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[2000] 1 C.F. 586

A-371-99

L’Alliance évangélique du Canada, Precision Sound

Corporation et Western Imperial Magnetics Ltd. (demanderesses)

c.

Agence canadienne des droits de reproduction musicaux limitée, Société canadienne de gestion des droits voisins, Société de gestion des droits des artistes-musiciens, Société du droit de reproduction des auteurs, compositeurs et éditeurs au Canada, Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (appelées ci-après « sociétés musicales ») et Fuji Photo Film Canada Inc., Sony of Canada Ltd., Memtek Canada Ltd., Maxell Canada, AVS Technologies Inc., Kodak Canada Inc. (appelées ci-après « Alliance canadienne en matière de supports musicaux » ou « ACSM ») et Commission du droit d’auteur et Le procureur général de la Colombie-Britannique et Canatron Corporation, Mme Mary Anne Epp, faisant affaire sous la raison sociale Bluebird Events, M. A. Mark Hambridge pour First Evangelical Lutheran Church, M. Glenn Howell pour St. John’s Shaughnessy Anglican Church, M. Wes Klause, M. L. Graham Newton, Mme Katie Wreford, faisant affaire sous la raison sociale Studio-A-Mirador (appelés ci-après « autres participants non représentés ») (défendeurs)

Répertorié : Alliance évangélique du Canada c. Agence canadienne des droits de reproduction musicaux (C.A.)

Cour d’appel, juge Rothstein, J.C.A.—Toronto, 12 et 13 août; Ottawa, 18 août 1999.

Pratique Suspension d’instance Requête visant à obtenir une ordonnance de prohibition ou une suspension de l’instance devant la Commission du droit d’auteur sous le régime de la partie VIII de la Loi sur le droit d’auteurLa constitutionnalité de cette partie est mise en douteMême si une question sérieuse a été soulevée, il n’a pas été démontré qu’un préjudice irréparable découlera de l’imposition de redevances si la réparation n’est pas accordéeDans les cas de suspension, l’intérêt public commande normalement davantage le respect de la législation.

Droit d’auteur Contestation de la constitutionnalité de la partie VIII de la Loi sur le droit d’auteur (système de paiement aux titulaires de droits d’auteur de redevances perçues sur les bandes vierges que vendent les importateurs et les fabricants)S’agit-il de dispositions concernant le droit d’auteur ou la taxation?La requête visant à obtenir une ordonnance de prohibition ou la suspension de l’instance devant la Commission du droit d’auteur est rejetée, les questions du préjudice irréparable et de la prépondérance des inconvénients jouant en faveur des défendeurs.

La partie VIII de la Loi sur le droit d’auteur a été adoptée afin de légaliser la copie des enregistrements sonores pour usage privé, afin de prévoir un système de paiement aux titulaires de droits d’auteur de redevances perçues sur les bandes vierges que vendent les importateurs et les fabricants, et afin de déléguer à la Commission du droit d’auteur le pouvoir d’homologuer le tarif fixant les redevances sur la vente de bandes vierges par des importateurs et des fabricants. Lorsque la Commission a fixé la tenue d’une audience, les demanderesses ont présenté une requête visant à obtenir une ordonnance de prohibition ou, subsidiairement, une suspension de l’instance. Il a été allégué que les dispositions législatives étaient inconstitutionnelles.

Arrêt : la requête doit être rejetée.

Le critère en trois volets qui a été formulé dans l’arrêt RJR—MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général) relativement aux injonctions interlocutoires, ou, en l’espèce, au bref de prohibition ou à la suspension de l’instance, s’appliquait.

Il y avait une question sérieuse à trancher. L’argument des demanderesses selon lesquelles les dispositions législatives concernaient davantage la taxation que le droit d’auteur et qu’elles devaient respecter les articles 53 et 54 de la Loi constitutionnelle de 1867 n’était ni frivole ni vexatoire.

La question du préjudice irréparable devait être tranchée en faveur des défendeurs. Même si les demanderesses ont affirmé qu’elles subiraient un préjudice irréparable si la partie VIII était finalement jugée inconstitutionnelle étant donné, en particulier, qu’il n’existe aucun mécanisme leur permettant de toucher des dommages-intérêts ni d’obtenir le remboursement des redevances, la preuve que les sociétés musicales ont déclaré leur intention d’offrir une dispense de perception de la redevance à certaines catégories d’utilisateurs de bandes vierges, notamment les organisations religieuses, était particulièrement convaincante en ce qui a trait à l’Alliance évangélique. Pour ce qui est des autres demanderesses, les redevances ne leur étaient pas imposées, mais l’étaient plutôt aux importateurs et aux fabricants qui essaieront probablement de les refiler à quelqu’un d’autre. Comme on ignorait quel serait le montant des redevances et si ces dernières seraient refilées intégralement, la preuve d’un préjudice irréparable pour ces demanderesses était aussi hypothétique.

Cependant, l’argument des demanderesses selon lequel elles devraient engager, pour participer aux procédures devant la Commission du droit d’auteur, des frais irrécouvrables importants qu’elles débourseraient pour rien si la partie VIII était finalement jugée inconstitutionnelle, était valide. C’est à ce point que l’argument du procureur général du Canada relativement au préjudice irréparable pour l’intérêt public est devenu pertinent. Lorsque l’autorité d’un organisme chargé de l’application de la loi fait l’objet d’une attaque fondée sur la Constitution, aucune injonction interlocutoire ni aucune suspension d’instance ne devrait être prononcée pour empêcher cet organisme de remplir ses obligations envers le public, à moins que l’intérêt public ne soit pris en considération et ne reçoive l’importance qu’il mérite dans l’appréciation de la prépondérance des inconvénients : Manitoba (Procureur général) c. Metropolitan Stores Ltd. (le juge Beetz). Si on applique en l’espèce les commentaires des juges Sopinka et Cory dans l’arrêt RJR—MacDonald, ce n’est pas le rôle de la Cour, en règle générale, d’évaluer l’efficacité d’une mesure prise par le gouvernement ou de déterminer si le gouvernement gouverne bien. En s’acquittant de ces fonctions en vertu de la partie VIII, la Commission agissait de manière à promouvoir et à protéger l’intérêt public tel qu’il ressort de cette partie. Il convenait donc de présumer que la délivrance d’un bref de prohibition ou une ordonnance de suspension de l’instance devant la Commission du droit d’auteur causerait un préjudice irréparable à l’intérêt public.

Dans les cas de suspension, l’intérêt public commande normalement davantage le respect de la législation existante. Les tribunaux ont généralement répondu par la négative à la question de savoir s’il est juste et équitable de priver le public, ou d’importants secteurs du public, de la protection et des avantages conférés par la loi attaquée, dont l’invalidité n’est qu’incertaine, sans tenir compte de l’intérêt public dans l’évaluation de la prépondérance des inconvénients et sans lui accorder l’importance qu’il mérite : le juge Beetz dans Metropolitan Stores Ltd. En l’espèce, la prépondérance des inconvénients qui obligeait à prendre en considération le préjudice irréparable pouvant être causé à chacune des parties jouait en faveur du procureur général. Même si le fait de devoir engager des frais irrécouvrables pourrait suffire à justifier une injonction interlocutoire dans d’autres circonstances, il ne s’agit pas en règle générale d’un facteur qui justifie la suspension de l’application de la loi et contrecarre la volonté d’une législature démocratiquement élue.

Deux autres considérations justifiaient cette conclusion. Non seulement les demanderesses auraient-elles pu agir plus tôt, mais la Commission du droit d’auteur a dit qu’elle examinerait toute question constitutionnelle qui lui serait soumise. Même si l’on peut douter de la compétence de la Commission d’examiner la constitutionnalité de la loi en vertu de laquelle elle agit, cela signifie que les demanderesses auraient une tribune devant laquelle débattre des questions précises qui sont à l’origine de la présente procédure visant à obtenir un bref de prohibition.

LOIS ET RÈGLEMENTS

Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44].

Loi constitutionnelle de 1867, 30 & 31 Vict., ch. 3 (R.-U.) (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, no 1) [L.R.C. (1985), appendice II, no 5], art. 53, 54, 91(3),(23).

Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. (1985), ch. C-42, art. 79 « support audio » (édicté par L.C. 1997, ch. 24, art. 50), partie VIII (édicté, idem).

JURISPRUDENCE

DÉCISIONS APPLIQUÉES :

RJR —MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311; (1994), 111 D.L.R. (4th) 385; 164 N.R. 1; Manitoba (Procureur général) c. Metropolitan Stores Ltd., [1987] 1 R.C.S. 110; (1987), 38 D.L.R. (4th) 321; [1987] 3 W.W.R. 1; 46 Man. R. (2d) 241; 25 Admin. L.R. 20; 87 CLLC 14,015; 18 C.P.C. (2d) 273; 73 N.R. 341; Ainsley Financial Corp. v. Ontario Securities Commission (1993), 14 O.R. (3d) 280 (Div. gén.).

décisions mentionnées :

FWS Joint Sports Claimants c. Canada (Commission du droit d’auteur), [1992] 1 C.F. 487 (1991), 81 D.L.R. (4th) 412; 36 C.P.R. (3d) 483; 129 N.R. 289 (C.A.); Réseau de Télévision CTV Ltée c. Canada (Commission du droit d’auteur),[1993] 2 C.F. 115 (1993), 99 D.L.R. (4th) 216; 46 C.P.R. (3d) 343; 149 N.R. 363 (C.A.); Cuddy Chicks Ltd. c. Ontario (Commission des relations de travail), [1991] 2 R.C.S. 5; (1991), 81 D.L.R. (4th) 121; 91 CLLC 14,024; 122 N.R. 361; [1991] OLRB Rep 790; Lawson v. Interior Tree Fruit and Vegetable Committee of Direction, [1931] R.C.S. 357; [1931] 2 D.L.R. 193.

REQUÊTE visant à obtenir un bref de prohibition ou, subsidiairement, une suspension de l’instance devant la Commission du droit d’auteur pour l’homologation des tarifs relatifs à la vente de bandes audio vierges. Requête rejetée.

ONT COMPARU :

Howard P. Knopf pour les demanderesses.

Randall J. Hofley pour la défenderesse, l’Alliance canadienne en matière de supports musicaux.

David R. Collier et Claudine Roy pour l’Agence canadienne des droits de reproduction musicaux limitée.

Edward R. Sojonky pour le défendeur proposé, le procureur général du Canada.

Mario Bouchard pour l’intervenante, la Commission du droit d’auteur.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Shapiro Cohen, Ottawa, pour les demanderesses.

Stikeman, Elliott, Ottawa, pour la défenderesse, l’Alliance canadienne en matière de supports musicaux.

Ogilvy Renault, Montréal, pour la défenderesse, l’Agence canadienne des droits de reproduction musicaux limitée.

Le sous-procureur général du Canada pour le défendeur proposé, le procureur général du Canada.

Commission du droit d’auteur pour l’intervenante, la Commission du droit d’auteur.

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement de la Cour rendus par

Le juge Rothstein, J.C.A. :

QUESTIONS EN LITIGE

[1]        Il s’agit en l’espèce d’une requête visant à obtenir une ordonnance de prohibition ou, subsidiairement, une suspension de l’instance qui doit avoir lieu devant la Commission du droit d’auteur le 24 août 1999. Les demanderesses affirment que la partie VIII de la Loi sur le droit d’auteur [L.R.C. (1985), ch. C-42][1], qui est entrée en vigueur en mars 1998 et en vertu de laquelle doit avoir lieu en l’instance, est inconstitutionnelle. À la clôture des plaidoiries le vendredi 13 août 1999, la requête a été rejetée. J’ai indiqué que des motifs suivraient.

CONTEXTE

[2]        Les avocats ont expliqué à la Cour les motifs qui sont à l’origine de la partie VIII de la Loi sur le droit d’auteur ainsi que son objet et je les résume brièvement. Des personnes font des enregistrements sonores de musique et d’autres œuvres protégées par des droits d’auteur sur des supports audio vierges (appelés ci-après « bandes vierges »)[2]. Il est permis de croire qu’une telle copie pour « usage privé » violait les droits d’auteur des artistes et autres personnes qui avaient des droits d’auteur sur les œuvres copiées. Toutefois, on a avancé qu’en pratique il était impossible de faire respecter les droits des détenteurs des droits d’auteur.

[3]        La partie VIII a été adoptée : 1) afin de légaliser la copie pour usage privé (mais non le piratage, qui consisterait à copier une œuvre en vue de sa revente); 2) afin de prévoir un système de paiement aux titulaires de droits d’auteur de redevances perçues sur les bandes vierges que vendent les importateurs et les fabricants; 3) afin de déléguer à la Commission du droit d’auteur le pouvoir d’homologuer le tarif fixant les redevances sur la vente de bandes vierges par des importateurs et des fabricants.

[4]        Une fois la législation adoptée, les sociétés musicales ont déposé, au nom des titulaires de droits d’auteur, un projet de tarif, fixé essentiellement en fonction d’une période de quinze minutes d’enregistrement sur une bande vierge. La Commission a ensuite publié le tarif, ce qui a permis aux personnes qui voulaient s’y opposer de le faire. Dès août 1998, de très nombreuses oppositions avaient été déposées, certaines visant le principe même du tarif et d’autres concernant le montant du tarif proposé.

[5]        La Commission a ensuite fixé la tenue d’une audience. Au départ, l’audience devant la Commission devait débuter le 25 mai 1999. Elle a toutefois été remise et doit maintenant commencer le 24 août 1999, à moins qu’elle ne fasse l’objet d’une ordonnance d’interdiction ou de suspension par suite de la présente procédure.

[6]        En vertu de la partie VIII, un tarif de redevances d’une durée de deux ans devait entrer en vigueur le 1er janvier 1999. Ce délai est passé et l’avocat de la Commission a fait savoir que le président de la Commission avait indiqué qu’il souhaitait rendre une décision de manière à ce que si un tarif est homologué, il prendra effet le 1er janvier 2000. Dans l’intervalle, les sociétés musicales ont renoncé à la perception des redevances jusqu’au 1er janvier 2000 ou jusqu’à ce que la Commission du droit d’auteur homologue un tarif, celle de ces deux dates qui surviendra la première étant à retenir.

[7]        Les demanderesses entrent dans deux catégories : religieuse et commerciale. L’Alliance évangélique du Canada est un organisme cadre regroupant 32 confessions religieuses. Celles-ci enregistrent des renseignements religieux, par exemple des sermons, sur des bandes vierges et les distribuent gratuitement ou à peu de frais. Precision Sound et Western Imperial vendent en gros des bandes vierges à des clients tels des musiciens professionnels. Les demanderesses s’opposent à l’imposition de redevances sur les bandes vierges parce qu’elles affirment que cela augmentera considérablement leurs coûts et, dans le cas de Precision Sound et de Western Imperial, les rendra moins concurrentielles sur le marché par rapport à leurs concurrents américains auxquels des bandes vierges peuvent être achetées aux États-Unis où aucune redevance n’est exigée.

[8]        Le procureur général de la Colombie-Britannique s’oppose à la redevance en sa qualité d’utilisateur de bandes vierges pour l’enregistrement des procédures devant les tribunaux. Les autres participants non représentés sont un petit fabricant de bandes vierges, des producteurs de musiciens qui utilisent des bandes vierges et d’autres églises qui utilisent des bandes vierges pour enregistrer des messages religieux.

[9]        Les demanderesses, le procureur général de la Colombie-Britannique et les autres participants non représentés affirment qu’ils n’utilisent pas des bandes vierges pour enregistrer de la musique ou d’autres objets visés par un droit d’auteur et que, pour cette raison, ils s’opposent à la redevance.

[10]      Les sociétés musicales sont des organisations établies pour percevoir les redevances et les verser aux titulaires des droits d’auteur. Ce sont elles qui ont déposé le projet de tarif devant la Commission du droit d’auteur.

[11]      L’Alliance canadienne en matière de supports musicaux (ACSM) est une association d’importateurs et de fabricants de bandes vierges. Suivant la partie VIII, la redevance est imposée sur la vente de bandes vierges par les membres de l’ACSM. Le montant de la redevance peut ou non être refilé aux clients des importateurs et des fabricants, selon les conditions du marché.

[12]      Le procureur général du Canada défend la constitutionnalité de la partie VIII qui est contestée.

[13]      La Commission du droit d’auteur est intervenue afin d’aider la Cour, au besoin.

QUESTION SÉRIEUSE

[14]      Passons maintenant au critère en trois volets habituellement applicable aux injonctions interlocutoires ou, en l’espèce, au bref de prohibition ou à la suspension de l’instance devant la Commission du droit d’auteur : une question sérieuse, un préjudice irréparable et la prépondérance des inconvénients. Comme l’a indiqué la Cour suprême du Canada dans l’arrêt RJRMacDonald Inc. c. Canada (Procureur général)[3], les exigences minimales pour déterminer s’il y a une question sérieuse à juger ne sont pas élevées et seul un examen préliminaire est requis. Une fois convaincu qu’une réclamation n’est ni futile ni vexatoire, le juge de la requête devrait examiner les questions du préjudice irréparable et de la prépondérance des inconvénients.

[15]      Les demanderesses affirment que la partie VIII de la Loi sur le droit d’auteur est inconstitutionnelle. Elles prétendent que la partie VIII ne peut constituer une loi fédérale valide qu’en vertu des paragraphes 91(23) ou 91(3) de la Loi constitutionnelle de 1867 [30 & 31 Vict., ch. 3 (R.-U.) (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, no 1 [L.R.C. (1985), appendice II, no 5]] : une loi concernant « Les droits d’auteur » ou une loi concernant « Le prélèvement de deniers par tous modes ou systèmes de taxation ». Elles affirment qu’il ne s’agit pas d’une législation sur les droits d’auteur parce que sa portée est trop large; il n’y a aucun lien dans la législation entre les titulaires de droits d’auteur et l’imposition des redevances; les redevances s’appliquent à toutes les bandes vierges et seront refilées aux utilisateurs de ces bandes qui n’enregistrent pas des objets protégés par le droit d’auteur. Les demanderesses invoquent des règles de droit ayant une portée plus limitée aux États-Unis ainsi que la jurisprudence australienne qui, selon elles, étayent leur position. Par conséquent, elles font valoir que la partie VIII n’est pas une législation sur le droit d’auteur en vertu du paragraphe 91(23) de la Loi constitutionnelle de 1867.

[16]      Les demanderesses prétendent que les dispositions de la partie VIII ne concernent pas le droit d’auteur, mais sont plutôt des dispositions concernant la taxation. Elles affirment que les redevances sont exigibles en vertu de la loi; elles sont imposées en vertu du pouvoir du législateur; elles sont perçues par un organisme public pour une fin d’intérêt public. (Voir Lawson v. Interior Tree Fruit and Vegetable Committee Direction[4].) Les demanderesses affirment qu’étant donné qu’elle contient des dispositions fiscales, la partie VIII doit respecter les articles 53 et 54 de la Loi constitutionnelle de 1867. Les articles 53 et 54 prévoient ce qui suit :

53. Tout bill ayant pour but l’appropriation d’une portion quelconque du revenu public, ou la création de taxes ou d’impôts, devra originer dans la Chambre des Communes.

54. Il ne sera pas loisible à la Chambre des Communes d’adopter aucune résolution, adresse ou bill pour l’appropriation d’une partie quelconque du revenu public, ou d’aucune taxe ou impôt, à un objet qui n’aura pas, au préalable, été recommandé à la chambre par un message du gouverneur-général durant la session pendant laquelle telle résolution, adresse ou bill est proposé.

Les demanderesses prétendent qu’il y a inobservation de ces dispositions parce que la partie VIII n’a pas été présentée par une motion de voies et moyens comme l’exige le Règlement de la Chambre des communes. Elles font en outre valoir que la Loi confère à la Commission du droit d’auteur un large pouvoir discrétionnaire lui permettant de déterminer les produits pour lesquels la redevance est exigible ainsi que les personnes ou catégories de personnes qui devraient être exemptées de son paiement. Elles soutiennent qu’une délégation de pouvoir aussi large et générale est incompatible avec les exigences des articles 53 et 54.

[17]      Tout en soutenant que la partie VIII est constitutionnelle, le procureur général du Canada et les sociétés musicales reconnaissent que les arguments des demanderesses ne sont ni futiles ni vexatoires. Après un examen superficiel initial des arguments des demanderesses, je suis également convaincu qu’ils ne sont ni frivoles ni vexatoires. Je ne dois pas aller plus loin. Les demanderesses ont établi l’existence d’une question sérieuse.

PRÉJUDICE IRRÉPARABLE ET PRÉPONDÉRAN-CE DES INCONVÉNIENTS

[18]      Passons maintenant à la question du préjudice irréparable. Les demanderesses revendiquent un préjudice irréparable à deux égards. Premièrement, les coûts de leur participation aux audiences projetées de la Commission du droit d’auteur. Les demanderesses affirment que si un bref de prohibition ou une suspension de l’instance n’est pas accordé, elles devront engager pour participer aux procédures devant la Commission du droit d’auteur des frais irrécouvrables importants qu’elles débourseront pour rien si la partie VIII de la Loi sur le droit d’auteur est finalement jugée inconstitutionnelle. Deuxièmement, les redevances qui seront imposées et qui leur seront refilées si la Commission du droit d’auteur homologue un tarif par suite des procédures engagées devant elle. Les demanderesses prétendent que si une redevance est imposée et leur est refilée, cela entraînera la création d’un « marché semi-clandestin », les consommateurs de bandes vierges acquérant celles-ci aux États-Unis où aucune redevance n’est exigée. L’imposition de redevances au Canada augmentera les coûts des utilisateurs, telle l’Alliance évangélique, entraînant une diminution de l’activité religieuse. L’achat de bandes vierges aux États-Unis par des consommateurs canadiens nuira aussi aux activités commerciales des autres demanderesses. Les demanderesses affirment qu’il n’existe aucun mécanisme leur permettant de toucher des dommages-intérêts ni d’obtenir le remboursement des redevances si la partie VIII est finalement jugée inconstitutionnelle.

[19]      Pour ce qui est du deuxième élément de l’allégation de préjudice irréparable, il ressort de la preuve soumise par les sociétés musicales qu’elles ont déclaré leur intention d’offrir une dispense de perception de la redevance à certaines catégories d’utilisateurs de bandes vierges, notamment les organisations religieuses, les tribunaux, les sténographes judiciaires, la police, les studios d’enregistrement, les maisons de postproduction, les agences publicitaires, les maisons de disques et les artistes indépendants. Les sociétés musicales contestent que les redevances ne pourraient pas être recouvrées si la législation était jugée inconstitutionnelle, par exemple grâce aux sommes retenues en fiducie par l’ACSM ou les sociétés jusqu’à ce que la question constitutionnelle soit tranchée. Elles affirment aussi que, même si une suspension de l’instance était ordonnée, les membres de l’ACSM ont indiqué qu’ils tenteront nécessairement d’augmenter leurs prix dès le 1er janvier 2000 pour couvrir les redevances éventuelles qui pourraient être rétroactives au 1er janvier 2000. Par conséquent, une suspension de l’instance n’empêcherait pas nécessairement une augmentation des prix pour couvrir les redevances éventuelles.

[20]      La preuve soumise par les sociétés musicales est plus convaincante que celle des demanderesses en ce qui a trait au deuxième élément de l’allégation de préjudice irréparable avancée par les demanderesses. L’offre d’exemption à l’égard des organisations religieuses est particulièrement convaincante dans la mesure où l’Alliance évangélique est concernée. C’est peut-être une réponse complète aux inquiétudes de l’Alliance. Cette dernière n’a toutefois pas encore accepté l’offre des sociétés musicales même si elle a été faite en mai 1999.

[21]      Il semble que des détails doivent encore être réglés. L’Alliance affirme que certains pensent que le « système de détaxation », comme on l’appelle, est inutilisable et trop limité, mais la preuve n’indique pas clairement que le projet ne fonctionnera pas. On ne m’a fourni aucune preuve qu’il a été présenté de mauvaise foi par les sociétés ou qu’elles ne feront pas ce qu’elles ont proposé de faire. Dans les circonstances, je dois considérer que cet aspect de l’allégation de préjudice irréparable de l’Alliance évangélique est à tout le moins hypothétique.

[22]      Pour ce qui est de l’effet de l’imposition des redevances sur les autres demanderesses, il est probablement vrai, au sens économique large, que tout ce qui augmente leurs coûts nuira à leurs activités commerciales. Cependant, les redevances ne leur sont pas imposées, mais le sont plutôt aux importateurs et aux fabricants. Ces derniers essaieront probablement de refiler les redevances à quelqu’un d’autre, mais ils doivent tenir compte de l’effet sur le volume de leurs ventes. On ignore pour l’instant quel sera le montant des redevances et si elles seront refilées intégralement. Par conséquent, la preuve d’un préjudice irréparable pour ces demanderesses est aussi hypothétique.

[23]      Je ne suis pas convaincu que les demanderesses ont démontré qu’un préjudice irréparable découlera de l’imposition de redevances si une suspension de l’instance ou un bref de prohibition n’est pas accordé.

[24]      Toutefois, le premier élément de l’argumentation des demanderesses, savoir les coûts qu’elles ne pourront pas recouvrer par suite de la procédure éventuellement inutile devant la Commission du droit d’auteur, est viable. Les intimés ne se sont pas engagés à indemniser les demanderesses pour les coûts engagés et aucun autre moyen de recouvrement n’a été avancé.

[25]      C’est ici que l’argument du procureur général du Canada relativement au préjudice irréparable pour l’intérêt public devient pertinent. L’avocat du procureur général a correctement énoncé le droit applicable relativement à la prépondérance des inconvénients et au préjudice irréparable lorsque l’intérêt public est en cause, et je reprends et j’applique la jurisprudence qu’il a invoquée. Dans l’arrêt Manitoba (Procureur général) c. Metropolitan Stores Ltd.[5], le juge Beetz dit :

En bref, je conclus que, lorsque l’autorité d’un organisme chargé de l’application de la loi fait l’objet d’une attaque fondée sur la Constitution, aucune injonction interlocutoire ni aucune suspension d’instance ne devrait être prononcée pour empêcher cet organisme de remplir ses obligations envers le public, à moins que l’intérêt public ne soit pris en considération et ne reçoive l’importance qu’il mérite dans l’appréciation de la prépondérance des inconvénients.

[26]      Dans Ainsley Financial Corp. v. Ontario Securities Commission[6], le juge Blair a dit :

[traduction] Une injonction interlocutoire comportant une contestation de la validité constitutionnelle d’une loi ou de l’autorité d’un organisme chargé de l’application de la loi diffère des litiges ordinaires dans lesquels les demandes de redressement opposent des plaideurs privés. Il faut tenir compte des intérêts du public, que l’organisme a comme mandat de protéger, et en faire l’appréciation par rapport à l’intérêt des plaideurs privés.

[27]      Dans l’arrêt RJRMacDonald, précité, les juges Sopinka et Cory disent[7] :

À notre avis, le concept d’inconvénient doit recevoir une interprétation large dans les cas relevant de la Charte. Dans le cas d’un organisme public, le fardeau d’établir le préjudice irréparable à l’intérêt public est moins exigeant que pour un particulier en raison, en partie, de la nature même de l’organisme public et, en partie, de l’action qu’on veut faire interdire. On pourra presque toujours satisfaire au critère en établissant simplement que l’organisme a le devoir de favoriser ou de protéger l’intérêt public et en indiquant que c’est dans cette sphère de responsabilité que se situent le texte législatif, le règlement ou l’activité contestés. Si l’on a satisfait à ces exigences minimales, le tribunal devrait, dans la plupart des cas, supposer que l’interdiction de l’action causera un préjudice irréparable à l’intérêt public.

En règle générale, un tribunal ne devrait pas tenter de déterminer si l’interdiction demandée entraînerait un préjudice réel. Le faire amènerait en réalité le tribunal à examiner si le gouvernement gouverne bien, puisque l’on se trouverait implicitement à laisser entendre que l’action gouvernementale n’a pas pour effet de favoriser l’intérêt public et que l’interdiction ne causerait donc aucun préjudice à l’intérêt public. La Charte autorise les tribunaux non pas à évaluer l’efficacité des mesures prises par le gouvernement, mais seulement à empêcher celui-ci d’empiéter sur les garanties fondamentales.

Même si les commentaires des juges Sopinka et Cory sont relatifs à des cas relevant de la Charte [Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44]], je pense que les principes qu’ils énoncent doivent aussi s’appliquer aux autres contestations de la constitutionnalité d’une loi.

[28]      Suivant la preuve dont j’ai été saisi, la partie VIII de la Loi sur le droit d’auteur a pour but de promouvoir l’industrie culturelle en renforçant l’identité canadienne et en favorisant la création d’emplois. Le sommaire [dans le projet de loi C-32, Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur, première lecture, 25 avril 1996] précédant les modifications où figure la partie VIII contient notamment ce qui suit :

Le texte prévoit un régime de protection des prestations d’artistes-interprètes, des enregistrements sonores et des signaux de communication des radiodiffuseurs, et rend ainsi la législation canadienne conforme aux dispositions de la Convention internationale sur la protection des artistes interprètes ou exécutants, des producteurs de phonogrammes et des organismes de radiodiffusion, conclue à Rome en 1961.

Un régime de rémunération est établi pour la copie privée d’œuvres musicales, de prestations d’artistes-interprètes et d’enregistrements sonores. Un certain nombre d’exceptions à la protection du droit d’auteur qui bénéficieront particulièrement aux établissements d’enseignement, bibliothèques, service d’archives et musées et aux personnes ayant une déficience perceptuelle ont été ajoutées.

Ce n’est pas le rôle de la Cour, en règle générale, d’évaluer l’efficacité d’une mesure prise par le gouvernement ou de déterminer si le gouvernement gouverne bien, et je refuse de le faire. Je considère que la partie VIII a été adoptée dans l’intérêt public.

[29]      La Commission du droit d’auteur a pour rôle d’établir la manière dont il faut déterminer les redevances, de modifier les tarifs proposés et d’homologuer les tarifs, ce qui entraînera l’imposition et la perception des redevances. Les redevances seront distribuées aux sociétés de gestion suivant les proportions fixées par la Commission. En s’acquittant de ces fonctions, la Commission agit de manière à promouvoir et à protéger l’intérêt public tel qu’il ressort de l’adoption de la partie VIII de la Loi sur le droit d’auteur. Vu ces conclusions, il convient, suivant l’arrêt RJRMacDonald, précité, que je présume que la délivrance d’un bref de prohibition ou une ordonnance de suspension de l’instance devant la Commission du droit d’auteur causera un préjudice irréparable à l’intérêt public.

[30]      Je dois, aux fins de la discussion, présumer que l’Alliance évangélique, qui représente 32 confessions religieuses, constitue aussi une partie du public. En engageant inutilement devant la Commission du droit d’auteur des frais qu’elle ne pourra pas recouvrer, l’Alliance évangélique subira un préjudice irréparable. Il faut donc prendre en considération l’intérêt public par rapport à l’intérêt de chacune des parties.

[31]      Ce faisant, je remarque qu’il s’agit d’un cas de « suspension d’instance » où l’on demande la suspension à toutes fins pratiques de l’application de la partie VIII. Dans les cas de suspension, l’intérêt public commande normalement davantage le respect de la législation existante et ce, pour les motifs décrits par le juge Beetz dans l’arrêt Metropolitan Stores, précité[8] :

[…] la suspension d’instance accordée à la demande des plaideurs privés ou de l’un d’eux vise normalement un organisme public, un organisme d’application de la loi, une commission administrative, un fonctionnaire public ou un ministre chargé de l’application ou de l’administration de la loi attaquée. La suspension d’instance peut en général avoir deux effets. Elle peut prendre la forme d’une interdiction totale d’appliquer les dispositions attaquées en attendant une décision définitive sur la question de leur validité ou elle peut empêcher l’application des dispositions attaquées dans la mesure où elle ne vise que la partie ou les parties qui ont précisément demandé la suspension d’instance. Dans le premier volet de l’alternative, l’application des dispositions attaquées est en pratique temporairement suspendue. On peut peut-être appeler les cas qui tombent dans cette catégorie les « cas de suspension » […]

Qu’elles soient ou non finalement jugées constitutionnelles, les lois dont les plaideurs cherchent à obtenir la suspension, ou de l’application desquelles ils demandent d’être exemptés par voie d’injonction interlocutoire, ont été adoptées par des législatures démocratiquement élues et visent généralement le bien commun […] Il semble bien évident qu’une injonction interlocutoire dans la plupart des cas de suspension et, jusqu’à un certain point, comme nous allons le voir plus loin, dans un bon nombre de cas d’exemption, risque de contrecarrer temporairement la poursuite du bien commun.

Quoique le respect de la Constitution doive conserver son caractère primordial, il y a lieu à ce moment-là de se demander s’il est juste et équitable de priver le public, ou d’importants secteurs du public, de la protection et des avantages conférés par la loi attaquée, dont l’invalidité n’est qu’incertaine, sans tenir compte de l’intérêt public dans l’évaluation de la prépondérance des inconvénients et sans lui accorder l’importance qu’il mérite. Comme il fallait s’y attendre, les tribunaux ont généralement répondu à cette question par la négative.

Dans l’arrêt Metropolitan Stores, précité[9], le juge Beetz souligne la rareté des cas dans lesquels une injonction interlocutoire a été accordée pour suspendre l’application d’une loi.

[32]      En l’espèce, je n’ai guère de mal à conclure que la prépondérance des inconvénients qui oblige à prendre en considération le préjudice irréparable pouvant être causé à chacune des parties joue en faveur du procureur général. Bien que je reconnaisse que les demanderesses peuvent engager des frais irrécouvrables lors de l’instance devant la Commission du droit d’auteur, je ne pense pas que cet élément suffise pour faire entrer la présente affaire dans cette petite minorité de cas où la suspension de l’application de la loi peut se justifier. Même si le fait de devoir engager des frais irrécouvrables pourrait suffire à justifier une injonction interlocutoire dans d’autres circonstances, je ne pense pas qu’il s’agisse en règle générale d’un facteur qui justifie la suspension de l’application de la loi et contrecarre la volonté d’une législature démocratiquement élue.

[33]      En l’espèce, deux autres considérations me poussent à adopter ce point de vue. La première est que les demanderesses auraient pu agir plus tôt. La partie VIII est entrée en vigueur en mars 1998. Les demanderesses sont devenues parties à l’instance devant la Commission du droit d’auteur en novembre ou en décembre 1998. Elles affirment qu’elles étaient mal informées et mal organisées jusqu’à tout récemment. Cependant, si la présente affaire est si importante pour elles qu’elle justifie la présente procédure, il est difficile de ne pas leur reprocher de ne pas avoir agi plus tôt.

[34]      La deuxième est que la Commission du droit d’auteur a dit qu’elle examinerait toute question constitutionnelle qui lui serait soumise. Les demanderesses auront donc une tribune devant laquelle débattre des questions précises qui sont à l’origine de la présente procédure visant à obtenir un bref de prohibition. Je reconnais qu’on peut douter de la compétence de la Commission du droit d’auteur d’examiner la constitutionnalité de la loi en vertu de laquelle elle agit. En fait, cette question a été débattue devant moi. Je refuse de statuer sur celle-ci, car je pense qu’elle mérite d’être examinée par une formation plénière des juges de la Cour d’appel plutôt que par un juge seul saisi d’une requête interlocutoire. Cependant, sans trancher cette question, je ferai remarquer que notre Cour a statué que la Commission est habilitée à trancher des questions de droit et que la Cour suprême du Canada a statué que le tribunal à qui on a conféré le pouvoir d’interpréter la loi a aussi le pouvoir concomitant de déterminer si la loi est constitutionnelle. FWS Joint Sports Claimants c. Canada (Commission du droit d’auteur)[10]; Réseau de Télévision CTV Ltée c. Canada (Commission du droit d’auteur)[11]; Cuddy Chicks Ltd. c. Ontario (Commission des relations de travail)[12]. Conclure que la Commission du droit d’auteur n’a pas une telle compétence pose sur le plan pratique le problème des questions constitutionnelles qui seraient soulevées devant la Cour d’appel fédérale lors d’un contrôle judiciaire ab initio sans le bénéfice d’un dossier d’instruction exposant les faits constitutionnels pertinents.

[35]      Je conclus que les questions du préjudice irréparable et de la prépondérance des inconvénients jouent en faveur des défendeurs s’opposant à la demande.

[36]      Pour ces motifs, la demande visant à obtenir un bref de prohibition ou, subsidiairement, une suspension de l’instance devant la Commission du droit d’auteur est rejetée. Les parties peuvent présenter leur argumentation écrite au sujet de la question des dépens.



[1]  L.C. 1997, ch. 24 [art. 50].

[2]  L'art. 79 [édicté par L.C. 1997, ch. 24, art. 50] de la Loi sur le droit d'auteur prévoit notamment ce qui suit:

79. Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente partie.

[…]

« support audio » Tout support audio habituellement utilisé par les consommateurs pour reproduire des enregistrements sonores, à l'exception toutefois de ceux exclus par règlement.

Cette définition de l'expression support audio n'a fait l'objet d'aucune interprétation et je n'ai pas l'intention d'en faire une dans les présents motifs. L'expression « bandes vierges » est utilisée par souci de commodité.

[3]  [1994] 1 R.C.S. 311, à la p. 337.

[4]  [1931] R.C.S. 357.

[5]  [1987] 1 R.C.S. 110, à la p. 149.

[6]  (1993), 14 O.R. (3d) 280 (Div. gén.), à la p. 303.

[7]  Supra, note 3, à la p. 346.

[8]  Supra, note 5, aux p. 134 et 135.

[9]  Ibid., à la p. 148.

[10]  [1992] 1 C.F. 487 (C.A.), à la p. 494.

[11]  [1993] 2 C.F. 115 (C.A.), aux p. 123, 125, 126.

[12] [1991] 2 R.C.S. 5, à la p. 13.

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