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A-64-02

2003 CAF 24

Eli Lilly Canada Inc. (appelante) (demanderesse)

c.

Le ministre de la Santé (intimé) (défendeur)

Répertorié: Eli Lilly Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé) (C.A.)

Cour d'appel, Isaac, Sharlow et Malone, J.C.A.-- Ottawa, 15 octobre 2002 et 22 janvier 2003.

Brevets -- Pratique -- Médicaments brevetés -- Appel de la décision par laquelle la Section de première instance de la C.F.  a rejeté une demande de contrôle judiciaire -- Le ministre a radié du registre le brevet 969 visant la ceftazidime pentahydratée associée à du lactose amorphe -- L'invention évitait le problème de toxicité en supprimant la formation de polymères -- L'appelante a obtenu des avis de conformité pour des drogues portant le nom commercial «Tazidime» -- L'appel porte sur la question de l'interprétation du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) -- Portée du pouvoir du ministre d'ajouter des brevets au registre ou d'en supprimer -- Examen des modifications apportées au Règlement en 1998 -- L'argument suivant lequel les listes de brevets soumises avant 1998 ne devaient pas être appréciées selon les règles les plus strictes a été rejeté -- Un brevet peut être supprimé s'il ne peut plus être inscrit dans une liste -- Les modifications ne sont pas rétroactives -- Il s'agit de savoir si le brevet 969 pouvait être inscrit selon le Règlement tel qu'il avait été modifié -- L'examen du ministre est facilité par le formulaire de la liste de brevets -- La ceftazidime est-elle un médicament? -- Désaccord avec la décision de la Section de première instance de la C.F. -- Comme elle a obtenu un avis de conformité pour la drogue Tazidime, l'appelante peut soumettre une liste de brevets -- L'argument du ministre selon lequel le Règlement exige la «pertinence» entre la drogue indiquée dans l'avis de conformité et le brevet inclus au registre n'a pas été retenu -- La valeur du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation a été examinée -- Problème avec l'interprétation du ministre: elle permettrait au fabricant de produits génériques de contrefaire le brevet et l'appelante serait incapable de l'empêcher d'obtenir un avis de conformité.

Aliments et drogues -- Appel interjeté de l'ordonnance de la Section de première instance de la C.F.  confirmant la décision du ministre de radier le brevet du registre des brevets -- L'avis de conformité a été délivré conformément au Règlement sur les aliments et drogues et à la Loi sur les aliments et drogues dans leur version de 1990 et 1992 -- Les listes de brevets ont été présentées en 1993 -- En raison du nombre de présentations soumises à l'époque, les listes de brevets ont été ajoutées au registre sans qu'une décision ne soit prise au sujet de leur admissibilité -- À l'époque, le registre des brevets était tenu par des employés de bureau -- Définition de «drogue» à l'art. 2 de la Loi -- Opinion dissidente: le produit en cause n'est pas une «drogue» au sens de l'art. 2.

Interprétation des lois -- Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) -- Les modifications apportées en 1998 permettaient de radier des listes les brevets admissibles en 1998 s'ils ne respectaient plus les exigences -- Les modifications ne sont pas rétroactives, elles ne s'appliquent qu'à partir du 11 mars 1998 (date d'entrée en vigueur) -- Examen de la valeur du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation.

Il s'agissait d'un appel de la décision par laquelle la Section de première instance de la Cour fédérale a rejeté la demande de contrôle judiciaire de la radiation, dans le registre des brevets, du brevet 969 visant la ceftazidime pentahydratée associée à du lactose amorphe. La ceftazidime est un antibiotique. Avant la divulgation contenue dans le brevet 969, les formulations connues de la ceftazidime pentahydratée avaient tendance à se dégrader, causant la toxicité. L'invention, qui incorpore du lactose amorphe, évite le problème de toxicité en supprimant la formation de polymères. L'appelante a trouvé une autre solution--qui ne fait pas l'objet d'un brevet--au problème de toxicité mais elle la garde comme un secret de fabrique. Eli Lilly a obtenu des avis de conformité pour six drogues, vendues sous le nom commercial «Tazidime», qu'elle a élaborées en utilisant cette autre solution. Ces drogues sont des poudres solubles, destinées à être reconstituées pour obtenir une solution administrée par injection.

L'appelante a présenté une liste de brevets en vertu du paragraphe 4(1) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) pour chacun de ces produits Tazidime, dont le brevet 969, mais celui-ci a été radié à la suite d'une décision du ministre de la Santé.

Arrêt (le juge Isaac, J.A.C., étant dissident): L'appel doit être accueilli.

Le juge Sharlow, J.C.A. (avec l'appui du juge Malone, J.C.A.): La seule question en litige est l'interprétation du Règlement sur les MB(ADC) et la Cour était aussi bien placée que le ministre pour interpréter ce règlement.

La présente affaire a soulevé la question de la portée du pouvoir du ministre de décider ce qui est ajouté à la liste de brevets, ou ce qui peut y rester. Avant les modifications de 1998, le paragraphe 3(1) du Règlement conférait implicitement au ministre le pouvoir de veiller à ce que tous les brevets figurant dans la liste soient conformes au Règlement et de refuser d'inscrire ou de supprimer tout brevet qui n'était pas conforme. C'est devenu encore plus clair par suite des modifications apportées en 1998. Le paragraphe 3(1) prévoit maintenant que «[le ministre] peut refuser d'y ajouter ou en supprimer tout renseignement qui n'est pas conforme aux exigences de» l'article 4. L'article 4 modifié a restreint l'étendue des renseignements qui peuvent être inscrits dans le registre des brevets. Il a été allégué au nom de l'appelante que l'admissibilité des listes de brevets soumises avant les modifications ne devait pas s'apprécier selon les règles les plus strictes, mais il n'était pas possible de souscrire à cette position. Un brevet de la liste qui ne pouvait plus être inscrit selon les modifications pouvait être supprimé n'importe quand après le 11 mars 1998 (date à laquelle les modifications sont entrées en vigueur). L'observation de l'appelante, savoir que cela porte atteinte au droit de ne pas être assujetti à une législation rétroactive, n'était pas fondée. Les modifications ne sont pas rétroactives, mais ne s'appliquent qu'à partir du 11 mars 1998. Elles ne deviennent pas rétroactives parce que leur application peut entraîner la suppression de la liste de brevets d'un brevet qui y a été accepté en 1993.

Il s'agissait donc de savoir si le brevet 969 pouvait être inscrit dans le registre des brevets selon le Règlement tel qu'il a été modifié. L'examen du ministre est facilité par le formulaire de la liste de brevets. Une liste distincte est soumise pour chaque produit et le formulaire exige des renseignements au sujet de la drogue comme la marque, le numéro d'identification de drogue indiqué dans l'avis de conformité et la concentration.

On a débattu en première instance du point de savoir si la ceftazidime est un médicament mais, bien que le lactose amorphe ne possède pas de propriétés médicinales, la ceftazidime est un antibiotique et la formulation des deux serait considérée comme un «médicament» au sens de l'article 2 du Règlement. La Cour ne pouvait souscrire à la conclusion du juge de première instance qui avait considéré qu'étant donné que la ceftazidime est toxique en soi, elle ne peut servir au traitement d'une maladie ou d'un désordre. Un antibiotique ne cesse pas d'être un antibiotique parce qu'il ne peut pas être utilisé dans l'organisme sans effet nuisible tant qu'il n'est pas combiné avec une substance qui l'empêche de devenir toxique en se dégradant. Pour l'application du Règlement sur les MB(ADC), la ceftazidime est un médicament, qu'elle soit formulée ou non avec le lactose amorphe. Comme elle a obtenu un avis de conformité pour la drogue Tazidime, qui contient un médicament, la ceftazidime, l'appelante peut soumettre une liste de brevets à l'égard de la drogue Tazidime.

Pour ce qui est des brevets qui peuvent être inclus dans la liste, suivant l'alinéa 4(2)b), la liste peut comprendre tout brevet qui comporte «une revendication pour le médicament en soi». Selon le sens grammatical du Règlement, le brevet 969 devrait pouvoir être inclus dans les listes de brevets pour le Tazidime, mais le ministre a soutenu qu'il doit exister une «pertinence» entre la drogue indiquée dans l'avis de conformité et le brevet que l'on veut inscrire dans le registre. Comme Tazidime n'utilise aucunement l'invention divulguée dans le brevet 969, celui-ci n'est pas «pertinent» par rapport à l'avis de conformité pour Tazidime. Cet argument a été accepté par le juge de première instance dans la décision Warner-Lambert Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé). Toutefois, il ressort de l'examen du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation (le Résumé) que l'extrait cité dans la décision Warner-Lambert relativement à l'exigence de pertinence prévue à l'alinéa 4(7)b) du Règlement et à la «pertinence» mentionnée dans l'extrait cité du Résumé se rapporte à la nouvelle exigence d'une attestation de la pertinence quant à la forme posologique, la concentration et la voie d'administration. On obtiendra alors la liste de brevets «spécifique d'un produit» que l'on recherche en respectant la conformité à l'alinéa 4(7)b). L'extrait cité n'a pas la portée plus large plaidée par le ministre. Un résumé de l'étude d'impact de la réglementation se limite à expliquer en termes très généraux l'objectif du Règlement. La question est de savoir si l'on peut interpréter raisonnablement que le Règlement sur les MB(ADC) impose un critère de la «pertinence». Le Règlement détermine les personnes qui peuvent présenter une liste de brevets et non ce que peut contenir une telle liste, et il ne décrit pas une relation entre la drogue désignée dans l'avis de conformité et les brevets qui peuvent être inclus dans la liste de brevets. L'appelante a fait valoir que si l'interprétation du ministre devait être retenue, un fabricant de drogues génériques pourrait produire une drogue consistant en une formulation de ceftazidime et de lactose amorphe qui soit bioéquivalente à Tazidime. Un tel produit pourrait contrefaire le brevet 969, mais Eli Lilly serait incapable d'empêcher la délivrance d'un avis de conformité si le brevet 969 était supprimé de la liste des brevets concernant Tazidime. Un argument semblable a été accepté, mais seulement dans une remarque incidente, par la Section de première instance dans la décision Apotex Inc. c. Canada, une décision antérieure aux modifications du Règlement en 1998. Il y avait deux raisons de préférer cette interprétation à celle proposée par le ministre: 1) elle est plus conforme à la formulation du Règlement et 2) elle pourrait prévenir la contrefaçon de brevets.

Le juge Isaac, J.C.A. (dissident): La décision du juge des requêtes doit être maintenue parce que celui-ci a apprécié la preuve et appliqué le droit correctement.

Il n'a pas été satisfait aux exigences du paragraphe 3(3) du Règlement. Ce paragraphe prévoit qu'aucun renseignement concernant la soumission d'une liste de brevets ne peut être consigné dans le registre avant la délivrance de l'avis de conformité à l'égard de la drogue. Il est donc nécessaire de désigner la drogue à l'égard de laquelle la liste de brevets a été fournie et à l'égard de laquelle l'avis de conformité a été délivré. L'avis de conformité en cause a été délivré en vertu du Règlement sur les aliments et drogues et de la Loi sur les aliments et drogues dans leur version de 1990 et 1992 respectivement. Le témoignage par affidavit--non contredit lors du contre-interrogatoire--de l'agent des brevets de l'intimé indiquait que les listes de brevets en cause avaient été soumises en 1993 lorsque le Règlement est entré en vigueur, et qu'un nombre si élevé de listes avaient été reçues que toutes les listes étaient incluses dans le registre des brevets sans qu'aucune décision ne soit prise au sujet de leur admissibilité. Il était prévu que le registre de brevets serait tenu par des employés de bureau. Les médicaments mentionnés dans l'affidavit produit au nom de l'appelante n'utilisaient pas la formulation revendiquée dans le brevet 969. La décision de radier le brevet 969 du registre des brevets était fondée sur les exigences de l'article 4 du Règlement. Le brevet 969 n'était pas admissible à être inscrit au registre relativement à Tazidime et Tazidime Add-Vantage.

Il n'était pas possible de souscrire à la conclusion que, pour l'application du Règlement, la ceftazidime est un médicament, qu'elle soit formulée ou non avec le lactose amorphe. Il n'était pas non plus possible de souscrire à la conclusion que, du fait que l'appelante a obtenu un avis de conformité à l'égard de Tazidime (contenant de la ceftazidime), il pouvait être permis de soumettre une liste de brevet à l'égard de la drogue Tazidime. Pour comprendre la divergence d'opinion entre le juge Sharlow et le juge des requêtes, il fallait considérer la définition des termes «médicament» à l'article 2 du Règlement et «drogue» à l'article 2 de la Loi sur les aliments et drogues. Un examen approfondi des témoignages était également requis. Sur le fondement du témoignage de D Wirth, invoqué par l'appelante, le juge de première instance a eu raison de dire que la ceftazidime, par elle-même, n'est pas un «médicament» au sens de la définition prévue à l'article 2 du Règlement. L'analyse faite par le juge Noël dans la décision Hoffmann-LaRoche, sur laquelle s'est fortement appuyée le juge Sharlow, n'était pas applicable parce que, dans cette affaire, il n'y avait pas de preuve qu'il existait un problème de toxicité. Le D Wirth a reconnu dans son affidavit que «la société qui veut vendre de la ceftazidime devra surmonter le problème de la polymérisation», et il était possible d'en déduire que la ceftazidime, en soi, ne peut être un «médicament» au sens de la définition prévue au Règlement, et ce, parce qu'elle ne peut servir au traitement d'une maladie ou de ses symptômes. En soi, elle est dépourvue de valeur thérapeutique. Il ne s'agissait pas non plus d'une «drogue» suivant la définition prévue à l'article 2 de la Loi puisqu'elle ne satisfait pas aux alinéas a) et b) de ladite définition. De plus, il est douteux que l'on puisse affirmer que la ceftazidime, en soi, est une «revendication pour le médicament en soi», la méthode utilisée par l'appelante dans sa formulation de la ceftazidime n'étant pas celle revendiquée dans le brevet.

Il n'était pas possible de souscrire à la minimisation de l'utilité du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation. Des arrêts tant de notre Cour que de la Cour suprême du Canada ont statué qu'un tel résumé indique l'objet du gouvernement en prenant des règlements. Le jugement majoritaire rendu en l'espèce ne tient pas compte du double objet du régime réglementaire de 1998: définir un équilibre entre les droits des brevetés et l'intention de faciliter l'entrée sur le marché de produits génériques.

lois et règlements

Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, art.18.1 (édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5).

Loi sur les aliments et drogues, L.R.C. (1985), ch. F-27, art. 2 «drogue» (mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 71).

Règlement modifiant le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/98-166, art. 1, 2, 3, 9, 10.

Règlement sur les aliments et drogues, C.R.C., ch. 870.

Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133, art. 2, 3 (mod. par DORS/98-166, art. 2), 4 (mod., idem, art. 3), 5 (mod., idem, art. 4; DORS/99-379, art. 2), 6(1) (mod. par DORS/98-166, art. 5).

Règlement sur les produits du tabac--Modification, DORS/93-389.

Règlement sur l'impôt sur le revenu--Modification, DORS/89-419.

jurisprudence

décision non suivie:

Warner-Lambert Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé) (2001), 12 C.P.R. (4th) 129; 206 F.T.R. 177 (C.F. 1re inst.).

décisions appliquées:

Merck & Co. c. Canada (Procureur général) (1999), 176 F.T.R. 21 (C.F. 1re inst.); conf. par (2000), 5 C.P.R. (4th) 138; 254 N.R. 68 (C.A.F.); Parke-Davis Division c. Canada (Ministre de la Santé), [2003] 2 C.F. 514; (C.A.); Hoffmann-La Roche Ltd. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1995), 62 C.P.R. (3d) 58; 97 F.T.R. 288 (C.F. 1re inst.); conf. par (1996), 67 C.P.R. (3d) 25 (C.A.F.); Apotex Inc. c. Canada (Ministre de la Santé) (1999), 87 C.P.R. (3d) 271; 165 F.T.R. 42 (C.F. 1re inst.).

décisions citées:

Reza c. Canada, [1994] 2 R.C.S. 394; (1994), 116 D.L.R. (4th) 61; 21 C.R.R. (2d) 236; 24 Imm. L.R. (2d) 117; 167 N.R. 282; 72 O.A.C. 348; Manitoba (Procureur général) c. Metropolitan Stores Ltd., [1987] 1 R.C.S. 110; (1987), 38 D.L.R. (4th) 321; [1987] 3 W.W.R. 1; 46 Man. R. (2d) 241; 25 Admin. L.R. 20; 87 CLLC 14,015; 18 C.P.C. (2d) 273; 73 N.R. 341; Friends of the Oldman River Society c. Canada (Ministre des Transports), [1992] 1 R.C.S. 3; (1992), 88 D.L.R. (4th) 1; [1992] 2 W.W.R. 193; 84 Alta. L.R. (2d) 129; 3 Admin. L.R. (2d) 1; 7 C.E.L.R. (N.S.) 1; 132 N.R. 321; RJR--MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311; (1994), 111 D.L.R. (4th) 385; 54 C.P.R. (3d) 114; 164 N.R. 1; 60 Q.A.C. 241; Friesen c. Canada, [1995] 3 R.C.S. 103; (1995), 127 D.L.R. (4th) 193; [1995] 2 C.T.C. 369; 95 DTC 5551; 186 N.R. 243; Bayer Inc. c. Canada (Procureur général) (1999), 87 C.P.R. (3d) 293; 243 N.R. 70 (C.A.F.).

APPEL d'une ordonnance de la Section de première instance ((2002), 16 C.P.R. (4th) 439) rejetant une demande de contrôle judiciaire de la décision du ministre de la Santé de radier un brevet du registre des brevets tenu en vertu de l'article 3 du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité). Appel accueilli.

ont comparu:

Anthony George Creber et Patrick S. Smith pour l'appelante (demanderesse).

Frederick B. Woyiwada et Marie A. Crowley pour l'intimé (défendeur).

avocats inscrits au dossier:

Gowling Lafleur Henderson LLP, Ottawa, pour l'appelante (demanderesse).

Le sous-procureur général du Canada pour l'intimé (défendeur).

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par

[1]Le juge Sharlow, J.C.A.: Il s'agit d'un appel d'une ordonnance d'un juge rejetant une demande de contrôle judiciaire [(2002), 16 C.P.R. (4th) 439 (C.F. 1re inst.)], présentée par Eli Lilly Canada Inc., à l'égard d'une décision du ministre de la Santé de radier le brevet canadien no 1249969 (le brevet 969) du registre des brevets tenu en vertu de l'article 3 du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133 (Règlement sur les MB(ADC)). Le brevet 969 expirera le 14 février 2006.

[2]Toutes les revendications du brevet 969 visent la ceftazidime pentahydratée associée à du lactose amorphe. La ceftazidime est un antibiotique. Selon la divulgation contenue dans le brevet 969, la ceftazidime pentahydratée est une forme utile de la ceftazidime pour les formulations pharmaceutiques. Avant la divulgation contenue dans le brevet 969, les formulations connues de la ceftazidime pentahydratée tendaient à se dégrader, entraînant la formation de polymères à poids moléculaire élevé, qui cause la toxicité. L'invention divulguée par le brevet 969 donne une formulation de ceftazidime pentahydratée avec du lactose amorphe. L'incorporation du lactose amorphe évite le problème de toxicité en supprimant la formation de polymères.

[3]Eli Lilly a trouvé une autre solution au problème de toxicité découlant de la dégradation de la ceftazidime pentahydratée. Son autre solution ne fait pas l'objet du brevet. Eli Lilly la garde plutôt comme un secret de fabrique. En employant cette autre solution, Eli Lilly a élaboré six drogues à base de ceftazidime. En 1990 et 1992, Eli Lilly a obtenu des avis de conformité pour ces six drogues en vertu du Règlement sur les aliments et drogues, C.R.C., ch. 870. Quatre de ces drogues sont vendues en diverses formes posologiques sous le nom commercial Tazidime et deux autres sont vendues en diverses formes posologiques sous le nom commercial Tazidime Add-Vantage (collectivement, «Tazidime»). Tous ces produits sont des poudres solubles, destinées à être reconstituées pour obtenir une solution qui sera administrée par injection.

[4]Le 8 avril 1993, Eli Lilly a présenté une liste de brevets en vertu du paragraphe 4(1) du Règlement sur les MB(ADC) pour chacun de ses produits Tazidime. Chaque liste de brevets énumère plusieurs brevets, dont le brevet 969. Le brevet 969 a été inscrit au registre des brevets lorsque les listes ont été déposées. Toutefois, il a été radié le 6 juillet 2000, à la suite d'une décision du ministre consignée dans une lettre à Eli Lilly datée du 8 juin 2000. L'appelante a demandé le contrôle judiciaire de la décision du ministre. Sa demande a été rejetée et elle interjette appel devant la Cour.

[5]Il n'est pas contesté que la norme de contrôle applicable à la décision du ministre est celle de la décision correcte: Merck & Co. c. Canada (Procureur général) (1999), 176 F.T.R. 21 (C.F. 1re inst.), au paragraphe 68, confirmée sans commentaire sur la norme de contrôle (2000), 5 C.P.R. (4th) 138 (C.A.F.). La seule question en litige est l'interprétation du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité). La Cour est aussi bien placée que le ministre pour interpréter ce règlement.

[6]La bonne méthode d'interprétation du Règlement sur les MBADC est bien établie. Elle a été résumée récemment par la Cour dans l'arrêt Parke Davis Division c. et Canada (Ministre de la Santé), [2003] 2 C.F. 514, aux paragraphes 30 à 33:

[. . .] Le principe de base à appliquer est celui qu'on trouve énoncé dans l'ouvrage de Driedger, Construction of Statutes (2e éd., 1983), à la page 87:

[traduction] Aujourd'hui, il n'y a qu'un seul principe ou solution: il faut lire les termes d'une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s'harmonise avec l'esprit de la loi, l'objet de la loi et l'intention du législateur.

Ce principe d'interprétation législative a été appliqué dans un grand nombre de contextes: voir l'arrêt Bell ExpressVu Limited Partnership c. Rex, 2002 CSC 42. Dans cet arrêt, le juge Iacobucci, s'exprimant au nom de la Cour, a en outre souligné que la méthode d'interprétation législative préconisée par Driedger était renforcée par l'article 12 de la Loi d'interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21, qui prévoit que tout texte «est censé apporter une solution de droit et s'interprète de la manière la plus équitable et la plus large qui soit compatible avec la réalisation de son objet».

Le Règlement sur les MBAC a été adopté en 1993 au moment de l'abrogation du régime d'octroi de licences obligatoires pour les médicaments brevetés. L'objet du Règlement est expliqué dans le Résumé de l'étude d'impact de la réglementation, Gazette du Canada, partie II, volume 127, nº 6, page 1388:

. . . En règle générale, les recours judiciaires suffisent pour régler les cas de contrefaçon. Toutefois, avec l'adoption du projet de loi C-91 [L.C. 1993, ch. 2] le gouvernement fait une exception dans ce domaine en permettant aux fabricants de médicaments génériques d'entreprendre les démarches nécessaires pour obtenir l'approbation réglementaire d'un produit. Par conséquent, le titulaire d'un brevet perd un droit dont il aurait pu se prévaloir pour empêcher ses concurrents de faire approuver leurs produits.

Le présent Règlement est nécessaire si on veut éviter que cette nouvelle exception en matière de contrefaçon soit mal utilisée par les fabricants de produits génériques désireux de vendre leurs produits au Canada pendant que le brevet original est encore valide. En vertu du Règlement, ces fabricants peuvent toutefois entreprendre les démarches nécessaires pour obtenir l'approbation réglementaire et ainsi commercialiser leurs produits dès que les brevets pertinents arrivent à expiration.

Faisant écho à cette citation, la Cour suprême du Canada a déclaré que le Règlement sur les MBAC vise à empêcher la contrefaçon en retardant la délivrance des avis de conformité à l'égard des médicaments génériques jusqu'à ce qu'aucune contrefaçon de brevet ne puisse en résulter: Merck Frosst Canada c. Canada, [1998] 2 R.C.S. 193, 227 N.R. 299, 80 C.P.R. (3d) 368, au paragraphe 30.

[7]Le régime établi par le Règlement sur les MB (ADC) peut être résumé de la façon suivante. Le fabricant de drogues qui dépose ou a déposé une présen-tation de drogue nouvelle relative à un médicament breveté, ou qui a obtenu un avis de conformité pour un médicament breveté, peut soumettre une liste de brevets à l'égard de la drogue en vertu de l'article 4 du Règlement sur les MB(ADC). Il devient ainsi la «première personne» relativement aux brevets énumérés dans la liste.

[8]Le ministre ne peut délivrer d'avis de conformité pour une drogue qui est comparable à certains égards déterminés à une autre drogue qui a été commercialisée au Canada conformément à un avis de conformité délivré à une première personne, et à l'égard de laquelle une liste de brevets a été soumise, à moins qu'il soit satisfait aux conditions prévues à l'article 5 du Règlement sur les MB(ADC). La comparabilité requise comprend, par exemple, la bioéquivalence. Le fabricant de drogues (appelé la «seconde personne») qui se propose de commercialiser une drogue qui est bioéquivalente ou qui est comparable à d'autres égards à une autre drogue doit, dans sa présentation de drogue nouvelle, inclure l'une d'un certain nombre d'allégations qui, si elle est vraie, établira que la nouvelle drogue ne peut être autorisée en vue de la commercialisation au Canada jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de risque de contrefaçon des brevets figurant dans la liste. La seconde personne doit également fournir un énoncé détaillé du droit et des faits sur lesquels se fonde l'allégation et signifier l'avis d'allégation à la première personne.

[9]Si la première personne adopte la position que les allégations contenues dans l'avis d'allégation ne sont pas fondées, elle peut demander au tribunal, en vertu du paragraphe 6(1) du Règlement sur les MB(ADC), une ordonnance interdisant au ministre de la Santé de délivrer un avis de conformité à la seconde personne avant l'expiration du brevet visé dans l'avis d'allégation. La première personne a la charge d'établir que les allégations formulées dans l'avis d'allégation ne sont pas fondées.

[10]Si la première personne fournit au ministre de la Santé un avis d'introduction de la procédure prévue au paragraphe 6(1), le ministre ne peut délivrer d'avis de conformité pendant un certain délai. Le délai du sursis prévu par la loi est de 24 mois, à moins qu'il ne prenne fin plus tôt du fait de l'expiration du brevet, d'une déclaration par le tribunal que le brevet est invalide ou qu'une allégation de non-contrefaçon est fondée, ou du retrait ou du rejet de la procédure d'interdiction ou d'un désistement de celle-ci. Le délai peut également être abrégé ou prolongé par le tribunal dans certaines circonstances. Dans la décision Merck Frosst, précitée, le délai légal a été qualifié de «draconien» parce qu'il permet à la première personne de retarder l'entrée sur le marché des fabricants de génériques concurrents sans qu'elle ait à établir, même sur la base d'une preuve prima facie, la contrefaçon.

[11]Si la procédure d'interdiction échoue, la seconde personne peut demander à la première personne des dommages-intérêts pour l'indemniser du retard dans la délivrance de l'avis de conformité.

[12]L'une des questions soulevées dans la présente affaire est la portée du pouvoir du ministre de décider ce qui est ajouté à la liste de brevets, ou ce qui peut y rester. Le paragraphe 3(1) du Règlement sur les MB(ADC) avait à l'origine la rédaction suivante:

3. (1) Le 30e jour suivant la date d'entrée en vigueur du présent règlement, le ministre ouvre un registre de tout renseignement soumis aux termes de l'article 4 et le tient à jour.

[13]À mon avis, cette disposition conférait implicitement au ministre le pouvoir de veiller à ce que tous les brevets figurant dans la liste de brevets soient conformes au Règlement sur les MB(ADC), et de refuser d'inscrire, ou de supprimer, tout brevet qui n'est pas conforme. S'il y a jamais eu un doute au sujet de la portée du pouvoir du ministre à cet égard, il a été dissipé par le Règlement modifiant le règlement sur les médica-ments brevetés (avis de conformité), DORS/98-166 (les modifications de 1998). Les modifications de 1998 ont notamment remplacé le paragraphe 3(1) du Règlement, qui a maintenant la rédaction suivante:

3. (1) Le ministre tient un registre des renseignements fournis aux termes de l'article 4. À cette fin, il peut refuser d'y ajouter ou en supprimer tout renseignement qui n'est pas conforme aux exigences de cet article.

[14]Les modifications de 1998 sont entrées en vigueur le 11 mars 1998 (article 10, DORS/98-166, sous réserve de certaines règles transitoires prévues à l'article 9 et qui sont sans application en l'espèce).

[15]Les modifications de 1998 ont également apporté certains changements à l'article 4 qui ont restreint l'étendue des renseignements qui peuvent être inscrits dans le registre des brevets. L'avocat d'Eli Lilly a plaidé que l'admissibilité de toutes les listes de brevets qu'elle avait soumises avant les modifications de 1998 ne devait pas s'apprécier selon les règles plus strictes. Je ne puis souscrire à cette position. À mon sens, les modifications de 1998 confèrent au ministre le pouvoir d'éliminer du registre des brevets tous les renseignements qui ne sont pas conformes aux exigences du Règlement sur les MB(ADC), telles qu'elles peuvent être établies à un moment ou à l'autre par le gouverneur en conseil. Donc, un brevet qui pouvait être inscrit dans une liste de brevets en 1993, mais ne peut plus l'être selon les modifications de 1998, peut être supprimé n'importe quand après le 11 mars 1998.

[16]Je juge mal fondée l'observation de l'avocat d'Eli Lilly que cela porte atteinte au droit ou au droit présomptif d'Eli Lilly de ne pas être assujettie à une législation rétroactive. Les modifications de 1998 ne sont pas rétroactives. Les modifications de 1998 ne s'appliquent qu'à compter du 11 mars 1998. Qu'elles puissent correctement s'appliquer de manière à faire supprimer de la liste de brevets un brevet qui a été accepté dans la liste en 1993, cela ne rend pas les modifications de 1998 rétroactives. Donc, la question suivante porte sur le point de savoir si le brevet 969 pouvait être inscrit dans le registre des brevets selon le Règlement sur les MB(ADC) tel qu'il a été modifié en 1998.

[17]Les dispositions pertinentes du Règlement sur les MB(ADC) sont ainsi rédigées après les modifications de 1998:

2. Les définitions qui suivent s'appliquent au présent règlement

«revendication pour le médicament en soi» S'entend notamment d'une revendication, dans le brevet, pour le médicament en soi préparé ou produit selon les modes du procédé de fabrication décrits en détail et revendiqués ou selon leurs équivalents chimiques manifestes.

    [. . .]

«médicament» Substance destinée à servir ou pouvant servir au diagnostic, au traitement, à l'atténuation ou à la prévention d'une maladie, d'un désordre, d'un état physique anormal, ou de leurs symptômes.

    [. . .]

3. . . .

(3) Aucun renseignement soumis aux termes de l'article 4 n'est consigné au registre avant la délivrance de l'avis de conformité à l'égard duquel il a été soumis.

    [. . .]

4. (1) La personne qui dépose ou a déposé une demande d'avis de conformité pour une drogue contenant un médicament ou qui a obtenu un tel avis peut soumettre au ministre une liste de brevets à l'égard de la drogue, accompagnée de l'attestation visée au paragraphe (7).

(2) La liste de brevets au sujet de la drogue doit contenir les renseignements suivants:

a) la forme posologique, la concentration et la voie d'administration de la drogue;

b) tout brevet canadien dont la personne est propriétaire ou à l'égard duquel elle détient une licence exclusive ou a obtenu le consentement du propriétaire pour l'inclure dans la liste, qui comporte une revendication pour le médicament en soi ou une revendication pour l'utilisation du médicament, et qu'elle souhaite voir inscrit au registre;

    [. . .]

(7) La personne qui soumet une liste de brevets ou une modification apportée à une liste de brevets aux termes des paragraphes (1) ou (4) doit remettre une attestation portant que:

a) les renseignements fournis sont exacts;

b) les brevets mentionnés dans la liste [. . .] sont admissibles à l'inscription au registre et sont pertinents quant à la forme posologique, la concentration et la voie d'administration de la drogue visée par la demande d'avis de conformité.

[18]Dans le Règlement sur les MB(ADC), le terme «drogue» doit avoir le même sens que dans le Règlement sur les aliments et drogues. La définition est donnée à l'article 2 [mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 71] de la Loi sur les aliments et drogues, L.R.C. (1985), ch. F-27:

2. Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

    [. . .]

«drogue» Sont compris parmi les drogues les substances ou mélanges de substances fabriqués, vendus ou présentés comme pouvant servir:

a) au diagnostic, au traitement, à l'atténuation ou à la prévention d'une maladie, d'un désordre, d'un état physique anormal ou de leurs symptômes, chez l'être humain ou les animaux;

[19]Je commencerai par ce qui me paraît être l'interprétation de ces dispositions en fonction de leur sens ordinaire et grammatical. Le ministre, dans l'exercice du pouvoir prévu au paragraphe 3(1), doit examiner si la liste de brevets est conforme aux exigences des paragraphes 3(3), 4(1), 4(2) et 4(7) du Règlement sur les MB(ADC).

[20]L'examen du ministre est facilité par le formulaire de la liste de brevets. Une liste de brevets distincte est soumise pour chaque produit pharmaceutique. Le formulaire exige les renseignements suivants au sujet de la drogue: le nom du médicament contenu dans la drogue, la marque, le numéro d'identification de drogue indiqué dans l'avis de conformité, l'usage prévu (humain ou vétérinaire), la voie d'administration, la forme posologique et la concentration. Vient ensuite une section dans laquelle sont énumérés les brevets dont l'inscription au registre des brevets est demandée, avec indication pour chacun du numéro de brevet, de la date de délivrance et de la date d'expiration. Pour chaque brevet, un code indique la situation du demandeur à son égard: propriétaire, titulaire de licence exclusive ou personne ayant obtenu le consentement du propriétaire du brevet. Le reste du formulaire indique le nom de la personne soumettant la liste de brevets et fournit une adresse aux fins de signification. Le formulaire comprend également l'attestation exigée.

[21]Le paragraphe 3(3) vise à éviter que le ministre ne donne suite à une liste de brevets soumise à l'égard d'un produit pharmaceutique particulier avant qu'un avis de conformité n'ait été délivré à l'égard du produit. En l'espèce, les parties conviennent qu'il est satisfait aux exigences du paragraphe 3(3).

[22]Le paragraphe 4(1) indique au ministre qui a le droit de déposer une liste de brevets. Ce droit est accordé à la personne qui dépose ou a déposé une présentation de drogue nouvelle en vue d'obtenir un avis de conformité à l'égard d'une «drogue contenant un médicament» ou à la personne qui a obtenu un tel avis.

[23]Dans le contexte de l'espèce, les parties conviennent que Tazidime est une drogue contenant de la ceftazidime, et que Tazidime est une drogue à l'égard de laquelle Eli Lilly a obtenu un avis de conformité. On a débattu en première instance le point de savoir si la ceftazidime est un médicament.

[24]Selon la preuve, la ceftazidime est un antibiotique. Le lactose amorphe ne possède pas de propriétés médicinales, mais empêche la ceftazidime de devenir toxique en se dégradant. Une formulation de ceftazidime et de lactose amorphe qui fait l'objet de l'une des revendications du brevet 969 serait considérée comme un «médicament» au sens où ce terme est défini à l'article 2 du Règlement sur les MB(ADC): Hoffmann-La Roche Ltd. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1995), 62 C.P.R. (3d) 58 (C.F. 1re inst.); confirmée par (1996), 67 C.P.R. (3d) 25 (C.A.F.). Toutefois, il me semble que la ceftazidime seule correspond également à la définition du «médicament».

[25]Le juge a fait le raisonnement que la ceftazidime, puisqu'elle est toxique en soi, n'est pas destinée à servir et ne peut servir au traitement d'une maladie ou d'un désordre. Je ne puis souscrire à cette conclusion. Un antibiotique ne cesse pas d'être un antibiotique simplement parce qu'il ne peut être utilisé dans l'organisme sans effet nuisible tant qu'il n'est pas combiné avec une substance qui l'empêche de devenir toxique en se dégradant. Il s'ensuivrait que, pour l'application du Règlement sur les MB(ADC), la ceftazidime est un médicament, qu'elle soit formulée ou non avec le lactose amorphe.

[26]Il s'ensuivrait également que, pour paraphraser le paragraphe 4(1), Eli Lilly qui a obtenu un avis de conformité pour une drogue, Tazidime, qui contient un médicament, la ceftazidime, peut soumettre une liste de brevets à l'égard de la drogue Tazidime. Toutefois, le paragraphe 4(1) n'indique pas quels brevets Eli Lilly a le droit d'inclure dans la liste de brevets. Cette question se décide sur le fondement des alinéas 4(2)b) et 4(7)b).

[27]Selon l'alinéa 4(2)b), la liste de brevets soumise à l'égard de Tazidime peut comprendre tout brevet qui comporte «une revendication pour le médicament en soi». Le terme «médicament» à l'alinéa 4(2)b) doit avoir la même signification qu'au paragraphe 4(1). S'il en est ainsi, dans le cas d'une liste de brevets soumise à l'égard de Tazidime, tout brevet qui comporte une revendication pour la ceftazidime en soi, ou une revendication pour une formulation dans laquelle la ceftazidime est l'ingrédient médicinal actif, correspond aux paramètres définis à l'alinéa 4(2)b).

[28]Je n'ai pas besoin d'analyser les exigences de l'alinéa 4(7)b) de façon détaillée. Je crois comprendre que l'avocat du ministre n'a pas pris la position que le brevet 969 n'est pas «pertinent quant à la forme posologique, la concentration et la voie d'administration» de Tazidime.

[29]Sur le fondement de l'interprétation qui précède selon le sens ordinaire et grammatical du Règlement sur les MB(ADC), le brevet 969 devrait pouvoir être inclus dans les listes de brevets pour Tazidime. C'est l'interprétation qu'il y a lieu d'adopter à moins qu'on puisse raisonnablement prêter au texte du Règlement sur les MB(ADC) une signification différente qui s'accorderait mieux avec l'objet du Règlement.

[30]L'avocat du ministre a plaidé que le Règlement sur les MB(ADC) exige une relation, qu'il a appelée la «pertinence», entre la drogue indiquée dans l'avis de conformité et le brevet que l'on veut inscrire dans le registre des brevets. Il a soutenu que cette relation fait défaut si l'invention divulguée dans le brevet n'est pas de quelque façon incluse ou appliquée dans la drogue. En l'espèce, par exemple, il n'est pas contesté que Tazidime n'utilise aucunement l'invention divulguée dans le brevet 969. C'est dans ce sens que l'avocat du ministre fait valoir que le brevet 969 n'est pas «pertinent» par rapport à l'avis de conformité pour Tazidime.

[31]Cet argument a été accepté dans la décision Warner-Lambert Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé) (2001), 12 C.P.R. (4th) 129 (C.F. 1re inst.). On ne peut établir de distinction entre les faits de cette affaire et les faits de l'espèce. Les conclusions du juge dans cette affaire sont résumées aux paragraphes 17 à 19 de ses motifs:

Selon moi, les paragraphes 4(1), (2) et (7) du Règlement sont clairs: pour qu'un brevet compris dans une liste de brevets soit admissible à l'inclusion dans le registre, il doit s'appliquer à un médicament pour lequel une demande d'avis de conformité a été déposée. Cette exigence contribue d'une manière évidente à s'assurer qu'une liste de brevets est «spécifique d'un produit», qui est un objectif clairement décrit dans le Résumé de l'étude d'impact de la réglementation accompagnant les modifications apportées à l'article 4 du Règlement en 1998:

Les titulaires de brevets doivent certifier que les brevets répertoriés sur la liste correspondant à un médicament se rapportent au médicament en question, afin d'éviter que des brevets visant d'autres versions du médicament empêchent de commercialiser la version générique.

Dans la présente affaire, la preuve montre que les brevets 023 et 024 renferment des revendications relatives à des formulations pharmaceutiques qui sont considérées, au sens du Règlement, comme des médicaments faisant état d'un ingrédient médicamenteux (voir Hoffman-La Roche Ltd. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1995), 62 C.P.R. (3d) 58 (C.F.S.P.I.); confirmé (1995), 67 C.P.R. (3d) 25 (C.A.F.); requête en autorisation d'appel à la Cour suprême du Canada rejetée [1996] C.S.C.R. no 65 (C.S.C.) (QL), 68 C.P.R. (3d)).

Toutefois, la preuve montre également que les médicaments spécifiques visés par les brevets 023 et 024 n'ont jamais fait l'objet d'une demande d'avis de conformité en vertu du Règlement sur les aliments et drogues, C.R.C., 1978, ch. 870, et ses modifications. De plus, la preuve montre que les produits médicamenteux ACCUPRIL et ACCURETIC, pour lesquels des présentations de drogue ont été soumises et approuvées par le ministre, ne contiennent ni stabilisant à l'acide ascorbique, ni acide ascorbique ou ascorbate de sodium, qui sont les stabilisants contenus dans les formulations visées par les brevets 023 et 024. Par conséquent, ces brevets ne correspondent pas aux produits médicamenteux pour lesquels le fabricant a soumis une demande d'avis de conformité. En conséquence, ils ne sont pas conformes aux exigences d'admissibilité décrites aux paragraphes 4(1), (2) et (7) du Règlement. Le Ministre était donc fondé de refuser d'ajouter les brevets 023 et 024 au registre.

[32]De l'examen du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation de 1998 dans son ensemble, il ressort que l'extrait cité dans la décision Warner-Lambert renvoie spécifiquement à l'alinéa 4(7)b) du Règlement sur les MB(ADC). J'en déduis que la «pertinence» dont fait mention cet extrait se rapporte à la nouvelle exigence d'une attestation de la pertinence quant à la forme posologique, la concentration et la voie d'administration. Si c'est le cas, on obtiendra la liste de brevets «spécifique d'un produit» que l'on recherche en respectant la conformité à l'alinéa 4(7)b). Je ne suis pas persuadée que l'extrait cité ait la portée plus large plaidée par le ministre.

[33]Toutefois, il y a un autre point plus important: un résumé de l'étude d'impact de la réglementation se limite à expliquer en termes très généraux l'objectif du règlement auquel il se rapporte. La question, me semble-t-il, est de savoir si l'on trouve dans le Règlement sur les MB(ADC) des formulations que l'on peut interpréter raisonnablement comme imposant le critère de la «pertinence» proposé par le ministre. Le ministre s'appuie sur la formulation de l'article 4, plus précisément sur les termes soulignés ci-dessous:

4. (1) La personne qui dépose ou a déposé une demande d'avis de conformité pour une drogue contenant un médicament ou qui a obtenu un tel avis peut soumettre au ministre une liste de brevets à l'égard de la drogue, accompagnée de l'attestation visée au paragraphe (7).

    [. . .]

(7) La personne qui soumet une liste de brevets . . . doit remettre une attestation portant que:

    [. . .]

b) les brevets mentionnés dans la liste ou dans la modification sont admissibles à l'inscription au registre et sont pertinents quant à la forme posologique, la concentration et la voie d'administration de la drogue visée par la demande d'avis de conformité. [Soulignement ajouté.]

[34]Je n'arrive pas à interpréter ces formulations de la manière préconisée dans l'argumentation du ministre. Le paragraphe 4(1) détermine les personnes qui peuvent présenter une liste de brevets, non ce que peut contenir une liste de brevets. De même, les mots soulignés de l'alinéa 4(7)b) ne décrivent pas une relation entre la drogue désignée dans l'avis de conformité et les brevets qui peuvent être inclus dans la liste de brevets. Plutôt «la drogue visée par la demande d'avis de conformité» est simplement Tazidime.

[35]D'après Eli Lilly, l'interprétation du ministre irait à l'encontre des objectifs du Règlement sur les MB(ADC). Il est théoriquement possible qu'un fabricant de drogues génériques produise une drogue consistant en une formulation de ceftazidime et de lactose amorphe qui soit bioéquivalente à Tazidime (même si elle n'était pas exactement identique à Tazidime parce que Tazidime ne contient pas de lactose amorphe). Un tel produit pourrait contrefaire le brevet 969. Si l'on ne permet pas que le brevet 969 reste dans les listes de brevets pour Tazidime, Eli Lilly sera privée de son droit de demander au tribunal d'interdire la délivrance de l'avis de conformité pour la nouvelle drogue jusqu'à l'expiration du brevet 969. Si cela se produisait, on se trouverait à avoir empêché le Règlement sur les MB(ADC) de s'appliquer de la manière prévue. Je note qu'un argument semblable a été accepté dans la décision Apotex Inc. c. Canada (Ministre de la Santé) (1999), 87 C.P.R. (3d) 271 (C.F. 1re inst.), mais seulement dans une remarque incidente, dans le contexte de la version du Règlement sur les MB(ADC) antérieure aux modifications de 1998.

[36]En somme, il me semble que l'interprétation proposée par Eli Lilly devrait être préférée à celle qui est proposée par le ministre, pour deux raisons. D'abord, elle est plus conforme à la formulation du Règlement sur les MB(ADC). Ensuite, elle offre au moins la possibilité de prévenir la contrefaçon du brevet 969, alors que l'interprétation du ministre ne peut avoir ce résultat.

[37]Pour ces motifs, j'accueillerais l'appel avec dépens en appel et en première instance, j'infirmerais la décision du juge, j'annulerais la décision du ministre de radier le brevet 969 du registre des brevets et j'enjoindrais au ministre de rétablir le brevet 969 dans le registre des brevets pour tous les produits Tazidime qui font l'objet de la présente procédure.

Le juge Malone, J.C.A.: Je souscris à ces motifs.

    * * *

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par

[38]Le juge Isaac, J.C.A.: (dissident): J'ai eu l'avantage de lire, sous forme de projet, les motifs que ma collègue, Mme le juge Sharlow, a rédigés dans le présent appel. Malheureusement, je ne puis souscrire à la façon dont elle propose de trancher l'appel et à certains des motifs qu'elle a donnés au soutien de cette décision. Pour les motifs exposés ci-dessous, je rejetterais l'appel avec dépens.

[39]Je suis en accord complet avec ma collègue lorsqu'elle indique aux paragraphes 15 et 16 de ses motifs:

À mon sens, les modifications de 1998 confèrent au ministre le pouvoir d'éliminer du registre des brevets tous les renseignements qui ne sont pas conformes aux exigences du Règlement sur les MB(ADC), telles qu'elles peuvent être établies à un moment ou à l'autre par le gouverneur en conseil. Donc, un brevet qui pouvait être inscrit dans une liste de brevets en 1993, mais ne peut plus l'être selon les modifications de 1998, peut être supprimé n'importe quand après le 11 mars 1998.

Je juge mal fondée l'observation de l'avocat d'Eli Lilly que cela porte atteinte au droit ou au droit présomptif d'Eli Lilly de ne pas être assujettie à une législation rétroactive. Les modifications de 1998 ne sont pas rétroactives. Les modifications de 1998 ne s'appliquent qu'à compter du 11 mars 1998. Qu'elles puissent correctement s'appliquer de manière à faire supprimer de la liste de brevets un brevet qui a été accepté dans la liste en 1993, cela ne rend pas les modifications de 1998 rétroactives.

[40]Sur la question de la norme de contrôle, je suis d'avis que la norme applicable dans une affaire comme la présente, où la réparation demandée est de la nature du certiorari et du mandamus, est celle qui a été définie par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Reza c. Canada, [1994] 2 R.C.S. 394, où le juge La Forest, prononçant le jugement unanime de la Cour, a indiqué au paragraphe 20:

[. . .] le critère en matière de contrôle par une cour d'appel de l'exercice du pouvoir discrétionnaire d'un juge est de savoir si le juge a accordé suffisamment d'importance à toutes les considérations pertinentes [. . .]

Voir également les arrêts Manitoba (Procureur général) c. Metropolitan Stores Ltd., [1987] 1 R.C.S. 110, aux pages 154 et 155; Friends of the Oldman River Society c. Canada (Ministre des Transports), [1992] 1 R.C.S. 3, aux pages 76 et 77.

[41]Selon la façon dont je comprends la présente procédure, l'appelante a interjeté appel d'une ordonnance du juge des requêtes dans la Section de première instance portant sur sa demande de contrôle judiciaire relative à une décision du ministre de la Santé. La réparation demandée par l'appelante consistait en des ordonnances annulant la décision du ministre radiant le brevet 969 du registre des brevets et enjoignant au ministre de rétablir le brevet 969 dans le registre des brevets. Les deux ordonnances que l'appelante demandait étaient discrétionnaires. À mon avis, le juge des requêtes a apprécié la preuve et appliqué le droit correctement. Je ne vois donc pas de motif d'infirmer sa décision de rejeter la demande présentée sur le fondement de l'article 18.1 [édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5] de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7.

[42]Au paragraphe 21 de ses motifs, ma collègue indique qu'il a été satisfait aux exigences du paragraphe 3(3) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) de 1998, DORS/93-133 (Règlement sur les MB(ADC)). Avec égards, je ne puis accepter cette conclusion. Par souci de commodité, je reproduis ici le texte du paragraphe 3(3):

3. [. . .]

(3) Aucun renseignement soumis aux termes de l'article 4 n'est consigné au registre avant la délivrance de l'avis de conformité à l'égard duquel il a été soumis.

[43]Une exigence clé du paragraphe 3(3) veut qu'aucun renseignement concernant la soumission d'une liste de brevets portant sur une drogue ne soit consigné dans le registre avant la délivrance de l'avis de conformité à l'égard de cette drogue.

[44]Il est donc nécessaire pour moi de désigner la drogue à l'égard de laquelle la liste de brevets a été fournie et à l'égard de laquelle l'avis de conformité a été délivré.

[45]Denise Maher, directrice intérimaire des Affaires réglementaires chez l'appelante, a déclaré, aux paragraphes 2 et 3 de l'affidavit qu'elle a déposé au soutien de la demande de contrôle judiciaire de l'appelante, ce qui suit:

2.     En août 1990, Lilly Canada a reçu un avis de conformité pour la ceftazidime TAZIDIME ADD-VANTAGE en ampoules de 1 g et de 2 g de poudre soluble à administrer par voie i.v. ou i.m. En avril 1992, Lilly Canada a reçu un avis de conformité pour la ceftazidime TAZIDIME en ampoules de 500 mg, 1 g et 6 g de poudre soluble à administrer par voie i.v. ou i.m. Une copie des avis de conformité délivrés à Lilly Canada pour TAZIDIME et TAZIDIME ADD-VANTAGE est jointe à l'annexe A.

3.     Le 8 avril 1993 ou vers cette date, et avec la permission d'Eli Lilly and Company, Lilly Canada a soumis des listes de brevets sur le formulaire IV indiquant le brevet canadien 1,249,969 (le brevet 969) relativement à TAZIDIME et à TAZIDIME ADD-VANTAGE conformément au Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) dans la version en vigueur en 1993. Peu après, le brevet 969 a été consigné au registre des brevets par le ministre de la Santé pour la ceftazidime TAZIDIME en ampoules de 500 mg, 1 g et 6 g de poudre soluble à administrer par voie i.v. ou i.m. et pour la ceftazidime TAZIDIME ADD-VANTAGE en ampoules de 1 g et de 2 g de poudre soluble à administrer par voie i.v. ou i.m. Une copie de la lettre au ministre datée du 8 avril 1993, à laquelle sont annexées les listes de brevets pertinentes pour TAZIDIME et TAZIDIME ADD-VANTAGE sur le formulaire IV, est jointe à l'annexe B.

[46]De plus, au paragraphe 4, elle a déposé ce qui suit:

[traduction]

4.     Une copie de la partie pertinente du registre des brevets datée du 16 janvier 1996, indiquant que le brevet 969 avait été consigné au registre des brevets par le ministre de la Santé pour la ceftazidime TAZIDIME en ampoules de 500 mg, 1 g et 6 g de poudre soluble à administrer par voie i.v. ou i.m. et pour la ceftazidime TAZIDIME ADD-VANTAGE en ampoules de 1 g et de 2 g de poudre soluble à administrer par voie i.v. ou i.m. est jointe à l'annexe C.

[47]On notera pourtant que les présentations et avis de conformité que mentionne Mme Maher ont été faites et délivrées en vertu du Règlement sur les aliments et drogues, C.R.C., ch. 870, et de la Loi sur les aliments et drogues, L.R.C. (1985), ch. F-27, dans leur version de 1990 et 1992 respectivement.

[48]MmeAnne Bowes, officier de brevets-Science, de la Division des politiques sur les présentations et renseignements, Bureau de la politique et de la coordination, Programme des produits thérapeutiques, Direction générale des produits de santé et des aliments, ministère de la Santé, a déposé un affidavit au soutien de la position du défendeur. Aux paragraphes 16 à 23, elle a décrit les circonstances dans lesquelles les présentations ont été faites, les avis de conformité délivrés et les listes de brevets ajoutées au registre des brevets. Au paragraphe 18, elle a décrit les circonstances entourant la création du registre des brevets de la façon suivante:

[traduction]

18.     Les listes de brevets soumises par Eli Lilly Canada ont été ajoutées au registre des brevets lorsque le Règlement MB(ADC) est entré en vigueur en 1993. À l'époque de l'entrée en vigueur, le ministre disposait d'un délai de trente (30) jours pour établir le registre des brevets. Des centaines de listes de brevets ont été reçues par le ministre au cours de ces trente (30) jours. Aucune décision n'a été prise au sujet de l'admissibilité. Il était prévu que le registre des brevets serait tenu par des employés de bureau. Le registre des brevets initial se composait donc de toutes les listes de brevets que les fabricants avaient soumises.

[49]Au paragraphe 34, Mme Bowes a précisé que les médicaments mentionnés par Mme Maher n'utilisent pas la formulation revendiquée dans le brevet 969:

[traduction] Toutefois, il est important de noter qu'elle ne parle pas d'un médicament qui comprend la composition visée par le brevet 969. Cette composition n'a pas été approuvée par Santé Canada et ne peut être commercialisée à l'heure actuelle.

[50]J'ai lu le contre-interrogatoire sur l'affidavit de Mme Bowes et je n'y trouve rien qui contredise les déclarations qu'elle a faites aux paragraphes 41 et 42 de son affidavit, où elle a indiqué que la décision de radier le brevet 969 du registre des brevets était fondée sur les exigences de l'article 4 du Règlement sur les MB(ADC) et que le brevet 969 n'est pas admissible à être inscrit au registre relativement à Tazidime et à Tazidime Add-Vantage.

[51]Je conclus donc, contrairement à ce qu'a affirmé ma collègue, qu'il n'a pas été satisfait aux exigences du paragraphe 3(3).

[52]Avec égards, je ne puis souscrire à la conclusion, exposée au paragraphe 25 des motifs de ma collègue, que, pour l'application du Règlement sur les MB(ADC), la ceftazidime est un médicament, qu'elle soit formulée ou non avec le lactose amorphe. Je ne puis non plus souscrire à la conclusion qu'elle formule au paragraphe 26, que du fait que l'appelante a obtenu un avis de conformité à l'égard de Tazidime, laquelle contient de la ceftazidime, il lui est permis de soumettre une liste de brevets à l'égard de la drogue Tazidime.

[53]En formulant ces conclusions, ma collègue semble répondre aux paragraphes suivants des motifs du jugement du juge des requêtes [aux paragraphes 31 et 32]:

La demanderesse soutient que le lactose amorphe est un ingrédient non médicinal ou inactif. En soi, la suppression du lactose amorphe de la formulation du médicament ne devrait pas avoir d'incidence sur l'admissibilité du brevet 969 à l'inscription sur le registre. Toutefois, vu le problème de polymérisation, il semble clair que sans lactose amorphe, la ceftazidime ne répondrait pas à la définition de médicament. À cause des effets nocifs de la ceftazidime sans lactose amorphe, il serait impossible de considérer celle-ci comme une «substance destinée à servir ou pouvant servir au diagnostic, au traitement, à l'atténuation ou à la prévention d'une maladie, d'un désordre, d'un état physique anormal, ou de leurs symptômes» au sens de l'article 2 du Règlement sur les ADC. Qui plus est, le brevet 969 ne contient pas de revendication visant le «médicament» ceftazidime. Il ne contient qu'une revendication portant sur la ceftazidime lorsqu'elle est associée avec du lactose amorphe et une base pharmaceutiquement acceptable.

En conséquence, je ne peux souscrire à l'argument de la demanderesse selon lequel le fait que TAZIDIME et TAZIDIME ADD-VANTAGE contiennent de la ceftazidime justifie l'inscription du brevet 969 au registre, même si leur formulation ne contient pas de lactose amorphe. L'article 2 du Règlement dispose qu'un brevet comportant «une revendication pour le médicament en soi» s'entend «notamment d'une revendication, dans le brevet, pour le médicament en soi préparé ou produit selon les modes du procédé de fabrication décrits en détail et revendiqués ou selon leurs équivalents chimiques manifestes.» Je suis donc d'avis que TAZIDIME et TAZIDIME ADD-VANTAGE ne contiennent pas «le médicament en soi» décrit au brevet 969. On ne peut que supposer que TAZIDIME et TAZIDIME ADD-VANTAGE sont fabriqués grâce à une formulation ou à un procédé différent, dont les détails se trouvent dans le document confidentiel intitulé Présentation de nouvelle drogue déposé auprès du ministre. Aucun avis de conformité n'a été délivré à l'égard de la revendication contenue au brevet 969: ceftazidime, lactose amorphe et une base pharmaceutiquement acceptable. [Non souligné dans l'original.]

[54]Pour comprendre la divergence d'opinion entre ma collègue et le juge des requêtes sur ce point, il faut d'abord considérer la définition des termes «médicament» à l'article 2 du Règlement sur les MB(ADC) et «drogue» à l'article 2 de la Loi sur les aliments et drogues. Par souci de commodité, je reproduis ces dispositions.

    Règlement sur les MB(ADC)

2. Les définitions qui suivent s'appliquent au présent règlement.

    [. . .]

«médicament» Substance destinée à servir ou pouvant servir au diagnostic, au traitement, à l'atténuation ou à la prévention d'une maladie, d'un désordre, d'un état physique anormal, ou de leurs symptômes.

    [. . .]

«revendication pour le médicament en soi» S'entend notamment d'une revendication, dans le brevet, pour le médicament en soi préparé ou produit selon les modes du procédé de fabrication décrits en détail et revendiqués ou selon leurs équivalents chimiques manifestes.

    [. . .]

«revendication pour l'utilisation du médicament» Revendication pour l'utilisation du médicament aux fins du diagnostic, du traitement, de l'atténuation ou de la prévention d'une maladie, d'un désordre, d'un état physique anormal, ou de leurs symptômes.

    Loi sur les aliments et drogues

2. Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

    [. . .]

«drogue» Sont compris parmi les drogues les substances ou mélanges de substances fabriqués, vendus ou présentés comme pouvant servir:

a) au diagnostic, au traitement, à l'atténuation ou à la prévention d'une maladie, d'un désordre, d'un état physique anormal ou de leurs symptômes, chez l'être humain ou les animaux;

b) à la restauration, à la correction ou à la modification des fonctions organiques chez l'être humain ou les animaux;

c) à la désinfection des locaux où des aliments sont gardés.

[55]Il faut également récapituler certains éléments des dépositions que les témoins ont données à l'appui des positions respectives des parties.

[56]L'affidavit du Dr David D. Wirth, déposé au soutien de la demande de contrôle judiciaire de l'appelante, est éclairant sur la question de savoir si la ceftazidime, par elle-même, est un médicament au sens défini à l'article 2 du Règlement sur les MB(ADC). Pour cette raison, je vais maintenant citer longuement son témoignage. Au paragraphe 7 de son affidavit, le Dr Wirth dépose:

[traduction] La ceftazidime «est la substance médicamenteuse la moins stable avec laquelle j'aie travaillé. La ceftazidime réagit donc plus rapidement et à des températures plus basses que certains autres types d'antibiotiques.

[57]Au paragraphe 8, il dit:

[traduction] Au cours des essais initiaux avec la ceftazidime sur les lapins, des problèmes de toxicité se sont manifestés. Après une longue période d'examen, on a découvert que la toxicité était liée à la polymérisation de la ceftazidime ou aux produits de sa dégradation.

[58]Au paragraphe 12, il indique, à propos d'une étude qu'il a rédigée sur le problème de la dégradation:

[traduction] Cette étude démontre aussi que l'impureté des polymères provenant de la ceftazidime a une certaine activité biologique. Un fabricant de drogues ne veut pas que les impuretés aient une activité biologique, parce qu'elle produirait un résultat biologique autre que l'ingrédient actif principal. Pour éviter les problèmes toxicologiques, et pour éviter que l'impureté des polymères n'entraîne un effet physiologique indésirable, il est important de contrôler la polymérisation de la ceftazidime lorsqu'on la prépare en vue de l'utilisation chez l'homme.

[59]Au paragraphe 13, il dépose:

[traduction] En d'autres termes, il faut veiller à ce que les impuretés polymériques soient contrôlées dans les formulations commerciales de ceftazidime destinées à l'utilisation chez l'homme; autrement, le produit ne sera pas prévisible ni stable.

[60]Au paragraphe 14, il déclare:

[traduction] Les formulations revendiquées dans le brevet 969 surmontent le problème de polymérisation en retardant la dégradation de la ceftazidime et donc sa tendance à former des polymères.

[61]Et finalement, au paragraphe 15, il dépose notamment ce qui suit:

[traduction] La société qui veut vendre de la ceftazidime devra surmonter le problème de la polymérisation. [Non souligné dans l'original.]

[62]Je suis d'avis, sur le fondement du seul affidavit du Dr Wirth, que le juge des requêtes avait raison de dire que la ceftazidime, par elle-même, n'est pas un médicament au sens défini à l'article 2 du Règlement sir les MB(ADC).

[63]Ma collègue s'appuie fortement sur l'analyse faite par le juge Noël (tel était alors son titre) dans la décision Hoffmann-LaRoche Ltd. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1995), 62 C.P.R. (3d) 58 (C.F. 1re inst.); confirmée par (1996), 67 C.P.R. (3d) 25 (C.A.F.) pour arriver à sa conclusion que la ceftazidime, en soi, est un médicament. À mon avis, c'est à bon droit que le juge des requêtes a rejeté l'argument proposé par l'appelante sur le fondement de la décision Hoffmann-LaRoche, parce que, dans cette affaire, il n'y avait pas de preuve dans le dossier qu'il existait un problème de toxicité.

[64]Le Dr Wirth ne semble pas avoir été contre-interrogé sur son affidavit. Par conséquent, les déclarations de fait qu'il a formulées dans son affidavit sont non contredites. De sa déclaration, au paragraphe 15 de son affidavit, que:

[traduction] [. . .] La société qui veut vendre de la ceftazidime devra surmonter le problème de la polymérisation. [. . .]

je déduis que la ceftazidime, en soi, ne peut selon la définition donnée dans le Règlement sur les MB(ADC) être un médicament. Cette conclusion se fonde sur le fait qu'elle n'est pas une substance destinée à servir ou pouvant servir au diagnostic, au traitement, à l'atténuation ou à la prévention d'une maladie, d'un désordre, d'un état physique anormal ou de leurs symptômes. Pour reprendre les termes du juge Noël dans la décision Hoffmann-LaRoche [précité, au paragraphe 42], «dans la langue de tous les jours» la ceftazidime, en soi, est dépourvue de «valeur thérapeutique».

[65]Je suis également d'avis que ce n'est pas une drogue au sens défini à l'article 2 de la Loi sur les aliments et drogues puisqu'elle ne satisfait pas aux alinéas a) et b) de la définition.

[66]De plus, à mon sens, il est douteux que la ceftazidime, en soi, convienne à la définition de l'expression «revendication pour le médicament en soi», qui est ainsi conçue: «s'entend notamment d'une revendication, dans le brevet, pour le médicament en soi préparé ou produit selon les modes du procédé de fabrication décrits en détail et revendiqués ou selon leurs équivalents chimiques manifestes». La méthode décrite et revendiquée dans le brevet 969 est la ceftazidime, une base pharmaceutiquement acceptable et le lactose amorphe. Au cours du contre-interrogatoire sur son affidavit, on a demandé à Mme Maher si la méthode utilisée par l'appelante dans sa formulation commerciale de ceftazidime est la même que la méthode revendiquée dans le brevet. Elle a donné une réponse négative. Les parties pertinentes de son témoignage, aux pages 252 et 266, sont reproduites ci-dessous:

[traduction] Q:     [. . .] Je vous suggère que les seules composantes des ces deux drogues sont la ceftazidime et le carbonate de sodium. Seriez-vous d'accord ou non avec cette proposition?

R:     Oui, je serais d'accord avec cette proposition.

    [. . .]

Q:     Vous seriez d'accord avec moi que l'énoncé est ainsi rédigé: «Les ampoules de Tazidime contiennent un mélange de ceftazidime et de carbonate de sodium.» Exact?

R:     C'est exact.

Q:     Et c'est un énoncé vrai. Exact?

R:     Oui.

[67]Au sujet du critère de la «pertinence» proposé par le ministre, ma collègue formule le commentaire suivant au sujet de l'utilité du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation, au paragraphe 33 de ses motifs:

Toutefois, il y a un autre point plus important: un résumé de l'étude d'impact de la réglementation se limite à expliquer à termes très généraux l'objectif du règlement auquel il se rapporte.

[68]Par suite, elle a minimisé l'utilité du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation de 1998 pour définir l'objet du Règlement sur les MB(ADC). Sur ce point, elle semble avoir accepté l'argument mis de l'avant par l'appelante que le Règlement sur les MB(ADC) visait à prévenir la contrefaçon de brevets, particulièrement, en l'espèce, le brevet 969.

[69]Avec égards, je ne puis souscrire à cette analyse en principe et sur le fondement de la jurisprudence. Il a été jugé que le Résumé de l'étude d'impact de la réglementation indique l'objet et l'intention du gouvernement en édictant des règlements, notamment le Règlement sur les MB(ADC).

[70]Dans l'arrêt RJR--MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311, la Cour suprême du Canada a examiné le Résumé de l'étude d'impact de la réglementation accompagnant le Règlement sur les produits du tabac--Modification, DORS/93-389. Les juges Sopinka et Cory, s'exprimant au nom de la Cour, ont déclaré ce qui suit au sujet du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation. Après avoir cité un extrait du Résumé, ils indiquent à la page 353:

Ce qui a été cité indique clairement que le gouvernement a adopté le règlement en cause dans l'intention de protéger la santé publique et donc pour promouvoir le bien public.

[71]De même, dans l'arrêt Friesen c. Canada, [1995] 3 R.C.S. 103, à la page 139, le juge Major, s'exprimant au nom de la Cour, a formulé l'observation suivante à l'égard du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation accompagnant le Règlement de l'impôt sur le revenu--Modification, DORS/89-419:

La modification de 1989 a enlevé au contribuable la possibilité de choisir d'évaluer à leur coût d'origine les biens figurant dans un inventaire et n'a conservé que les méthodes plus prudentes de la juste valeur marchande ou du moindre du coût et de la valeur marchande. La conséquence pratique de cette modification est que, depuis 1989, le contribuable est tenu de déclarer une perte aux fins de l'impôt pour toute année au cours de laquelle la juste valeur marchande des biens figurant dans un inventaire devient inférieure au coût d'origine. Le contribuable n'a plus la possibilité de reporter sa perte jusqu'à l'année d'imposition au cours de laquelle la perte est effectivement matérialisée par la vente du bien figurant dans l'inventaire. C'est ce qu'exprime clairement le «Résumé de l'étude d'impact de la réglementation», publié en même temps que la modification du Règlement, DORS/89-419:

Cette modification, qui fait partie des mesures annoncées par le ministre des Finances le 15 janvier 1987 sur l'application des pertes et autres déductions, empêchera les corporations de maintenir à leur coût les biens des inventaires dont la valeur a diminué, et ainsi de différer une perte en reportant l'évaluation des biens à leur juste valeur marchande jusqu'à ce qu'il y ait un changement de contrôle.

[72]Notre Cour a jugé que le Résumé de l'étude d'impact de la réglementation constituait une preuve de l'objet visé par un règlement. Dans l'arrêt Bayer Inc. c. Canada (Procureur général) (1999), 87 C.P.R. (3d) 293 (C.A.F.), le juge Rothstein a examiné le Résumé de l'étude d'impact de la réglementation accompagnant le Règlement sur les aliments et drogues. Aux paragraphes 10 et 11, il formule l'observation suivante:

Le résumé de l'étude d'impact de la réglementation qui accompagne le règlement modifié dont il est question ici renforce l'idée selon laquelle l'intention qui sous-tend le règlement est que le ministre puisse ou non examiner et utiliser les renseignements confidentiels produits par l'innovateur. Le résumé mentionne entre autres ce qui suit:

Dans le cas où la Direction des médicaments a l'intention de se fonder sur les données de l'innovateur pour appuyer les allégations concernant l'innocuité et l'efficacité du produit et où cela entraînerait un retard dans l'octroi de l'avis de conformité, la Direction des médicaments en informera le fabricant du produit générique avant l'examen. La Direction des médicaments offrira au fabricant du produit générique la possibilité de fournir d'autres données à l'appui des allégations et ne se fondera pas sur les données déjà soumises par l'innovateur. Le fabricant aura le loisir de fournir directement les renseignements demandés, conformément à la politique sur la gestion de l'information; il se soustraira ainsi à l'application de cette disposition.

La politique gouvernementale semble être la suivante: lorsque le ministre entend se fonder sur les données de l'innovateur pour appuyer les allégations d'innocuité et d'efficacité faites par le fabricant de produits génériques, conférant par le fait même à l'innovateur la protection minimale de cinq ans contre la concurrence, le fabricant de produits génériques aura la possibilité de fournir des renseignements complémentaires afin d'éviter que le ministre ne se fonde sur les renseignements fournis par l'innovateur. Si le fabricant de produits génériques fait ce choix et convainc le ministre, celui-ci n'examinera pas ni n'utilisera les renseignements de l'innovateur, et la protection minimale de cinq ans contre la concurrence ne s'appliquera pas. L'interprétation proposée par l'appelante aurait pour effet d'empêcher le fabricant de produits génériques de faire ce choix.

[73]Aux paragraphes 34 et 35 de ses motifs, sur le fondement de son affirmation [au paragraphe 33] que:

[. . .] un résumé de l'étude d'impact de la réglementation se limite à expliquer en termes très généraux l'objectif du règlement auquel il se rapporte.

ma collègue a rejeté l'argument de l'avocat du ministre que le Règlement sur les MB(ADC) exige une relation de «pertinence» entre la drogue indiquée dans l'avis de conformité et le brevet inscrit dans le registre, et, implicitement, les motifs du juge Pinard, dans la décision Warner-Lambert Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé) (2001), 12 C.P.R. (4th) 129 (C.F. 1re inst.). En acceptant, aux paragraphes 34 et 35 de ses motifs, que le seul objet du Règlement sur les MB(ADC) est de prévenir la contrefaçon de brevets, ma collègue n'accorde pas de poids à la déclaration suivante, contenue dans le Résumé de l'étude d'impact de la Réglementation de 1998 [aux pages 1057 et 1058] qui accompagnait le Règlement sur les MB(ADC) modifié, démontrant son double objet:

Le lien entre le statut du brevet protégeant un médicament et l'approbation d'une version générique de ce médicament est maintenu afin de faire respecter véritablement les droits conférés par les brevets, tout en assurant que les médicaments génériques puissent être commercialisés aussitôt que possible, soit dès qu'il est déterminé qu'ils ne sont couverts par aucun brevet, soit, s'ils sont couverts par un brevet, immédiatement après l'expiration de celui-ci. [. . .]

Les modifications envisagées renforceront l'équilibre entre l'assurance d'un mécanisme qui permet de faire véritablement respecter les droits conférés par les brevets et la garantie que les médicaments génériques soient commercialisés aussitôt que possible.

[74]À mon avis, l'opinion de ma collègue ignore le double objet du régime réglementaire de 1998, qui cherche à définir un équilibre entre les droits des brevetés et l'intention de faciliter l'entrée sur le marché de produits génériques. L'opinion de ma collègue a également l'effet d'étendre le droit de l'appelante au titre du brevet 969.

[75]Pour tous ces motifs, comme je l'ai indiqué auparavant, je rejetterais l'appel avec dépens.

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