parties de cet ensemble de règles de droit ne relève pas du droit maritime. Selon la définition énoncée dans l’arrêt ITO, le droit maritime canadien est l’ensemble des règles de droit fédérales essentiel à la solution du litige et qui constitue le fondement de l’attribution légale de compétence[11].

[28]      Compte tenu des principes énoncés dans les affaires susmentionnées, j’estime que les demandes présentées par l’intimée dans l’action principale sont suffisamment reliées aux affaires maritimes au point de constituer légitimement du droit maritime canadien qui relève de la compétence législative fédérale. L’intimée soutient que les membres d’équipage appelants travaillaient dans un contexte maritime, soit l’exploitation d’un navire. L’appelant Parsons, représentant la FIT (organisme qui représente exclusivement des marins marchands), est monté à bord du navire et a invité les membres de l’équipage à rompre leurs contrats. Les membres d’équipage appelants ont violé leurs contrats en refusant de travailler à bord du navire. Cette décision a eu pour effet d’entraver l’exploitation du navire; son chargement n’a pu être embarqué et son départ a été retardé, ce qui a causé un préjudice à l’intimée.

[29]      Par conséquent, sous réserve des conclusions auxquelles j’arrive plus loin, j’estime que le juge en chef adjoint Lutfy avait compétence pour rendre l’ordonnance du 7 février 2000 et que la Cour fédérale avait compétence pour entendre les demandes de nature contractuelle et délictuelle formées par l’intimée dans l’action principale.

Compétence en matière personnelle et réelle

[30]      Pour ce qui est des arguments selon lesquels la Cour n’a pas compétence pour entendre ces demandes parce qu’elles sont de nature personnelle et non réelle, je note qu’outre l’attribution d’une compétence à l’égard des cas « opposant notamment des administrés » par l’article 22, l’article 43 de la Loi sur la Cour fédérale prévoit :

43. (1) Sous réserve du paragraphe (4), la Cour peut, aux termes de l’article 22, avoir compétence en matière personnelle dans tous les cas.

Par conséquent, si les demandes de nature contractuelle et délictuelle relèvent de la compétence de la Cour, cette compétence peut également s’exercer en matière personnelle. Voir, par exemple, les affaires examinées ci-dessus.

Grève illégale

[31]      Les membres d’équipage appelants soutiennent que la prétention selon laquelle il y a eu rupture de contrat de leur part revient à affirmer qu’ils ont fait une grève illégale. Ils affirment que c’est une question qui a été « attribuée expressément » au Conseil canadien des relations du travail (CCRT) par le Code canadien du travail[12] et qu’elle ne relève donc plus de notre Cour. Ils fondent cet argument sur l’article 91 [mod. par L.C. 1998, ch. 26, art. 40] du Code et sur la jurisprudence selon laquelle les demandes d’ordonnance présentées en vertu des dispositions que l’article 91 a remplacées ont été expressément confiées au Conseil.

[32]      Je ne pense pas que le Code du travail ou les décisions citées soient applicables en l’espèce. Si je retenais les arguments présentés par les membres d’équipage dans la présente affaire, il faudrait que j’admette que le législateur voulait que le Code régisse les relations de travail entre les propriétaires d’un navire étranger et les membres d’équipage étrangers. Je ne trouve aucun élément indiquant que telle ait été l’intention du législateur, et les appelants n’ont cité aucune décision permettant d’affirmer que le Parlement peut légiférer à l’égard d’un contrat extraterritorial de ce type, conclu par des sujets de droit étrangers.

L’article 87.7 du Code canadien du travail

[33]      Les appelants soutiennent que la demande présentée par l’intimée en vue d’obtenir une ordonnance exigeant le respect de l’article 87.7 [édicté par L.C. 1998, ch. 26, art. 37] du Code du travail est également une question qui a été expressément attribuée au CCRI. En voici les dispositions pertinentes :

87.7 (1) Pendant une grève ou un lock-out non interdits par la présente partie, l’employeur du secteur du débardage ou d’un autre secteur d’activités visé à l’alinéa a) de la définition de « entreprise fédérale » à l’article 2, ses employés et leur agent négociateur sont tenus de maintenir leurs activités liées à l’amarrage et à l’appareillage des navires céréaliers aux installations terminales ou de transbordement agréées, ainsi qu’à leur chargement, et à leur entrée dans un port et leur sortie d’un port.

[…]

(3) Sur demande présentée par un employeur ou un syndicat concerné ou sur renvoi fait par le ministre, le Conseil peut trancher toute question liée à l’application du paragraphe (1) et rendre les ordonnances qu’il estime indiquées pour en assurer la mise en œuvre.

[34]      Je n’examinerai pas cet argument. L’intimée n’a aucunement indiqué qu’elle entendait maintenir cette demande. En outre, j’estime que la question est désormais théorique. Peu importe qu’il y ait eu effectivement une grève, les céréales ont été chargées, le navire a quitté le port et les membres de l’équipage appelants ont quitté le pays.

CONCLUSION

[35]      En résumé, j’estime que l’ordonnance rendue par le juge en chef adjoint Lutfy et les demandes en responsabilité contractuelle et délictuelle mentionnées dans la déclaration de l’intimée relèvent de la compétence de la Cour fédérale. L’appel est donc rejeté avec dépens.

Le juge Rothstein, J.C.A. : J’y souscris.

Le juge Evans, J.C.A. : J’y souscris.



[1]  [1986] 1 R.C.S. 752 (ci-après ITO).

[2]  Ibid., at p. 766.

[3]  Succession Ordon c. Grail, [1998] 3 R.C.S. 437, au par. 46 (ci-après Succession Ordon).

[4]  L.R.C. (1985), ch. F-7.

[5]  101. Le parlement du Canada pourra, nonobstant toute disposition contraire énoncée dans la présente loi, lorsque l’occasion le requerra, adopter des mesures à l’effet de créer, maintenir et organiser une cour générale d’appel pour le Canada, et établir des tribunaux additionnels pour la meilleure administration des lois du Canada.

[6]  Succession Ordon, précité, note 3, au par. 71. On trouvera une analyse plus détaillée de la définition de l’art. 2 de la Loi sur la Cour fédérale dans ITO, précité, note 1, aux p. 774 et s.

[7]  Voir ITO, précité, note 1, à la p. 774; Monk Corp c. Island Fertilizers Ltd., [1991] 1 R.C.S. 779, à la p. 795 (ci-après Monk).

[8]  Ibid. Voir également Bow Valley Husky (Bermuda) Ltd. c. Saint John Shipbuilding Ltd., [1997] 3 R.C.S. 1210, au par. 87 (ci-après Bow Valley) et Succession Ordon, précité, note 3, au par. 71.

[9]  Ibid., au par. 85.

[10]  [1990] 1 C.F. 542 (C.A.).

[11]  Ibid., à la p. 560.

[12]  L.R.C. (1985), ch. L-2, modifié.

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