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A-684-97

Cinnabon, Inc. (appelante)

c.

Yoo-Hoo of Florida Corp., faisant aussi affaires sous le nom commercial de Orangina International Company (intimée)

Répertorié: Austin Nichols & Co., Inc.c. Cinnabon Inc. (C.A.)

Cour d'appel, juges Desjardins, Décary et Noël, J.C.A. "Montréal, 15 septembre; Ottawa, 24 septembre 1998.

Marques de commerce Pratique Appel de la décision du juge de première instance infirmant la décision du registraire des marques de commerce de radier l'enregistrement de la marque de commerceSwirl Design— — L'intimée n'a pas fourni au registraire de preuve d'emploi au Canada en réponse à l'avis donné en vertu de l'art. 45L'art. 56(5) prévoit qu'en appel devant la Cour fédérale, il peut être apporté une preuveen plus decelle qui a été fournie devant le registraireLes motsen plus den'impliquent pas qu'il doive y avoir production préalable d'éléments de preuve auxquels d'autres éléments puissent être ajoutésL'art. 56 est d'application généraleSon libellé n'autorise pas une interprétation dont l'effet serait de priver qui que ce soit d'un droit d'appel utileRefuser au propriétaire inscrit le droit de produire des éléments de preuve en appel équivaut à toutes fins pratiques à lui refuser toute chance de succès en appelCela conduirait aussi au résultat absurde de permettre au propriétaire inscrit qui produit des éléments de preuve peu importants ou non pertinents d'ajouterdes éléments de preuve en appel, tout en l'interdisant à ceux qui n'ont pas produit de preuveEn donnant à la Cour toute discrétiondont le registraire est investi, le législateur reconnaît que la Cour qui siège en appel devrait être en mesure de trancher les questions en litige comme si elles lui étaient soumises pour la première foisCela donne à croire qu'il est tout aussi loisible au propriétaire inscrit de produire en appel les éléments de preuve qu'il pouvait fournir au registraireSelon une jurisprudence constante, l'art. 56(5) ne devrait pas être interprété strictement contre le propriétaire inscrit dans le cadre des appels relatifs à la procédure visée à l'art. 45La Cour ne devrait pas modifier la conclusion portant que les différences entre la marque employée et la marque déposée ne sont pas si importantes qu'elles induisent en erreur les consommateurs non avertis.

Il s'agit d'un appel de la décision du juge de première instance infirmant la décision du registraire des marques de commerce de radier l'enregistrement de la marque de commerce "Swirl Design" déposée par Austin Nichols en 1986. Austin Nichols n'ayant produit aucun élément de preuve en réponse à l'avis du registraire lui enjoignant de fournir une preuve de l'emploi de la marque de commerce au Canada, le registraire a décidé que l'enregistrement serait radié. En appel, Austin Nichols a produit un affidavit. L'appel a été accueilli. Aux termes du paragraphe 56(5) de la Loi sur les marques de commerce , il peut être apporté devant la Cour fédérale une preuve en plus de celle qui a été fournie devant le registraire, et le tribunal peut exercer toute discrétion dont le registraire est investi. L'appelante a fait valoir que le paragraphe 56(5) empêchait le propriétaire inscrit de produire en appel quelque élément de preuve que ce soit s'il n'en avait pas déjà déposé devant le registraire.

Les questions en litige étaient les suivantes: (1) Austin Nichols pouvait-il produire une preuve par affidavit en appel? (2) Dans l'affirmative, la preuve présentée suffisait-elle à prouver l'emploi de la marque déposée?

Arrêt: l'appel doit être rejeté.

(1) Les mots "en plus de" n'impliquent pas nécessairement qu'il doive y avoir production préalable d'éléments de preuve auxquels d'autres éléments puissent être ajoutés. Le processus d'appel établi par l'article 56 s'applique à tous les appels interjetés par quelque partie que ce soit à l'égard de toute instance devant le registraire. Le libellé de l'article 56 n'autorise pas une interprétation dont l'effet pratique serait de priver qui que ce soit d'un droit d'appel utile dans le cadre d'une affaire déterminée. Comme l'omission de produire des éléments de preuve constitue en soi un motif de radiation par le registraire dans une instance aux termes de l'article 45, refuser au propriétaire inscrit le droit de produire des éléments de preuve en appel équivaut à toutes fins pratiques à lui refuser toute chance de succès en appel. Retenir l'interprétation littérale proposée par l'appelante permettrait aussi au propriétaire inscrit qui produit des éléments de preuve peu importants ou non pertinents devant le registraire d'"ajouter" des éléments de preuve en appel. Le législateur ne peut avoir eu l'intention de punir ceux qui ne tiennent pas compte de l'avis du registraire tout en encourageant la production d'éléments de preuve peu importants ou non pertinents devant le registraire.

Le paragraphe 56(4) confère à la Cour le pouvoir de donner un avis public de l'audition de l'appel et des "matières en litige dans cet appel". Cela amène à présumer que la préoccupation première du législateur était de protéger l'intégrité du registre des marques de commerce. Le rôle de la Cour ne se borne pas à se prononcer sur les prétentions des parties; il consiste aussi à s'assurer que le registre demeure un document public fiable.

En donnant à la Cour toute discrétion "dont le registraire est investi", le législateur reconnaît que la Cour qui siège en appel devrait être en mesure de trancher les questions en litige comme si elles lui étaient soumises pour la première fois. Cela donne à croire qu'il est tout aussi loisible au propriétaire inscrit de produire en appel les éléments de preuve qu'il pouvait fournir au registraire.

Les mots employés au paragraphe 56(5) peuvent raisonnablement être interprétés comme signifiant qu'en appel devant la Section de première instance, le propriétaire inscrit a une deuxième chance d'empêcher la radiation ou la modification de sa marque de commerce. Il est de jurisprudence constante que le paragraphe 56(5) ne devrait pas être interprété strictement contre le propriétaire inscrit dans le cadre des appels relatifs à la procédure visée à l'article 45. Une cour d'appel ne devrait pas modifier sans motifs sérieux un courant jurisprudentiel aussi bien établi dans un domaine aussi pratique que celui qui est en cause en l'espèce.

(2) Le critère auquel il faut satisfaire sous le régime de l'article 45 n'étant pas sévère, le juge de première instance pouvait à première vue conclure qu'Austin Nichols avait employé la marque de commerce qu'elle avait enregistrée. Le juge de première instance n'a pas été convaincu que les différences entre les caractéristiques dominantes de la marque employée et celles de la marque déposée étaient de nature à induire en erreur les consommateurs non avertis, et la Cour d'appel n'était pas disposée à modifier cette conclusion.

lois et règlements

Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13, art. 45(1) (mod. par L.C. 1994, ch. 47, art. 200), (3) (mod., idem), (4), 56.

jurisprudence

décisions appliquées:

Re Wolfville Holland Bakery Ltd. (1964), 42 C.P.R. 88 (C. de l'É.); Plough (Canada) Ltd. c. Aerosol Fillers Inc., [1981] 1 C.F. 679; (1980), 53 C.P.R. (2d) 62; 34 N.R. 39 (C.A.); Lewis Thomson & Sons Ltd. c. Rogers, Bereskin & Parr (1988), 21 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.); Nissei Plastics Industrial Co. c. Pascal & Associates (1994), 58 C.P.R. (3d) 395 (C.F. 1re inst.).

décisions examinées:

Meredith & Finlayson c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1991), 40 C.P.R. (3d) 409; 138 N.R. 379 (C.A.F.); Broderick & Bascom Rope Co. v. Registraire des marques de commerce (1970), 62 C.P.R. 268 (C. de l'É.); Boutiques Progolf Inc. c. Marks & Clerk (1993), 54 C.P.R. (3d) 451; 164 N.R. 264 (C.A.F.).

décisions citées:

Cornerstone Securities Canada Inc. c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1994), 58 C.P.R. (3d) 417 (C.F. 1re inst.); Lander Co. Canada Ltd. c. Alex E. Macrae & Co. (1993), 46 C.P.R. (3d) 417; 62 F.T.R. 71 (C.F. 1re inst.); Quarry Corp. c. Bacardi & Co. (1996), 72 C.P.R. (3d) 25; 124 F.T.R. 264 (C.F. 1re inst.); Roebuck et al. c. Registraire des marques de commerce et al. (1987), 13 C.I.P.R. 75; 15 C.P.R. (3d) 113 (C.F. 1re inst.); Gesco Industries Inc. c. Sim & McBurney (1997), 76 C.P.R. (3d) 289 (C.F. 1re inst.); Choice Hotels International Inc. c. Hotels Confortel Inc. (1996), 67 C.P.R. (3d) 340; 112 F.T.R. 39 (C.F. 1re inst.); Assurance-Vie Desjardins c. North American Life Assurance Co. (1995), 63 C.P.R. (3d) 225; 99 F.T.R. 254 (C.F. 1re inst.); SkyDome Corp. c. Toronto Heart Industries Ltd. (1997), 72 C.P.R. (3d) 546; 128 F.T.R. 71 (C.F. 1re inst.); Automaxi S.A. c. U.A.P. Inc. (1993), 47 C.P.R. (3d) 158; 61 F.T.R. 45 (C.F. 1re inst.); conf. par (1994), 59 C.P.R. (3d) 82; 178 N.R. 53 (C.A.F.); Primax Computer Corp. c. Primax Electronic (U.S.A.) Inc. (1995), 62 C.P.R. (3d) 75; 98 F.T.R. 63 (C.F. 1re inst.); Mantha & Associés/Associates c. Central Transport, Inc. (1995), 64 C.P.R. (3d) 354 (C.A.F.).

APPEL de la décision du juge de première instance infirmant la décision du registraire des marques de commerce de radier l'enregistrement de la marque de commerce "Swirl Design" déposée par Austin Nichols (Austin Nichols & Co. c. Cinnabon, Inc. (1997), 76 C.P.R. (3d) 45; 135 F.T.R. 303 (C.F. 1re inst.)). Appel rejeté.

ont comparu:

A. David Morrow pour l'appelante.

Stéphane Létourneau pour l'intimée.

avocats inscrits au dossier:

Smart & Biggar, Ottawa, pour l'appelante.

Martineau, Walker, Montréal, pour l'intimée.

Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par

Le juge Décary, J.C.A.: Il s'agit d'un appel de la décision datée du 5 septembre 19971 par laquelle le juge Rouleau a infirmé la décision du registraire des marques de commerce (registraire) de radier l'enregistrement de la marque de commerce nE TMA 321,610 en vertu du paragraphe 45(4) de la Loi sur les marques de commerce , L.R.C. (1985), ch. T-13, modifiée (la Loi).

La marque de commerce en cause "Swirl Design" a été déposée en 1986 par l'intimée, Austin Nichols & Co., Incorporated (Austin Nichols). En mai 1996, l'appelante, Cinnabon, Inc. (Cinnabon), a demandé que le registraire donne à Austin Nichols un avis fondé sur le paragraphe 45(1) [mod. par L.C. 1994, ch. 47, art. 200] de la Loi, lui enjoignant de fournir une preuve de l'emploi de la marque de commerce au Canada. Le registraire a donné cet avis. Austin Nichols n'a produit aucun élément de preuve en réponse à cet avis. Le 18 octobre 1996, le registraire a avisé Austin Nichols que l'enregistrement serait radié du registre parce qu'elle n'avait pas produit de preuve d'emploi. Le 22 octobre 1996, Austin Nichols a demandé une prorogation rétroactive du délai relatif au dépôt d'éléments de preuve établissant qu'elle avait employé la marque de commerce. Le registraire a refusé cette demande au motif qu'il était alors dessaisi de l'affaire puisque la décision de radier la marque de commerce avait déjà été rendue.

Austin Nichols a ensuite déposé un avis d'appel devant la Section de première instance en vertu de l'article 56 de la Loi. Au soutien de cet appel, elle a produit un affidavit accompagné de pièces.

Cinnabon s'est opposée à l'appel au motif qu'Austin Nichols ne pouvait produire d'affidavit en appel parce qu'elle n'avait fourni aucun élément de preuve devant le registraire. Selon l'avocat de Cinnabon, le libellé du paragraphe 56(5) de la Loi empêche un propriétaire inscrit de produire en appel quelque élément de preuve que ce soit s'il n'en a pas déjà déposé devant le registraire. Il a ajouté que, de toute façon, les éléments de preuve présentés ne suffisent pas à prouver l'emploi de la marque déposée en cause au sens de la Loi. Le juge Rouleau a rejeté ces deux prétentions et accueilli l'appel.

Ces deux mêmes questions nous sont maintenant soumises. Pour commencer, il est utile de reproduire les articles 45 et 56 de la Loi sur les marques de commerce:

45. (1) Le registraire peut, et doit sur demande écrite présentée après trois années à compter de la date de l'enregistrement d'une marque de commerce, par une personne qui verse les droits prescrits, à moins qu'il ne voie une raison valable à l'effet contraire, donner au propriétaire inscrit un avis lui enjoignant de fournir, dans les trois mois, un affidavit ou une déclaration solennelle indiquant, à l'égard de chacune des marchandises ou de chacun des services que spécifie l'enregistrement, si la marque de commerce a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois ans précédant la date de l'avis et, dans la négative, la date où elle a été ainsi employée en dernier lieu et la raison de son défaut d'emploi depuis cette date.

(2) Le registraire ne peut recevoir aucune preuve autre que cet affidavit ou cette déclaration solennelle, mais il peut entendre des représentations faites par le propriétaire inscrit de la marque de commerce ou pour celui-ci ou par la personne à la demande de qui l'avis a été donné ou pour celle-ci.

(3) Lorsqu'il apparaît au registraire, en raison de la preuve qui lui est fournie ou du défaut de fournir une telle preuve, que la marque de commerce, soit à l'égard de la totalité des marchandises ou services spécifiés dans l'enregistrement, soit à l'égard de l'une de ces marchandises ou de l'un de ces services, n'a été employée au Canada à aucun moment au cours des trois ans précédant la date de l'avis et que le défaut d'emploi n'a pas été attribuable à des circonstances spéciales qui le justifient, l'enregistrement de cette marque de commerce est susceptible de radiation ou de modification en conséquence.

. . .

56. (1) Appel de toute décision rendue par le registraire, sous le régime de la présente loi, peut être interjeté à la Cour fédérale dans les deux mois qui suivent la date où le registraire a expédié l'avis de la décision ou dans tel délai supplémentaire accordé par le tribunal, soit avant, soit après l'expiration des deux mois.

(2) L'appel est interjeté au moyen d'un avis d'appel produit au bureau du registraire et à la Cour fédérale.

(3) L'appelant envoie, dans le délai établi ou accordé par le paragraphe (1), par courrier recommandé, une copie de l'avis au propriétaire inscrit de toute marque de commerce que le registraire a mentionnée dans la décision sur laquelle porte la plainte et à toute autre personne qui avait droit à un avis de cette décision.

(4) Le tribunal peut ordonner qu'un avis public de l'audition de l'appel et des matières en litige dans cet appel soit donné de la manière qu'il juge opportune.

(5) Lors de l'appel, il peut être apporté une preuve en plus de celle qui a été fournie devant le registraire, et le tribunal peut exercer toute discrétion dont le registraire est investi.

Première question: Le dépôt d'éléments de preuve en appel devant la Section de première instance

À première vue, l'interprétation littérale des mots "en plus de" ("in addition to") du paragraphe 56(5) de la Loi que propose l'avocat de l'appelante est très séduisante, compte tenu du régime particulier établi à l'article 45. Cette disposition impose au propriétaire inscrit l'obligation de "fournir" au registraire "un affidavit ou une déclaration solennelle" (paragraphe 45(1)). Le registraire ne peut recevoir "aucune preuve autre que cet affidavit ou cette déclaration solennelle" de la part du propriétaire inscrit (paragraphe 45(2)) et il peut, en raison du simple défaut du propriétaire inscrit de fournir une telle preuve, radier ou modifier la marque de commerce (paragraphe 45(3)). Dans ces circonstances, il pourrait être logique d'empêcher un propriétaire inscrit qui a omis de soumettre une telle preuve au registraire de se servir du processus d'appel pour se soustraire à l'obligation que lui impose initialement le paragraphe 45(1). Autrement, un propriétaire inscrit pourrait tout simplement ignorer l'avis du registraire et attendre le début du processus d'appel avant de produire sa preuve.

Cette interprétation ne résiste toutefois pas à un examen plus approfondi.

Les mots eux-mêmes ("en plus de", "in addition to") ne sont pas aussi clairs que l'appelante le dit. Ils n'impliquent pas nécessairement qu'il faille y avoir production préalable d'éléments de preuve auxquels d'autres éléments puissent être ajoutés. En fait, un plus zéro égale un; il s'agissait d'une addition même si, techniquement, il n'y avait rien à quoi ajouter. J'hésiterais à donner au mot "plus" un sens qui contredit les règles d'arithmétique élémentaires.

En outre"et ceci est peut-être plus important"l'interprétation proposée des mots "en plus de" ne résiste pas à un examen du contexte dans lequel ces mots sont utilisés, soit celui de l'article 56, qui vise le processus d'appel, non plus qu'à un examen du contexte auquel ils sont applicables, soit celui de la procédure visée à l'article 45.

L'article 56 est une disposition d'application générale. Le processus d'appel qu'il établit n'est aucunement restreint; il s'applique à tous les appels interjetés par quelque partie que ce soit à l'égard de toute instance devant le registraire. Il ne vise pas uniquement les décisions rendues en vertu de l'article 45, non plus qu'il n'est réservé aux propriétaires inscrits qui ont déposé certains éléments de preuve dans le cadre d'une instance devant le registraire. Le sens des mots employés est suffisamment large pour englober toute particularité liée au type d'instance en cause qui est en appel.

Le libellé de l'article 56 n'autorise pas une interprétation dont l'effet pratique serait de priver qui que ce soit d'un droit d'appel utile dans le cadre d'une affaire déterminée. Comme l'omission de produire des éléments de preuve constitue en soi un motif de radiation par le registraire dans une instance aux termes de l'article 45, refuser au propriétaire inscrit le droit de produire des éléments de preuve en appel équivaut à toutes fins pratiques à lui refuser toute chance de succès en appel. Retenir l'interprétation littérale proposée par l'appelante permettrait aussi au propriétaire inscrit qui produit des éléments de preuve peu importants ou non pertinents devant le registraire d'"ajouter" des éléments de preuve en appel. Le législateur ne peut avoir eu l'intention de punir ceux qui ne tiennent pas compte de l'avis du registraire tout en encourageant la production d'éléments de preuve peu importants ou non pertinents devant le registraire.

Pour interpréter le paragraphe 56(5), il faut se rappeler que le processus d'appel vise manifestement autant le public en général que les parties. Le paragraphe 56(4) est une disposition inhabituelle qui confère à la Cour le pouvoir de donner un avis public de l'audition de l'appel et "des matières en litige dans cet appel". Une telle disposition ne peut faire autrement que d'amener à présumer que la préoccupation première du législateur était de protéger l'intégrité du registre des marques de commerce. Le rôle de la Cour ne se borne pas à se prononcer sur les prétentions des parties; il consiste aussi à s'assurer que le registre demeure un document public fiable.

Les derniers mots du paragraphe 56(5) font clairement ressortir que la Cour siège en appel d'une décision du registraire. En donnant à la Cour toute la discrétion "dont le registraire est investi", le législateur reconnaît que la Cour qui siège en appel devrait être en mesure de trancher les questions en litige comme si elles lui étaient soumises pour la première fois. Selon moi, l'interprétation de ce paragraphe donne à croire qu'il est tout aussi loisible au propriétaire inscrit de produire en appel les éléments de preuve qu'il pouvait fournir au registraire.

Je passe maintenant au but et à la portée de la procédure prévue à l'article 45. Dans Meredith & Finlayson c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1991), 40 C.P.R. (3d) 409 (C.A.F.), aux pages 412 et 413, le juge Hugessen les décrit comme suit:

L'article 45 prévoit une méthode simple et rapide de radier du registre les marques tombées en désuétude. Il n'est pas censé prévoir un moyen supplémentaire de contester une marque de commerce, autre que la procédure litigieuse courante visée par l'art. 57. Le fait que l'auteur d'une demande fondée sur l'art. 45 ne soit même pas tenu d'avoir un intérêt dans l'affaire (en l'espèce, la société intimée est un cabinet d'avocats) en dit long sur la nature publique des intérêts que l'article vise à protéger.

Le paragraphe 45(2) est clair: le registraire peut seulement recevoir une preuve présentée par le propriétaire inscrit ou pour celui-ci. Cette disposition ne vise manifestement pas la tenue d'une instruction qui porterait sur une question de faits contestée mais, plus simplement, à donner au propriétaire inscrit l'occasion d'établir, s'il le peut, que sa marque est employée, ou bien d'établir les raisons pour lesquelles elle ne l'est pas, le cas échéant.

Le fait d'interjeter appel à la Cour, en application de l'art. 56, n'a pas pour effet d'élargir la portée de l'enquête ni, par voie de conséquence, celle de la preuve qui s'y rapporte. Le passage suivant du juge en chef Thurlow mérite d'être reproduit textuellement. S'exprimant au nom de cette Cour, dans l'arrêt Plough (Canada) Ltd. c. Aerosol Fillers Inc. (1980), 53 C.P.R. (2d) 62, à la p. 69, [1981] 1 C.F. 679, 34 N.R. 39, le juge cite, en les approuvant, les commentaires du président Jackett dans l'affaire Broderick & Bascom Rope Co. c. Le registraire des marques de commerce (1970), 62 C.P.R. 268:

À mon avis, toute preuve produite par la partie à la demande de qui a été donné l'avis prévu au paragraphe 44(1) (le paragraphe 45(1) actuel), est irrecevable aussi bien sur l'appel interjeté contre la décision du registraire que devant ce dernier. Sur ce point, je fais miens les propos tenus par le président Jackett dans l'affaire Broderick & Bascom Rope Co. c. Le registraire des marques de commerce (précitée) à la page 279:

"La requérante se fonde sur le dictum stipulant que la Cour peut être "convaincue que la marque de commerce est employée". Pour moi, ces mots, dans leur contexte, se rapportent uniquement à la Cour, convaincue de la même façon qu'a pu l'être le registraire au début de l'instance, c'est-à-dire, par la preuve apportée par le propriétaire inscrit. Le savant Président n'avait pas à traiter de la question de savoir si des tierces parties pouvaient s'introduire à l'instance et y soumettre une preuve, et rien, dans ce qu'il a dit, ne laisse supposer qu'il ait abordé cette éventualité."

"La requérante invoque aussi le paragraphe 5 de l'article 55 (le paragraphe 56(5) actuel) qui prévoit que, "lors de l'appel, il peut être apporté une preuve en plus de celle qui a été fournie devant le registraire". Ceci ne peut pas cependant aller jusqu'à autoriser une preuve sur les questions qui ne sont pas soumises à la Cour lors de l'appel. Lorsque, par conséquent, l'unique question consiste à savoir si la preuve du propriétaire inscrit fait "apparaître" à la Cour qu'il y a un usager, toute autre preuve sur ce sujet ne présente évidemment plus d'intérêt."

L'article 45 a aussi été examiné dans d'autres affaires dignes de mention. La procédure a été décrite par le président Jackett dans Broderick & Bascom Rope Co. v. Registrar of Trade Marks (1970), 62 C.P.R. 268 (C. de l'É.), aux pages 276 et 277 comme [traduction] "une procédure simple pour débarrasser le registre des inscriptions de marques de commerce qui ne sont pas revendiquées bona fide par leurs propriétaires comme des marques de commerce en usage", et par le juge Desjardins dans Boutiques Progolf Inc. c. Marks & Clerk (1993), 54 C.P.R. (3d) 451 (C.A.F.), à la page 457 comme "une procédure sommaire qui a essentiellement pour objet de débarrasser le registre des inscriptions de marques de commerce qui sont tombées en désuétude et qui constituent, en quelque sorte, du bois mort".

À mon avis, cet objectif de débarrasser le registre du bois mort est incompatible avec l'interprétation du processus d'appel proposée qui empêcherait un propriétaire inscrit de tenter de prouver à la Cour qu'il emploie véritablement sa marque de commerce.

Enfin, je ne suis pas disposé à statuer que le paragraphe 56(5) devrait être interprété comme une clause pénale déguisée visant à punir le propriétaire inscrit qui ignore la demande présentée par le registraire en vertu de l'article 45. Au contraire, les mots employés au paragraphe 56(5) peuvent raisonnablement être interprétés comme signifiant qu'en appel devant la Section de première instance, le propriétaire inscrit a une deuxième chance d'empêcher la radiation ou la modification de sa marque de commerce. La jurisprudence étaye fermement cette conclusion.

Même si la question de la "preuve en plus" ne semble pas avoir été déjà abordée en soi par la Cour de l'Échiquier ou la Cour d'appel fédérale, elle a, à mon avis, été tranchée implicitement par le président Thorson dans Re Wolfville Holland Bakery Ltd. (1964), 42 C.P.R. 88 (C. de l'É.). Les faits de cette affaire et ceux de la présente espèce sont remarquablement similaires. Un propriétaire inscrit avait omis de produire des éléments de preuve devant le registraire. Ce dernier avait radié l'enregistrement du registre parce que le propriétaire inscrit avait omis de produire des éléments de preuve. Le propriétaire inscrit avait ensuite demandé au registraire une prorogation du délai en vue de déposer un affidavit. Le registraire avait refusé cette prorogation au motif qu'il était dessaisi de l'affaire. Le propriétaire inscrit a interjeté appel de la décision par laquelle le registraire avait radié l'enregistrement et de celle par laquelle ce dernier avait refusé d'accorder une prorogation du délai. Il a ensuite déposé un affidavit devant la Cour de l'Échiquier à l'appui de son appel.

Le président Thorson a rejeté l'appel en ce qui concerne le refus de proroger le délai, mais il l'a accueilli pour ce qui est de la radiation sur la foi de la preuve par affidavit qui lui était soumise. Voici ce qu'il dit aux pages 91 et 92:

[traduction] À mon avis, le registraire avait raison de rejeter la demande de prorogation. Il aurait pu l'accueillir, même si le délai de trois mois prévu dans les avis avait été expiré, et s'il n'avait pas déjà rendu sa décision. Toutefois, sa décision étant rendue, il n'avait plus le pouvoir d'accueillir la requête. Il ne restait alors à l'appelante qu'un seul recours: interjeter appel devant cette Cour.

Même si le registraire a décidé le 17 novembre 1961 de radier l'enregistrement des marques de commerce en cause, la Loi exige qu'il attende le jugement définitif rendu en appel de sa décision et qu'il agisse en conséquence.

Il ne fait aucun doute que l'objet de l'article 44 de la Loi est de fournir un processus permettant de supprimer du registre certaines marques de commerce de manière qu'on puisse, en quelque sorte, éliminer le "bois mort" que constituent les marques qui ne sont plus employées. Par contre, la Loi prévoit également des mesures afin de protéger le propriétaire inscrit d'une marque contre les tentatives injustifiées visant à faire radier celle-ci.

Toute personne qui verse les droits prescrits peut demander l'envoi d'un avis en vertu de l'article 44 de la Loi et le registraire doit, à moins qu'il ne voie une raison valable à l'effet contraire, donner suite à cette demande.

Mais la Loi protège les droits du propriétaire inscrit de la marque de commerce. Ce dernier dispose de deux recours. Il peut se conformer à l'exigence du registraire en fournissant un affidavit ou une déclaration solennelle prouvant que la marque en cause est toujours employée. Si cette marque est employée, il ne s'agit pas de "bois mort" et il n'est pas nécessaire de s'en débarrasser.

Si le registraire a décidé de radier l'enregistrement, le propriétaire inscrit dispose aussi de la protection que lui offre l'appel devant la Cour. Dans un tel cas, la Cour peut, si elle est convaincue que la marque de commerce est employée, autoriser l'appel de la décision du registraire, auquel cas il ne donnera pas suite à sa décision de radier la marque et l'enregistrement demeurera au registre.

Il est particulièrement intéressant de souligner que le président Thorson a dit que dans des cas semblables, [traduction] "il ne restait alors à l'appelante qu'un seul recours" et que l'appel à la Cour était censé [traduction ] "protéger le propriétaire inscrit d'une marque contre les tentatives injustifiées visant à faire radier celle-ci". En l'espèce, le juge Rouleau se fonde précisément sur ces derniers mots.

Dans Plough (Canada) Ltd. c. Aerosol Fillers Inc., [1981] 1 C.F. 679 (C.A.), à la page 682, la présente Cour cite en l'approuvant la décision Wolfville Holland Bakery Ltd. comme un des arrêts qui renferment "un exposé clair et pertinent de l'état du droit" à l'égard du but et de la portée de l'article 45 (alors l'article 44 [S.C.R. 1970, ch. T-10]). Je souligne en passant que dans Plough , le juge en chef Thurlow, à la page 686, dit que "[la Loi] exige que soient précisés certains faits; il appartient ensuite au registraire et, le cas échéant, à la Cour , de décider si ces précisions sont révélatrices d'un emploi de la marque" (non souligné dans l'original). À la page 688, le juge en chef Thurlow cite le président Jackett, qui dit dans Broderick , précité, au paragraphe 15, à la page 279, que la Cour doit être [traduction] "convaincue de la même façon qu'a pu l'être le registraire au début de l'instance, c'est-à-dire par la preuve apportée par le propriétaire inscrit". Plus loin, à la page 689, le juge en chef mentionne le long délai dont bénéficie un propriétaire inscrit pour déposer des éléments de preuve: "un délai de trois mois en première instance devant le registraire et, par la suite, [le] délai plus que suffisant que donnent les Règles de la Cour pour déposer tous les éléments de preuve qu'[il] désire".

Au cours des dernières années, les juges de la Section de première instance ont systématiquement permis au propriétaire inscrit de produire des éléments de preuve dans le cadre des appels interjetés en vertu de l'article 45, même s'il n'avait pas produit d'élément de preuve devant le registraire. Cette question n'a été abordée directement que deux fois par le juge Strayer (tel était alors son titre) dans Lewis Thomson & Sons Ltd. c. Rogers, Bereskin & Parr (1988), 21 C.P.R. (3d) 483 (C.F. 1re inst.), et par le juge Gibson dans Nissei Plastics Industrial Co. c. Pascal & Associates (1994), 58 C.P.R. (3d) 395 (C.F. 1re inst.) et, dans les deux cas, le propriétaire inscrit a eu gain de cause.

Dans Lewis Thomson, précité, paragraphe 22, à la page 485, le juge Strayer a conclu ce qui suit:

Quoi qu'il en soit, je constate qu'un appel a été interjeté. Il me semble, en vertu du paragraphe 56(5) de la Loi sur les marques de commerce, que la Cour est tenue d'entendre l'appel et de recevoir des preuves supplémentaires, si l'appelante désire en présenter. La Loi sur les marques de commerce ne contient aucune condition limitant l'admission de la preuve par la Cour. C'est dire que la Loi n'oblige pas la Cour à recevoir uniquement les preuves qui n'étaient pas disponibles au moment de la procédure devant le registraire, celles qui n'étaient pas raisonnablement accessibles à l'appelante ni connues à ce moment-là. Aucun de ces critères ne s'applique, et il semble que l'appelante ait le loisir d'apporter de nouveaux éléments de preuve. À mon avis, il convient de tenir compte du fait que cette preuve n'a pas été produite devant le registraire mais seulement en ce qui concerne l'adjudication des dépens.

Dans Nissei Plastics, précité, paragraphe 22, aux pages 401 et 402, le juge Gibson aurait retenu une interprétation littérale semblable à celle que propose l'appelante, n'eut été du fait que "l'objectif de l'art. 45 et, par conséquent, des appels connexes fondés [sur] l'art. 56" dicte "que l'art. 56(5) ne doit pas être interprété strictement contre le [propriétaire inscrit]".

Dans toutes les autres affaires, la même conclusion a été tirée sans débat ou presque (voir Cornerstone Securities Canada Inc. c. Canada (Registraire des marques de commerce) (1994), 58 C.P.R. (3d) 417 (C.F. 1re inst.), le juge Wetston; Lander Co. Canada Ltd. c. Alex E. Macrae & Co. (1993), 46 C.P.R. (3d) 417 (C.F. 1re inst.), le juge Rouleau; Quarry Corp. c. Bacardi & Co. (1996), 72 C.P.R. (3d) 25 (C.F. 1re inst.), le juge Lutfy (en appel, nE du greffe A-11-97); Roebuck et al. c. Registraire des marques de commerce et al. (1987), 15 C.P.R. (3d) 113 (C.F. 1re inst.), le juge Martin, et Gesco Industries Inc. c. Sim & McBurney (1997), 76 C.P.R. (3d) 289 (C.F. 1re inst.), le juge Wetston (en appel, nE du greffe A-866-97)).

Il est donc de jurisprudence constante que le paragraphe 56(5) ne devrait pas être interprété strictement contre le propriétaire inscrit dans le cadre des appels relatifs à la procédure visée à l'article 45. Une cour d'appel ne devrait pas modifier sans motifs sérieux un courant jurisprudentiel aussi bien établi dans un domaine aussi pratique que celui qui est en cause en l'espèce.

Je souligne qu'un courant jurisprudentiel similaire régit aussi l'interprétation du paragraphe 56(5) dans le contexte de la procédure d'opposition (voir Choice Hotels International Inc. c. Hotels Confortel Inc. (1996), 67 C.P.R. (3d) 340 (C.F. 1re inst.), le juge Rouleau, (en appel, nE du greffe A-284-96); Assurance-Vie Desjardins c. North American Life Assurance Co. (1995), 63 C.P.R. (3d) 225 (C.F. 1re inst.), le juge Dubé; SkyDome Corp. c. Toronto Heart Industries Ltd. (1997), 72 C.P.R. (3d) 546 (C.F. 1re inst.), le juge Lutfy; Automaxi S.A. c. U.A.P. Inc. (1993), 47 C.P.R. (3d) 158 (C.F. 1re inst.), le juge Teitelbaum; confirmé par (1994), 59 C.P.R. (3d) 82 (C.A.F.)). La seule exception semble être la décision rendue par le juge Denault dans Primax Computer Corp. c. Primax Electronic (U.S.A.) Inc. (1995), 62 C.P.R. (3d) 75 (C.F. 1re inst.).

Deuxième question: La preuve d'emploi

Le juge Rouleau a conclu que l'affidavit déposé devant lui [à la page 47] "indique clairement que la marque a été utilisée de façon active au Canada au cours de la période pertinente" et il était convaincu "que si l'affidavit . . . avait été porté à l'attention du registraire, la marque de commerce . . . n'aurait pas été radiée".

Vu le but et la portée de l'article 45 que j'ai examinés plus tôt, il n'est pas étonnant que le critère auquel doit satisfaire le propriétaire inscrit en vertu de cet article ne soit pas sévère (voir, par exemple, Mantha & Associés/Associates c. Central Transport, Inc. (1995), 64 C.P.R. (3d) 354 (C.A.F.)).

En l'espèce, le juge Rouleau pouvait à première vue conclure qu'Austin Nichols avait employé la marque de commerce qu'elle avait enregistrée. La marque soumise en preuve est indubitablement une variante de la marque déposée. L'appelante prétend que les différences entre les caractéristiques dominantes de la marque employée et celles de la marque déposée sont si importantes qu'elles induisent en erreur les consommateurs non avertis. Manifestement, le juge de première instance n'a pas été convaincu que ces différences étaient aussi importantes que l'appelante le prétendait et, dans le contexte d'une instance en vertu de l'article 45, nous ne sommes pas disposés à modifier cette conclusion. En l'espèce, il ne nous appartient pas de décider si cette preuve permet de satisfaire aux critères prévus pour d'autres types d'instances engagées en vertu de la Loi.

En terminant, un mot sur les dépens. Austin Nichols a demandé les dépens [traduction] "en appel et en première instance". Elle n'avait pas demandé les dépens devant la Section de première instance, et le juge Rouleau n'a rendu aucune ordonnance à l'égard des dépens. À l'évidence, même si Austin Nichols avait interjeté un appel incident devant la présente Cour relativement aux dépens, je ne l'aurais pas accueilli. À mon avis, Austin Nichols peut se compter chanceuse que les dépens n'aient pas été adjugés contre elle en Section de première instance, car on pourrait très bien prétendre que les dépens en Section de première instance devraient normalement être adjugés contre le propriétaire inscrit en tout état de cause, lorsque ce dernier a omis de déposer des éléments de preuve devant le registraire. C'est en fait la solution qu'a retenue le Juge Strayer dans Lewis Thomson , précité, au paragraphe 22.

Il convient donc de rejeter l'appel et d'adjuger les dépens de l'appel en faveur d'Austin Nichols.

Desjardins, J.C.A.: J'y souscris.

Noël, J.C.A.: J'y souscris.

1 Publiée dans (1997), 76 C.P.R. (3d) 45 (C.F. 1re inst.) sous l'intitulé Austin Nichols & Co. c. Cinnabon, Inc. Yoo-Hoo of Florida Corp. a remplacé Austin Nichols & Co., Incorporated avant l'audition de l'appel. J'ai employé la dénomination Austin Nichols partout dans les présents motifs pour en faciliter la lecture.

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