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[1993] 1 C.F. 145

T-1027-91

Steinberg Inc. (requérante)

c.

J. L. Duval Ltée (intimée)

Répertorié : Steinberg Inc. c. J. L. Duval Ltée (1re inst.)

Section de première instance, juge Denault—Montréal, 8 mai; Ottawa, 13 novembre 1992.

Marques de commerce — Radiation — Demande de radiation du registre de la marque de commerce — Marché Extra — et de son dessin — La marque a été enregistrée pour être utilisée en liaison avec la distribution et la vente en gros de produits alimentaires — L’intimée a permis à plus de trente détaillants de se servir de la marque sans être des usagers inscrits — Exigences de la Loi sur les marques de commerce, art. 50 (disposition à l’égard de l’usager inscrit) — L’omission d’inscrire les usagers n’entraîne pas nécessairement la perte du caractère distinctif — Le contrôle du propriétaire sur l’emploi de sa marque et la possibilité que le public soit trompé sont pris en considération.

Il s’agit d’une demande visant à radier du registre la marque de commerce « Marché Extra » et son dessin parce qu’ils n’expriment pas de façon exacte les droits existants du propriétaire inscrit de la marque. « Marché Extra » avait été enregistrée pour être utilisée en liaison avec la distribution et la vente en gros de produits alimentaires. La requérante a soutenu que la marque n’était plus distinctive des services fournis par l’intimée parce que celle-ci avait permis à plus de trente preneurs de licence d’utiliser la marque sans être des usagers inscrits. Les détaillants exploitaient leur entreprise sous leur propre nom d’affaires, mais ils affichaient à l’extérieur de leur établissement la marque de l’intimée, « Marché Extra », et la mention « affilié à J. L. Duval ». Conformément à un contrat conclu avec chaque détaillant, l’intimée devait installer et entretenir les affiches, publier une circulaire hebdomadaire des prix d’occasion annoncés proposés dans les magasins affiliés et offrir des services de consultation à ses membres ainsi que des bulletins d’information hebdomadaires. En retour, les détaillants s’engageaient à acheter quatre-vingt pour cent de leurs marchandises de l’intimée, à offrir leurs produits aux prix du détail annoncés et à suivre les lignes directrices de l’intimée en matière de politique. La question litigieuse consistait à savoir si le défaut d’inscrire les détaillants en qualité d’usagers inscrits entraînait nécessairement la perte du caractère distinctif.

Jugement: la demande est rejetée.

Une marque de commerce ne sera pas automatiquement considérée invalide simplement parce que son propriétaire a autorisé son emploi limité en liaison avec des marchandises ou des services non compris dans l’enregistrement. L’article 50 de la Loi sur les marques de commerce permet l’inscription de l’utilisateur inscrit d’une marque à l’égard de « la totalité ou [d’]une partie des marchandises ou services à l’égard desquels il est inscrit ». La requérante n’a pas prouvé soit que l’enregistrement de la marque de l’intimée ne définit pas correctement ses droits existants sur la marque ou que celle-ci ne distingue plus les services de l’intimée. Puisque les détaillants n’ont utilisé la marque en liaison avec aucun des services décrits dans l’enregistrement, l’intimée n’était pas tenue d’enregistrer leur emploi. L’opinion que la disposition applicable à l’usager inscrit doit être observée est fondée sur le fait que la marque de commerce a pour objet de dénoter que les marchandises et les services ont une source unique. Ainsi donc, l’usage simultané de la même marque par deux personnes ou plus conduirait inévitablement à la duperie du public. On peut cependant soutenir que l’usage de la marque par un preneur de licence ne dénote pas que ce dernier est la source des marchandises et la marque restera liée au propriétaire. Tenant pour acquis qu’il n’y a pas duperie du public, le défaut d’inscrire un usager ne saurait nuire à la validité de la marque. Il était donc nécessaire d’examiner le contrôle de l’intimée sur l’emploi de sa marque et de déterminer s’il y a eu duperie du public. Les accords écrits conclus par l’intimée et les détaillants ont établi que l’intimée exerçait un contrôle suffisant sur l’usage de sa marque. Puisque l’intimée n’exploite pas ses propres points de vente au détail et qu’elle n’accorde pas de licences permettant d’utiliser sa marque de commerce en liaison avec des services de vente en gros, l’usage qui était fait de la marque de l’intimée n’était pas susceptible de jeter la confusion dans l’esprit du public.

LOIS ET RÈGLEMENTS

Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13, art. 2, 18(1)b), 30a), 50, 57.

JURISPRUDENCE

décisions citées :

Building Products Ltd. v. BP Canada Ltd. (1961), 36 C.P.R. 121; 21 Fox Pat. C. 130 (C. de l’É.); Schmid Laboratories v. Atlantic Packaging Ltd. (1989), 24 C.P.R. (3d) 258; 26 F.T.R. 203 (C.F. 1re inst.); Yorkshire Copper Works Ld.’s application (Trade Mark) (1953), 71 R.P.C. 150 (H.L.).

DOCTRINE

Bereskin, D. « The Source Theory of Trade Mark Law and its Effect on Trade Mark Licensing » (1987), 3 Can. Intell. Prop. Rev. 322.

Fox, H. G. The Canadian Law of Trade Marks and Unfair Competition, 3rd ed., Toronto: Carswell Co. Ltd., 1972.

DEMANDE de radiation d’une marque de commerce du registre au motif qu’elle ne reflétait pas avec exactitude les droits existants du propriétaire. Demande rejetée.

AVOCATS :

Adele J. Finlayson pour la requérante.

Georges T. Robic pour l’intimée.

PROCUREURS :

Shapiro, Cohen, Andrews, Finlayson, Ottawa, pour la requérante.

Leger, Robic, Richard, Montréal, pour l’intimée.

Ce qui suit est la version française des motifs de l’ordonnance rendus par

Le juge Denault : Il s’agit d’une demande introduite par voie d’avis introductif de requête en vue d’obtenir une ordonnance radiant l’enregistrement de la marque de commerce no 332,181 « Marché Extra » et son dessin du registre des marques de commerce, conformément à l’alinéa 18(1)b) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13, (ci-après appelée « la Loi »).

La requérante soutient que l’enregistrement de la marque de commerce « Marché Extra » et son dessin n’énonce ni ne délimite précisément les droits existants de l’intimée, J. L. Duval Ltée., à titre de propriétaire inscrit de la marque. Selon la requérante, la marque de commerce en question n’était pas distinctive des services fournis par l’intimée à l’époque où ont été entamées les procédures contestant la validité de l’enregistrement, l’intimée ayant permis à plus de trente preneurs de licence d’employer sa marque sans prendre les mesures nécessaires pour les inscrire officiellement à titre d’« usagers inscrits » conformément à l’article 50 de la Loi.

L’intimée prétend que son dessin-marque « Marché Extra » a toujours suffisamment déterminé et distingué les services pour lesquels la marque a été originellement enregistrée: la vente et la distribution en gros par l’intimée de produits alimentaires[1]. L’intimée soutient que l’emploi permis de sa marque de commerce par de nombreux détaillants ne peut priver celle-ci de son caractère distinctif puisque cet emploi permet simplement d’identifier un réseau de détaillants affiliés pour lesquels l’emploi de la marque permet d’informer le public qu’ils vendent des produits provenant de l’entreprise de distribution en gros de l’intimée. Les détaillants tirent ainsi profit de la vaste publicité de l’intimée et de sa réputation au niveau de la qualité, et le public connaît l’identité du grossiste d’où proviennent ses achats. Selon l’intimée, l’emploi surveillé et contrôlé de sa marque par des détaillants autorisés ne porte pas atteinte à la validité de la marque de commerce « Marché Extra » qui distingue toujours les services de l’intimée de ceux fournis par d’autres « grossistes ».

Aux termes de l’alinéa 18(1)b) de la Loi, l’enregistrement d’une marque de commerce est invalide si la marque de commerce n’est pas distinctive à l’époque où sont entamées les procédures contestant la validité de l’enregistrement (ci-après appelée « la date pertinente »). La jurisprudence a établi qu’en matière de procédures en radiation, il incombe à la partie qui allègue l’invalidité de l’enregistrement de la démontrer[2].

Questions en litige :

En l’espèce, la Cour doit déterminer si la marque de l’intimée était employée, à la date pertinente, en liaison avec les services pour lesquels elle a été enregistrée et si l’emploi permis de la marque de l’intimée par les différents détaillants lui a fait perdre son caractère distinctif. En conséquence, la Cour étudiera la notion du « caractère distinctif » et les exigences de l’article 50 de la Loi et, plus précisément, elle déterminera si, en l’espèce, le défaut par l’intimée d’inscrire les détaillants à titre d’« usagers inscrits » de sa marque permet nécessairement de conclure à la perte du caractère distinct.

Preuve :

À l’audience, les parties ont admis que la requérante est une « personne intéressée » au sens de l’article 57 de la Loi et que le registre des marques de commerce ne contient aucune mention d’usager inscrit à l’égard de l’enregistrement de la marque de l’intimée.

Selon la preuve documentaire de la requérante, cette dernière a demandé l’enregistrement de la marque de commerce « Xtra Food and Drug Mart » qu’elle utilise actuellement en liaison avec les ventes de produits alimentaires et de médicaments dans la région d’Ottawa. Les deux parties ont produit une preuve de l’existence de quelque trente détaillants dans la région est du Québec qui, bien qu’ils exploitent une entreprise sous leur propre nom d’affaires, affichent à l’extérieur de leur établissement la marque de commerce de l’intimée, « Marché Extra », et la mention « affilié à J. L. Duval ». La preuve documentaire de l’intimée consistait uniquement en l’affidavit de son président Henri Duval. Cet affidavit contient des éléments intéressants sur le degré de contrôle exercé par l’intimée sur les détaillants autorisés à employer sa marque. J’étudierai plus amplement cet affidavit ci-dessous.

Analyse :

La preuve de la requérante repose principalement sur la notion du caractère distinctif défini ainsi à l’article 2 de la Loi:

2.

« distinctive »  Relativement à une marque de commerce, celle qui distingue véritablement les marchandises ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire, des marchandises ou services d’autres propriétaires, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi.

Dans The Canadian Law of Trade Marks and Unfair Competition[3], Harold G. Fox s’exprime ainsi sur la question du caractère distinctif [à la page 25] :

[traduction] L’essence d’une marque de commerce défendable et, par conséquent, le fondement du droit des marques de commerce, est depuis toujours le caractère distinctif. « Le caractère distinctif consiste en l’attribut d’une marque de commerce qui rend les marchandises revêtues de celui-ci distinctes de celles d’autres producteurs de telles marchandises »[4]. [C’est moi qui souligne.]

En conséquence, dans la mesure où il s’applique à une marque de commerce particulière, le « caractère distinctif » ne peut être déterminé dans l’abstrait. Au contraire, il doit être déterminé en tenant compte des faits propres à chaque affaire. À mon avis, la Cour devrait toujours entreprendre son analyse par l’examen du libellé utilisé dans l’enregistrement contesté. Elle devrait déterminer si, à l’époque pertinente, le propriétaire de la marque ou toute autre personne employait la marque de commerce en question en liaison avec les marchandises ou les services énumérés dans l’enregistrement. Ce n’est qu’une fois cette analyse complétée que la Cour sera en mesure de déterminer si la marque de commerce distingue effectivement les marchandises ou services de son propriétaire de celles d’autres producteurs ou fournisseurs de telles marchandises ou de tels services.

L’alinéa 30a) de la Loi prévoit que quiconque sollicite l’enregistrement d’une marque de commerce produit une demande renfermant « un état, dressé dans les termes ordinaires du commerce, des marchandises ou services spécifiques en liaison avec lesquels la marque a été employée ou sera employée ». Il y a lieu de souligner à cet égard que l’intimée a enregistré sa marque de commerce pour l’employer en liaison avec « la vente et la distribution en gros de produits alimentaires »[5], et qu’il n’est fait mention d’aucun autre service dans l’enregistrement de sa marque.

La preuve dans l’affidavit de M. Henri Duval établit que l’intimée a sans interruption employé sa marque de commerce « Marché Extra » en liaison avec la vente et la distribution en gros de produits alimentaires depuis le 21 octobre 1985. L’intimée n’a pas employé sa marque en liaison avec quelqu’autre service. Cette preuve n’est pas contredite. De plus, la requérante n’a soumis aucune preuve de l’emploi de la marque de l’intimée par d’autres grossistes en produits alimentaires. Conséquemment, cette Cour conclut que la requérante n’a pas prouvé que l’enregistrement de la marque de commerce de l’intimée ne décrit ni ne reflète correctement ses droits existants sur sa marque de commerce déposée. De plus, cette Cour estime que la requérante ne s’est pas acquittée de son obligation de prouver que la marque de l’intimée, à la date pertinente, ne distinguait plus les services de cette dernière de ceux d’autres « grossistes ».

La requérante soutient que les tribunaux canadiens ont uniformément statué que les dispositions de la Loi visant les usagers inscrits sont de nature impérative. Selon la requérante, l’intimée était tenue d’inscrire ses détaillants affiliés comme étant des usagers inscrits de sa marque. À mon avis, le libellé particulier du paragraphe 50(1) de la Loi semblerait laisser entendre le contraire:

50. (1) Une personne autre que le propriétaire d’une marque de commerce déposée peut être inscrite comme usager inscrit de cette marque pour la totalité ou une partie des marchandises ou services à l’égard desquels elle est inscrite.

Le paragraphe 50(1) permet l’inscription d’un usager inscrit d’une marque si l’emploi qui doit être fait de cette marque vise la totalité ou une partie des marchandises ou services à l’égard desquels il est inscrit. Puisque les détaillants n’ont employé la marque de l’intimée en liaison avec aucun des services décrits dans l’enregistrement, l’intimée n’était pas tenue d’inscrire l’emploi qu’ils font de la marque de commerce « Marché Extra ».

Dans un article très intéressant écrit par Daniel R. Bereskin et intitulé The Source Theory on Trade Mark Law and its Effect on Trade Mark Licensing[6], l’auteur met en question le bien-fondé du caractère impératif des dispositions de la Loi applicables aux usagers inscrits. Il explique comme suit pourquoi M. Fox et d’autres personnes estiment que les dispositions de la Loi visant les usagers inscrits ont un caractère impératif (à la page 322) :

[traduction] D’après une opinion répandue au Canada, il ne serait pas prudent de permettre à un preneur de licence d’utiliser une marque de commerce sans qu’il soit inscrit en tant qu’usager inscrit. Un des principaux partisans de cette thèse était Harold G. Fox, qui a insisté que l’octroi de licences en matière de marques de commerce causerait leur invalidité à moins que les formalités de la Loi sur les marques de commerce canadienne applicables aux usagers inscrits soient scrupuleusement remplies. Cette opinion tient au fait que la fonction première de la marque de commerce étant de dénoter que les marchandises et les services visés proviennent d’une seule et unique source, tout emploi simultané de la même marque de commerce par deux ou plusieurs personnes (telles le donneur et le preneur de licence) aboutirait inévitablement à tromper le public. Selon M. Fox, le système applicable à l’usager inscrit est une exception à la règle qui veut que l’objet de la marque de commerce soit d’indiquer l’origine, et que par conséquent les dispositions pertinentes de la Loi, y compris le droit positif et la procédure, doivent être strictement respectées.

L’auteur propose ensuite une solution à ce problème, qu’il expose comme suit :

[traduction] Cet essai se fonde sur l’argument selon lequel même si la théorie de la source est incontestablement le fondement du droit en matière de marques de commerce au Canada, le simple emploi d’une marque de commerce par un preneur de licence dans un contexte contemporain typique d’octroi de licence ne résulte pas en soi en une seconde « source ». Lorsque les marchandises ou les services sont proposés par un preneur de licence qui agit sous l’autorité et le contrôle du propriétaire de la marque de commerce, l’emploi de cette marque par le preneur de licence ne dénote pas davantage qu’il est la source des marchandises ou des services, que ne le fait l’emploi d’une marque par une personne qui est un simple distributeur. Par conséquent la marque de commerce restera liée à son propriétaire en tant que source unique, que l’identité de ce dernier soit connue ou non. Pourvu qu’il n’y ait pas duperie du public, le défaut d’inscrire le preneur de licence en tant qu’usager inscrit ne saurait avoir aucun effet défavorable sur la validité ou le caractère exécutoire de la marque qui a fait l’objet d’une licence, que ce soit en vertu de la loi ou de la common law.

Étant donné ces principes, auxquels je souscris pleinement, la démarche suivante semblerait être l’examen de l’importance du contrôle exercé par le propriétaire de la marque de commerce sur l’emploi de celle-ci par les usagers autorisés, et l’étude de la question de savoir si le public sera vraisemblablement trompé par un tel emploi non inscrit.

En l’espèce, la preuve de l’intimée établit qu’avant de s’affilier à elle, les membres possibles sont tenus de signer une entente régissant les rapports entre l’intimée et ses détaillants affiliés. Aux termes de ce contrat, dont un modèle est joint à l’affidavit de M. Duval, l’intimée est responsable de l’installation et de l’entretien de l’affiche qui apparaît à l’extérieur de ses épiceries de vente au détail affiliées. L’affiche dont parle l’entente, comme on l’a dit plus haut, présente la marque de commerce de l’intimée, aussi bien que la mention « affilié à J. L. Duval ». Dans cette entente, l’intimée s’engage aussi à publier une circulaire hebdomadaire des prix d’occasion annoncés qui sont proposés dans tous ses magasins affiliés. Un exemplaire de la circulaire en question est joint à l’affidavit de M. Duval. De nouveau, la marque de l’intimée apparaît avec la mention confirmant l’affiliation du détaillant à l’intimée. Finalement, l’intimée s’engage à offrir des services de consultation à ses magasins membres et à fournir des bulletins d’information hebdomadaires. Les détaillants, à leur tour, s’engagent à acheter au moins quatre-vingt pour cent de leurs marchandises chez l’intimée, à offrir leurs produits au prix de détail annoncé par l’intimée et à suivre les lignes directrices générales de cette dernière en matière de politique. Ces faits établissent clairement que l’intimée exerce un contrôle suffisant sur l’emploi de sa marque par ses détaillants affiliés.

Puisque l’intimée n’exploite pas ses propres points de vente au détail et qu’elle n’accorde pas de licences permettant d’utiliser sa marque de commerce en liaison avec des services de vente en gros, l’emploi non inscrit de la marque de l’intimée n’est pas susceptible de jeter la confusion dans l’esprit du public. L’intimée a été fort diligente à inclure la mention « affilié à J. L. Duval », et elle semble utiliser sa marque de commerce très efficacement pour promouvoir ses services de distribution en gros. J’estime qu’il ne saurait y avoir en l’espèce aucune duperie du public.

À mon sens, une marque de commerce ne devrait pas automatiquement être considérée invalide simplement parce que son propriétaire a autorisé son emploi limité en liaison avec des marchandises ou des services non compris dans l’enregistrement de la marque de commerce par son propriétaire. Dans de tels cas, un examen plus minutieux du contrôle du propriétaire sur l’emploi de sa marque et de la perception qu’en tire le public s’impose. La réponse à la question de savoir si une marque de commerce distingue réellement les marchandises ou les services de son propriétaire de ceux des autres personnes qui fournissent de telles marchandises ou de tels services dépendra des faits particuliers de l’espèce.

Dans l’affaire dont cette Cour est saisie, je conclus que la requérante ne s’est pas acquittée de l’obligation qu’elle avait de prouver que l’enregistrement No 332,181 est invalide. Conséquemment, cette demande est rejetée avec dépens.



[1] L’enregistrement même de la marque de l’intimée décrit ainsi les services en liaison avec lesquels la marque de commerce est employée par son propriétaire: « exploitation d’un commerce pour la vente et la distribution en gros de produits alimentaires ».

[2] Building Products Ltd. v. BP Canada Ltd. (1961), 36 C.P.R. 121 (C. de l’É.), à la p. 141; Schmid Laboratories c. Atlantic Packaging Ltd. (1989), 24 C.P.R. (3d) 258 (C.F. 1re inst.), à la p. 260.

[3] Fox, H. G. The Canadian Law of Trade Marks and Unfair Competition, 3e éd., Toronto: Carswell, 1972.

[4] Fox cite Yorkshire Copper Works Ld.’s application (Trade Mark) (1953), 71 R.P.C. 150 (H.L.).

[5] Comme il est dit plus haut, l’enregistrement se lit comme suit: « L’exploitation d’un commerce pour la vente et la distribution en gros de produits alimentaires ».

[6] Bereskin, Daniel R. « The Source of Theory of Trade Mark Law and its Effect on Trade Mark Licensing » (1987), 3 Can. Intell. Prop. Rev. 322.

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