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IMM-1756-16

2017 CF 482

Vinesh Kapoor Schleicher (demandeur)

c.

Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile (défendeur)

Répertorié : Schleicher c. Canada (Sécurité publique et Protection civile)

Cour fédérale, juge Kane—Vancouver, 1er et 9 mai 2017.

Citoyenneté et Immigration — Exclusion et renvoi — Renvoi de résidents permanents — Contrôle judiciaire de la décision rendue par un agent d’exécution de la loi dans les bureaux intérieurs de l’Agence des services frontaliers du Canada, qui a refusé de reporter le renvoi du demandeur à Fidji — Le demandeur est un résident de longue date du Canada interdit de territoire en raison de grande criminalité dont le renvoi a été ordonné — Il a épousé une citoyenne canadienne et ils ont une fille ensemble — Le demandeur a soumis une demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR), laquelle a été rejetée — Le demandeur a ensuite présenté une demande de résidence permanente pour des motifs d’ordre humanitaire (CH) et a sollicité le report de son renvoi en attendant la décision à l’égard de sa demande CH — L’agent a mentionné qu’il jouissait d’un pouvoir discrétionnaire limité aux termes de l’art. 48 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés — Il a conclu que compte tenu de l’ensemble de la preuve, un report de renvoi n’était pas justifié — Le demandeur a allégué en particulier que l’agent avait commis une erreur en n’exerçant pas son pouvoir discrétionnaire de reporter le renvoi jusqu’à ce qu’une décision soit rendue dans la demande CH, étant donné les circonstances impérieuses — Il s’agissait de savoir si la décision de l’agent était raisonnable — Le pouvoir discrétionnaire de l’agent de reporter le renvoi est limité — Des circonstances impérieuses, comme des considérations d’ordre humanitaire, pourraient justifier le report, mais il s’agit d’une conclusion qui doit être fondée sur la preuve — Le fait d’une demande en instance n’est pas, à lui seul, une considération spéciale justifiant un report — Même si l’intérêt supérieur d’un enfant à court terme doit être pris en compte d’une manière équitable et avec sensibilité, il ne s’agit pas d’une analyse approfondie comme dans le cas d’une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire — En l’espèce, l’agent n’a pas erré en concluant que son pouvoir discrétionnaire de reporter le renvoi était limité et que sa compétence pour examiner les facteurs CH devait se concentrer sur la question de savoir s’il existait des circonstances impérieuses, notamment l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme, justifiant un report du renvoi — En ce qui concerne l’arrêt Kanthasamy c. Canada (Citoyenneté et Immigration), il ne change pas la portée limitée du pouvoir discrétionnaire d’un agent des renvois de reporter un renvoi — L’arrêt Kanthasamy ne se limite pas qu’aux décisions rendues en application de l’art. 25 — En l’espèce, l’agent a tenu compte des observations du demandeur présentées à l’appui de sa demande de report, notamment l’intérêt supérieur de sa fille — Rien ne laissait entendre dans la décision que l’agent a imposé un seuil de difficultés inhabituelles et injustifiées ou démesurées ou que l’agent n’a pas tenu compte de tous les faits et facteurs pertinents au dossier en évaluant l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme — L’arrêt Kanthasamy n’impose pas à l’agent une obligation de chercher des renseignements additionnels à propos de l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme — L’agent a examiné l’ensemble de la preuve à sa disposition — En ce qui concerne le caractère raisonnable de la décision de l’agent, le dossier révélait que très peu de renseignements avaient été fournis concernant l’intérêt supérieur de l’enfant — L’agent a raisonnablement conclu qu’en fonction du dossier, les éléments de preuve concernant l’effet que le renvoi du demandeur aurait sur sa fille étaient insuffisants — La conclusion générale de l’agent selon laquelle, en fonction de l’intégralité de la preuve, un report de renvoi n’était pas justifié était raisonnable — Demande accueillie.

Il s’agissait d’une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par un agent d’exécution de la loi dans les bureaux intérieurs de l’Agence des services frontaliers du Canada, qui a refusé de reporter le renvoi du demandeur à Fidji. Le demandeur est un résident de longue date du Canada interdit de territoire en raison de grande criminalité. Il a épousé une citoyenne canadienne et ils ont une fille ensemble. Les antécédents criminels du demandeur remontent à plusieurs années, mais les condamnations criminelles ayant mené à la décision d’interdiction de territoire sont survenues plus récemment en 2014. Par la suite, une mesure d’expulsion a été prononcée en 2015, et le demandeur a soumis une demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR), laquelle a été rejetée. Le demandeur a ensuite présenté une demande de résidence permanente pour des motifs d’ordre humanitaire (CH), décrivant l’incidence de sa déportation éventuelle sur sa fille, son épouse et sa mère âgée. Après avoir présenté sa demande CH, le demandeur a reçu un avis de renvoi et a sollicité le report de son renvoi en attendant la décision à l’égard de sa demande CH. Il a demandé à l’agent de se fier aux renseignements qu’il avait déposés avec sa première demande de report. Toutefois, les deux demandes de report du renvoi du demandeur ont été rejetées.

Dans la décision faisant l’objet du contrôle judiciaire, l’agent a mentionné, en particulier, qu’il jouissait d’un pouvoir discrétionnaire limité aux termes de l’article 48 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, et qu’un agent des renvois n’a généralement pas compétence pour examiner des facteurs d’ordre humanitaire, mais qu’il a un pouvoir discrétionnaire limité d’examiner les circonstances impérieuses ou spéciales, notamment l’intérêt à court terme des enfants concernés. L’agent a également conclu que le demandeur n’avait pas fourni de preuve documentaire pour appuyer ses affirmations à propos de l’effet que son renvoi pourrait avoir sur sa fille et que, compte tenu de l’ensemble de la preuve, un report de renvoi n’était pas justifié.

Le demandeur a allégué en particulier que l’agent avait commis une erreur en n’exerçant pas son pouvoir discrétionnaire de reporter le renvoi jusqu’à ce qu’une décision soit rendue dans la demande CH, étant donné les circonstances impérieuses. Il a aussi soutenu que l’agent avait l’obligation de prendre en considération l’intérêt supérieur de l’enfant et que cet examen aurait dû être guidé par la décision de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Kanthasamy c. Canada (Citoyenneté et Immigration) qui, a-t-il allégué, a modifié la portée du pouvoir discrétionnaire de l’agent lors du report d’un renvoi lorsque l’intérêt supérieur des enfants est en jeu.

La principale question en litige était de savoir si la décision de l’agent était raisonnable.

Jugement : la demande doit être rejetée.

Le pouvoir discrétionnaire de l’agent de reporter le renvoi est limité. Des circonstances impérieuses, comme des considérations d’ordre humanitaire, pourraient justifier le report, mais il s’agit d’une conclusion qui doit être fondée sur la preuve. Le fait d’une demande CH en instance n’est pas, à lui seul, une considération spéciale justifiant un report. Une telle approche est contraire à la loi, qui exige que les mesures de renvoi valides soient exécutées dès que possible et qui ne prévoit pas le sursis d’un renvoi en attendant la conclusion d’une demande CH. La jurisprudence examinée en l’espèce a établi ce qui suit : le pouvoir discrétionnaire de l’agent d’exécution est limité; la considération de facteurs d’ordre humanitaire se limite aux circonstances impérieuses, notamment l’intérêt supérieur d’un enfant à court terme; et même si l’intérêt supérieur d’un enfant à court terme doit être pris en compte d’une manière équitable et avec sensibilité, il ne s’agit pas d’une analyse approfondie comme dans le cas d’une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. En l’espèce, l’agent n’a pas erré en concluant que son pouvoir discrétionnaire de reporter le renvoi était limité et que sa compétence pour examiner les facteurs CH devait se concentrer sur la question de savoir s’il existait des circonstances impérieuses, notamment l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme, justifiant un report du renvoi. Il s’agissait de savoir si l’agent a tenu compte de l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme et s’il a exercé sa compétence limitée raisonnablement.

En ce qui concerne l’arrêt Kanthasamy, qui traitait de la façon dont l’article 25 de la Loi, portant sur une dispense à certaines conclusions d’interdiction, devrait être interprété, cet arrêt ne change pas la portée limitée du pouvoir discrétionnaire d’un agent des renvois de reporter un renvoi. Toutefois, l’arrêt Kanthasamy ne se limite pas qu’aux décisions rendues en application de l’article 25 et il pourrait aider les décideurs qui examinent des critères d’ordre humanitaires, notamment l’intérêt supérieur de l’enfant, dans des contextes analogues. La Cour suprême a expliqué dans cet arrêt que ce qui peut justifier une mesure de redressement aux termes de l’article 25 variera selon les faits et le contexte de chaque cas. Les agents qui prennent de telles décisions doivent véritablement examiner tous les faits et les facteurs pertinents portés à leur connaissance et leur accorder du poids. En l’espèce, l’agent a tenu compte des observations du demandeur présentées à l’appui de sa demande de report, notamment l’intérêt supérieur de sa fille. Rien ne laissait entendre dans la décision que l’agent a imposé un seuil de difficultés inhabituelles et injustifiées ou démesurées ou que l’agent n’a pas tenu compte de tous les faits et facteurs pertinents au dossier en évaluant l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme. L’arrêt Kanthasamy n’impose pas à l’agent une obligation de chercher des renseignements additionnels à propos de l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme. L’agent a examiné l’ensemble de la preuve à sa disposition.

En ce qui concerne le caractère raisonnable de la décision de l’agent, le dossier révélait que très peu de renseignements avaient été fournis concernant l’intérêt supérieur de l’enfant, que ce soit à long terme ou à court terme. L’agent a examiné le peu d’éléments de preuve dont il disposait concernant l’enfant, qui constituaient des affirmations, et les autres observations connexes faites à l’égard de la séparation du demandeur de sa famille. L’agent a raisonnablement conclu qu’en fonction du dossier, les éléments de preuve concernant l’effet que le renvoi du demandeur aurait sur sa fille étaient insuffisants. La conclusion générale de l’agent selon laquelle, en fonction de l’intégralité de la preuve, un report de renvoi n’était pas justifié était raisonnable.

LOIS ET RÈGLEMENTS CITÉS

Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46, art. 344.

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, art. 25, 36, 48.

JURISPRUDENCE CITÉE

DÉCISIONS APPLIQUÉES :

Baron c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2009 CAF 81, [2010] 2 R.C.F. 311; Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190; Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, [2011] 3 R.C.S. 708; Kanthasamy c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61, [2015] 3 R.C.S. 909; Urbina Ortiz c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2012 CF 18, [2012] A.C.F. no 11 (QL); Nguyen c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2017 CF 225, [2017] A.C.F. no 203 (QL); Wang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 148, [2001] 3 C.F. 682; Danyi c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2017 CF 112, [2017] A.C.F. no 156 (QL); Varga c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CAF 394, [2007] 4 R.C.F. 3.

DÉCISIONS EXAMINÉES :

Simoes c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2000 CanLII 15668 (C.F. 1re inst.); Dheer c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2016 CF 1194, [2016] A.C.F. no 1485 (QL); Hawthorne c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 475, [2003] 2 C.F. 555.

DÉCISIONS CITÉES :

Escalante c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2016 CF 897, [2016] A.C.F. no 859 (QL); Animodi c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2016 CF 845, [2016] A.C.F. no 872 (QL); Yuris c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1333, [2016] A.C.F. no 1380 (QL).

DEMANDE de contrôle judiciaire de la décision rendue par un agent d’exécution de la loi dans les bureaux intérieurs de l’Agence des services frontaliers du Canada, qui a refusé de reporter le renvoi du demandeur à Fidji. Demande rejetée.

ONT COMPARU

Jaswant S. Mangat pour le demandeur.

Hilla Aharon pour le défendeur.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Mangat Law Professional Corporation, Brampton, pour le demandeur.

Le sous-procureur général du Canada pour le défendeur.

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement et du jugement rendus par

[1]        La juge Kane : Le demandeur, un résident de longue date du Canada interdit de territoire en raison de grande criminalité, demande le contrôle judiciaire de la décision rendue par un agent d’exécution de la loi dans les bureaux intérieurs (l’agent) de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), datée du 28 avril 2016, qui a refusé de reporter son renvoi à Fidji.

[2]        La présente demande est rejetée pour les motifs qui suivent. L’agent a examiné la preuve au dossier et il a raisonnablement conclu qu’elle n’était pas suffisante pour justifier l’exercice de son pouvoir discrétionnaire limité de reporter le renvoi du demandeur.

I.          Le contexte factuel

[3]        Le demandeur est venu au Canada en 1972 à l’âge de neuf ans avec sa mère et ses frères et sœurs. Il a épousé une citoyenne canadienne en 2007 et ils ont une fille née le 17 janvier 2010.

[4]        Les antécédents criminels du demandeur remontent à 1988. Toutefois, les condamnations criminelles ayant mené à la décision d’interdiction de territoire en vertu de l’article 36 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), sont survenues plus récemment. Le demandeur a été reconnu coupable en août 2014 d’un chef d’accusation de vol qualifié et de deux chefs d’accusation de tentative de vol qualifié en vertu de l’article 344 du Code criminel, L.R.C (1985), ch. C-46. Il a plaidé coupable à ces accusations et il a été condamné à une peine d’emprisonnement de 3 ans et 6 mois de prison, avec 18 mois crédités pour la détention avant le procès.

[5]        Le demandeur fait aussi face à des accusations additionnelles en Alberta dont certaines ont été réglées et d’autres dont la Couronne entend suspendre les chefs d’accusation jusqu’à son renvoi du Canada.

[6]        Suite à la conclusion d’interdiction de territoire, une mesure d’expulsion a été prononcée le 21 mai 2015. Le demandeur a soumis une demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR) en juillet 2015, laquelle a été examinée et rejetée le 19 août 2015. L’agent d’ERAR a conclu que les éléments de preuve présentés par le demandeur ne suffisaient pas à démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il serait exposé à un risque de préjudice grave personnalisé et, par conséquent, il n’était pas une personne à protéger. Le demandeur n’a pas demandé le contrôle judiciaire de la décision de l’agent d’ERAR.

[7]        Le demandeur a présenté une demande de résidence permanente pour des motifs d’ordre humanitaire (CH) le 26 août 2015. Dans sa demande CH, il a décrit, entre autres, ce qui suit : son statut de résident permanent au Canada depuis 33 ans; son absence de lien avec Fidji pour n’y être jamais retourné; ses emplois antérieurs; sa toxicomanie et ses efforts pour y remédier; ses condamnations et peines criminelles; son expression de remords; l’incidence de sa déportation éventuelle sur sa fillette et sur son épouse, qui est devenue une mère monoparentale avec des problèmes de santé, qui ne peut travailler et qui est maintenant « financièrement indigente ».

[8]        En ce qui concerne l’incidence sur sa fille, ses observations CH indiquent que son incarcération actuelle a eu sur lui de [traduction] « profondes répercussions au plan psychologique » qui seraient aggravées par son renvoi. Il ajoute que son renvoi provoquerait des [traduction] « perturbations catastrophiques pour sa famille », faisant référence à sa mère âgée, à sa femme et à sa fille.

[9]        Plus précisément, à l’égard de l’intérêt supérieur de sa fille, les observations indiquent que [traduction] « l’enfant souffrirait de troubles du développement et de problèmes émotionnels sévères si M. Schleicher était renvoyé du Canada. Il est dans l’intérêt supérieur de la fille canadienne de M. Schleicher qu’il ne soit pas renvoyé du Canada et qu’il soit autorisé à l’élever au Canada ».

[10]      Au même moment où il présentait sa demande CH, le demandeur a sollicité le report de son renvoi en attendant la décision à l’égard de sa demande CH. Les observations de son procureur étaient composées d’une lettre demandant que la demande et les observations d’ordre humanitaire, qui étaient jointes, soient prises en considération au moment où il est statué sur le renvoi.

[11]      La demande de report du renvoi a été rejetée le 27 octobre 2015, car aucune date de renvoi n’avait encore été fixée en raison des accusations criminelles en instance en Alberta.

[12]      Le demandeur a présenté une seconde demande le 26 avril 2016, à la suite de la réception d’un avis de renvoi qui était prévu pour le 2 mai 2016. Le demandeur n’a pas présenté de document à l’appui de la seconde demande; il a plutôt incité l’agent à se fier aux renseignements qu’il avait déposés avec sa première demande. La seconde demande de report mentionnait que la fille de six ans du demandeur serait touchée par la décision qui serait rendue. Elle affirmait également ce qui suit : qu’il existait des circonstances impérieuses justifiant la suspension de la mesure de renvoi; que [traduction] « vu les circonstances […] sa fille subirait un préjudice sérieux s’il était renvoyé »; que le renvoi irait [traduction] « à l’encontre de l’intérêt supérieur de l’enfant à court et à long terme, en particulier puisque la relation de M. Schleicher avec sa fille s’était renforcée depuis qu’il avait été renvoyé en Alberta de la Colombie-Britannique et à la lumière de la jurisprudence récente, plus précisément l’arrêt Kanthasamy c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61 »; et enfin, que l’enfant avait récemment commencé à consulter un pédopsychologue qui allait remettre un rapport sur l’incidence que son renvoi aurait sur elle. La lettre affirmait que ce rapport allait être fourni à titre de document supplémentaire à l’appui de la demande CH en instance. Le procureur du demandeur a demandé une décision immédiate.

[13]      Le 28 avril 2016, l’agent a refusé de reporter le renvoi du demandeur. La décision du 28 avril 2016 fait l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

II.          La décision faisant l’objet du contrôle

[14]      L’agent a noté les observations énumérées ci-dessus. L’agent a également noté qu’aucun document n’avait été fourni à l’appui de la seconde demande de report et qu’il examinerait les renseignements qui avaient été présentés à l’égard de la première demande de report. L’agent a énuméré les documents considérés, lesquels comprenaient la demande CH du demandeur, les affidavits de l’épouse du demandeur et d’un autre ami, divers documents sur la situation dans le pays et des articles parus sur Fidji dans les médias.

[15]      L’agent a mentionné, entre autres, les antécédents criminels du demandeur qui avaient mené à l’interdiction de territoire et à la mesure d’expulsion, les accusations en instance auxquelles le demandeur faisait face en Alberta, lesquelles seraient suspendues jusqu’au renvoi du Canada du demandeur, et les résultats de la décision concernant l’ERAR.

[16]      L’agent a mentionné qu’il jouissait d’un pouvoir discrétionnaire limité aux termes de l’article 48 de la Loi, en vertu duquel une mesure de renvoi doit être exécutée dès que possible. Il a ajouté qu’un agent des renvois n’a généralement pas compétence pour examiner des facteurs d’ordre humanitaire, mais qu’il a un pouvoir discrétionnaire limité d’examiner les [traduction] « circonstances impérieuses ou spéciales, notamment l’intérêt à court terme des enfants concernés ».

[17]      L’agent a également mentionné que le dépôt d’une demande CH n’a aucune incidence sur la validité d’une mesure de renvoi valide et qu’il n’existe aucun cas de sursis de renvoi d’origine législative dans l’attente de la conclusion de la demande d’ordre humanitaire. L’agent a ajouté que les délais de traitement pour les demandes CH variaient de 30 à 42 mois et, se fondant sur le fait que le demandeur avait présenté sa demande en août 2015, il estimait que la demande CH pourrait ne pas être décidée pour une durée supplémentaire de 24 à 34 mois. L’agent a fait observer que le demandeur ne présentait pas une demande de report à court terme.

[18]      En ce qui concerne l’intérêt supérieur de l’enfant, l’agent a noté qu’il avait tenu compte des observations présentées dans la demande CH du mois d’août 2015. L’agent a également considéré que la lettre du procureur du demandeur indiquait que la fille du demandeur consultait un pédopsychologue et qu’un rapport serait produit à titre d’observation supplémentaire à la demande CH.

[19]      L’agent a conclu que le demandeur n’avait pas fourni de preuve documentaire pour appuyer ses affirmations à propos de l’effet que son renvoi pourrait avoir sur sa fille. L’agent a considéré que l’enfant n’avait commencé à consulter un psychologue qu’une semaine avant la seconde demande de report (qui avait été présentée le 26 avril 2016 et tranchée le 28 avril 2016) et par conséquent, les conclusions psychologiques, tout comme le moment du rapport, étaient inconnues.

[20]      Pour ce qui est des autres observations du demandeur à l’appui du report de son renvoi, l’agent a noté que le risque du demandeur avait été évalué dans l’ERAR. L’agent a conclu que la preuve documentaire concernant les incidents de discrimination à Fidji s’était produite avant l’examen des risques avant renvoi et plusieurs rapports identiques avaient été présentés à l’agent de l’ERAR et il les avait examinés. Par conséquent, les allégations et les documents à l’appui avaient déjà été traités par l’agent approprié. L’agent a reconnu que le demandeur risquait d’être victime de discrimination à son retour à Fidji, mais il a conclu que la preuve qui avait été présentée était insuffisante pour établir, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur serait exposé à un risque personnel de préjudice grave s’il retournait à Fidji.

[21]      L’agent a conclu que, compte tenu de l’ensemble de la preuve, un report de renvoi n’était pas justifié.

III.         La norme de contrôle

[22]      Les décisions discrétionnaires des agents des renvois sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision raisonnable (Baron c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2009 CAF 81, [2010] 2 R.C.F. 311 (Baron), au paragraphe 25; Escalante c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2016 CF 897, au paragraphe 13).

[23]      La norme de la raisonnabilité porte sur l’existence d’une « justification […] la transparence et l’intelligibilité du processus décisionnel » ainsi que sur « l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, au paragraphe 47).

[24]      Dans l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, [2011] 3 R.C.S. 708 (Newfoundland Nurses), aux paragraphes 14 et 15, la Cour suprême du Canada a donné des détails sur les exigences stipulées dans l’arrêt Dunsmuir en déclarant que les motifs « doivent être examinés en corrélation avec le résultat et ils doivent permettre de savoir si ce dernier fait partie des issues possibles ». De plus, au besoin, la cour peut examiner le dossier « pour apprécier le caractère raisonnable du résultat ».

IV.        Les questions en litige

[25]      Le demandeur a soulevé plusieurs arguments dans son mémoire écrit. Ils ont été ciblés lors de la plaidoirie orale afin de se concentrer sur la question de savoir si la décision de l’agent est raisonnable.

[26]      Le demandeur fait valoir que l’agent a commis une erreur en n’exerçant pas son pouvoir discrétionnaire de reporter le renvoi jusqu’à ce qu’une décision soit rendue dans la demande CH, étant donné les circonstances impérieuses.

[27]      Le demandeur fait également valoir que, bien que l’agent ne soit pas tenu de mener une analyse complète des motifs d’ordre humanitaire, l’agent avait l’obligation de prendre en considération l’intérêt supérieur à court terme de l’enfant et que cet examen aurait dû être guidé par la décision de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Kanthasamy c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61, [2015] 3 R.C.S. 909 (Kanthasamy). Le demandeur affirme que l’arrêt Kanthasamy a modifié la portée du pouvoir discrétionnaire de l’agent lors du report d’un renvoi lorsque l’intérêt supérieur des enfants est en jeu et qu’il régit l’approche utilisée dans l’évaluation de cet intérêt.

V.        Les observations du demandeur

[28]      Le demandeur fait valoir que les agents ont le pouvoir de reporter le renvoi d’une personne malgré une mesure d’expulsion valide et dans l’attente de la détermination d’une demande CH. Les considérations d’ordre humanitaire, en particulier l’intérêt supérieur de l’enfant, constituent des circonstances impérieuses justifiant un report (Urbina Ortiz c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2012 CF 18 (Ortiz), aux paragraphes 43 à 46).

[29]      Le demandeur reconnaît que ce n’est pas le rôle d’un agent examinant un report de renvoi de mener une analyse complète des motifs d’ordre humanitaire. Toutefois, compte tenu des circonstances impérieuses établies dans la demande CH du demandeur, l’agent devait évaluer si ces circonstances justifiaient le report de son renvoi jusqu’à ce que la demande CH puisse être examinée.

[30]      Le demandeur fait valoir que les circonstances sont clairement impérieuses, en particulier les répercussions sur sa fille dans le contexte d’autres circonstances, notamment que son épouse a des problèmes de santé et qu’elle n’est pas capable de travailler; que d’autres membres de sa famille dépendent de lui; qu’il était la seule personne subvenant aux besoins financiers de son épouse et de sa fille avant son incarcération; qu’il avait passé la majeure partie de sa vie au Canada; qu’il n’a aucun lien avec Fidji.

[31]      Le demandeur fait valoir que l’arrêt Kanthasamy a élargi la portée du pouvoir discrétionnaire d’un agent lors de l’examen de l’intérêt supérieur de l’enfant, notamment dans le cadre d’une demande de report, lorsqu’il y a une demande CH en instance. Il fait valoir qu’un agent doit mener une évaluation préliminaire valable du bien-fondé d’une demande CH et, lorsqu’il est possible que l’intérêt supérieur d’un enfant à court terme puisse être bafoué par le renvoi, il doit reporter le renvoi afin de permettre l’examen des motifs d’ordre humanitaire par l’instance compétente. Le demandeur affirme que cette évaluation préliminaire doit appliquer les principes de l’arrêt Kanthasamy, notamment la réitération par la Cour suprême du Canada que « “[l]es enfants méritent rarement, sinon jamais, d’être exposés à des difficultés” » (au paragraphe 41).

[32]      Le demandeur fait valoir que l’agent n’a pas effectué une évaluation préliminaire valable à la lumière de l’arrêt Kanthasamy. Il affirme que l’absence de prise en considération des difficultés auxquelles la fille du demandeur serait exposée, jumelée aux autres éléments de preuve au dossier portant sur les circonstances impérieuses de l’affaire, rend en fait déraisonnable le refus de reporter son renvoi.

VI.        Les observations du défendeur

[33]      Le défendeur soutient que la loi dispose clairement que le pouvoir discrétionnaire d’un agent de reporter le renvoi est limité et l’arrêt Kanthasamy n’a pas modifié la portée de son pouvoir discrétionnaire. L’arrêt Kanthasamy s’est penché sur la manière dont on devrait examiner les demandes CH lorsque des questions d’intérêt supérieur d’enfants sont soulevées. Il n’a pas abordé les considérations pertinentes à un report de renvoi.

[34]      Le défendeur fait valoir que les agents n’ont aucune compétence pour procéder à des examens approfondis de facteurs d’ordre humanitaires, puisque cela usurperait le rôle du décideur CH et transforme le stade du renvoi en « demande [CH] “préalable” » (Simoes c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2000 CanLII 15668 (C.F. 1re inst.), au paragraphe 11).

[35]      La Cour d’appel fédérale a établi qu’un agent possède un pouvoir discrétionnaire limité dans l’exécution des mesures de renvoi. L’existence d’une demande CH n’empêche pas l’exécution d’une mesure de renvoi valide (Baron, précité, aux paragraphes 49 à 51).

[36]      Le défendeur signale plusieurs décisions de la Cour postérieures à l’arrêt Kanthasamy, lesquelles confirment que l’état du droit reste le même; les agents des renvois sont mandatés uniquement pour examiner l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme afin de déterminer s’il existe des circonstances impérieuses justifiant le report (voir par exemple, Animodi c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2016 CF 845, au paragraphe 21; Yuris c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1333, aux paragraphes 9, 10, 15 et 16; Nguyen c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2017 CF 225 (Nguyen), aux paragraphes 11 à 14).

VII.       Le pouvoir discrétionnaire de l’agent de reporter le renvoi est limité

[37]      Dans la décision Dheer c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2016 CF 1194, aux paragraphes 12 et 13, dans le cadre d’une requête en suspension d’exécution de la mesure de renvoi, le juge Roy a indiqué :

L’agent chargé du renvoi n’est pas sans pouvoir discrétionnaire lorsqu’une mesure de renvoi doit être exécutée. Toutefois, la décision de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Baron c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2009 CAF 81, [2010] 2 RCF 311 [Baron] fait autorité et appuie la thèse selon laquelle « il est de jurisprudence constante que le pouvoir discrétionnaire dont disposent les agents d’exécution en matière de report d’une mesure de renvoi est limité » (paragraphe 49). Le juge Nadon, avec l’appui du juge Desjardins, conclut ce qui suit au paragraphe 50 :

[50] J’ai également exprimé l’avis que la simple existence d’une demande CH n’empêchait pas l’exécution d’une mesure de renvoi valide. Au sujet de la présence d’enfants nés au Canada, j’ai adopté le point de vue que l’agent chargé du renvoi n’est pas tenu d’effectuer un examen approfondi de l’intérêt des enfants avant d’exécuter la mesure de renvoi.

Cette approche trouve un écho dans les motifs du juge Blais (tel était alors son titre) qui a écrit que « les demandes CH ne sont pas censées faire obstacle aux mesures de renvoi valides ». (paragraphe 87).

Un autre tribunal de la Cour d’appel fédérale est parvenu à la même conclusion dans l’arrêt Canada (Sécurité publique et Protection civile) c. Shpati, 2011 CAF 286, [2012] 2 RCF 133, où le juge Evans, au nom de la Cour, a jugé que « les agents d’exécution ne sont pas censés se prononcer sur les demandes d’ERAR ou de CH ou rendre de nouvelles décisions à ce sujet » (paragraphe 45). Or, les demandeurs prétendent justement que c’est ce que l’agent chargé du renvoi aurait dû faire. Ils parlent de la meilleure vie dont les enfants jouiraient au Canada et de la vie familiale qui devrait être améliorée et chérie. Cela conduit à la conclusion [traduction] « que la demande pour motifs d’ordre humanitaire qu’ils ont soumise doit être étudiée avant toute expulsion » (mémoire des faits et du droit, paragraphe 13). Malheureusement pour les demandeurs, tel n’est pas l’état de la loi. Ce ne sont pas là des considérations qui doivent être prises en compte au stade du renvoi. [Non souligné dans l’original.]

[38]      Dans l’arrêt Baron, le juge Nadon a cité la décision Wang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 148, [2001] 3 C.F. 682 (Wang), au paragraphe 48, où la Cour d’appel fédérale a conclu que « l’exercice de ce pouvoir aux affaires où il y a des demandes ou procédures pendantes et où le défaut de différer ferait que la vie du demandeur serait menacée, ou qu’il serait exposé à des sanctions excessives ou à un traitement inhumain ». Au paragraphe 51 de l’arrêt Baron, le juge Nadon a souscrit aux motifs et à l’éventail des critères établis dans la décision Wang selon lesquels il peut être pertinent pour une décision de reporter le renvoi, notamment :

•     Pour respecter l’économie de la Loi, qui impose une obligation positive au ministre tout en lui accordant une certaine latitude en ce qui concerne le choix du moment du renvoi, l’exercice du pouvoir discrétionnaire de différer le renvoi devrait être réservé aux affaires où le défaut de le faire exposerait le demandeur à un risque de mort, de sanctions excessives ou de traitement inhumain. Pour ce qui est des demandes CH, à moins qu’il n’existe des considérations spéciales, ces demandes ne justifient un report que si elles sont fondées sur une menace à la sécurité personnelle.

•     Il est possible de remédier aux affaires où les difficultés causées à la famille sont le seul préjudice subi par le demandeur en réadmettant celui-ci au pays par suite d’un gain de cause dans sa demande qui était en instance. [Souligné dans l’original.]

[39]      Le demandeur affirme que des « considérations spéciales » ou des circonstances impérieuses peuvent être, et en l’espèce sont, établies dans la demande CH en instance et que cela justifie le report. Le demandeur fait référence à la décision Ortiz, précitée, au paragraphe 45, où le juge O’Keefe a déclaré que les agents des renvois peuvent tenir compte de circonstances impérieuses comme les « considérations d’ordre humanitaire ». Cependant, cette phrase doit être examinée dans le contexte des passages qui la précèdent et qui la suivent. Ces passages reflètent nettement la formulation et l’application par le juge O’Keefe de la jurisprudence dominante, notamment qu’« [e]n l’absence de considérations spéciales, le fait qu’une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire soit en instance ne suffit pas, en règle générale, pour justifier un sursis, à moins qu’il n’existe une menace à la sécurité personnelle » (Ortiz, précitée, au paragraphe 43) et que l’agent de renvoi ne peut examiner qu’un nombre limité de facteurs lorsqu’il évalue une demande de report (Ortiz, précitée, au paragraphe 44, citant Wang, précitée). Le juge O’Keefe poursuit aux paragraphes 45 et 46 pour mentionner que :

Les agents de renvoi ne sont pas en mesure d’évaluer toute la preuve susceptible d’être pertinente dans le cadre d’une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire (voir Ramada, précitée, au paragraphe 7). Ils peuvent cependant déterminer s’il existe de bonnes raisons de retarder le renvoi, par exemple la capacité de voyager d’une personne, la nécessité d’honorer d’autres engagements comme des obligations scolaires, ou des circonstances impérieuses telles que des considérations d’ordre humanitaire (voir Ramada, précitée, au paragraphe 3). Les agents peuvent aussi réfléchir à la possibilité de remédier aux conséquences du renvoi en réadmettant le demandeur une fois la demande pendante approuvée (voir Wang, précitée, au paragraphe 48).

Pour ce qui est des enfants concernés, leur intérêt immédiat doit être traité équitablement et avec sensibilité (voir Joarder c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 230, [2006] ACF no 310, au paragraphe 3). Cependant, les agents de renvoi « ne [sont] pas tenu[s] d’effectuer un examen approfondi de l’intérêt supérieur des enfants avant d’exécuter la mesure de renvoi » (voir Baron, précité, au paragraphe 57). [Je souligne.]

[40]      La référence que fait le juge O’Keefe à ce qu’un agent des renvois peut examiner afin de justifier un renvoi n’élargit pas, à mon avis, le pouvoir discrétionnaire de l’agent, mais confirme plutôt que des circonstances impérieuses, « comme » des considérations d’ordre humanitaire, pourraient justifier le report. En d’autres termes, des considérations d’ordre humanitaire peuvent être impérieuses, mais il s’agit d’une conclusion qui doit être fondée sur la preuve.

[41]      Le fait d’une demande en instance n’est pas, à lui seul, une considération spéciale justifiant un report. Une telle approche serait contraire à la loi, qui exige que les mesures de renvoi valides soient exécutées dès que possible et qui ne prévoit pas le sursis d’un renvoi en attendant la conclusion d’une demande CH.

[42]      Plus récemment dans la décision Danyi c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2017 CF 112 (Danyi), le juge Boswell a abordé des arguments semblables, il a examiné la jurisprudence et il a noté au paragraphe 30 :

[traduction] Par ailleurs, dans Canada (Sécurité publique et Protection civile) c. Shpati, 2011 CAF 286 au paragraphe 45, [2012] 2 RCF 133, la Cour d’appel a déclaré que les agents d’exécution « disposent de peu de latitude et les reports sont censés être temporaires. Les agents d’exécution ne sont pas censés se prononcer sur les demandes d’ERAR ou de CH ou rendre de nouvelles décisions à ce sujet ». Dans l’arrêt Munar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1180, au paragraphe 36, [2006] 2 RCF 664 [Munar], la Cour a fait remarquer que l’on « ne peut pas exiger des agents de renvoi qu’ils se livrent à un examen approfondi des motifs humanitaires que l’on doit examiner dans le cadre d’une évaluation CH. Cela constituerait non seulement une demande “préalable à la demande fondée sur des raisons d’ordre humanitaire”, comme le dit le juge Nadon dans la décision Simoes, mais il y aurait également double emploi jusqu’à un certain point avec la vraie évaluation CH. »

[43]      La jurisprudence récente confirme que les principes articulés dans l’arrêt Baron et la décision Wang continuent de s’appliquer. La jurisprudence récente a également examiné la latitude dont jouit un agent des renvois dans la considération de l’intérêt supérieur de l’enfant dans le cadre de l’évaluation des circonstances spéciales.

[44]      Comme il a été mentionné par le défendeur, la décision de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Varga c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CAF 394, [2007] 4 R.C.F. 3, s’appliquent toujours. Au paragraphe 16 de cet arrêt, le juge Evans a déclaré que « [c]ompte tenu du peu de latitude dont jouit l’agent de renvoi pour l’accomplissement de ses tâches, son obligation, le cas échéant, de prendre en considération l’intérêt des enfants touchés est minime, contrairement à l’examen complet qui doit être mené dans le cadre d’une demande CH présentée en vertu du paragraphe 25(1) ».

[45]      Dans la décision Danyi, précitée, aux paragraphes 34 et 35, le juge Boswell a examiné la nature de l’évaluation de l’intérêt supérieur de l’enfant qui est de mise dans le contexte du report d’un renvoi, mentionnant que :

[traduction] Plus récemment, dans Kampemana c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2015 CF 1060, au paragraphe 34, [2015] ACF no 1119 [Kampemana], la Cour a confirmé que même si l’agent d’exécution est « tenu de considérer l’intérêt immédiat et à court terme des enfants et d’en traiter équitablement et avec sensibilité », « il n’est pas tenu d’effectuer un examen approfondi de l’intérêt supérieur des enfants avant d’exécuter la mesure de renvoi ». De même, dans Ally c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 560, au paragraphe 21, [2015] ACF no 547, la Cour a conclu que les agents d’exécution « n’avaient pas compétence pour faire l’analyse de fond complète sur l’intérêt supérieur de l’enfant qui s’impose dans le cadre d’une demande de résidence permanente fondée sur des considérations d’ordre humanitaire » et qu’ils « devraient plutôt se concentrer uniquement sur l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme ».

La jurisprudence a établi que les agents d’exécution doivent tenir compte de l’intérêt supérieur d’un enfant à court terme de manière équitable et avec sensibilité (voir Joarder, au paragraphe 3; Kampemana, au paragraphe 34). Il est également clair que « si l’intérêt supérieur des enfants est certainement un facteur dont il faut tenir compte dans le contexte d’une mesure de renvoi, il ne s’agit toutefois pas d’un facteur déterminant » (Pangallo c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2014 CF 229, au paragraphe 25, 238 ACWS (3rd) 711).

[46]      En résumé, la jurisprudence a établi ce qui suit : le pouvoir discrétionnaire de l’agent d’exécution est limité; la considération de facteurs d’ordre humanitaire se limite aux circonstances impérieuses, notamment l’intérêt supérieur d’un enfant à court terme; et même si l’intérêt supérieur d’un enfant à court terme doit être pris en compte d’une manière équitable et avec sensibilité, il ne s’agit pas d’une analyse approfondie comme dans le cas d’une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire, et par comparaison, est minime, et n’est pas un facteur dominant.

[47]      En l’espèce, l’agent n’a pas erré en concluant que son pouvoir discrétionnaire de reporter le renvoi était limité et que sa compétence pour examiner les facteurs CH devait se concentrer sur la question de savoir s’il existe des circonstances impérieuses, notamment l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme, justifiant un report du renvoi. La question en litige est de savoir si l’agent a tenu compte de l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme et s’il a exercé sa compétence limitée raisonnablement.

VIII.      L’incidence de l’arrêt Kanthasamy

[48]      Dans l’arrêt Kanthasamy, la Cour suprême du Canada a traité la façon dont l’article 25 de la Loi devrait être interprété. L’article 25 prévoit qu’une dispense à certaines conclusions d’interdiction et à d’autres critères ou obligations de la Loi peut être accordée pour des motifs d’ordre humanitaire « compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché ».

[49]      Je suis d’accord avec le défendeur que l’arrêt Kanthasamy ne change pas la portée limitée du pouvoir discrétionnaire d’un agent des renvois de reporter un renvoi. Toutefois je suis d’avis que l’arrêt Kanthasamy ne se limite pas nécessairement qu’aux décisions rendues en application de l’article 25 et qu’il pourrait aider les décideurs qui examinent des critères d’ordre humanitaires, notamment l’intérêt supérieur de l’enfant, dans des contextes analogues.

[50]      Cela étant dit, plusieurs passages de l’arrêt Kanthasamy, sur lesquels s’appuie le demandeur afin de faire valoir que l’agent a commis une erreur dans son examen de l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme à la lumière de l’arrêt Kanthasamy, exagèrent l’incidence de la décision et ils doivent être placés en contexte.

[51]      Le demandeur mentionne que l’arrêt Kanthasamy confirme que les enfants méritent rarement d’être exposés à des difficultés, faisant valoir que « quelconque difficulté » devrait être suffisante pour justifier le report d’un renvoi. Ce libellé de « quelconque difficulté » vient de l’arrêt Hawthorne c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 475, [2003] 2 C.F. 555 (Hawthorne), au paragraphe 9, lequel fournit également une orientation concernant l’évaluation de l’intérêt supérieur de l’enfant dans le cadre d’une demande CH. Le principe selon lequel un enfant mérite rarement d’être exposé à des difficultés n’est pas contesté, toutefois « quelconque difficulté » ne fournit pas un nouveau seuil à franchir pour traiter une demande CH. Dans l’arrêt Kanthasamy, la Cour suprême du Canada a reconnu que certaines difficultés étaient inévitables.

[52]      Au paragraphe 41 de l’arrêt Kanthasamy, la Cour suprême se concentre sur les circonstances particulières de M. Kanthasamy, étant donné qu’il était le demandeur et qu’il était un enfant (de moins de 18 ans) au moment pertinent. La Cour déclare :

Comment un enfant pourrait-il être plus « directement touché » que lorsqu’il est l’auteur de la demande? À mon avis, il s’ensuit non seulement que l’« intérêt supérieur » doit être considéré comme un élément important, mais aussi qu’il doit jouer dans l’appréciation des autres aspects de la situation de l’enfant. Et comme « [l]es enfants méritent rarement, sinon jamais, d’être exposés à des difficultés », la notion de « difficultés inhabituelles et injustifiées » ne saurait généralement s’appliquer aux difficultés alléguées par un enfant à l’appui de sa demande de dispense pour considérations d’ordre humanitaire (Hawthorne, par. 9). Puisque l’enfant peut éprouver de plus grandes difficultés qu’un adulte aux prises avec une situation comparable, des circonstances qui ne justifieraient pas une dispense dans le cas d’un adulte pourraient néanmoins la justifier dans le cas d’un enfant (voir Kim c. Canada (Citoyenneté et Immigration), [2011] 2 R.C.F. 448 (C.F.), par. 58; HCNUR, Principes directeurs sur la protection internationale no 8 : Les demandes d’asile d’enfants dans le cadre de l’article 1(A)2 et de l’article 1(F) de la Convention de 1951 et/ou son Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés, HCR/GIP/09/08 (22 décembre 2009)). [Je souligne.]

[53]      Je ne suis pas d’accord avec le demandeur lorsqu’il affirme que la possibilité qu’un enfant éprouve « quelconque difficulté » est un facteur déterminant de l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme dans le cadre du pouvoir discrétionnaire limité de l’agent des renvois de reporter le renvoi du parent de l’enfant en attendant la conclusion d’une demande CH.

[54]      L’orientation de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Kanthasamy, précité, au paragraphe 23, établit la nécessité de prendre en considération tous les facteurs pertinents et elle appelle une interprétation plus libérale des considérations CH, mais elle reconnaît que certaines difficultés sont inévitables :

L’obligation de quitter le Canada comporte inévitablement son lot de difficultés, mais cette seule réalité ne saurait généralement justifier une dispense pour considérations d’ordre humanitaire suivant le par. 25(1) (voir Rizvi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 463, par. 13 (CanLII); Irimie c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2000 CanLII 16640 (C.F. 1re inst.), par. 12). De plus, ce paragraphe n’est pas censé constituer un régime d’immigration parallèle (Chambre des communes, Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration, Témoignages, no 19, 3e sess., 40e lég., 27 mai 2010, 15 h 40 (Peter MacDougall); voir également Témoignages, no 3, 1re sess., 37e lég., 13 mars 2001, 9 h 55 à 10 h (Joan Atkinson)).

[55]      La Cour suprême explique dans l’arrêt Kanthasamy que ce qui peut justifier une mesure de redressement aux termes de l’article 25 variera selon les faits et le contexte de chaque cas. Les agents qui prennent de telles décisions doivent véritablement examiner tous les faits et les facteurs pertinents portés à leur connaissance et leur accorder du poids (au paragraphe 25). Un aspect important de l’arrêt Kanthasamy est l’orientation précise de la Cour afin d’éviter d’imposer un seuil dont les difficultés sont inhabituelles et injustifiées ou démesurées et de « soupeser toutes les considérations d’ordre humanitaire pertinentes » (italique dans l’original) (Kanthasamy, précité, au paragraphe 33). Les agents doivent être réceptifs, attentifs et sensibles à l’intérêt supérieur de l’enfant; simplement affirmer que l’intérêt a été pris en considération n’est pas suffisant. L’intérêt supérieur de l’enfant doit être bien identifié et défini eu égard à l’ensemble de la preuve (Kanthasamy, précité, aux paragraphes 35 à 39).

[56]      En l’espèce, l’agent a tenu compte des observations du demandeur présentées à l’appui de sa demande de report, notamment l’intérêt supérieur de sa fille. Rien ne laisse entendre dans la décision que l’agent a imposé un seuil de difficultés inhabituelles et injustifiées ou démesurées ou que l’agent n’a pas tenu compte de tous les faits et facteurs pertinents au dossier en évaluant l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme. L’arrêt Kanthasamy n’impose pas à l’agent une obligation de chercher des renseignements additionnels à propos de l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme. L’agent a examiné l’ensemble de la preuve à sa disposition.

IX.        La décision de l’agent est raisonnable

[57]      Les observations d’ordre humanitaire (à l’appui de la demande CH déposée en août 2015) étaient les mêmes observations sur lesquelles s’appuyait le demandeur dans sa demande de report, en plus de la lettre de son procureur. Conformément à l’orientation de l’arrêt Newfoundland Nurses, au paragraphe 15, j’ai examiné le dossier afin de mieux orienter mon évaluation de la raisonnabilité de la décision de l’agent. Le dossier révèle que très peu de renseignements ont été fournis concernant l’intérêt supérieur de l’enfant, que ce soit à long terme ou à court terme. Il y avait des affirmations concernant la relation rétablie entre le demandeur et sa fille et que l’incarcération du demandeur avait eu de profondes répercussions psychologiques sur son épouse et sa fille, lesquelles seraient aggravées par son renvoi. Ces mêmes énoncés figuraient dans l’affidavit du demandeur et dans l’affidavit de son épouse. De plus, il y avait un paragraphe dans la demande de report qui faisait précisément référence à l’intérêt supérieur de l’enfant et qui déclarait que [traduction] « l’enfant souffrirait de troubles du développement et de problèmes émotionnels sévères » et [traduction] « qu’il est dans l’intérêt supérieur [de sa fille] qu’il ne soit pas renvoyé du Canada et qu’il soit autorisé à l’élever au Canada ».

[58]      Dans la décision Nguyen, le juge Boswell a examiné la raisonnabilité d’une décision refusant de reporter le renvoi et les observations, semblables aux observations en l’espèce, concernant le défaut de tenir compte de l’intérêt supérieur de l’enfant. Le juge Boswell a fait remarquer [au paragraphe 23] :

[traduction] Le fardeau pour le demandeur de produire des éléments de preuve à l’égard de l’intérêt supérieur de l’enfant dans le cadre d’une demande CH s’applique de la même manière dans le cadre d’une demande de report d’une mesure de renvoi. À cet égard, la Cour dans l’arrêt Omidsorkhabi c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2015 CF 954, au paragraphe 15, [2015] ACF no 980, déclare : « les agents chargés d’exécuter les renvois ont un pouvoir discrétionnaire très limité en matière de report […]. Il incombe au demandeur de produire les éléments de preuve nécessaires et des justificatifs de sa demande ». En outre, il a été établi qu’ : « il incombe à la personne qui invoque l’intérêt supérieur de l’enfant de mettre en preuve les éléments qui soutiennent ses allégations. De vagues conjonctures ne sont pas suffisantes » (voir Mondelus c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2011 CF 1138, au paragraphe 76, [2011] ACF no 1392).

[59]      De même, en l’espèce, il incombait au demandeur de fournir des éléments de preuve pour appuyer ses affirmations concernant l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme. Je prends acte de l’observation du procureur du demandeur selon laquelle l’incarcération du demandeur et la situation financière de la famille ont empêché le demandeur de recueillir des éléments de preuves à l’appui. Cependant, le demandeur a présenté deux demandes de report à un an d’intervalle, toutes deux à l’aide d’un procureur; malgré cela, le dossier ne comprend aucun renseignement étayant la répercussion sur l’enfant.

[60]      Comme l’agent l’a mentionné, la promesse d’un rapport de la part d’un psychologue, à un moment donné, aux fins de compléter la demande CH en instance, n’aide pas à appuyer la demande de report. Le demandeur n’a pas adéquatement étayé ses prétentions concernant l’intérêt supérieur de l’enfant. L’agent a examiné le peu d’éléments de preuve dont il disposait concernant l’enfant, qui constituaient des affirmations, et les autres observations connexes faites à l’égard de la séparation du demandeur de sa famille. L’agent a raisonnablement conclu qu’en fonction du dossier, les éléments de preuve concernant l’effet que le renvoi du demandeur aurait sur sa fille étaient insuffisants.

[61]      Ce n’est pas le rôle de la Cour d’apprécier à nouveau la preuve ou de spéculer sur l’incidence que le renvoi du père aura sur son enfant.

[62]      Comme il est mentionné dans l’arrêt Baron, précité, au paragraphe 69 :

[…] les difficultés et perturbations causées à la vie familiale sont une des conséquences regrettables entraînées par les mesures de renvoi, mais elles ne constituent manifestement pas un préjudice irréparable. Pour paraphraser le juge Pelletier (voir le paragraphe 48 de ses motifs dans la décision Wang, précitée), les difficultés causées à la famille sont la malheureuse conséquence d’une mesure de renvoi, mais on peut y remédier par une réadmission si la demande CH est accueillie.

[63]      La conclusion générale de l’agent selon laquelle, en fonction de l’intégralité de la preuve, un report de renvoi n’était pas justifié est raisonnable.

X.        Aucune question n’est certifiée

[64]      Le demandeur a proposé initialement que la question suivante soit certifiée :

Est-ce que la décision de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Kanthasamy a modifié la portée et la nature du pouvoir de l’agent des renvois lors de l’examen de l’intérêt supérieur d’un enfant directement concerné par la décision relativement à la demande de report du parent de l’enfant lorsqu’il y a une demande sous-jacente de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire en instance?

[65]      Après la présentation d’autres observations, le demandeur a accepté que l’analyse de l’agent comprenne deux étapes et que l’arrêt Kanthasamy n’ait pas eu d’incidence sur la première étape, qui est axée sur le pouvoir discrétionnaire limité de l’agent de reporter le renvoi. Pour ce qui est de la seconde étape, la question est de savoir si l’arrêt Kanthasamy peut avoir une incidence sur l’examen de l’agent de l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme. Par conséquent, la question proposée serait axée sur la question de savoir si l’interprétation et l’orientation de la Cour suprême du Canada à l’égard de l’évaluation des motifs d’ordre humanitaire et de l’intérêt supérieur de l’enfant s’appliquent dans d’autres contextes que celui de l’article 25 de la Loi.

[66]      Bien que je sois d’avis que les principes énoncés dans l’arrêt Kanthasamy aideraient à déterminer les critères d’ordre humanitaire et l’intérêt supérieur de l’enfant dans le cadre de contextes analogues et que la résolution de la présente question en litige apporterait une certaine clarté et une orientation supplémentaire aux agents des renvois, la décision rendue ne réglerait pas l’issue de la demande actuelle. Comme il a été mentionné, il n’y a aucune indication dans la décision voulant que l’agent ait commis une erreur dans son appréciation de l’intérêt supérieur de l’enfant à court terme. La conclusion de l’agent était fondée sur l’insuffisance de la preuve soumise par le demandeur afin d’établir que l’intérêt supérieur de l’enfant serait touché et de façon générale, que l’intégralité de la preuve ne justifiait pas le report.

[67]      Par conséquent, la question proposée ne sera pas certifiée.

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

1.         La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.         Aucune question n’est certifiée.

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