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IMM-5086-03

2004 CF 1174

Syed Zahid Ali (demandeur)

c.

Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (défendeur)

Répertorié: Ali c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (C.F.)

Cour fédérale, juge Mactavish--Toronto, 15 juillet; Ottawa, 26 août 2004.

Citoyenneté et Immigration -- Exclusion et renvoi -- Personnes interdites de territoire -- Le demandeur est un réfugié au sens de la Convention, un citoyen du Pakistan et un membre de la faction Altaf du MQM -- Il nie le fait que cette faction soit terroriste -- Demande de contrôle judiciaire d'une décision d'une agente d'immigration relative à l'art. 34(1) de la LIPR selon laquelle la demande d'établissement ne serait pas considérée davantage en raison de l'appartenance du demandeur à une organisation dont il y a des motifs raisonnables de croire qu'elle se livre au terrorisme -- Une demande de redressement ministériel fondée sur l'art. 34(2) était pendante -- Objection préliminaire de la part du MCI: il n'y a actuellement aucune «décision» pouvant faire l'objet d'un contrôle -- Après examen du régime législatif, l'objection préliminaire a été rejetée -- Les rôles de l'agente et du ministre sont différents -- Le demandeur subirait un préjudice s'il devait attendre la décision du ministre -- Il s'agissait de savoir si la décision de l'agente était finale ou interlocutoire -- Une décision favorable du ministre ne rendrait pas la présente demande théorique -- Le processus de redressement ministériel ne constitue pas un autre recours adéquat -- Norme requise pour conclure à l'interdiction de territoire en vertu de l'art. 34(1) -- Définitions législatives de «terrorisme» fournies dans la jurisprudence et dans la législation -- Lacunes dans les motifs de l'agente -- Manquement au devoir d'équité en raison de l'omission de satisfaire à la demande de communication de la documentation sur laquelle l'agente s'est fondée.

Il s'agissait d'une demande de contrôle judiciaire de la décision d'une agente d'immigration selon laquelle une demande d'établissement ne serait pas considérée du fait que l'agente avait des motifs raisonnables de croire que le demandeur était membre de l'organisation terroriste Mohajir Qaumi Movement (MQM). Bien que le demandeur ait admis appartenir à la faction Altaf du MQM, il a nié que cette faction soit impliquée dans le terrorisme et il a affirmé que l'agente n'avait pas indiqué les actes de terrorisme particuliers commis par le MQM-A. Il a prétendu qu'il y avait eu manquement au devoir d'équité du fait de la non-communication de la preuve sur laquelle s'est fondée l'agente. Le demandeur a également sollicité un redressement ministériel en vertu du paragraphe 34(2) de la LIPR, affirmant que sa présence au pays ne serait nullement contraire à l'intérêt national. Le ministre a présenté une objection préliminaire: puisque que la demande de redressement ministériel du demandeur est toujours en cours, aucune décision finale n'a été rendue sur l'admissibilité et, par conséquent, aucune «décision» ne peut faire l'objet d'un contrôle judiciaire.

Le demandeur est un citoyen du Pakistan dont on a conclu, en 1999, qu'il était un réfugié au sens de la Convention. Mais, après qu'il eut présenté une demande de statut de résident permanent, le SCRS a mentionné qu'il désirait l'interroger avant qu'une décision soit rendue sur la demande d'établissement. Le sujet de préoccupation était son association avec le MQM au Pakistan. Plus tard, l'agente d'immigration a écrit au demandeur pour l'aviser que «CIC possède des renseignements indiquant que vous êtes interdit de territoire au Canada en application du paragraphe 34(1) de la Loi».

Les questions en litige étaient de savoir: 1) si la décision d'un agent d'immigration fondée sur le paragraphe 34(1), selon laquelle il y a des motifs raisonnables de croire qu'un demandeur est membre d'une organisation terroriste, est une décision susceptible de contrôle judiciaire lorsqu'une demande de redressement ministériel est pendante; 2) si l'agente a fourni des motifs suffisants pour conclure que le MQM-A constitue une organisation terroriste et 3) s'il y a eu un manquement au devoir d'équité.

Pour traiter de l'objection préliminaire, il était nécessaire de tenir compte du régime législatif, en particulier des articles 33 et 34. On a également fait référence au paragraphe 6(3) qui établit clairement que le ministre a un pouvoir discrétionnaire, lequel ne peut être délégué, d'accorder une exemption fondée sur l'intérêt national. Le ministre a soutenu qu'il était loisible au demandeur de faire valoir que le MQM-A ne constituait pas une organisation terroriste et que les conclusions de l'agente à ce sujet pouvaient être réexaminées par le ministre. Et si un demandeur était insatisfait de la décision du ministre fondée sur le paragraphe 34(2), un contrôle judiciaire pourrait alors être demandé. La position du demandeur était qu'il subirait un préjudice s'il devait attendre la décision sur le redressement ministériel parce qu'il ne peut emmener son épouse au Canada tant que son propre statut relatif à l'immigration continue à être remis en question. Sa demande de redressement est pendante depuis plus d'un an. Il subirait en outre un préjudice en n'étant pas en mesure de contester les conclusions sous-jacentes de l'agente. Le demandeur a laissé entendre que la décision de l'agente, selon laquelle il appartenait à une organisation terroriste, était finale et non interlocutoire. Le demandeur a indiqué que «rapport sur l'interdiction de territoire» prévu à l'article 44 et préparé par l'agente le jour même de leur entrevue, démontrait qu'une décision finale avait été rendue sur une question de fond. Bien que la Cour ne procède normalement pas au contrôle judiciaire de décisions administratives interlocutoires, elle exerce sa compétence dans des «circonstances spéciales».

Jugement: la demande est accueillie et l'affaire est renvoyée à un autre agent d'immigration pour qu'elle soit réexaminée.

1) La Cour fédérale pouvait entendre une demande de contrôle judiciaire de la décision d'un agent, en dépit du fait qu'une demande de redressement ministériel fondée sur le paragraphe 34(2) était en cours. Bien qu'aucune décision finale quant à l'admissibilité ne soit rendue tant que la demande de redressement ministériel ne sera pas tranchée, il ne s'ensuit pas nécessairement que la décision rendue par l'agente en vertu du paragraphe 34(1) était de nature interlocutoire. Le rôle du ministre en vertu du paragraphe 34(2) n'est pas de réexaminer la décision de l'agente relative au paragraphe 34(1) quant à l'appartenance à une organisation terroriste mais plutôt d'examiner la question de savoir si--compte tenu d'une telle appartenance--il serait préjudiciable à l'intérêt national que la personne demeure au pays. Ainsi, la décision de l'agente tranchait une question de fond. Il s'agissait d'une conclusion d'interdiction de territoire, sujette à l'octroi d'un redressement exceptionnel par le ministre. Cette conclusion trouvait appui dans le fait que l'agente a jugé approprié de préparer un rapport en vertu de l'article 44 confirmant son opinion selon laquelle le demandeur était interdit de territoire. La Cour n'était pas convaincue que le fait d'accorder un redressement ministériel rendrait la présente demande théorique. Même si cela lui permettait de demeurer au pays, le demandeur ferait toujours face à la conclusion d'appartenance à une organisation terroriste, ce qui pourrait avoir de graves répercussions sur son avenir.

Le processus de redressement ministériel ne constitue pas un recours subsidiaire adéquat, puisqu'il n'implique pas un examen de la justesse de la décision initiale, et c'est pour ce motif que la décision de la Cour dans l'affaire Fast c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)--confirmée par la Cour d'appel fédérale--pouvait faire l'objet d'une distinction. Il y avait encore un autre problème. Si le demandeur cherchait à obtenir le contrôle judiciaire tant de la décision de l'agent que de celle du ministre, il pourrait se heurter à la régle 302 et à l'argument selon lequel il tentait d'obtenir l'examen de deux décisions différentes dans une seule demande de contrôle judiciaire. La présente demande devrait donc être examinée.

2) Une conclusion d'interdiction de territoire en application du paragraphe 34(1) doit être fondée sur quelque chose de plus qu'un léger soupçon, bien qu'elle n'ait pas à satisfaire à la norme civile de la balance des probabilités. L'agent doit également suivre la définition du terme «terrorisme» adoptée dans l'arrêt Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), la Loi antiterroriste ainsi que les définitions d'«activité terroriste» et de «groupe terroriste» qui se trouvent au paragraphe 83.01 du Code criminel. L'agente a conclu que le demandeur appartenait à une organisation terroriste mais il était impossible de savoir comment elle définissait le terme «terrorisme». Il a été décidé que toute dérogation à la définition énoncée dans l'arrêt Suresh constituait une erreur susceptible de révision. Les motifs contestés étaient insuffisants pour que la Cour puisse décider si le terme avait été correctement défini. Encore une fois, l'agente a omis de mentionner des actes précis posés par le MQM-A qui satisferaient à la définition de «terrorisme» de l'arrêt Suresh. En ne donnant aucune explication au sujet de la conclusion selon laquelle il y avait des motifs raisonnables de croire que le MQM-A était une organisation terroriste, elle a commis une erreur susceptible de révision.

3) La Cour a tiré la conclusion de fait selon laquelle une demande précise avait été faite lors de l'entrevue afin d'obtenir une copie de la preuve documentaire sur laquelle se fondait l'agente quant aux activités du MQM mais cette demande n'a pas été satisfaite. La question était de savoir si, dans les circonstances, l'équité exigeait que le demandeur soit bien informé des éléments de preuve qu'il devait présenter. Il ne s'agissait pas d'un cas impliquant des renseignements génériques et disponibles publiquement concernant la situation d'un pays, mais plutôt de renseignements spécifiques sur lesquels on s'est fondé pour en arriver à une conclusion d'exclusion. Les instances visées par l'article 34 de la LIPR ne devraient pas être réduites à un jeu de devinettes dans lequel un demandeur doit tenter de déterminer par lui-même quels renseignements sont utilisés contre lui. L'omission de l'agente d'identifier le rapport de la CISR sur lequel elle s'est fondée équivalait à une erreur susceptible de révision.

L'affaire est renvoyée pour qu'il soit statué à nouveau sur celle-ci et la question suivante est certifiée parce qu'elle est de portée générale: «Une décision rendue en application du paragraphe 34(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés est-elle susceptible de contrôle judiciaire si une demande de redressement ministériel en application du paragraphe 34(2) est pendante et qu'aucune décision n'a été rendue sur la demande d'établissement?»

lois et règlements

Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46, art. 83.01(1) «activité terroriste» (édicté par L.C. 2001, ch. 41, art. 4), «groupe terroriste» (édicté idem).

Loi antiterroriste, L.C. 2001, ch. 41.

Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, art. 33, 34, 44(1).

Règles de la Cour fédérale (1998), DORS/98-106, règle 302.

jurisprudence

décisions appliquées:

Canadien Pacifique Ltée c. Bande indienne de Matsqui, [1995] 1 R.C.S. 3; (1995), 122 D.L.R. (4th) 129; 26 Admin. L.R. (2d) 1; [1995] 2 C.N.L.R. 92; 177 N.R. 325; Alemu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 997; [2004] A.C.F. no 1210 (C.F.) (QL); Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] 1 R.C.S. 3; (2002), 208 D.L.R. (4th) 1; 37 Admin. L.R. (3d) 152; 90 C.R.R. (2d) 1; 18 Imm. L.R. (3d) 1; 281 N.R. 1; Fuentes c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2003] 4 C.F. 249; (2003), 231 F.T.R. 172; 28 Imm. L.R. (3d) 172 (1re inst.).

décisions distinctes:

Fast c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] 1 C.F. 257; (2000), 24 Admin. L.R. (3d) 74; 186 F.T.R. 16; 7 Imm. L.R. (3d) 40 (1re inst.); conf. par (2001), 41 Admin. L.R. (3d) 200; 288 N.R. 8 (C.A.F.); Mancia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] 3 C.F. 461; (1998), 161 D.L.R. (4th) 488; 45 Imm. L.R. (2d) 131; 226 N.R. 134 (C.A.).

décision examinée:

Zündel c. Canada (Commission des droits de la personne), [2000] 4 C.F. 255; (2000), 25 Admin. L.R. (3d) 135; 256 N.R. 125 (C.A.).

décisions citées:

Szczecka c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 116 D.L.R. (4th) 333; 25 Imm. L.R. (2d) 70; 170 N.R. 58 (C.A.F.); Pfeiffer c. Canada (Surintendant des faillites), [1996] 3 C.F. 584; 116 F.T.R. 173 (1re inst.); Froom c. Canada (Ministre de la Justice), [2004] 2 R.C.F. 154; (2003), 8 Admin. L.R. (4th) 1; 242 F.T.R. 1 (C.F.).

doctrine

D. J. M. Brown et J. M. Evans, Judicial Review of Administrative Action in Canada, feuilles mobiles. Toronto: Canvasback Publishing, 1998.

DEMANDE de contrôle judiciaire de la décision d'une agente d'immigration selon laquelle elle avait des motifs raisonnables de croire qu'un demandeur de résidence permanente appartenait à une organisation terroriste et que, par conséquent, sa demande ne pouvait pas se poursuivre. Demande accueillie, affaire renvoyée pour qu'il soit statué à nouveau sur celle-ci et question certifiée.

ont comparu:

Krassina Kostadinov pour le demandeur.

Mary Matthews pour le défendeur.

avocats inscrits au dossier:

Waldman & Associates, Toronto, pour le demandeur.

Le sous-procureur général du Canada pour le défendeur.

Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance et de l'ordonnance rendus par

[1]La juge Mactavish: Syed Zahid Ali est un réfugié au sens de la Convention, originaire du Pakistan, qui tente d'obtenir le statut de résident permanent au Canada. Une agente d'immigration a décidé qu'elle avait des motifs raisonnables de croire que M. Ali était membre d'une organisation terroriste, à savoir le Mohajir Qaumi Movement (MQM). Conformément aux dispositions de l'alinéa 34(1)f) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés [L.C. 2001, ch. 27] (LIPR), l'agente a ensuite avisé M. Ali que sa demande d'établissement ne serait pas considérée davantage. M. Ali a également été avisé qu'il avait la possibilité de demander un redressement ministériel afin que le traitement de sa demande puisse continuer.

[2]M. Ali admet qu'il est membre de la faction Altaf du MQM. Il n'est toutefois pas d'accord pour dire que la faction Altaf (également appelée le MQM-A) se livre au terrorisme. Par conséquent, il vise à obtenir le contrôle judiciaire de la conclusion de l'agente d'immigration à cet égard, soutenant que l'agente a commis une erreur en n'indiquant pas correctement les actes de terrorisme précis que le MQM-A aurait commis. M. Ali fait également valoir que l'agente a manqué à son devoir d'équité envers lui en ne lui communiquant pas les éléments de preuve sur lesquels elle s'est fondée pour étayer sa conclusion selon laquelle le MQM-A est une organisation terroriste.

[3]M. Ali a également présenté une demande de redressement ministériel, conformément au paragraphe 34(2) de la LIPR, affirmant que sa présence au Canada ne serait nullement contraire à l'intérêt national.

[4]Le défendeur soutient que la preuve documentaire dont disposait l'agente d'immigration démontre clairement que le MQM-A est une organisation terroriste. M. Ali a été mis au courant des préoccupations concernant sa demande de résidence permanente et on lui a accordé amplement la possibilité de répondre à ces préoccupations. Il n'a donc pas été victime d'un déni de justice naturelle.

[5]À titre préliminaire, le défendeur soutient que, depuis que la demande de redressement ministériel est en cours, aucune décision finale n'a été rendue en ce qui concerne l'admissibilité de M. Ali. Par conséquent, il n'y a actuellement aucune «décision» pouvant à bon droit faire l'objet d'une demande de contrôle judiciaire.

Le contexte

[6]M. Ali est un citoyen du Pakistan. En 1999, on a conclu qu'il était un réfugié au sens de la Convention et, en avril 2000, il a présenté une demande de statut de résident permanent. Six mois plus tard, le Service canadien du renseignement de sécurité a informé Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) qu'il désirait interroger M. Ali avant qu'une décision soit rendue relativement à sa demande d'établissement. Cette entrevue a eu lieu au début de 2001.

[7]CIC a ensuite demandé à M. Ali de fournir une preuve additionnelle de son identité, ce qu'il a fait. Après avoir reçu ce renseignement, CIC a fixé une entrevue avec M. Ali dans le but de discuter de son association avec le MQM. On l'a avisé que sa demande d'établissement pouvait être rejetée, puisqu'il semblait qu'il pourrait être interdit de territoire pour des raisons de sécurité du fait de son association avec le MQM au Pakistan.

[8]M. Ali a été interrogé le 28 mai 2003, en présence de son avocate. Ce même jour, l'agente d'immigration a préparé un rapport en vertu du paragraphe 44(1) de la LIPR, mentionnant qu'elle avait des motifs raisonnables de croire que M. Ali était interdit de territoire pour des raisons de sécurité. Toutefois, il semble que ce rapport n'a jamais été transmis au ministre.

[9]Le 19 juin 2003, l'agente a envoyé à M. Ali une lettre lui faisant part de ceci: [traduction] «CIC possède des renseignements indiquant que vous êtes interdit de territoire au Canada en application du paragraphe 34(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés du Canada.» Après un renvoi au texte de l'alinéa 34(1)f), lequel fait référence aux organisations qui sont ou qui seront les auteurs d'un acte de terrorisme, la lettre ajoute: [traduction] «Il y a des motifs raisonnables de croire que vous êtes membre du Mohajir Qaumi Movement (MQM).»

[10]En raison de cette conclusion, l'agente d'immigration a avisé M. Ali que [traduction] «votre demande de résidence permanente au Canada ne sera pas considérée davantage. Toutefois, il était entendu [. . .] que vous aimeriez demander un "redressement" ministériel qui, s'il était accordé, permettrait que le traitement de votre demande de résidence permanente continue.» On a demandé à M. Ali de confirmer cette interprétation en signant et en retournant une [traduction] «demande visant à obtenir l'avis du ministre».

[11]La lettre du 19 juin 2003 avise M. Ali que, en examinant sa demande de redressement, le ministre considérerait:

[traduction] [. . .] si le fait de vous accorder la résidence permanente au Canada serait contraire à l'intérêt national du Canada. Cela exigera une appréciation du préjudice que vous constituez pour l'intérêt national du Canada de même que des motifs d'ordre humanitaire relatifs à votre situation.

[12]M. Ali a déposé sa demande de redressement ministériel le 17 juillet 2003. Cette demande est toujours pendante. Il a également déposé une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire, contestant la conclusion de l'agente fondée sur l'alinéa 34(1)f) de la LIPR. Le défendeur a d'abord contesté la demande en disant que la lettre du 19 juin de l'agente d'immigration constituait une «décision». Cette position a toutefois changé, peu de temps avant l'audience, lorsque l'avocate a pris connaissance du fait qu'une demande de redressement ministériel était en cours.

[13]Le défendeur fait maintenant valoir qu'aucune décision finale n'a été rendue relativement à la demande de résidence permanente de M. Ali et que, par conséquent, il n'y a actuellement aucune «décision» pouvant à bon droit faire l'objet d'un contrôle judiciaire.

Les questions en litige

[14]La Cour est saisie de trois questions en litige. La première est la question préliminaire de savoir si la décision d'un agent d'immigration en application du paragraphe 34(1) de la LIPR, selon laquelle il y a des motifs raisonnables de croire qu'un demandeur est membre d'une organisation terroriste, est une décision susceptible de contrôle judiciaire lorsqu'une demande de redressement ministériel est pendante.

[15]Au cas où je conclurais que la décision de l'agente est à bon droit susceptible de contrôle, la question qui se soulève alors est celle de savoir si l'agente a fourni des motifs suffisants pour justifier sa conclusion selon laquelle le MQM-A constitue une organisation terroriste. Je dois également trancher la question de savoir si l'agente a manqué à son devoir d'équité envers M. Ali en n'indiquant pas les éléments de preuve sur lesquels elle avait l'intention de se fonder pour en arriver à sa conclusion selon laquelle le MQM-A est une organisation terroriste. J'aborderai chacune de ces questions à tour de rôle, en commençant par la question préliminaire de savoir si la décision de l'agente est à bon droit susceptible de contrôle.

Le régime législatif

[16]Dans le but de décider si une décision susceptible de révision a été rendue relativement à la demande de résidence permanente de M. Ali, il est nécessaire de tenir compte du régime législatif en cause. Les dispositions pertinentes de la LIPR sont les articles 33 et 34, lesquels se lisent ainsi:

33. Les faits--actes ou omissions--mentionnés aux articles 34 à 37 sont, sauf disposition contraire, appréciés sur la base de motifs raisonnables de croire qu'ils sont survenus, surviennent ou peuvent survenir.

34. (1) Emportent interdiction de territoire pour raison de sécurité les faits suivants:

a) être l'auteur d'actes d'espionnage ou se livrer à la subversion contre toute institution démocratique, au sens où cette expression s'entend au Canada;

b) être l'instigateur ou l'auteur d'actes visant au renversement d'un gouvernement par la force;

c) se livrer au terrorisme;

d) constituer un danger pour la sécurité du Canada;

e) être l'auteur de tout acte de violence susceptible de mettre en danger la vie ou la sécurité d'autrui au Canada;

f) être membre d'une organisation dont il y a des motifs raisonnables de croire qu'elle est, a été ou sera l'auteur d'un acte visé aux alinéas a), b) ou c).

(2) Ces faits n'emportent pas interdiction de territoire pour le résident permanent ou l'étranger qui convainc le ministre que sa présence au Canada ne serait nullement préjudiciable à l'intérêt national.

[17]Il faut également tenir compte du paragraphe 6(3) de la LIPR qui établit clairement que le pouvoir discrétionnaire d'accorder une exemption fondée sur l'intérêt national en vertu du paragraphe 34(2) est conféré exclusivement au ministre et ne peut être délégué.

La conclusion de l'agente d'immigration en application du paragraphe 34(1) est-elle une décision susceptible de contrôle?

La position du défendeur

[18]Le défendeur reconnaît qu'une décision de la part d'un agent d'immigration selon laquelle une personne est membre d'une organisation terroriste peut à bon droit faire l'objet d'une demande de contrôle judiciaire, lorsque le demandeur choisit de ne pas se prévaloir de la possibilité de demander un redressement ministériel en vertu du paragraphe 34(2). En effet, l'avocate du défendeur m'a informée du fait que, lorsqu'un demandeur est insatisfait des conclusions d'un agent d'immigration, tirées en application du paragraphe 34(1), le cours normal est de demander immédiatement le contrôle judiciaire de ces conclusions. Le défendeur ne laisse aucunement entendre qu'il y a quoi que ce soit d'incorrect dans cette pratique et on m'a fait part du fait que la Cour traitait régulièrement des demandes de contrôle de conclusions tirées en application du paragraphe 34(1) de la LIPR.

[19]La présente affaire est inhabituelle, selon l'avocate, puisque M. Ali a choisi de demander un redressement ministériel, en même temps que le contrôle judiciaire des conclusions de l'agente d'immigration, tirées en application du paragraphe 34(1). Selon le défendeur, tant que la demande de redressement ministériel est pendante, la question de savoir si M. Ali est admissible n'a pas été tranchée de manière définitive et la demande de contrôle judiciaire est prématurée.

[20]Bien que l'élément central d'une demande de redressement ministériel fondée sur le paragraphe 34(2) porte habituellement sur le rôle du demandeur au sein de l'organisation en question, le défendeur soutient qu'il est néanmoins loisible à M. Ali de continuer à faire valoir devant le ministre que le MQM-A ne constitue pas une organisation terroriste. Il est également loisible au ministre de réexaminer les conclusions de l'agente d'immigration à cet égard.

[21]À l'appui de cet argument, l'avocate attire l'attention sur un document qui serait fourni aux personnes ayant été déclarées interdites de territoire en application du paragraphe 34(1) et pouvant être intéressées à demander un redressement ministériel. Ce document informe les demandeurs que leurs observations devraient être concentrées sur un certain nombre de questions, y compris le but de l'organisation, le rôle joué par la personne au sein de l'organisation, la nature et l'étendue des activités de la personne au sein de l'organisation ainsi que la question de savoir si ces activités impliquaient de la violence. On demande également des renseignements concernant le moment où la personne a été membre de l'organisation en question ainsi que l'attitude actuelle de la personne à l'égard de l'organisation. On informe les demandeurs que le ministre tiendra également compte du motif pour lequel la personne immigre au Canada et des «circonstances spéciales» entourant la demande. On demande également aux demandeurs de décrire leurs activités actuelles telles que l'emploi, l'éducation et l'implication dans la collectivité, ainsi que de fournir des renseignements à propos de leur situation familiale, de même que tout autre renseignement que le demandeur estime pertinent. Il convient de noter que M. Ali nie avoir déjà reçu ce document, bien qu'il soit mentionné dans la lettre du 19 juin 2003.

[22]Si un demandeur est insatisfait de la décision du ministre fondée sur le paragraphe 34(2), le défendeur affirme qu'il a toujours le loisir de demander le contrôle judiciaire à cette étape de la procédure. Une demande de contrôle judiciaire introduite après que la question de l'admissibilité a été tranchée de manière définitive peut porter sur la contestation des conclusions tirées par le ministre en application du paragraphe 34(2) et, également, sur les conclusions antérieures tirées par l'agent d'immigration en application du paragraphe 34(1).

[23]Enfin, le défendeur fait valoir que le fait d'attendre que la question de son admissibilité soit tranchée de manière définitive ne cause aucun préjudice à M. Ali.

La position de M. Ali

[24]M. Ali soutient qu'il subirait vraiment un préjudice s'il devait attendre jusqu'à ce que le ministre traite sa demande de redressement ministériel, soulignant qu'il désire faire venir son épouse au Canada et que, tant que son statut d'immigrant est remis en question, il est empêché de le faire. Sa demande de redressement ministériel est pendante depuis plus d'un an, selon M. Ali, et rien n'indique quand le ministre pourrait rendre une décision. Le fait qu'il continue à être séparé d'un être cher équivaut à un préjudice très réel.

[25]M. Ali prétend qu'il subira davantage de préjudice s'il doit attendre que le ministre traite sa demande de redressement en application du paragraphe 34(2), puisqu'il affirme qu'il ne serait alors pas en mesure de contester les conclusions sous-jacentes de l'agente d'immigration, tirées en application du paragraphe 34(1) de la LIPR.

[26]M. Ali conteste également le fait que la décision de l'agente d'immigration soit de nature interlocutoire. Ce qu'il vise à contester, c'est la décision finale de l'agente d'immigration qui a jugé qu'il était membre d'une organisation terroriste.

[27]Selon M. Ali, pour trancher la question de savoir s'il doit exercer le pouvoir discrétionnaire que lui confère le paragraphe 34(2), le ministre ne réexaminera pas la conclusion selon laquelle il est membre d'une organisation terroriste. Le ministre examinera plutôt la question de savoir si la présence constante de M. Ali au Canada serait préjudiciable à l'intérêt national.

[28]Enfin, bien que l'affidavit de l'agente d'immigration mentionne qu'elle ne préparerait un [traduction] «rapport sur l'interdiction de territoire» en vertu de l'article 44 qu'une fois qu'une décision aurait été rendue relativement à la demande de redressement ministériel de M. Ali, celui-ci souligne que l'agente a justement préparé un tel rapport le même jour qu'elle l'a interrogé. Cela démontre, selon M. Ali, qu'une décision finale a été rendue sur une question de fond.

Les principes juridiques applicables

[29]Dans le but d'éviter la multiplication des procédures et de s'assurer que les procédures administra-tives n'avortent pas en raison de demandes de contrôle judiciaire de décisions préliminaires ou interlocutoires, la Cour refusera habituellement d'exercer sa compétence relativement à une décision qui ne détermine pas de manière définitive les droits fondamentaux de l'intéressé, lorsqu'un recours subsidiaire adéquat est disponible plus tard: D. J. M. Brown et J. M. Evans, Judicial Review of Administrative Action in Canada, feuilles mobiles (Toronto: Canvasback Publishing, 1998), au paragraphe 2-69.

[30]Comme l'a souligné la Cour d'appel dans l'arrêt Zündel c. Canada (Commission des droits de la personne), [2000] 4 C.F. 255, la justification de cette règle est que la partie plaignante peut avoir gain de cause en fin de compte, ce qui rend totalement inutile la demande de contrôle judiciaire d'une décision interlocutoire. En outre, les retards et frais associés à de pareilles demandes peuvent avoir pour effet de jeter le discrédit sur l'administration de la justice.

[31]Ce principe n'est toutefois pas absolu et il est possible de procéder au contrôle judiciaire d'une décision interlocutoire lorsqu'il existe des «circonstances spéciales»: Szczecka c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 116 D.L.R. (4th) 333 (C.A.F.).

[32]Il a été décidé que des «circonstances spéciales» existaient lorsque, par exemple, la compétence du tribunal est en cause: Pfeiffer c. Canada (Surintendant des faillites), [1996] 3 C.F. 584 (1re inst.).

[33]La détermination de la disponibilité d'un recours subsidiaire adéquat «suppose que l'on procède à une interprétation législative de même qu'à un examen des circonstances appropriées en vertu desquelles le tribunal devrait refuser d'exercer son pouvoir discrétionnaire d'entendre une demande de contrôle judiciaire en raison de l'existence d'un recours subsidiaire adéquat»: Froom c. Canada (Ministre de la Justice), [2004] 2 R.C.F. 154 (C.F.), au paragraphe 52.

[34]Comme l'a fait remarquer la Cour suprême dans l'arrêt Canadien Pacifique Ltée c. Bande indienne de Matsqui, [1995] 1 R.C.S. 3, il faut tenir compte d'une variété de facteurs pour décider s'il est approprié de procéder à un contrôle judiciaire ou si un demandeur devrait être obligé de se prévaloir du recours subsidiaire disponible. Parmi ces facteurs, il y a la commodité de l'autre recours, la nature de l'erreur et la nature de la juridiction d'appel. La liste n'est pas exhaustive et il incombe aux tribunaux d'identifier et d'équilibrer les facteurs pertinents dans des situations précises.

[35]Il a été décidé qu'un recours subsidiaire adéquat existait lorsque le processus de contrôle permettait que la décision initiale soit examinée quant à sa justesse: Fast c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] 1 C.F. 257 (1re inst.), conf. par (2001), 41 Admin. L.R. (3d) 200 (C.A.F.).

[36]Dans le cadre de cette interprétation des principes juridiques applicables, j'aborde maintenant l'application de ces principes au faits de l'espèce.

Analyse

[37]Ayant examiné avec soin les positions avancées par chacune des parties, j'ai conclu qu'un contrôle judiciaire de la décision d'un agent d'immigration, rendue conformément au paragraphe 34(1) de la LIPR, était recevable. À mon avis, la Cour fédérale peut entendre une demande de contrôle judiciaire de la décision d'un agent, en dépit du fait qu'une demande de redressement ministériel fondée sur le paragraphe 34(2) est en cours.

[38]Pour en venir à cette conclusion, j'ai examiné la question de savoir si la décision de l'agente d'immigration était de nature interlocutoire et, également, si la voie du redressement ministériel constituait un recours subsidiaire adéquat. J'aborderai chacune de ces questions à tour de rôle.

La conclusion de l'agente d'immigration, tirée en application du paragraphe 34(1), est-elle de nature interlocutoire?

[39]Il est vrai que l'article 34 traite de la question globale de l'admissibilité au Canada et qu'aucune décision finale quant à l'admissibilité de M. Ali ne sera rendue tant que sa demande de redressement ministériel ne sera pas tranchée définitivement. Cela étant dit, il ne s'ensuit pas nécessairement que la décision rendue par l'agente d'immigration, conformément au paragraphe 34(1), selon laquelle il y a des motifs raisonnables de croire que M. Ali est membre d'une organisation terroriste, est de nature interlocutoire.

[40]L'article 34 de la LIPR comporte deux éléments. Lorsqu'on le lit conjointement avec l'article 33, le paragraphe 34(1) permet à un agent d'immigration de trancher la question de savoir si, entre autres choses, il y a des motifs raisonnables de croire qu'un demandeur est membre d'une organisation terroriste.

[41]Le paragraphe 34(2) prévoit qu'un décideur différent--à savoir le ministre elle-même--examine la question de savoir si la présence constante d'un étranger tel que M. Ali au Canada serait préjudiciable à l'intérêt national.

[42]Une enquête relative au paragraphe 34(2) vise une question différente de celle envisagée au paragraphe 34(1). La question que doit trancher le ministre en vertu du paragraphe 34(2) n'est pas celle de la justesse de la décision de l'agent selon laquelle il y a des motifs raisonnables de croire qu'un demandeur est membre d'une organisation terroriste--cette décision aura déjà été rendue. Le ministre est plutôt chargé d'examiner la question de savoir si, en dépit de l'appartenance du demandeur à une organisation terroriste, il serait préjudiciable à l'intérêt national de permettre au demandeur de demeurer au Canada.

[43]En d'autres mots, le paragraphe 34(2) habilite le ministre à accorder un redressement exceptionnel, malgré la conclusion ayant déjà été tirée par l'agent d'immigration.

[44]Par conséquent, je suis convaincue que la décision de l'agente d'immigration en cause en l'espèce tranchait une question de fond soulevée dans le cadre de la demande de résidence permanente de M. Ali--à savoir s'il y a des motifs raisonnables de croire qu'il est membre d'une organisation terroriste. Il ne s'agit pas d'une étape préliminaire ou interlocutoire dans le processus. Il s'agit d'une conclusion d'interdiction de territoire, sujette à l'octroi d'un redressement exceptionnel fondé sur une considération relative à l'intérêt national.

[45]Ce point de vue trouve appui dans le fait que, une fois que l'entrevue du 28 mai 2003 de M. Ali a eu lieu, l'agente d'immigration a estimé qu'il était approprié de préparer un rapport en vertu de l'article 44 confirmant son opinion selon laquelle M. Ali était interdit de territoire.

[46]Je ne suis pas non plus convaincue qu'une conclusion favorable de la part du ministre, relativement à la demande de redressement ministériel de M. Ali, aurait pour effet de rendre la présente demande inutile ou théorique. Une conclusion du ministre, en application du paragraphe 34(2), selon laquelle la présence constante de M. Ali au Canada ne serait nullement préjudiciable à l'intérêt national, permettrait à M. Ali de se voir accorder la résidence permanente, qui est, après tout, ce qu'il vise à obtenir. Toutefois, M. Ali ferait toujours face à la conclusion selon laquelle il y a des motifs raisonnables de croire qu'il est membre d'une organisation terroriste. Il s'agit d'une conclusion très grave, laquelle peut avoir des répercussions pour M. Ali dans l'avenir.

Une demande de redressement ministériel constitue-t-elle un recours subsidiaire adéquat?

[47]Le défendeur soutient que, bien qu'une décision rendue par un agent d'immigration en application du paragraphe 34(1) puisse à bon droit faire l'objet d'une demande de contrôle judiciaire lorsque le demandeur choisit de ne pas demander de redressement ministériel en vertu du paragraphe 34(2), elle n'est pas susceptible d'un contrôle judiciaire lorsqu'une telle demande est pendante, parce que le processus de redressement ministériel fournit au demandeur un recours subsidiaire adéquat.

[48]J'avoue être préoccupée par cet argument. Il me semble que ou bien la voie du redressement ministériel fournit à un demandeur un recours subsidiaire adéquat, ou bien elle ne lui en fournit pas. Si elle en fournit un, les demandeurs devraient alors être obligés de chercher à obtenir un tel redressement avant de s'adresser à la Cour fédérale dans le cadre d'un contrôle judiciaire. Si, d'un autre côté, elle ne fournit pas aux demandeurs un recours subsidiaire adéquat, le fait qu'une demande de redressement en vertu du paragraphe 34(2) soit pendante ne devrait alors pas avoir pour effet d'empêcher le contrôle judiciaire des conclusions tirées en application du paragraphe 34(1).

[49]En d'autres mots, le choix fait par un demandeur quant à savoir s'il se prévaut de la procédure prévue au paragraphe 34(2) ne devrait pas avoir d'effet sur la caractérisation d'une demande de redressement ministériel à titre de recours subsidiaire adéquat.

[50]Le processus de redressement ministériel ne constitue pas, à mon avis, un recours subsidiaire adéquat pour M. Ali. Comme je l'ai déjà mentionné, lorsqu'il exerce la compétence que lui confère le paragraphe 34(2), le ministre n'examine pas la justesse de la décision de l'agent d'immigration rendue en application du paragraphe 34(1). Le ministre exerce plutôt une fonction séparée et distincte prévue par la loi, celle d'examiner l'impact que la présence constante d'un demandeur au Canada aurait sur l'intérêt national. À cet égard, les faits de la présente affaire peuvent être distingués de ceux de la décision Fast.

[51]J'entrevois une autre difficulté relativement à la position du défendeur. Celui-ci affirme que, si M. Ali est insatisfait de la décision rendue par le ministre en application du paragraphe 34(2) de la LIPR, il pourrait chercher à obtenir le contrôle judiciaire à cette étape de la procédure, en ce qui concerne tant la décision du ministre que celle de l'agente d'immigration. Toutefois, si M. Ali tentait d'obtenir le contrôle des conclusions de l'agente d'immigration en même temps que le contrôle judiciaire de la décision du ministre de ne pas lui accorder le redressement en application du paragraphe 34(2), il pourrait déroger à la règle 302 des Règles de la Cour fédérale, 1998 [DORS/98-106]. Cela étant, on pourrait faire valoir que M. Ali cherchait à obtenir le contrôle de deux décisions, rendues par deux personnes différentes, dans une seule demande de contrôle judiciaire.

[52]Par conséquent, je ne suis pas convaincue que la voie du redressement ministériel fournit un forum subsidiaire adéquat dans lequel M. Ali peut contester la conclusion de l'agente d'immigration selon laquelle il y a des motifs raisonnables de croire qu'il est membre d'une organisation terroriste. Il convient donc d'examiner la demande de contrôle judiciaire de M. Ali.

Omission de lier le MQM-A à des actes de terrorisme

[53]Les motifs de l'agente sont composés de ses notes relatives à l'entrevue qu'elle a eue avec M. Ali. Dans son entrevue, M. Ali a admis appartenir au MQM-A, mais il a affirmé que, contrairement au MQM-H, le MQM-A était un parti politique pacifique qui était axé sur les besoins des pauvres au Pakistan. M. Ali a prétendu que l'organisation ne croyait pas en la violence et qu'il n'avait jamais entendu de discussions relativement à des activités violentes au sein du groupe. S'il avait eu connaissance que le MQM-A se livrait à des activités violentes, affirme M. Ali, il n'aurait jamais été impliqué dans l'organisation, puisqu'il est pacifique.

[54]M. Ali affirme que l'agente d'immigration a commis une erreur en concluant que le MQM-A est une organisation dont il y a des motifs raisonnables de croire qu'elle est, a été ou sera l'auteur d'un acte de terrorisme et en omettant de fournir des motifs suffisants à l'appui de sa conclusion. L'agente n'a pas fourni d'analyse pour étayer sa conclusion selon laquelle le MQM-A est une organisation terroriste. Plus particulièrement, elle n'a mentionné aucun acte précis que le MQM-A aurait commis afin de justifier sa conclusion selon laquelle il s'agit d'une organisation terroriste.

[55]Le défendeur soutient qu'on ne peut logiquement faire valoir que M. Ali n'était pas au courant des activités violentes du MQM-A, puisqu'il admet être membre de l'organisation, avoir assisté à des réunions et en avoir organisé. En outre, M. Ali a été confronté, au cours de l'entrevue, avec des renseignements qui donnent à penser que le MQM est une organisation violente. M. Ali n'a pas nié que ces événements s'étaient produits, affirmant simplement qu'il n'en avait pas eu connaissance. Selon le défendeur, la croyance exprimée par M. Ali selon laquelle le MQM-A est une organisation pacifique est tout simplement incompatible avec la preuve documentaire.

[56]En outre, affirme le défendeur, la proposition selon laquelle l'agente d'immigration n'a pas fourni de motifs suffisants n'est pas fondée. Selon le défendeur, la décision de l'agente d'immigration révèle clairement qu'elle estimait que M. Ali était membre d'une organisation dont il y a des motifs raisonnables de croire qu'elle se livre ou s'est livrée au terrorisme.

[57]Pour tirer une conclusion d'interdiction de territoire en application du paragraphe 34(1) de la LIPR, un agent d'immigration doit avoir des «motifs raisonnables de croire» qu'un demandeur est, parmi d'autres possibilités, membre d'une organisation qui se livre au terrorisme. La norme de preuve requise pour établir des «motifs raisonnables» est «davantage qu'un léger soupçon, mais elle n'atteint pas le critère civil de la prépondérance des probabilités»: Alemu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 997; [2004] A.C.F. no 1210 (C.F.) (QL), au paragraphe 26.

[58]En outre, pour en arriver à une conclusion en application de l'alinéa 34(1)f), l'agent d'immigration devrait tenir compte de la définition du terme «terrorisme» fournie dans l'arrêt Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] 1 R.C.S. 3, où la Cour a statué au paragraphe 98 que:

[. . .] «terrorisme» [. . .] inclut tout «acte destiné à tuer ou blesser grièvement un civil, ou toute autre personne qui ne participe pas directement aux hostilités dans une situation de conflit armé, lorsque, par sa nature ou son contexte, cet acte vise à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s'abstenir d'accomplir un acte quelconque».

L'on peut citer également la Loi antiterroriste, L.C. 2001, ch. 41, ainsi que les définitions d'«activité terroriste» et de «groupe terroriste» qui se trouvent au paragraphe 83.01(1) [édicté par L.C. 2001, ch. 41, art. 4] du Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46.

[59]En l'espèce, un examen des notes de l'agente d'immigration révèle que M. Ali a admis son implication continue auprès du MQM-A. Toutefois, tout au long de l'entrevue, il a soutenu que, au meilleur de sa connaissance, le MQM-A était un parti politique pacifique impliqué dans des bonnes oeuvres au profit des pauvres au Pakistan.

[60]Au milieu de l'entrevue, les notes de l'agente mentionnent qu'elle [traduction] «a lu des extraits d'un document portant sur les droits de la personne à l'échelle internationale relativement à la violence perpétrée par le MQM-A», après quoi l'agente a demandé à M. Ali de lui faire ses commentaires. Il ne ressort pas clairement des notes à quel document l'agente se référait. Toutefois, l'affidavit de l'agente identifie le document comme étant une étude préparée par la Direction des recherches de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié portant sur les activités du MQM au Pakistan, entre janvier 1995 et avril 1996. Rien n'indique, ni dans les notes de l'agente ni dans son affidavit, quels extraits de l'étude ont été lus à M. Ali. Selon les notes de l'agente, M. Ali a répondu en affirmant que le MQM n'avait jamais cru en la violence.

[61]L'agente a mentionné plus tard: [traduction] «Il y est mentionné que le MQM était impliqué dans la violence et qu'il utilisait des tactiques terroristes pour maintenir le contrôle sur Karachi, la violence ayant culminé entre 1995 et 1998, que pensez-vous de cela?», ce à quoi M. Ali aurait répondu: [traduction] «Tout le temps que j'étais au Pakistan, rien de cela ne s'est produit; nous étions des victimes».

[62]Bien qu'il n'y ait pas d'analyse ou de conclusion dans les notes de l'agente, sa lettre du 19 juin 2003 reflète une conclusion selon laquelle elle avait des motifs raisonnables de croire que M. Ali était membre d'une organisation terroriste. À mon avis, cette conclusion ne peut être maintenue.

[63]Premièrement, rien n'indique, ni dans les notes de l'agente ni dans sa lettre, ce qu'elle veut dire lorsqu'elle affirme que M. Ali est un membre d'une organisation qui se livre au «terrorisme», puisqu'il est impossible de découvrir comment l'agente définit ce terme. Il est clair qu'une dérogation à la définition de terrorisme énoncée dans l'arrêt Suresh de la part d'un décideur constitue une erreur susceptible de révision: Fuentes c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2003] 4 C.F. 249 (1re inst.). En l'espèce, les motifs de l'agente sont tout simplement insuffisants pour que la Cour puisse décider si le terme a été correctement défini.

[64]D'autres difficultés se posent à l'égard de la décision de l'agente. Les motifs de l'agente d'immigration font précisément référence à l'admission de M. Ali selon laquelle il était, et demeure, membre du MQM-A. En conséquence, il existe clairement une explication explicite de la conclusion de l'agente quant à l'appartenance à l'organisation. Toutefois, je suis préoccupée au sujet de l'omission de l'agente de mentionner des actes précis posés par le MQM-A qui satisferaient à la définition de «terrorisme» de l'arrêt Suresh ou de fournir une analyse de ces éléments de preuve. On peut également se questionner au sujet de la suffisance des éléments de preuve appuyant la conclusion de l'agente.

[65]En argumentation, l'avocate du défendeur a souligné différents extraits provenant du document de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié à l'appui de la proposition selon laquelle le MQM-A constitue une organisation terroriste. L'agente disposait en effet d'éléments de preuve qui appuieraient la conclusion selon laquelle le MQM en général, et le MQM-H en particulier, étaient les auteurs d'actes de terrorisme. Toutefois, en ce qui concerne le MQM-A, les éléments de preuve sont beaucoup plus limités et sont en grande partie restreints à des actes violents posés par des membres du MQM-A à l'encontre de membres de l'organisation rivale du MQM-H.

[66]Le rapport de la CISR reconnaît clairement que le MQM est composé de deux factions: le MQM-A et le MQM-H. Bien que certains actes de terrorisme soient clairement attribués au MQM-H, la plus grande partie du rapport ne fait pas la distinction entre les deux groupes, ne mentionnant que les actions posées par les «activistes du MQM», les «travailleurs du MQM» ou les «militants du MQM».

[67]Comme l'a fait remarquer la juge Layden-Stevenson dans la décision Alemu, précitée, au paragraphe 41:

Une conclusion d'exclusion est très importante pour un demandeur. Il faut faire preuve de circonspection afin d'être tout à fait certain que ces conclusions sont tirées comme il se doit. Le tribunal ne substituera pas son opinion à celle du décideur si l'analyse et le fondement de la décision sont raisonnables. Il n'en est pas ainsi en l'espèce. Une conclusion d'exclusion doit être fondée sur des motifs qui permettent de connaître la nature du groupe [. . .]. [À défaut], le résultat est bien loin d'être raisonnable. [Au paragraphe 41.]

[68]En l'espèce, les motifs de l'agente ne fournissent pas un fondement adéquat à sa conclusion selon laquelle il y a des motifs raisonnables de croire que le MQM-A est un groupe qui se livre à des activités terroristes. Plus particulièrement, il n'y a aucune analyse du rapport de la CISR ni aucune précision quant aux activités exercées par le MQM-A que l'agente estime être de nature terroriste. À mon avis, vu le caractère sérieux de la conclusion en cause et des conséquences en découlant pour M. Ali, il incombait à l'agente de fournir certaines explications au sujet de sa conclusion selon laquelle il y a des motifs raisonnables de croire que le MQM-A est une organisation terroriste. Son omission de le faire constitue une erreur susceptible de révision.

Omission de l'agente d'immigration de communiquer les éléments de preuve sur lesquels elle s'est fondée

[69]Bien qu'il ressorte du dossier que l'agente ait pu disposer d'autres documents qui n'ont pas été communiqués, les deux parties n'ont concentré leur attention que sur la question de savoir si le défendeur avait l'obligation de communiquer le rapport de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Par conséquent, je restreindrai mon analyse à cette question.

[70]M. Ali affirme que l'agente d'immigration a manqué à son devoir d'équité en omettant de lui fournir une copie du rapport de la CISR sur lequel elle s'est fondée relativement aux activités du MQM-A. Selon l'affidavit de M. Ali, à la fin de l'entrevue du 28 mai 2003, son avocate a demandé à l'agente d'immigration quels étaient les renseignements sur lesquels elle se fondait relativement à l'allégation selon laquelle le MQM se livrait au terrorisme. L'agente aurait répondu qu'elle se fondait sur des renseignements qu'elle avait obtenus sur Internet.

[71]M. Ali déclare que son avocate a ensuite demandé une copie de ces documents. L'avocate a également demandé d'avoir la possibilité de présenter des observations en réponse concernant l'organisation du MQM. Toutefois, on n'a jamais fourni à l'avocate de M. Ali les renseignements demandés et on ne lui a pas donné non plus la possibilité de formuler des observations à l'égard de la nature de l'organisation du MQM.

[72]Bien que les notes de l'agente d'immigration ne fassent aucunement mention de cette discussion, l'agente ne conteste pas le fait qu'une discussion ait eu lieu lors de l'entrevue à l'égard du document en question. L'agente a présenté un affidavit, souscrit quelque six mois après l'entrevue, dans lequel elle déclare: [traduction] «À la fin de l'entrevue, Me Kostadinov m'a demandé sur quels éléments de preuve je me fonderais pour rendre ma décision. J'ai mentionné que j'avais eu accès à des renseignements à partir d'Internet.» L'agente ajoute: [traduction] «J'avais examiné des renseignements provenant de la Direction des recherches, Direction générale de la documentation, de l'information et des recherches, CISR, Ottawa.» Elle a ensuite identifié l'étude de la CISR, laquelle est jointe en tant que pièce à son affidavit.

[73]L'agente d'immigration affirme: [traduction] «Si le demandeur ou son avocate avaient demandé une copie des documents sur lesquels je m'étais fondée concernant le MQM, je leur aurais fourni une copie ou une liste des documents ainsi que l'endroit où ils pourraient les obtenir.» Donc, bien que l'agente d'immigration ne le dise pas expressément, il ressort implicitement de son affidavit qu'aucune demande de cette nature n'est venue de l'avocate de M. Ali.

[74]En toute déférence, cela n'a aucun sens. Les deux parties conviennent que l'avocate de M. Ali s'est enquise de la documentation qui était examinée et que l'agente d'immigration l'a avisée qu'elle se fondait sur des renseignements obtenus sur Internet. Aucune des parties ne laisse entendre que l'étude a été identifiée par un nom ou qu'il a été mentionné précisément que les renseignements émanaient de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Même si les renseignements en question sont facilement accessibles par l'entremise du site Web de la Commission, sans savoir ce qu'elle cherchait, l'avocate de M. Ali n'aurait pas pu les repérer.

[75]Le bon sens suggère que, à tout le moins, l'avocate de M. Ali aurait demandé le nom et la source du document en cause, afin qu'elle puisse en obtenir une copie. Autrement, il lui aurait été inutile de s'enquérir du document au départ. Par conséquent, je préfère l'affidavit de M. Ali à celui de l'agente d'immigration et je conclus qu'une demande précise a été faite lors de l'entrevue afin d'obtenir une copie de la preuve documentaire sur laquelle se fondait l'agente d'immigration à l'égard des activités du MQM.

[76]En règle générale, le défendeur n'est pas tenu de communiquer publiquement les renseignements disponibles à l'égard de la situation dans d'autres pays: Mancia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] 3 C.F. 461 (C.A.). L'avocate de M. Ali soutient que, dans des cas comme celui-ci, lorsque l'effet de la conclusion d'interdiction de territoire est d'étiqueter M. Ali comme membre d'une organisation terroriste et, par conséquent, de lui refuser la résidence permanente, l'équité exige néanmoins qu'il soit bien informé des éléments de preuve qu'il doit présenter.

[77]Je pense qu'une distinction peut être établie entre la situation envisagée dans l'arrêt Mancia, où la Cour d'appel devait examiner des renseignements génériques concernant la situation d'un pays dans le contexte de ce qui était alors connu sous le nom de décision relative à la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada (CDNRSRC), et la situation en l'espèce, où l'agente se fondait sur des renseignements spécifiques en vue d'en venir à une conclusion d'exclusion. Toutefois, je n'ai pas à trancher la question de savoir s'il existe une obligation générale pour un agent d'immigration de communiquer des renseignements documentaires disponibles publiquement dans le contexte d'une instance relative au paragraphe 34(1), puisque je suis convaincue qu'en l'espèce, il y avait une demande précise de la part de l'avocate de M. Ali visant à obtenir des renseignements concernant la documentation prise en compte et qu'aucun de ces renseignements n'a été fourni avant que l'agente d'immigration rende sa décision.

[78]Les instances visées par l'article 34 de la LIPR peuvent avoir de graves conséquences pour les demandeurs et elles ne devraient pas être réduites à un jeu de devinettes, dans lequel le demandeur doit tenter de déterminer par lui-même quels renseignements sont utilisés contre lui.

[79]L'omission de la part de l'agente d'immigration d'identifier, pour M. Ali, le rapport de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, en réponse à une demande expresse de son avocate visant à obtenir ces renseignements, équivaut à une erreur susceptible de révision et constitue un autre fondement à l'annulation de la décision de l'agente.

Conclusion

[80]Pour les motifs qui précèdent, la présente demande est accueillie. La décision de l'agente d'immigration est annulée et l'affaire est renvoyée à un autre agent d'immigration pour qu'elle soit réexaminée.

Certification

[81]Le défendeur propose la question suivante à certifier:

[traduction] Une décision rendue en application du paragraphe 34(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés est-elle susceptible de contrôle judiciaire si une demande de redressement ministériel en application du paragraphe 34(2) est pendante et qu'aucune décision n'a été rendue sur la demande d'établissement?

[82]À mon avis, il s'agit d'une question grave de portée générale qui transcende les intérêts des parties en l'espèce. Par conséquent, je suis prête à certifier la question.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE:

1. La présente demande est accueillie. La décision de l'agente d'immigration est annulée et l'affaire est renvoyée à un autre agent d'immigration pour qu'elle soit réexaminée.

2. La question suivante est certifiée:

[traduction] Une décision rendue en application du paragraphe 34(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés est-elle susceptible de contrôle judiciaire si une demande de redressement ministériel en application du paragraphe 34(2) est pendante et qu'aucune décision n'a été rendue sur la demande d'établissement?

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