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IMM-3950-00

2002 CFPI 266

Zhu Xian Chen (demanderesse)

c.

Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (défendeur)

Répertorié: Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1re inst.)

Section de première instance, juge Hansen--Vancouver, 9 août 2001; Ottawa, 8 mars 2002.

Citoyenneté et Immigration -- Exclusion et renvoi -- Renvoi de réfugiés -- L'agent de révision des revendications refusées (l'ARRR) n'est pas tenu de communiquer l'évaluation du risque au demandeur avant de rendre sa décision -- L'ARRR en l'espèce n'est pas tenu de communiquer avant de rendre sa décision les documents accessibles au public qui décrivent la situation générale du pays et dont le demandeur est présumé avoir eu connaissance.

La demanderesse est arrivée en Colombie-Britannique par navire au cours de l'été 1999 après avoir fui la République populaire de Chine (la RPC). Sa revendication du statut de réfugié a été rejetée en mars 2000. La demanderesse a ensuite sollicité l'admission dans la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada (la CDNRSRC). Elle prétend que sa vie risque d'être en danger et qu'elle risque de subir des traitements inhumains ou des sanctions extrêmes si elle est renvoyée en RPC pour trois motifs: elle est sortie illégalement de ce pays, sa famille et elle pratiquent le christianisme et elle a plus d'un enfant. Se fondant sur un rapport du département d'État américain et sur un rapport qu'a établi le Dr Charles Burton après avoir effectué une visite du site (le rapport Burton), l'ARRR a conclu que la demanderesse ne courrait aucun danger du fait qu'elle est catholique ou qu'elle a quitté illégalement la RPC. Enfin, pour ce qui est de la violation de la politique d'un enfant par couple, l'ARRR s'est fondée sur le rapport Burton ainsi que sur le fait que la demanderesse avait déjà dû se soumettre à une ligature des trompes et avait déjà payé des amendes vu ses deux enfants [traduction] «de trop» pour conclure qu'on pouvait la renvoyer en RPC sans inquiétude.

Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision de l'ARRR. Les questions litigieuses sont de savoir si l'ARRR a contrevenu à l'obligation d'équité en ne communiquant pas, avant de rendre sa décision, ni son analyse du risque ni les documents sur lesquels elle s'est fondée dans son analyse du risque, privant ainsi la demanderesse de la possibilité de répondre aux documents en question.

Jugement: la demande est rejetée.

L'ARRR n'a pas contrevenu à l'obligation d'équité en ne communiquant pas son analyse du risque à la demanderesse avant de rendre sa décision. La Section de première instance a rendu des jugements contradictoires sur l'obligation de l'ARRR dans les circonstances. Dans Soto c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), la Cour a conclu que, compte tenu de l'arrêt de la Section d'appel dans Haghighi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), l'ARRR était tenu de donner au demandeur la possibilité de faire des commentaires sur l'évaluation du risque et de corriger toute erreur possible avant la décision finale. La Cour dans Mia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) a fait une distinction d'avec l'arrêt Haghighi et a conclu que l'obligation d'équité n'exigeait pas de l'ARRR qu'il communique l'évaluation du risque. La conclusion dans l'arrêt Haghighi selon laquelle l'évaluation du risque aurait dû être communiquée se limite aux faits sur lesquels elle reposait. La communication s'imposait parce que les fonctionnaires de l'immigration sont susceptibles de donner un «poids déterminant» aux avis de l'ARRR vu l'expertise relative de ce dernier dans l'évaluation du risque. Vu que l'«analyse du risque» de l'ARRR contient les motifs de la décision faisant l'objet de la demande de contrôle, accepter l'argument de la demanderesse à cet égard reviendrait, comme l'a affirmé la Cour dans Mia, à exiger des décideurs administratifs qu'ils communiquent des projets de décision aux demandeurs avant de rendre leurs décisions.

L'ARRR n'a pas non plus contrevenu à l'obligation d'équité en ne communiquant pas à la demanderesse avant de rendre sa décision les documents sur lesquels elle s'est fondée dans son analyse du risque, privant ainsi la demanderesse de la possibilité de répondre aux documents en question. La demanderesse soutient que la jurisprudence récente a étendu l'obligation d'équité de manière à exiger la communication de tous les documents portant sur la situation générale du pays sur lesquels l'ARRR a l'intention de se fonder avant de rendre sa décision, nonobstant le moment où ces documents deviennent accessibles au public. La demanderesse conteste essentiellement la fiabilité des conclusions du rapport Burton. Le défendeur affirme que tous les documents sur lesquels s'est fondée l'ARRR ont ou bien été présentés par la demanderesse ou bien étaient accessibles au public au moment où elle a déposé ses observations.

Dans l'arrêt Mancia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), la Cour d'appel fédérale a décidé que l'obligation d'équité n'exigeait pas que l'ARRR communique au demandeur, avant de rendre sa décision, les documents relatifs à la situation générale du pays sur lesquels il s'est fondé et qui étaient accessibles au public au moment où le demandeur a fait ses observations. Mais, l'obligation d'équité exigerait que l'ARRR communique au demandeur les documents sur lesquels il s'est fondé et qui sont devenus accessibles au public après le dépôt des observations du demandeur à condition qu'ils soient inédits et importants et qu'ils fassent état de changements survenus dans la situation du pays qui risquent d'avoir une incidence sur sa décision. En l'espèce, tous les documents, dont le rapport Burton, étaient accessibles au public lorsque la demanderesse a déposé ses observations.

L'arrêt de la Cour d'appel fédérale dans Chu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), qui préconisait une plus grande communication, portait sur le processus d'avis de danger plutôt que sur le processus applicable à la CDNRSR. En outre, l'arrêt Chu n'a pas écarté l'arrêt Mancia. Il reflétait plutôt l'opinion du juge Rothstein que l'analyse avait changé: le critère applicable ne consiste plus à savoir si les éléments de preuve en cause constituent une preuve extrinsèque, mais plutôt à savoir s'il doit y avoir communication pour que la personne ait une possibilité significative de participer au processus. Le fondement des règles établies dans Mancia, soit que l'équité exige que les documents, les rapports et les avis dont la demanderesse n'a pas connaissance ou n'est pas présumée avoir connaissance soient communiqués, demeure. Il résiste aux arrêts de la Cour d'appel fédérale dans Haghighi et Bhagwandass c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration). Même dans la jurisprudence récente, qui applique le cadre postérieur à l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) de la Cour suprême du Canada pour définir l'obligation d'équité, la préoccupation dominante relativement à la communication consiste à savoir si la personne a connaissance ou est présumée avoir connaissance du document, de l'avis ou du rapport.

Même si la demanderesse a formulé son argumentation en des termes relatifs à la communication, ses plaintes portant sur la fiabilité des documents et sur les contradictions entre eux ont trait au degré d'importance que l'ARRR a accordé à ces documents. Le document qui, selon la demanderesse, aurait dû lui être communiqué est un document dont elle est présumée avoir eu connaissance. Dans ces circonstances, la Cour ne peut pas conclure qu'on a privé la demanderesse d'une possibilité équitable de présenter l'ensemble de sa preuve.

Les principes d'équité énoncés dans les arrêts Baker, Haghighi et Bhagwandass ne vont pas jusqu'à exiger la communication dans les circonstances de la présente affaire. L'ARRR n'était pas tenue de communiquer avant de rendre sa décision les documents accessibles au public qui décrivent la situation générale du pays et dont la demanderesse est présumée avoir eu connaissance.

Les deux questions traitées en l'espèce sont certifiées en tant que questions de portée générale.

lois et règlements

Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172, art. 2(1) «demandeur non reconnu du statut de réfugié au Canada» (édicté par DORS/93-44, art. 1; 97-182, art.1).

jurisprudence

décisions appliquées:

Mia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CFPI 1150; [2001] A.C.F. no 1584 (1re inst.) (QL); Mancia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] 3 C.F. 461; (1998), 161 D.L.R. (4th) 488; 45 Imm. L.R. (2d) 131; 226 N.R. 134 (C.A.); Nadarajah c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 112 F.T.R. 296; 33 Imm. L.R. (2d) 234 (C.F. 1re inst.); Khanam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CFPI 1090; [2001] A.C.F. n1497 (1re inst.) (QL).

décision non suivie:

Soto c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CFPI 818; [2001] A.C.F. no 1207 (1re inst.) (QL).

distinction faite d'avec:

Haghighi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] 4 C.F. 407; (2000), 189 D.L.R. (4th) 268; 24 Admin. L.R. (3d) 36; 257 N.R. 139 (C.A.); Chu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2001), 270 N.R. 149 (C.A.F.); Bhagwandass c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] 3 C.F. 3; (2001), 199 D.L.R. (4th) 519; 13 Imm. L.R. (3d) 96; 268 N.R. 337 (C.A.).

décisions citées:

Shah c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1994), 29 Imm. L.R. (2d) 82; 170 N.R. 238 (C.A.F.); Nadarajah c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 237 N.R. 15 (C.A.F.); Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817; (1999), 174 D.L.R. (4th) 193; 14 Admin. L.R. (3d) 173; 1 Imm. L.R. (3d) 1; 243 N.R. 22.

doctrine

Burton, Charles. Heaven is High and the Emperor Far Away: Report from the Fuzhou Metropolitan Counties of Lianjiang, Mawei, Fuqing, and Changle. March 2000.

U.S. Department of State. Country Reports on Human Rights Practices for 1999. Washington: U.S. Government Printing Office, 2000.

DEMANDE de contrôle judiciaire d'une décision d'un agent de révision des revendications refusées selon laquelle la demanderesse ne faisait pas partie de la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada. Demande rejetée.

ont comparu:

Adrian D. Huzel pour la demanderesse.

Mark J. Sheardown pour le défendeur.

avocats inscrits au dossier:

Larson Boulton Sohn Stockholder, Vancouver, pour la demanderesse.

Le sous-procureur général du Canada pour le défendeur.

Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance rendus par

[1]Le juge Hansen: La demanderesse, Zhu Xian Chen, sollicite le contrôle judiciaire de la décision que l'agente de révision des revendications refusées Neeta Sandhu (l'ARRR) a rendue le 5 juillet 2000. Celle-ci a conclu que la demanderesse ne faisait pas partie de la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada (la CDNRSRC).

[2]On peut résumer brièvement les faits pertinents. La demanderesse a fui la République populaire de Chine (la RPC) par navire le 29 juillet 1999. Elle était l'une des personnes qui sont arrivées sur les côtes de la Colombie-Britannique en provenance de la province de Fujian en Chine lors de l'été 1999. La revendication du statut de réfugié au sens de la Convention de la demanderesse a été rejetée le 23 mars 2000. La demanderesse a ensuite sollicité l'admission dans la CDNRSRC.

[3]Dans ses observations, la demanderesse déclare que sa vie risque d'être en danger et qu'elle risque de subir des traitements inhumains ou des sanctions extrêmes si elle est renvoyée en RPC car elle est sortie illégalement de ce pays. Elle souligne que des sanctions sont prévues en RPC pour les personnes qui sortent du pays illégalement, notamment l'incarcération pendant des périodes prolongées dans des conditions déplorables, des raclées et des amendes. Ses observations insistent sur l'argument que, même si on n'a pas appliqué de façon stricte ces sanctions dans le passé, elles le seront dans son cas puisque le gouvernement chinois a été humilié au niveau international en raison de l'incident des [traduction] «réfugiés de la mer». Elle déclare qu'étant donné que ce sera le gouvernement central de la Chine qui la punira à son retour, il n'existe aucune possibilité de refuge intérieur. Elle soutient courir des risques additionnels en raison du fait qu'elle et sa famille pratiquent le christianisme et qu'elle a plus d'un enfant.

[4]L'ARRR a conclu que la demanderesse ne faisait pas partie de la CDNRSRC au sens du paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172 [édicté par DORS/93-44, art. 1; 97-182, art. 1], parce que la vie de la demanderesse ne serait pas gravement en danger et que celle-ci ne ferait pas l'objet de sanctions extrêmes ni de traitements inhumains si elle était renvoyée en Chine. Dans sa décision, l'agente déclare qu'elle s'est fondée sur les sources suivantes:

Les observations relatives à la CDNRSRC et la preuve documentaire qu'ont présentées les avocats;

1) Le formulaire de renseignements personnels;

2) La décision et les motifs de la SSR;

3) Heaven is High and the Emperor Far Away: Report from the Fuzhou Metropolitan Counties of Lianjiang, Mawei, Fuqing, and Changle, par le Dr Charles Burton--visite du site du 25 au 30 janvier 2000;

4) Secrétariat d'État américain, Country Reports on Human Rights Practices for 1999: China, 25 février 2000;

5) Direction des recherches de la CISR, Réponse à la demande de renseignement #CHN32869.EX22, 22 septembre 1999.

[5]Dans ses motifs écrits de rejet de la demande, l'ARRR a considéré que la preuve indiquait que la demanderesse ne courrait aucun danger du fait qu'elle est catholique. L'agente cite abondamment le Country Reports on Human Rights for 1999: Chine (Secrétariat d'État américain) (le Country Reports 1999) de même qu'un rapport plus récent intitulé Heaven is High and the Emperor Far Away: Report from the Fuzhou Metropolitan Counties of Lianjiang, Mawei, Fuqing, and Changle, par le Dr Charles Burton (le rapport Burton).

[6]Relativement à la question de la sortie illégale de la Chine de la demanderesse, l'ARRR a conclu qu'il n'y avait pas suffisamment d'éléments de preuve persuasifs indiquant qu'elle ferait face à des sanctions à son retour. L'ARRR s'est fondée beaucoup sur le rapport Burton pour tirer cette conclusion. Elle a également souligné que, malgré la prétention de la demanderesse selon laquelle la couverture médiatique importante ayant entouré l'arrivée des «réfugiés de la mer» sur les côtes canadiennes avait constitué une grande humiliation pour le gouvernement chinois, les politiques et les sanctions [traduction] «officielles» n'étaient généralement pas appliquées.

[7]Et finalement, quant à l'argument de la demanderesse selon lequel elle fait face aux risques liés à sa violation de la politique chinoise d'un enfant par couple, l'ARRR s'est fondée sur le rapport Burton ainsi que sur le fait que la demanderesse avait déjà dû se soumettre à une ligature des trompes et avait déjà payé des amendes vu ses deux enfants [traduction] «de trop» pour conclure qu'on pouvait la renvoyer en Chine sans inquiétude.

[8]L'ARRR a tiré la conclusion suivante:

Je souligne que la documentation relative à la Chine indique que la situation en matière de droits de la personne n'est pas très favorable, mais cela ne suffit pas en soi pour que je conclue que la demanderesse est en danger. Il doit y avoir un lien entre le cas de la personne et cette situation. Il n'y a pas suffisamment de renseignements indiquant l'existence d'un lien entre sa situation personnelle et la situation prévalant en Chine pour qu'on puisse conclure qu'elle serait expressément ciblée ou ferait face à un risque objectivement identifiable si elle retournait dans ce pays.

DÉCISION:

Compte tenu de la preuve dont je suis saisie, je ne vois aucune possibilité raisonnable que la demanderesse soit en danger si elle est renvoyée en Chine. La demanderesse n'est pas membre de la CDNRSRC.

LES QUESTIONS EN LITIGE

[9]La demanderesse soulève les questions suivantes:

1) L'ARRR a-t-elle contrevenu à l'obligation d'équité en ne communiquant pas son analyse du risque à la demanderesse avant de rendre sa décision?

2) L'ARRR a-t-elle contrevenu à l'obligation d'équité en ne communiquant pas à la demanderesse les documents sur lesquels elle s'est fondée dans son analyse du risque, privant ainsi la demanderesse de la possibilité de répondre aux documents en question avant de rendre sa décision?

3) L'ARRR a-t-elle entravé son pouvoir discrétionnaire en se fiant sur l'évaluation par la SSR de la crédibilité de la demanderesse plutôt que de déterminer elle-même cette crédibilité de façon indépendante?

La troisième question n'ayant pas été plaidée, je traite uniquement des deux premières questions soulevées.

ANALYSE

Question no 1

L'ARRR a-t-elle contrevenu à l'obligation d'équité en ne communiquant pas son analyse du risque à la demanderesse avant de rendre sa décision?

[10]La demanderesse invoque l'arrêt récent de la Cour d'appel fédérale Haghighi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] 4 C.F. 407, à l'appui de l'argument que l'ARRR avait l'obligation de lui communiquer son rapport d'analyse du risque et de lui fournir la possibilité de répondre aux conclusions de ce rapport avant de rendre sa décision.

[11]Le juge Lemieux a conclu que l'obligation d'équité exigeait la communication dans ces cas. Dans Soto c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CFPI 818; [2001] A.C.F. no 1207 (1re inst.) (QL), il a conclu que l'ARRR était tenu de donner au demandeur la possibilité de faire des commentaires sur l'évaluation du risque et de corriger toute erreur possible avant la décision finale. Il a déclaré ceci au paragraphe 19:

À mon avis, Haghighi, précité, a une pertinence directe à cet égard. Dans cette affaire, la Cour d'appel fédérale a confirmé le jugement du juge Gibson selon lequel, en raison de la décision de la Cour suprême du Canada dans Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, l'obligation d'équité implique désormais que le rapport d'évaluation du risque d'un ARRR soit divulgué afin que le demandeur ait la possibilité de corriger des erreurs ou de relever des omissions, et ce même si le rapport ou l'évaluation du risque se fonde sur de la documentation fournie par le demandeur, avec sa demande de reconnaissance à titre de DNRSRC, ou sur d'autres renseignements du domaine public qui lui sont raisonnablement accessibles.

[12]Par la suite, le juge McKeown a fait face à la même question dans Mia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CFPI 1150; [2001] A.C.F. no 1584 (1re inst.) (QL). Il était toutefois d'avis que l'obligation d'équité n'exigeait pas de l'ARRR qu'il communique l'évaluation du risque. Il s'est exprimé ainsi, au paragraphe 11, en ce qui a trait à la conclusion tirée dans Soto, précité:

En toute déférence, je ne crois pas que les principes d'équité obligent un ARRR qui procède à une évaluation du risque pour savoir si le demandeur est membre de la catégorie DNRSRC à divulguer l'évaluation en question avant d'en arriver à sa décision. À mon sens, reconnaître l'existence de cette obligation équivaudrait pour ainsi dire à contraindre un décideur à communiquer les motifs de sa décision à des fins de commentaires avant de prendre sa décision finale. Dans la présente affaire, la personne qui a examiné les éléments de preuve a pris la décision. Aucune autre personne n'a participé au processus. Il ne s'agit pas d'un cas où le décideur reçoit des renseignements de personnes autres que le demandeur. De plus, je souligne que l'arrêt Haghighi portait sur une demande fondée sur des motifs d'ordre humanitaire. Par conséquent, aucune erreur susceptible de révision n'a été commise à ce sujet.

[13]Avec égards, je suis d'accord avec le juge McKeown. Dans l'arrêt Haghighi, la Cour d'appel fédérale a examiné la décision d'une agente d'immigration sur une demande fondée sur des considérations d'ordre humanitaire (CH). Dans l'évaluation de la demande, l'agente d'immigration s'est fondée sur un avis d'évaluation du risque préparé à sa demande par un ARRR. La décision dont on demandait le contrôle dans Haghighi n'était pas l'évaluation du risque. La question était de savoir si le rapport préparé par le tiers, l'ARRR, aurait dû être communiqué au demandeur pour commentaires avant que l'agente d'immigration ne rende une décision finale sur la demande CH. La Cour a conclu que l'obligation d'équité exigeait que le demandeur ait une possibilité équitable de présenter l'ensemble de sa preuve. Le ministre avait contrevenu à cette obligation puisque le demandeur n'avait pas eu la possibilité de répondre au rapport de l'ARRR avant la décision finale sur la demande CH.

[14]Par conséquent, bien qu'il ait été conclu dans Haghighi que l'évaluation du risque de l'ARRR aurait dû être communiquée au demandeur même si cette évaluation ne contenait aucun fait et aucune allégation de fait dont le demandeur n'avait pas connaissance (puisqu'il bénéficiait de leur accessibilité au public), cette conclusion doit être limitée aux faits sur lesquels elle reposait. La Cour était d'avis que la communication s'imposait parce que les fonctionnaires de l'immigration sont susceptibles de donner un «poids déterminant» aux avis de l'ARRR vu l'expertise relative de ce dernier dans l'évaluation du risque.

[15]Autrement, selon le juge Evans, J.C.A., dans Haghighi, précité, au paragraphe 36, «l'influence sur le décideur des arguments [que le demandeur a] présentés à l'appui [de sa] demande sera vraisemblablement grandement diminuée par le rapport [de l'ARRR]».

[16]À la lumière des faits dont je suis saisie, l'«analyse du risque» de l'ARRR contient les motifs de la décision faisant l'objet de la demande de contrôle. Je partage la préoccupation du juge McKeown selon laquelle accepter l'argument de la demanderesse à cet égard reviendrait à exiger des décideurs administratifs qu'ils communiquent des projets de décision aux demandeurs avant de rendre leurs décisions.

[17]Pour ces motifs, je conclus que l'ARRR n'a pas contrevenu à l'obligation d'équité lorsqu'elle a omis de communiquer l'évaluation du risque au demandeur avant de rendre sa décision.

Question no 2

L'ARRR a-t-elle contrevenu à l'obligation d'équité en ne communiquant pas à la demanderesse les documents sur lesquels elle s'est fondée dans son analyse du risque, privant ainsi la demanderesse de la possibilité de répondre aux documents en question avant de rendre sa décision?

[18]La demanderesse soutient que la jurisprudence récente a étendu l'obligation d'équité de manière à exiger la communication de tous les documents portant sur la situation générale du pays sur lesquels l'ARRR a l'intention de se fonder avant de rendre sa décision, nonobstant le moment où ces documents deviennent accessibles au public.

[19]La demanderesse se plaint qu'en l'espèce, l'ARRR a accordé une importance indue au rapport Burton. Le conseiller politique Charles Burton a préparé ce rapport à partir d'une mission d'enquête de quatre jours dans la province de Fujian à la fin de janvier 2000. Lors de cette visite, le Dr Burton a rencontré des fonctionnaires de Fuzhou et a interrogé plusieurs [traduction] «immigrants illégaux qui avaient été renvoyés de l'étranger».

[20]La demanderesse conteste la fiabilité des conclusions du rapport. Elle soutient qu'elle avait le droit de recevoir un avis indiquant que l'ARRR avait l'intention de se fonder sur le rapport Burton et que l'obligation d'équité exigeait qu'elle ait la possibilité de relever les faiblesses de ce rapport avant que l'ARRR ne parvienne à sa décision.

[21]Le défendeur affirme que tous les documents sur lesquels s'est fondée l'ARRR ont été présentés par la demanderesse ou étaient accessibles au public au moment où elle a déposé ses observations. En conséquence, l'obligation d'équité ne prescrivait pas la communication des documents avant la prise de la décision. Le défendeur a raison quant à l'affirmation de fait. Bien qu'il y ait eu une certaine confusion au sujet de la date exacte à laquelle le rapport Burton a été rendu accessible au public, ce rapport l'a clairement été après le rejet de la revendication du statut de réfugié de la demanderesse et avant que celle-ci ne dépose sa demande d'admission dans la CDNRSRC et ses observations à l'appui.

[22]L'arrêt de la Cour d'appel fédéraleMancia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] 3 C.F. 461, a établi un cadre de traitement de cette question. Quant aux documents relatifs à la situation générale du pays sur lesquels s'est fondé l'ARRR et qui étaient accessibles au public au moment où la demanderesse a fait ses observations, l'obligation d'équité n'oblige pas l'ARRR à lui communiquer ces documents avant de rendre sa décision. Il incombe à la demanderesse de rassembler la preuve documentaire et de dissiper tout doute dans les observations qu'il dépose avec la demande.

[23]En ce qui concerne les documents sur lesquels s'est fondé l'ARRR et qui sont devenus accessibles au public après le dépôt des observations du demandeur, la Cour, dans Mancia [au paragraphe 27], a énoncé deux critères qui, si respectés, rendraient la communication obligatoire. L'obligation d'équité exigerait la communication des documents à la demanderesse «à condition qu'ils soient inédits et importants et qu'ils fassent état de changements survenus dans la situation du pays qui risquent d'avoir une incidence sur sa décision».

[24]Par conséquent, si j'appliquais le cadre élaboré dans l'arrêt Mancia aux faits de la présente affaire, l'obligation d'équité ne forcerait pas l'ARRR à communiquer à la demanderesse les documents sur lesquels elle voulait se fonder pour rendre sa décision. Tous les documents, dont le rapport Burton, étaient accessibles au public lorsque la demanderesse a déposé ses observations.

[25]La demanderesse soutient cependant que, dans l'arrêt Chu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2001), 270 N.R. 149, la Cour d'appel fédérale a écarté la décision qu'elle avait rendu antérieurement dans Nadarajah c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 237 N.R. 15. La Cour d'appel fédérale ayant appliqué l'arrêt Mancia dans l'arrêt Nadarajah, la demanderesse prétend que, par suite logique, l'arrêt Mancia est aussi écarté. La demanderesse invoque l'énoncé suivant que le juge Rothstein de la Cour d'appel fédérale a fait dans l'arrêt Chu, précité, au paragraphe 10:

La question certifiée en l'espèce consiste, tel que mentionné précédemment, à savoir s'il existait une obligation de communiquer à l'appelant des documents contenant des renseignements sur le pays qui n'avaient pas été identifiés expressément ni fournis à l'appelant. La réponse relative au Rapport sur l'avis du ministre s'applique également aux autres documents que les fonctionnaires du ministère ont remis au représentant du ministre. Tout document présenté au représentant du ministre par les fonctionnaires du ministère en leur qualité de partie opposée à l'appelant doivent, règle générale, être communiqués à l'appelant, ou à tout le moins identifiés expressément s'ils sont accessibles à tous. Sur ce point, la jurisprudence antérieure, telles les décisions Chu (T.T.) c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1998), 225 N.R. 378 (C.A.F.), autorisation de pourvoi à la Cour suprême du Canada refusée (1998), 236 N.R. 387, et Nadarajah c. Canada (MCI) (1996), 33 Imm. L.R. (2d) 234 (C.F. 1re inst.), ont été écartées par les arrêts Baker et Bhagwandass.

[26]Le juge McKeown a récemment eu l'occasion d'examiner l'effet de l'arrêt Chu dans Khanam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CFPI 1090; [2001] A.C.F. no 1497 (1re inst.) (QL). La décision visée par la demande de contrôle dont était saisi le juge McKeown avait été rendue par un ARRR qui s'était fondé sur un document relatif à la situation générale du pays qui était antérieur aux observations de la partie demanderesse. Le juge McKeown a examiné l'arrêt Chu et a fait une distinction d'avec l'affaire dont il était saisi. Il a souligné que l'arrêt Chu portait sur l'obligation d'équité dans le cadre du processus d'avis de danger. Il a ensuite mis en opposition le processus applicable à la CDNRSRC au processus d'avis de danger, soulignant la nature contradictoire de ce dernier et le fait qu'il n'existe pas de lis inter partes dans le processus applicable à la CDNRSRC. De même, contrairement à ce que prévoit le processus d'avis de danger, où les fonctionnaires du ministère soumettent des rapports au décideur, l'ARRR n'obtient aucun rapport de tiers dont les intérêts sont opposés à ceux du demandeur. Il a fait remarquer qu'en ce qui concerne la CDNRSRC, les demandeurs sont informés dès le départ des documents sur lesquels on se fondera dans le processus décisionnel. Il a également souligné la différence de contexte fondamentale existant entre la CDNRSRC et l'avis de danger, soit qu'une décision en matière de CDNRSRC ne facilite pas nécessairement le renvoi du demandeur. En conséquence, ayant distingué le processus d'avis de danger du processus applicable à la CDNRSRC, le juge McKeown a conclu qu'en ce qui a trait à l'obligation d'équité de l'ARRR, la démarche formulée dans l'arrêt Mancia s'applique toujours.

[27]Il ressort toutefois des motifs prononcés dans Khanam qu'un argument plus particulier invoqué par la demanderesse en l'espèce n'a pas été avancé dans cette affaire. La demanderesse soutient que l'affirmation du juge Rothstein dans l'arrêt Chu, selon laquelle l'arrêt Nadarajah a été écarté par les arrêts Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, et Bhagwandass c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] 3 C.F. 3 (C.A.), signifie que les arrêts antérieurs de la Cour d'appel fédérale, dont l'arrêt Mancia, ont été écartés.

[28]Je n'accepte pas cet argument. Premièrement, comme le défendeur l'a prétendu, l'arrêt Chu est limité de par les faits en cause au processus d'avis de danger. Deuxièmement, le juge Rothstein a fait référence à la décision que la Section de première instance de la Cour fédérale a rendue dans Nadarajah, et non pas à l'arrêt ultérieur de la Cour d'appel fédérale dans la même affaire. Dans les motifs prononcés par la Section de première instance dans Nadarajah c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 112 F.T.R. 296, la Cour a exposé ainsi la question [au paragraphe 1]:

La question soulevée dans la demande de contrôle judiciaire est de savoir si les renseignements relatifs aux conditions prévalant dans un pays qui ne figurent pas dans les dossiers d'immigration des requérants, mais qui sont pris en considération dans une évaluation du risque concernant la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada, constituent une preuve extrinsèque obligeant l'agent des revendications refusées à informer les requérants qu'il sera tenu compte de tels renseignements et à leur donner la possibilité de répondre.

[29]L'accent était mis sur la question de savoir si les renseignements relatifs aux conditions prévalant dans le pays constituent une preuve extrinsèque. La Cour a conclu que, compte tenu de l'obligation d'équité minimale dont il faut faire preuve conformément à la décision Shah c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1994), 29 Imm. L.R. (2d) 82 (C.A.F.), à moins que ces renseignements ne soient pas publics et qu'ils soient importants quant à la décision, l'omission par l'ARRR de communiquer les documents avant de rendre sa décision n'équivalait pas à une violation des règles d'équité procédurale.

[30]Dans Bhagwandass, une affaire d'avis de danger, le juge Sharlow a appliqué le raisonnement suivi par la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Haghighi, déclarant au paragraphe 22 que:

L'arrêt Haghighi établit également que lorsqu'on cherche à déterminer si l'obligation d'équité exige la communication à l'avance d'un rapport interne du Ministère sur lequel le décideur s'appuiera pour rendre une décision discrétionnaire, la question ne consiste pas à savoir si le rapport constitue ou contient la preuve de faits inconnus de la personne touchée par la décision, mais bien à savoir si la communication du rapport est requise pour que cette personne ait une possibilité raisonnable de participer d'une manière significative au processus de prise de décision.

[31]C'est pour ces motifs qu'on ne peut pas, à mon avis, interpréter les observations faites par le juge Rothstein dans l'arrêt Chu comme ayant écarté l'arrêt Mancia, et que ces observations reflétaient plutôt l'opinion du juge que l'analyse avait changé. Le critère applicable ne consiste plus à savoir si les éléments de preuve en cause constituent une preuve extrinsèque, mais plutôt à savoir s'il doit y avoir communication pour que la personne ait une possibilité significative de participer au processus.

[32]La demanderesse avance toutefois que l'arrêt Mancia n'est plus valable en droit car il est antérieur à l'arrêt de la Cour suprême du Canada Baker, qui a étendu l'obligation d'équité. Elle prétend essentiellement que l'obligation d'équité rend maintenant nécessaire la communication à la demanderesse des documents relatifs à la situation générale du pays sur lesquels la décision concernant la CDNRSRC sera fondée.

[33]Je tire le principe général suivant de l'arrêt Mancia. La preuve extrinsèque doit être communiquée à la demanderesse. L'équité ne requiert toutefois pas la communication d'éléments de preuve non extrinsèques, comme les rapports sur la situation générale du pays, à moins que ces éléments n'aient été rendus accessibles après que la demanderesse eut déposé ses observations et à moins qu'ils respectent les autres critères formulés dans cet arrêt.

[34]D'après moi, ces deux «règles» reposent sur le même fondement. L'équité exige que les documents, les rapports et les avis dont la demanderesse n'a pas connaissance ou n'est pas présumée avoir connaissance soient communiqués.

[35]À mon avis, le fondement de la règle établie dans Mancia résiste aux arrêts Haghighi et Bhagwandass. Énoncé de façon générale, le principe qui sous-tend ces arrêts veut que l'obligation d'équité oblige la communication d'un document, d'un rapport ou d'un avis si cette communication est nécessaire pour fournir à la personne une possibilité significative et équitable de présenter l'ensemble de sa preuve au décideur.

[36]Par conséquent, même si la distinction entre la preuve extrinsèque et la preuve non extrinsèque n'est clairement plus déterminante quant à la question de savoir si l'obligation d'équité exige la communication, le fondement de la règle de l'arrêt Mancia demeure. J'en arrive à cette conclusion parce que même dans les arrêts récents, qui appliquent le cadre postérieur à l'arrêt Baker pour définir l'obligation d'équité, la préoccupation dominante relativement à la communication consiste à savoir si la personne a connaissance ou est présumée avoir connaissance du document, de l'avis ou du rapport.

[37]Par exemple, la Cour d'appel fédérale a conclu dans Haghighi que l'agente se prononçant sur une demande CH était tenue de révéler qu'un avis de danger avait été obtenu de la part d'un ARRR parce que le demandeur ne savait pas qu'elle avait sollicité un avis d'un autre agent et qu'il n'avait pas eu la possibilité de répondre. Dans l'arrêt Bhagwandass, le juge Sharlow a adopté les termes de l'arrêt Haghighi pour souligner que la réponse à la question de savoir s'il doit y avoir communication doit reposer sur l'objectif visant à garantir que la personne touchée par la décision ait «une possibilité raisonnable de participer d'une manière significative au processus de prise de décision».

[38]En l'espèce, la demanderesse a-t-elle eu la possibilité équitable de présenter l'ensemble de sa preuve à l'ARRR? La demanderesse prétend avoir été privée de cette possibilité. Essentiellement, la demanderesse désire contester la fiabilité des conclusions du rapport Burton. Elle avance que le rapport n'est pas compatible avec les autres éléments de preuve documentaire dont disposait l'ARRR et que cette dernière n'aurait pas dû lui accorder autant d'importance dans sa décision.

[39]Il s'ensuit donc que même si la demanderesse a formulé son argumentation en des termes relatifs à la communication, ses plaintes portant sur la fiabilité des documents et sur les contradictions entre eux ont trait au degré d'importance que l'ARRR a accordé à ces documents, et non pas à leur communication.

[40]Par exemple, les observations écrites de la demanderesse énoncent ce qui suit:

[traduction] La fiabilité des sources des renseignements du docteur Burton est fort douteuse de même que les autres moyens par lesquels il tire les conclusions dans son rapport. Nous soutenons donc que le rapport lui-même n'est pas fiable et que l'ARRR n'aurait pas dû lui accorder autant d'importance dans la décision.

[41]La demanderesse s'est vu offrir la possibilité de faire part de ses préoccupations concernant le rapport Burton au moyen des observations qu'elle a présentées à l'ARRR. Le rapport était accessible par l'entremise des centres de documentation publics de la CISR et du site Web de cette dernière. La «Demande d'admission à la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada» informe les demandeurs que:

Pour ce qui est de l'information concernant la situation actuelle dans le pays de renvoi, l'agent peut se référer aux documents les plus récents que l'on trouve dans les centres de documentation de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, ainsi qu'aux renseignements provenant d'autres sources publiques.

[42]Le document qui, selon la demanderesse, aurait dû lui être communiqué est donc un document dont elle est présumée avoir eu connaissance. Si la demanderesse doutait de la fiabilité du rapport Burton, elle aurait pu présenter à l'ARRR des observations exposant ses préoccupations et indiquant que l'ARRR devrait accorder peu d'importance à ce document.

[43]Dans ces circonstances, je ne peux pas conclure qu'on a privé la demanderesse d'une possibilité équitable de présenter l'ensemble de sa preuve. La demanderesse a eu l'occasion de présenter des observations à l'appui de sa demande. Le document en question lui était raisonnablement accessible au moment où elle a présenté ses observations.

[44]Comme je l'ai dit précédemment, je n'accepte donc pas l'argument de la demanderesse selon lequel l'arrêt Chu écarte l'arrêt Mancia, mais j'accepte l'argument voulant que la démarche de communication formulée dans les arrêts antérieurs ait été modifiée par l'arrêt de la Cour suprême du Canada Baker et par les décisions ultérieures de la Cour fédérale. Je ne suis toutefois pas convaincue que les principes d'équité énoncés dans les arrêts Baker, Haghighi et Bhagwandass vont jusqu'à exiger la communication dans les circonstances de la présente affaire. En d'autres termes, l'ARRR n'était pas tenue de communiquer avant de rendre sa décision les documents accessibles au public qui décrivent la situation générale du pays et dont la demanderesse est présumée avoir eu connaissance.

[45]En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[46]Les questions suivantes avancées par l'avocat du défendeur sont certifiées en tant que questions de portée générale:

1.     L'agent de révision des revendications refusées qui évalue une demande sollicitant l'admission dans la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada en vertu du paragraphe 2(1) et de l'article 11.4 du Règlement sur l'immigration, DORS/78-172, est-il tenu de communiquer sa décision relative à l'évaluation du risque au demandeur et de fournir à celui-ci la possibilité de répondre à cette décision avant de rendre une décision finale sur la demande?

2.     L'agent de révision des revendications refusées qui évalue une demande sollicitant l'admission dans la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada en vertu du paragraphe 2(1) et de l'article 11.4 du Règlement sur l'immigration, DORS/78-172, est-il tenu de communiquer au demandeur les documents sur la situation du pays qui sont accessibles au public et de fournir au demandeur la possibilité de répondre à ces documents avant de rendre une décision finale sur la demande?

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