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     T-374-99

Alliance animale du Canada, Animal Protection Institute, Canadian Environmental Defence Fund, la Nation dénée, et Zoocheck Canada Inc. (demandeurs)

c.

Le procureur général du Canada et le ministre de l'Environnement (défendeurs)

Répertorié: Alliance animale du Canada c. Canada (Procureur général) (1re inst.)

Section de première instance, juge Gibson"Toronto, 14 avril; Ottawa, 13 mai 1999.

Environnement " Le Règlement modifiant le Règlement sur les oiseaux migrateurs est ultra vires dans la mesure où il entend autoriser la chasse aux oies de Ross et à d'autres espèces d'oiseaux difficiles à distinguer des oies des neiges pendant certaines périodes " Rien dans la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs ni dans la Convention sur les oiseaux migrateurs n'appuie les dispositions du Règlement modificateur ayant trait à cette autorisation.

Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire concernant l'adoption proposée par le gouverneur en conseil, sur recommandation du ministre de l'Environnement, du Règlement modifiant le Règlement sur les oiseaux migrateurs (le Règlement modificateur) créant une saison de chasse spéciale au cours de laquelle les chasseurs pouvaient prendre des espèces surabondantes d'oies des neiges, y compris les oies de Ross et d'autres espèces d'oiseaux difficiles à distinguer des oies des neiges. Le Règlement modificateur a été adopté pour réduire la croissance rapide de la population et ramener cette population à un niveau compatible avec la capacité porteuse des habitats de reproduction. Les demandeurs prétendent 1) que le Règlement modificateur est en contradiction avec la Convention concernant les oiseaux migrateurs de 1916 et qu'il est donc ultra vires de la loi d'application; 2) que le Règlement modificateur contrevient également à l'objet de la Convention; 3) qu'Environnement Canada essaie par ce règlement de réglementer l'environnement; 4) qu'il y a eu sous-délégation illégale et entrave à l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire; 5) que l'omission de suivre la politique d'Environnement Canada concernant la réglementation de la faune et la politique de réglementation fédérale du Conseil du Trésor contrevient à la loi et à la doctrine des attentes légitimes; 6) que le règlement se fonde sur des conclusions de faits erronés tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments disponibles; 7) qu'il n'y a aucun fondement légalement valide pour autoriser la chasse aux oies de Ross en dehors du temps prohibé; 8) que le Règlement porte atteinte aux droits des peuples autochtones.

Jugement: le Règlement modifiant le Règlement sur les oiseaux migrateurs est ultra vires dans la mesure seulement où il entend autoriser la chasse aux oies de Ross et à d'autres espèces difficiles à distinguer des oies des neiges, au cours des périodes et dans les régions énumérées au tableau 1.2 du Règlement.

La question que la Cour doit examiner dans cette demande est de savoir si le gouverneur en conseil, en adoptant le Règlement modificateur, n'a pas observé une condition préalable à l'exercice de son pouvoir ou s'il a outrepassé sa compétence. La Cour n'a ni le droit ni l'obligation d'enquêter sur les motifs qui ont incité le gouverneur en conseil à prendre le Règlement modificateur ou de les remettre en question.

La Convention concernant les oiseaux migrateurs, conclue en 1916 entre le Canada et les États-Unis d'Amérique avait pour but d'assurer la conservation de certains oiseaux migrateurs, y compris les oies des neiges et les oies de Ross, en restreignant la période de chasse de ces oiseaux. L'article VII de la Convention autorise la délivrance de "permis de tuer" des oies des neiges et des oies de Ross pendant le "temps prohibé" "dans des circonstances extraordinaires". L'objet avoué de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs , qui a remplacé l'ancienne loi d'application, est de mettre en Å“uvre la Convention par la protection des oiseaux migrateurs et de leurs nids. Le paragraphe 12(1) autorise donc le gouverneur en conseil à prendre des règlements pour fixer les périodes pendant lesquelles il est permis de tuer, de capturer ou de prendre des oiseaux migrateurs.

Bien que le Règlement modificateur ait été justifié en vertu de la Loi et de la Convention pour réduire la surabondance d'oies des neiges, qui constitue des "conditions extraordinaires" pouvant avoir de graves répercussions sur l'écosystème arctique, il n'y a rien dans le paragraphe 12(1) de la Loi et à l'article VII de la Convention pour appuyer les dispositions du Règlement modificateur ayant trait aux oies de Ross et à "d'autres espèces difficiles à distinguer des oies des neiges".

Les demandeurs ne se sont pas acquittés du fardeau qui leur incombait d'établir qu'il y a eu sous-délégation illégale et entrave à l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire en laissant au comité trilatéral, représentant le Mexique, les États-Unis d'Amérique et le Canada, le soin de désigner les espèces surabondantes.

L'omission de suivre la politique d'Environnement Canada concernant la réglementation de la faune et la politique de réglementation fédérale du Conseil du Trésor ne contrevient pas à la loi ni à la doctrine des attentes légitimes. Il n'y a pas eu d'omission de la part du ministre.

Sauf pour ce qui a été noté précédemment concernant les oies de Ross et autres espèces difficiles à distinguer des oies des neiges, il n'y a pas d'erreur susceptible de contrôle qui serait de la nature d'une conclusion de fait erronée tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments disponibles.

Bien qu'il ne fasse aucun doute que le Règlement modificateur ait des répercussions sur les intérêts ancestraux des Premières nations protégés par la Constitution et, peut-être aussi, sur les intérêts issus de traités, il y a eu des consultations et, d'après la preuve, la Cour n'a pu conclure que le Règlement modificateur constitue une atteinte prima facie aux droits des Autochtones.

    lois et règlements

        Convention concernant les oiseaux migrateurs, Art. I, II, VII, annexe de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, L.C. 1994, ch. 22.

        Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44].

        Loi de la Convention concernant les oiseaux migrateurs, S.C. 1917, ch. 18.

        Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, L.C. 1994, ch. 22, art. 4, 12.

        Règlement modifiant le Règlement sur les oiseaux migrateurs, DORS-99-147.

    jurisprudence

        décisions appliquées:

        Procureur général du Canada c. Inuit Tapirisat of Canada et autre, [1980] 2 R.C.S. 735; (1980), 115 D.L.R. (3d) 1; 33 N.R. 304; Angus c. Canada, [1990] 3 C.F. 410; (1990), 72 D.L.R. (4th) 672; 5 C.E.L.R. (N.S.) 157; 111 N.R. 321 (C.A.); Thorne's Hardware Ltd. et autres c. La Reine et autre, [1983] 1 R.C.S. 106; (1983), 143 D.L.R. (3d) 577; 46 N.R. 91; Re Doctors Hospital and Minister of Health et al. (1976), 12 O.R. (2d) 164; 68 D.L.R. (3d) 220; 1 C.P.C. 232 (C. div.); Travailleurs des pâtes, des papiers et du bois du Canada, Section locale 8 et al. c. Canada (Ministre de l'Agriculture) et al. (1994), 174 N.R. 37 (C.A.F.); Halfway River First Nation v. British Columbia (Minister of Forests), [1998] 4 W.W.R. 283; (1997), 39 B.C.L.R. (3d) 227; [1997] 4 C.N.L.R. 45 (C.S.); R. c. Sparrow, [1990] 1 R.C.S. 1075; (1990), 70 D.L.R. (4th) 324; [1996] 4 W.W.R. 410; 46 B.C.L.R. (2d) 1; 56 C.C.C. (3d) 263; [1990] 3 C.N.L.R. 160; 111 N.R. 241.

        décisions examinées:

        R. c. Badger, [1996] 1 R.C.S. 771; (1996), 133 D.L.R. (4th) 324; [1996] 4 W.W.R. 457; 181 A.R. 321; 37 Alta. L.R. (3d) 153; 105 C.C.C. (3d) 289; [1996] 2 C.N.L.R. 77; 195 N.R. 1; 116 W.A.C. 321; Société Makivik c. Canada (Ministre du Patrimoine canadien), [1999] 1 C.F. 38; (1998), 164 D.L.R. (4th) 463; [1998] 4 C.N.L.R. 68; 151 F.T.R. 69 (1re inst.).

        décisions citées:

        Schavernoch c. Commission des réclamations étrangères et autres, [1982] 1 R.C.S. 1092; (1982), 136 D.L.R. (3d) 447; 44 N.R. 166; Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689; (1993), 103 D.L.R. (4th) 1; 20 Imm. L.R. (2d) 85; 153 N.R. 321; National Corn Growers Assn. c. Canada (Tribunal des importations), [1990] 2 R.C.S. 1324; (1990), 74 D.L.R. (4th) 449; 45 Admin. L.R. 161; 114 N.R. 81; 3 T.C.T. 5303; 4 T.T.R. 267; Salomon v. Commissioners of Customs and Excise, [1967] 2 Q.B. 116 (C.A.); Vic Restaurant v. The City of Montreal, [1959] R.C.S. 58; (1959), 17 D.L.R. (2d) 81; Bates v. Lord Hailsham, [1972] 1 W.L.R. 1373 (Ch. D.); Nicholson c. Haldimand-Norfolk Regional Board of Commissioners of Police, [1979] 1 R.C.S. 311; (1978), 88 D.L.R. (3d) 671; 78 CLLC 14,181; 23 N.R. 410.

    doctrine

        Arctic Goose Habitat Working Group. Arctic Ecosystems in Peril: Report. Washington, D.C.: U.S. Fish and Wildlife Service, 1997.

        Arctic Goose Habitat Working Group. The Greater Snow Goose: Report. Washington, D.C.: U.S. Fish and Wildlife Service, 1998.

        Objectives and Guidelines for Establishment of National Regulations for Migratory Game Bird Hunting, revised September 1997, Appendix A to "Migratory Game Birds in Canada Proposals for 1999/2000 Hunting Regulations", December 31, 1998.

        133 Gazette du Canada, Partie I, p. 227 (30 janvier 1999).

        Sullivan, Ruth. Driedger on the Construction of Statutes, 3rd ed. Toronto: Butterworths, 1994.

DEMANDE de contrôle judiciaire contestant le Règlement modifiant le Règlement sur les oiseaux migrateurs. Le Règlement modificateur est ultra vires dans la mesure où il entend autoriser la chasse aux oies de Ross et à d'autres espèces difficiles à distinguer des oies des neiges, au cours des périodes et dans les zones désignées au tableau 1.2 du Règlement.

    ont comparu:

    David Estrin et Lesli Bisgould, pour les demandeurs.

    Peter A. Vita, c.r. et Cassandra Kirewskie pour les défendeurs.

    avocats inscrits au dossier:

    Gowling, Strathy & Henderson, Toronto, pour les demandeurs.

    Le sous-procureur général du Canada, pour les défendeurs.

Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance rendus par

Le juge Gibson:

1)  INTRODUCTION

Par le décret C.P. 1999-526 en date du 25 mars 19991, le gouverneur en conseil, sur recommandation du ministre de l'Environnement et en vertu de l'article 12 de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs2, a adopté le Règlement modifiant le Règlement sur les oiseaux migrateurs (le Règlement modificateur) [. . .] Une version préliminaire du Règlement modificateur, qui a été considérablement modifié avant son adoption, a été publiée dans la Gazette du Canada, Partie I le 30 janvier 19993. [. . .]

L'explication fournie par les défendeurs au sujet des circonstances qui ont mené à l'adoption du Règlement modificateur et de son contenu est résumée brièvement dans les trois premiers paragraphes du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation sous la rubrique "Description". Ces trois paragraphes sont reproduits ci-dessous pour en faciliter la consultation:

Description

Ces dernières années, les populations de Grandes Oies des neiges et de Petites Oies des neiges du milieu du continent ont augmenté radicalement. La croissance rapide des populations est attribuée à la disponibilité accrue de la nourriture pendant les mois d'hiver provenant des exploitations agricoles et à une diminution du taux de mortalité. En conséquence, ces oiseaux ne sont plus contrôlés par la capacité porteuse de l'habitat hivernal comme c'était le cas auparavant. L'analyse de leurs effets sur les aires de repos et de reproduction dans l'Arctique montre que les principaux habitats des oiseaux migrateurs et d'autres espèces sauvages sont touchés défavorablement par l'utilisation excessive. Si on n'intervient pas, les populations surabondantes d'Oies des neiges pourraient avoir de graves répercussions sur les oiseaux migrateurs eux-mêmes et compromettront sérieusement la diversité biologique de l'écosystème arctique.

Pour réduire la croissance rapide de la population et ramener cette population à un niveau compatible avec la capacité porteuse des habitats de reproduction, le taux de mortalité doit être multiplié par deux ou trois. Cette modification au Règlement sur les oiseaux migrateurs établit une saison spéciale au cours de laquelle les chasseurs peuvent prendre des espèces surabondantes pour des raisons de conservation. Cette initiative aidera à protéger et à restaurer la diversité biologique des écosystèmes des terres humides arctiques et les écosystèmes de migration importantes ainsi que les aires d'hivernage en réduisant la taille des populations d'Oies des neiges surabondantes. Pour ce faire, on prolongera les périodes de chasse (ex. au printemps ou au début de l'automne, en dehors des dates de la saison de chasse régulière). En 1999, cette chasse sera autorisée dans des secteurs locaux sélectionnés des provinces de Québec et du Manitoba. Il sera également permis aux chasseurs d'utiliser des techniques et de l'équipement de chasse spéciaux, y compris les appeaux électroniques, de chasser dans les cultures de diversion et d'utiliser des appâts artificiels ou naturels, dans les secteurs locaux déterminés en consultation avec le gouvernement provincial et les collectivités locales.

Enfin, cette modification proposée permettra une augmentation de la prise des Oies de Ross. Les Oies de Ross et les Oies des neiges fréquentent les mêmes aires et il n'est pas facile de les distinguer en chassant. La population des Oies de Ross peut supporter une prise accrue parce que la taille de la population augmente rapidement et est à un niveau élevé record.

L'un des aspects du Règlement modificateur qui n'est pas mentionné dans le passage précité est que celui-ci autorisait également la prise d'espèces d'oiseaux autres que les oies des neiges et les oies de Ross "difficiles à distinguer" de ces deux espèces.

2)  NATURE DE L'INSTANCE À L'ORIGINE DES PRÉSENTS MOTIFS

Dans une demande déposée le 4 mars 1999, les demandeurs recherchaient le contrôle judiciaire [traduction] "dans une affaire intéressant l'adoption proposée par le gouverneur en conseil sur recommandation du ministre de l'Environnement", du Règlement modificateur tel qu'il a paru dans la Gazette du Canada, Partie I du 30 janvier 1999.

La demande de contrôle judiciaire a été déposée avant l'adoption du Règlement modificateur. Elle faisait donc état de réparations se rapportant à une décision antérieure à l'adoption du Règlement modificateur. Comme la demande n'a pas été entendue avant l'adoption du Règlement modificateur, une bonne partie des réparations initialement demandées n'ont plus de raison d'être.

Au regard du mémoire des faits et du droit des demandeurs, la réparation demandée est réduite à ce qui suit:

[traduction] Les demandeurs demandent respectueusement une ordonnance déclarant que le document DORS/99-147 enregistré le 25 mars 1999, soit le Règlement modifiant le Règlement sur les oiseaux migrateurs, est ultra vires et illégal, qu'il contrevient à l'article 35 de la Charte canadienne des droits et libertés et est inopérant.

3)  MOYENS SOULEVÉS À L'APPUI DE LA RÉPARATION DEMANDÉE

Je reviens de nouveau au mémoire des faits et du droit des demandeurs qui expose neuf moyens à l'appui de la réparation demandée. Ils sont rédigés dans les termes suivants:

[traduction]

A.    Le règlement contesté est en contradiction avec la Convention de 1916 concernant les oiseaux migrateurs et il est donc ultra vires de la loi d'application. La Convention de 1916 a pour but de protéger les oiseaux migrateurs contre la chasse et d'autres initiatives de l'homme ayant pour but de tuer ou de menacer la survie de ces oiseaux. La Loi sur la convention des oiseaux migrateurs a pour objet explicite "la mise en Å“uvre de la Convention". Toutefois, l'un des principaux aspects du règlement contesté est d'autoriser une nouvelle saison de chasse au printemps afin de réduire substantiellement la population de certaines espèces d'oies.

B.    Le règlement contesté contrevient également à l'objet de la Convention parce que la portée de celle-ci (et par conséquent la portée de tout règlement établi en vertu de la Loi) est limitée à la protection des oiseaux migrateurs au cours de la saison de reproduction ou pendant qu'ils se rendent à leurs aires de reproduction ou qu'ils en reviennent, alors que l'un des résultats qu'Environnement Canada attend du règlement contesté est "d'augmenter les possibilités de chasse et de prise de ces espèces" en permettant aux chasseurs de tirer sur ces oies pendant leur trajet vers les aires de reproduction.

C.    Environnement Canada essaie par ce règlement de réglementer l'environnement. La Convention des oiseaux migrateurs ne lui confère aucun pouvoir à cet égard.

D.    Le règlement n'est pas autorisé par l'article II ou VII de la Convention.

E.    Il y a eu sous-délégation illégale et entrave à l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire.

F.    L'omission de suivre la politique d'Environnement Canada concernant la réglementation de la faune et la politique de réglementation fédérale du Conseil du Trésor du Canada contrevient à la loi et à la doctrine des attentes légitimes.

G.    Le règlement se fonde sur des conclusions de faits erronées tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments disponibles.

H.    En supposant que le règlement contesté ait un fondement légalement valide, il n'en va pas de même des dispositions du règlement qui autorise la chasse aux oies de Ross en dehors du temps prohibé.

I.    (i)    Les mesures prises par le ministre et le gouverneur en conseil dans la formulation et la prise de ces règlements ont contrevenu aux droits des autochtones, protégés par la Constitution, d'être consultés au sujet des mesures, des programmes et des activités autorisés par le gouvernement concernant les ressources fauniques, à l'égard desquelles les autochtones ont des droits ancestraux, issus de traités et protégés par la Constitution, et de participer à ces mesures et programmes, et constituent un déni fondamental permanent de ces droits.

    (ii)    Le ministre et le gouverneur en conseil ont ignoré et contrevenu à leur obligation de fiduciaire à l'égard des autochtones, qui les oblige, notamment, à obtenir des renseignements quant aux répercussions probables que le règlement aura sur les autochtones, les collectivités autochtones et la faune dont ils dépendent pour leur subsistance ou à l'égard de laquelle ils ont des droits, à examiner objectivement ces renseignements avant de formuler et de recommander des propositions semblables, et à s'abstenir de prendre ces mesures en cas de répercussions négatives probables.

4)  NORME DE CONTRÔLE

L'avocat des intimés fait valoir que, bien que l'exercice du pouvoir conféré au gouverneur en conseil n'échappe pas au contrôle, en règle générale, les décisions prises par le gouverneur en conseil sur des questions d'intérêt public et de politique générale sont définitives et ne peuvent faire l'objet d'un contrôle dans le cadre de poursuites judiciaires.

Dans l'arrêt Procureur général du Canada c. Inuit Tapirisat of Canada et autre4, le juge Estey, exprimant le jugement unanime de la Cour suprême du Canada, écrit à la page 748:

Il faut dire tout de suite que la simple attribution par la loi d'un pouvoir au gouverneur en conseil ne signifie pas que son exercice échappe à toute révision. Si ce corps constitué n'a pas respecté une condition préalable à l'exercice de ce pouvoir, la cour peut déclarer ce prétendu exercice nul.

Le juge Estey poursuit ainsi à la page 752:

Il est inutile, à mon avis, d'essayer de classer l'action du gouverneur en conseil ou sa fonction (ou celles du lieutenant-gouverneur en conseil dans des situations semblables) dans l'une des catégories traditionnelles établies en droit administratif. [. . .] à mon avis, l'essentiel du principe de droit applicable en l'espèce est simplement que dans l'exercice d'un pouvoir conféré par la loi, le gouverneur en conseil, comme n'importe quelle autre personne ou groupe de personnes, doit respecter les limites de la loi édictée par le Parlement ou la Législature. Y déroger déclenchera le rôle de la surveillance de la cour supérieure qui a la responsabilité de faire appliquer la loi, c'est-à-dire de s'assurer que les actes autorisés par la loi sont accomplis en conformité avec ses dispositions ou qu'une autorité publique ne se dérobe pas à une obligation qu'elle lui impose.

Dans l'arrêt Angus c. Canada5, le juge MacGuigan écrit à la page 420 en faisant référence à l'arrêt Inuit Tapirisat, qui vient d'être cité:

[. . .] "le gouverneur en conseil a entière discrétion dans la mesure où il respecte les limites fixées à sa compétence" par la disposition visée. Les parties reconnaissent aussi que le pouvoir législatif du gouverneur en conseil est susceptible de révision judiciaire s'il n'a pas observé l'une des conditions préalables à l'exercice de ce pouvoir.

Rien de ce qui a été dit précédemment au sujet des principes au regard desquels la présente Cour devrait réviser les mesures prises par le gouverneur en conseil visées en l'espèce n'a été sérieusement contesté devant moi. Par conséquent, les questions que la Cour devrait examiner dans la présente demande sont de savoir si le gouverneur en conseil, en adoptant le Règlement modificateur, n'a pas observé une condition préalable à l'exercice de son pouvoir ou s'il a outrepassé sa compétence.

Finalement, pour ce qui concerne la norme de contrôle, je me laisserai guider par les propos du juge en chef Dickson dans l'arrêt Thorne's Hardware Ltd. et autres c. La Reine et autre6, à la page 112:

Nous n'avons ni le droit ni l'obligation de mener une enquête sur les motifs qui ont pu inciter le cabinet fédéral à prendre le décret [. . .]

Je conclus donc, d'après la preuve dont la présente Cour est saisie, qu'elle n'a ni le droit ni l'obligation d'enquêter sur les motifs qui ont incité le gouverneur en conseil à prendre le Règlement modificateur, ou de les remettre en question. En outre, il n'est pas pertinent de savoir si la présente Cour ou le juge qui la préside aurait favorisé l'adoption du même règlement, d'un règlement différent ou de tout autre règlement modificateur.

5)  CONTEXTE

    a)  La Convention concernant les oiseaux migrateurs

La Convention concernant les oiseaux migrateurs, conclue en 1916 et ratifiée par "Sa Majesté britannique", probablement au nom du Canada, et par le président des États-Unis d'Amérique, figure en annexe de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs (la Loi)7. Le préambule de la Convention sur les oiseaux migrateurs (la Convention) est rédigé dans les termes suivants:

Attendu que certaines espèces d'oiseaux traversent au cours de leurs migrations annuelles certaines parties du Canada et des États-Unis; et

Attendu qu'un grand nombre de ces espèces ont une valeur importante au point de vue alimentaire, ou au point de vue de la destruction des insectes qui nuisent aux forêts et aux plantes fourragères sur les terres publiques, ainsi qu'aux récoltes agricoles, tant au Canada qu'aux États-Unis, mais que ces espèces sont en danger d'être exterminées, à cause du manque de protection adéquate pendant la saison de la ponte ou pendant qu'elles se rendent à leurs terrains de reproduction ou qu'elles en reviennent;

Sa Majesté le Roi du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande et des Dominions britanniques d'outre-mer, Empereur des Indes, et les États-Unis d'Amérique, désireux de sauver du massacre général les oiseaux migrateurs qui sont utiles à l'homme ou inoffensifs, et d'assurer la conservation de ces oiseaux, ont décidé d'adopter un système uniforme de protection qui accomplira cet objet d'une façon efficace [. . .]

Ainsi, on peut dire que la Convention a pour but de préserver du massacre général certains oiseaux migrateurs qui "traversent" certaines parties du Canada et des États-Unis au cours de leur migration annuelle et d'assurer leur conservation.

L'article premier de la Convention stipule que les oiseaux migrateurs visés par la Convention comprennent les oies.

L'article II de la Convention est rédigé en partie dans les termes suivants:

    Article II

Les Hautes Puissances contractantes conviennent, à titre de moyen efficace pour préserver les oiseaux migrateurs, d'établir les saisons suivantes pendant lesquelles il sera interdit de chasser, sauf pour des motifs scientifiques ou pour des motifs de propagation en vertu de permis délivrés par les autorités compétentes:

1. Le temps prohibé pour les oiseaux migrateurs considérés comme gibier est du 10 mars au 1er septembre [. . .] La saison de chasse est en outre restreinte à la période ne dépassant pas trois mois et demi que les Hautes Puissances contractantes peuvent individuellement juger appropriée et définir par loi ou par règlement.

Une fois de plus, il n'a pas été contesté devant moi que les oies des neiges et les oies de Ross auxquelles le Règlement modificateur s'applique sont visées par cet article. Ainsi, avant l'entrée en vigueur du Règlement modificateur, mais depuis l'adoption de la Convention, il était interdit de chasser les oies des neiges et les oies de Ross entre le 10 mars et le 1er septembre de chaque année (le "temps prohibé"). Une exception était toutefois prévue pour des "motifs scientifiques ou pour des motifs de propagation". En outre, la saison de chasse des oies des neiges et des oies de Ross était restreinte à une période ne dépassant pas trois mois et demi pendant le reste de l'année, c'est-à-dire entre le 1er  septembre d'une année donnée et le 10 mars de l'année suivante.

Il convient également de noter l'article VII de la Convention, rédigé dans les termes suivants:

    Article VII

Les autorités compétentes des Hautes Puissances contractantes peuvent émettre des permis de tuer l'un ou l'autre des oiseaux qui viennent d'être mentionnés et qui, dans des conditions extraordinaires, peuvent se montrer dommageables à l'agriculture ou à d'autres intérêts dans une localité spéciale; ces permis sont émis en vertu des règlements convenables prescrits respectivement par ces Puissances. Mais ces permis deviennent périmés ou peuvent être abrogés à tout moment quand, de l'avis desdites autorités, l'urgence particulière n'existe plus, et il est interdit d'expédier, de vendre, ou d'offrir en vente des oiseaux tués en vertu du présent article.

Donc, les "permis de tuer" les oies des neiges et les oies de Ross en dehors de la "saison de chasse" normale peuvent être délivrés, "en vertu de règlements convenables", lorsque, "dans des conditions extraordinaires", ils "peuvent se montrer dommageables à l'agriculture ou à d'autres intérêts dans une localité spéciale". Si l'on tient compte de la période de l'année au cours de laquelle les oies des neiges et les oies de Ross, dans le cadre de leur migration annuelle normale, se trouvent au sud de la frontière canado-américaine, il est manifeste, du moins pour la Cour, que l'article VII autorise la délivrance de "permis de tuer" pendant le "temps prohibé".

Le 14 décembre 1995, un "protocole" entre le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis d'Amérique modifiant la Convention a été signé au nom du Canada et des États-Unis à Washington. Ce protocole n'est pas encore en vigueur. Au cours du contre-interrogatoire de M. John Steven Wendt, au sujet de son affidavit déposé en faveur des défendeurs8 , l'échange suivant a eu lieu:

[traduction]

Q.    [M. Estrin, avocat des demandeurs] Bon, permettez-moi de vous rappeler que vous avez vous-même exprimé l'opinion qu'il y a dans ce protocole des dispositions qui autorisent la prise d'oiseaux migrateurs en dehors des dates spécifiées dans la Convention dans les cas où les habitats des oiseaux migrateurs sont endommagés?

R.    (M. Wendt) Oui, j'ai exprimé cette opinion9.

L'avocat des demandeurs me demande de conclure, en m'appuyant sur le protocole, que les hauts fonctionnaires d'Environnement Canada sont d'avis que le gouverneur en conseil n'a pas à l'heure actuelle compétence pour prendre le Règlement modificateur, que le protocole a été négocié et signé pour lui conférer cette compétence et que, puisque le protocole n'est pas encore en vigueur, le gouverneur en conseil a agi prématurément et a outrepassé sa compétence. Bien entendu, il peut y avoir une autre interprétation, savoir que le protocole a été négocié et signé pour préciser et dissiper tout doute à l'égard du pouvoir du gouverneur en conseil, afin d'assurer un consensus international et d'agir comme catalyseur pour les discussions et les consultations sur ce que le gouvernement perçoit comme une crise imminente. Compte tenu de la norme de contrôle dans un cas de cette espèce, dont il a déjà été question, et à la lumière de l'ensemble de la preuve produite devant la Cour, s'il était nécessaire que je choisisse entre ces deux interprétations, je choisirais la dernière.

    b)  La Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs

La loi ayant pour but de donner effet à la Convention a d'abord été adoptée par le Parlement en 1917, c'est-à-dire dans l'année qui a suivi la signature de la Convention10. Cette loi a été abrogée par l'adoption de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs.

L'objet de la Loi est énoncé brièvement à l'article 4:

4. La présente loi a pour objet la mise en Å“uvre de la convention par la protection des oiseaux migrateurs et de leurs nids. [Non souligné dans l'original.]

Le paragraphe 12(1) de la Loi confère au gouverneur en conseil le pouvoir de prendre des règlements. Ce paragraphe est essentiel aux fins de l'espèce. Les parties pertinentes du paragraphe 12(1) sont rédigées dans les termes suivants:

12. (1) Le gouverneur en conseil peut prendre les règlements qu'il juge nécessaires à la réalisation de l'objet de la présente loi et de la convention; les règlements peuvent notamment:

    a) fixer les périodes pendant lesquelles et les zones à l'intérieur desquelles il est permis:

        (i) de tuer, de capturer ou de prendre des oiseaux migrateurs,

    [. . .]

    e) prévoir la délivrance de permis d'enlever ou d'éliminer des oiseaux migrateurs, ainsi que leurs nids, là où l'enlèvement ou l'élimination est nécessaire en vue de prévenir des dommages à l'agriculture ou dans les circonstances énoncées par règlement;

    c)  Le processus menant à l'adoption du Règlement modificateur

Les préoccupations concernant les populations de plus en plus importantes d'oies des neiges et d'oies de Ross ont été exprimées dès janvier 1995. Les participants à la conférence sur l'oie de l'Arctique en Amérique du Nord qui s'est tenue au cours de ce mois étaient d'avis que les gouvernements du Canada et des États-Unis devaient sans tarder faire enquête sur les conséquences écologiques de ce phénomène. En octobre 1995, un atelier international, parrainé par une organisation connue sous le nom d'Arctic Goose Joint Venture, a eu lieu. M. Wendt d'Environnement Canada, qui coprésidait l'atelier avec son homologue des États-Unis, atteste que les renseignements au sujet de la tenue de l'atelier ont été largement distribués et qu'en plus des conférenciers scientifiques invités, des représentants de plusieurs groupes autochtones y participaient. M. Wendt confirme également que les participants à l'atelier ont conclu que la menace que les importantes populations d'oies de l'Arctique représentaient pour leurs habitats était réelle, et qu'un groupe d'experts devrait être choisi pour enquêter sur la situation et [traduction] "modéliser les conséquences en détail". En réponse, un groupe a été constitué, regroupant des membres provenant des gouvernements fédéral et provinciaux et des États américains, du milieu universitaire et des organismes non gouvernementaux au Canada et aux États-Unis, sous le nom de Groupe de travail sur l'habitat des grandes oies des neiges (le Groupe de travail).

Le Groupe de travail a mis au point une méthode d'évaluation continentale concernant la question de la population croissante d'oies. Deux rapports ont été établis et, d'après la preuve dont je suis saisi, ces rapports constituent le fondement de l'initiative qui a mené à l'adoption du Règlement modificateur. Le premier rapport a été publié en 1997 sous le titre Arctic Ecosystems in Peril (Les écosystèmes de l'Arctique en péril). Le deuxième rapport a été publié en 1998 sous le titre de The Greater Snow Goose (La Grande Oie des neiges). Les rapports renferment des conclusions concernant les causes qui pourraient expliquer la croissance rapide de la population d'oies des neiges, croissance qui est de nature exponentielle.

Comme il ressort du résumé de l'étude d'impact de la réglementation joint sous l'annexe B, l'oie des neiges du milieu du continent ou la petite oie des neiges et la grande oie des neiges, la première migrant vers le nord par les Prairies et la deuxième par le Québec, ont été désignées comme des "populations surabondantes" en mars 1998 par le comité trilatéral Canada/Mexique/États-Unis pour la conservation et la gestion de la faune et des écosystèmes. Les réponses à cette désignation ont été laissées à la discrétion du gouvernement de chacun des pays participants.

    d)  Les consultations

La preuve déposée au nom des défendeurs indique que le Service canadien de la faune d'Environnement Canada a eu recours à son processus formel de consultations annuelles sur les modifications au Règlement sur les oiseaux migrateurs pour faciliter la consultation avec les parties intéressées concernant la croissance rapide de la population d'oies des neiges. La première discussion sur le sujet était reproduite dans un rapport de novembre 1995 sur le statut des oiseaux migrateurs considérés comme gibier au Canada qui a été suivi d'autres discussions figurant dans des rapports équivalents publiés en novembre 1996, 1997 et 1998. Apparemment, ces rapports ont été postés à environ 700 organismes et particuliers qui s'intéressent à la conservation des oiseaux migrateurs considérés comme gibier au Canada, aux États-Unis et dans d'autres pays.

Des solutions précises ayant pour but de traiter de la crise perçue comme imminente ont été décrites dans des publications parues en décembre 1997 et en juillet 199811.

M. Wendt atteste qu'au Québec où le Règlement modificateur aura vraisemblablement l'impact le plus considérable, les consultations ont été menées par l'entremise d'un "comité des intéressés" qui [traduction ] "s'est réuni à plusieurs reprises". Pendant l'hiver de 1998, on a sollicité dans les provinces des Prairies la participation des intéressés au projet de Règlement modificateur. Le sujet a également été soulevé et discuté au cours d'un certain nombre de réunions du Conseil consultatif de la gestion de la faune qui ont eu lieu entre juin 1997 et mars 1999, et au cours de rencontres du Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut qui ont eu lieu entre février 1997 et août 1998.

M. Wendt confirme également que le Règlement modificateur devrait avoir un "effet négligeable" sur la capacité de prises des oies des neiges par les Premières nations, et que des consultations spéciales ont eu lieu avec ces groupes en vue de les conscientiser aux questions écologiques en cause et de les encourager à participer à la solution du problème.

La preuve déposée au nom des défendeurs indique que les discussions ont eu lieu avec le conseil de cogestion déné en avril 1997, avec le Conseil des ressources renouvelables gwich'in en octobre 1998 et avec le conseil des ressources renouvelables du Sahtu à trois reprises en 1998. Ces consultations menées dans le Nord se sont terminées par une réunion conjointe des représentants de plusieurs conseils de cogestion à Yellowknife en décembre 1998.

6)  ANALYSE

Comme il a été indiqué précédemment dans les présents motifs, la demande de contrôle judiciaire est datée du 4 mars 1999. Le Règlement modificateur a été adopté le 25 mars 1999. La chasse du printemps au Québec qui était autorisée par le Règlement devait commencer le 15 avril 1999. Le règlement de la présente demande était donc assez urgent. Avec le consentement des avocats, la Cour a fixé l'audition de cette affaire à 9 h le 14 avril 1999. Les avocats doivent être félicités du travail qu'ils ont accompli pour assurer que la très volumineuse documentation soit prête, préparée, communiquée à toutes les parties et déposée à la Cour avant la date de l'audition.

L'audience s'est terminée vers 18 h le 14 avril 1999. J'ai prononcé ma décision à l'audience à 10 h le lendemain matin, c'est-à-dire le 15 avril 1999, peu après l'ouverture de la chasse du printemps au Québec. Ma décision est la suivante:

[traduction]

LA COUR DÉCLARE PAR LES PRÉSENTES:

1.    Que le Règlement modifiant le règlement sur les oiseaux migrateurs, C.P. 1999-526, en date du 25 mars 1999, est ultra vires dans la mesure où il entend autoriser la chasse aux oies de Ross et à d'autres espèces difficiles à distinguer des oies des neiges, au cours des périodes et dans les régions énumérées au tableau 1.2 du Règlement.

2.    Qu'à tous autres égards, la demande de contrôle judiciaire des demandeurs est rejetée.

3.    Qu'il n'y a pas d'ordonnance quant aux dépens.

J'ai motivé brièvement ma décision oralement. L'analyse ci-après reprend de façon beaucoup plus élaborée le fond et la structure de ces brefs motifs oraux.

Au début des présents motifs, j'ai énoncé neuf propositions ou questions au regard desquelles les avocats des demandeurs ont formulé leurs observations. J'aborde les quatre premières propositions ensemble. Je les répète ici pour plus en faciliter la consultation:

1.    Le règlement contesté est en contradiction avec la Convention de 1916 sur les oiseaux migrateurs et il est donc ultra vires de la loi d'application. La Convention de 1916 a pour but de protéger les oiseaux migrateurs contre la chasse et d'autres initiatives de l'homme ayant pour but de tuer ou de menacer la survie de ces oiseaux. La Loi sur la convention des oiseaux migrateurs a pour objet explicite "la mise en Å“uvre de la Convention". Toutefois, l'un des principaux aspects du règlement contesté est d'autoriser une nouvelle saison de chasse au printemps afin de réduire substantiellement la population de certaines espèces d'oies.

2.    Le règlement contesté contrevient également à l'objet de la Convention parce que la portée de celle-ci (et par conséquent la portée de tout règlement établi en vertu de la Loi) est limitée à la protection des oiseaux migrateurs au cours de la saison de reproduction ou pendant qu'ils se rendent à leurs aires de reproduction ou qu'ils en reviennent, alors que l'un des résultats qu'Environnement Canada attend du règlement contesté est "d'augmenter les possibilités de chasse et de prise de ces espèces" en permettant aux chasseurs de tirer sur ces oies pendant leur trajet vers les aires de reproduction.

3.    Environnement Canada essaie par ce règlement de réglementer l'environnement. La Convention des oiseaux migrateurs ne lui confère aucun pouvoir à cet égard.

4.    Le règlement n'est pas autorisé par l'article II ou VII de la Convention.

Dans l'arrêt Re Doctors Hospital and Minister of Health et al.12, le juge Cory, plus tard juge de la Cour suprême, exprime ainsi l'avis de la Cour aux pages 174 et 175:

[traduction] Il a été statué que même si cela est fait en toute bonne foi et avec les meilleures intentions, une dérogation par un organisme décisionnel aux objets de la loi aux termes de laquelle il peut agir est contestable et peut faire l'objet d'un contrôle par les tribunaux.

Dans l'arrêt Roncarelli c. Duplessis, [1959] R.C.S. 121, à la p. 140, [. . .] le juge Rand écrit ceci:

    Dans une réglementation publique de cette nature, il n'y a rien de tel qu'une "discrétion" absolue et sans entraves, c'est-à-dire celle où l'administrateur pourrait agir pour n'importe quel motif ou pour toute raison qui se présenterait à son esprit; une loi ne peut, si elle ne l'exprime expressément, s'interpréter comme ayant voulu conférer un pouvoir arbitraire illimité pouvant être exercé dans n'importe quel but, si fantaisiste et hors de propos soit-il, sans avoir égard à la nature ou au but de cette loi. La fraude et la corruption au sein de la commission ne sont peut-être pas mentionnées dans des lois de ce genre, mais ce sont des exceptions implicites que l'on doit toujours sous-entendre. La "discrétion" implique nécessairement la bonne foi dans l'exercice d'un devoir public. Une loi doit toujours s'entendre comme s'appliquant dans une certaine optique, et tout écart manifeste de sa ligne ou de son objet est tout aussi répréhensible que la fraude ou la corruption.

En l'absence de dispositions manifestes dans la loi, la discrétion accordée au lieutenant-gouverneur en conseil [en l'espèce le gouverneur en conseil] ne peut servir qu'à poursuivre la politique et les objectifs de la loi, qui doivent être déterminés selon les critères d'interprétation normaux et, dans cette mesure à tout le moins, ils peuvent faire l'objet d'un contrôle judiciaire. [Citation omise.]

Dans l'ouvrage Driedger on the Construction of Statutes13, au sujet des mesures législatives ayant pour but d'appliquer des conventions internationales, l'auteur dit ceci:

[traduction] [. . .] dans la préparation d'une loi d'application, la législature interprète tout d'abord la convention internationale et décide ensuite dans quelle mesure elle souhaite l'appliquer et de la manière de le faire. Puisque la législature n'est pas liée par la convention, elle peut la modifier ou y ajouter à volonté. La structure du libellé de la convention de base peut être suivie de façon plus ou moins fidèle ou même être ignorée. Quelle que soit la méthode adoptée, et abstraction faite de la plus ou moins grande fidélité à la convention de base, la loi d'application est interprétée de la manière habituelle, comme toute autre loi interne. Ce point a été clairement établi par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Schavernoch c. Commission des réclamations étrangères relativement à des règlements ayant pour objet l'application d'un accord bipartite avec la Tchécoslovaquie. Le juge Estey écrit:

    [. . .] [L]e règlement doit être interprété suivant les maximes d'interprétation qui s'appliquent au droit interne canadien en général. La seule règle d'interprétation qui semble trouver application ici est celle du sens manifeste [. . .]

Dans d'autres arrêts, la Cour suprême du Canada a souligné l'importance de l'analyse fondée sur l'objet visé dans son interprétation de la loi d'application. Mais l'idée de base est la même, c'est-à-dire que la loi d'application doit être interprétée comme toute autre loi, en s'appuyant sur les principes et techniques habituels.

Il est maintenant admis que les tribunaux peuvent consulter la convention internationale qui sous-tend la loi d'application afin d'aider à l'interprétation de celle-ci, même en l'absence d'ambiguïté apparente. En outre, il y a une présomption que la loi d'application a été adoptée dans le but de respecter les obligations prises en vertu de la convention et de leur donner effet. Cette présomption est réfutable, toutefois, et ce n'est que l'un des nombreux outils auxquels les tribunaux peuvent à bon droit avoir recours pour déterminer quel était le sens recherché par la Législature ou celui qui est le plus approprié. En cas de conflit entre ce sens et la convention de base, c'est la loi qui a préséance14.

Traitant de l'interprétation des conventions elles-mêmes, Driedger poursuit en ces mots aux pages 398 et 399:

[traduction] La première règle d'interprétation en droit international indique que les conventions doivent être interprétées de façon à donner effet à leur objet. Dans l'arrêt Palacios [(1984), 7 D.L.R. (4th) 112 (C.A. Ont.)], le juge Blair s'est appuyé sur un texte de droit international pour formuler cette règle qui fait autorité. Il écrit ceci:

    La règle fondamentale du droit international régissant l'interprétation des traités est énoncée par O'Connell, dans International Law, [. . .] dans les termes suivants: "Le but premier de l'interprétation des traités est de donner effet à l'intention des parties, et non pas d'y faire échec". Cette règle est parfois appelée le principe d'efficacité qui exige que les tribunaux interprètent le traité dans son ensemble de façon à en déterminer l'objet et l'intention et à leur donner effet plutôt que de s'appuyer sur l'interprétation littérale de certains articles qui pourrait produire des résultats "contraires à l'objet manifeste du traité".

La similarité entre ce principe et la méthode d'interprétation du droit interne adoptée par la plupart des tribunaux modernes est évidente. Toutefois, dans la mesure où il peut y avoir une incompatibilité entre les méthodes d'interprétation du droit interne et du droit international, c'est la méthode retenue par le droit international qui a préséance dans les questions d'interprétation des conventions internationales.

Au regard de ces "principes d'interprétation normaux", je reviens aux termes de la Loi et de la Convention, qui figure en annexe de la Loi.

J'ai essayé de me mettre dans l'esprit des rédacteurs de la Convention. Mes conclusions sont les suivantes: premièrement, les préoccupations qui ont donné lieu à la rédaction de la Convention et les objectifs de la Convention sont exprimés clairement et sans équivoque dans le préambule; et deuxièmement, l'article II traite des objectifs, de la préservation des oiseaux migrateurs grâce à l'établissement d'un "temps prohibé", et il prévoit deux exceptions à la règle générale, c'est-à-dire les motifs scientifiques et de propagation.

Je conclus que les rédacteurs de la Convention, faisant preuve de ce qui m'apparaît comme une grande prévoyance, ont reconnu que les conditions qui existaient en 1916 et pendant toute la période de négociation et de rédaction de la Convention n'existeraient peut-être pas toujours; qu'en fait l'évolution qui avait eu lieu avec le temps et son impact sur les populations d'oiseaux migrateurs allait vraisemblablement se poursuivre. Donc, même si les rédacteurs ont mentionné les motifs scientifiques et de propagation comme étant des exceptions à la règle générale énoncée à l'article II, ce qui n'est pas surprenant compte tenu de l'environnement de l'époque, ils ont reconnu qu'il était approprié d'ajouter à la Convention une "clause dérogatoire" qui permettrait de faire face aux imprévus, comme les phénomènes actuels de relèvement isostatique, de réchauffement global et de croissance exponentielle des populations d'oies des neiges. C'est ce genre de prévoyance qui, à mon avis, a mené à l'inclusion de l'article VII qui vise justement ces conditions qui, d'après la preuve dont je suis saisi, existent actuellement et qu'il n'était pas raisonnablement possible d'envisager au moment de la rédaction de la Convention.

L'article 4 de la Loi permet de conclure sans aucun doute possible que la Loi a été adoptée afin de mettre en Å“uvre la Convention "par la protection des oiseaux migrateurs et de leurs nids". À mon avis, le paragraphe 12(1) reflète, du moins en partie, la prévoyance dont ont fait preuve les rédacteurs de la Convention en incluant l'article VII dans la Convention. Pour plus de facilité, je reproduis ci-dessous ce que je considère comme étant les parties pertinentes du paragraphe 12(1):

12. (1) Le gouverneur en conseil peut prendre les règlements qu'il juge nécessaires à la réalisation de l'objet de la présente loi et de la convention; les règlements peuvent notamment:

    a) fixer les périodes pendant lesquelles et les zones à l'intérieur desquelles il est permis:

        (i) de tuer, de capturer ou de prendre des oiseaux migrateurs,

    [. . .]

    e) prévoir la délivrance de permis d'enlever ou d'éliminer des oiseaux migrateurs, ainsi que leurs nids, là où l'enlèvement ou l'élimination est nécessaire en vue de prévenir des dommages à l'agriculture ou dans les circonstances énoncées par règlement;

Voici quelle est mon interprétation des éléments précités du paragraphe 12(1) relativement aux faits de l'espèce: le gouverneur en conseil peut prendre tout règlement qu'il juge nécessaire pour donner effet, non seulement à l'objet, mais aux dispositions de la Loi et de la Convention, y compris de l'article VII, tout en prévoyant des périodes pendant lesquelles et des zones à l'intérieur desquelles il serait permis de tuer des oiseaux migrateurs et de délivrer des permis d'éliminer les oiseaux migrateurs lorsque, de l'avis du gouverneur en conseil, il est nécessaire d'agir ainsi afin de prévenir des dommages à l'agriculture ou dans les circonstances énoncées par règlement.

Ce pouvoir est raisonnablement semblable, bien qu'il ne soit certainement pas exprimé dans des termes identiques, à celui énoncé à l'article VII de la Convention qui autorise l'octroi de permis pour tuer les oies qui, dans des "conditions extraordinaires", peuvent se montrer "dommageables à l'agriculture ou à d'autres intérêts" dans une "localité spéciale".

Pour revenir tout d'abord au libellé de la Loi, à l'exception du fait que le Règlement modificateur vise à englober les oies de Ross et "d'autres espèces" difficiles à distinguer des "oies des neiges", le Règlement modificateur, lu de concert avec le résumé de l'étude d'impact de la réglementation, est de toute évidence aux yeux du gouverneur en conseil jugé nécessaire pour appliquer une disposition de la Convention, c'est-à-dire l'article VII. Aux termes de l'alinéa 12(1)e ), le Règlement modificateur autorise l'octroi de permis pour éliminer les oies des neiges, c'est-à-dire des oiseaux migrateurs, afin d'éviter les dommages qui seraient causés dans les circonstances énoncées dans le Règlement.

Au regard des dispositions de l'article VII de la Convention, et, de nouveau, sans faire référence aux dispositions de celle-ci concernant les oies de Ross et "d'autres espèces difficiles à distinguer des oies des neiges", j'en arrive aux conclusions suivantes. Le Règlement modificateur permet de délivrer des permis de tuer des oies des neiges. Le gouverneur en conseil a manifestement suivi l'avis de la Commission trilatérale selon lequel les populations d'oies des neiges sont surabondantes. Au premier paragraphe du résumé de l'étude d'impact de la réglementation, on peut lire la phrase suivante:

Si on n'intervient pas, les populations surabondantes d'Oies des neiges [. . .] compromettront sérieusement la diversité biologique de l'écosystème arctique.

Je suis convaincu que le gouverneur en conseil pouvait raisonnablement conclure, selon son pouvoir discrétionnaire, que de telles circonstances, c'est-à-dire la surabondance, constituent des "conditions extraordinaires" et que ces conditions "pouvaient avoir de graves répercussions sur l'écosystème arctique". Il faut en outre se demander, ce qui est plus important, si ces conditions constituent un ou des intérêts pour "une localité spéciale". Je suis convaincu que, dans le contexte de l'article VII de la Convention, l'expression "localité spéciale" devrait être interprétée libéralement pour inclure la région de l'Arctique où les oies des neiges passent les mois d'été et que la diversité biologique de l'écosystème arctique est un autre intérêt du même genre que "l'agriculture".

À la lecture du paragraphe 12(1) de la Loi et de l'article VII de la Convention, je ne trouve rien pour appuyer les dispositions du Règlement modificateur ayant trait aux oies de Ross et à "d'autres espèces difficiles à distinguer des oies des neiges".

La cinquième question est rédigée dans les termes suivants:

Il y a eu sous-délégation illégale et entrave à l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire.

Dans le projet de Règlement modificateur qui a été publié, de même qu'un résumé de l'étude d'impact de la réglementation, dans la Gazette du Canada, Partie I le 30 janvier 1999, l'article 4 du projet de Règlement modificateur était rédigé dans les termes suivants:

4. Le même règlement est modifié par adjonction, après l'article 23, de ce qui suit:

    espèces surabondantes

23.1 (1) Pour l'application du présent article et de l'annexe I, "espèce surabondante" s'entend de toute espèce d'oiseaux migrateurs considérés comme gibier qui répond aux critères suivants:

    a) son abondance ou son taux d'augmentation menace sa viabilité ou celle d'autres espèces d'oiseaux migrateurs ou menace son habitat ou celui d'autres espèces d'oiseaux migrateurs;

    b) le Comité trilatéral Canada/Mexique/États-Unis pour la conservation et la gestion de la faune et des écosystèmes l'a désignée comme étant une espèce surabondante.

Le Comité trilatéral a identifié la petite oie des neiges et la grande oie des neiges comme étant des espèces surabondantes. La plupart des membres du Comité trilatéral représentaient le Mexique et les États-Unis, mais pas le Canada. L'avocat des demandeurs fait instamment valoir que le gouverneur en conseil a simplement adopté cette désignation et qu'en agissant ainsi il a délégué illégalement une partie de son mandat concernant l'adoption du Règlement modificateur. Il est utile de noter que le renvoi à la désignation d'une espèce surabondante par le Comité trilatéral ne ressort pas à la lecture du Règlement modificateur adopté par le gouverneur en conseil.

Il n'a pas été contesté sur le fond devant moi qu'un délégué, en l'espèce le gouverneur en conseil, qui fait entrave à l'exercice de son pouvoir discrétionnaire en adoptant une politique ou en acceptant de l'exercer d'une façon particulière, procède à une sous-délégation illégale. Le principe est énoncé dans l'arrêt Vic Restaurant v. The City of Montreal15.

Bien que l'indication d'une telle sous-délégation figurant dans le projet de Règlement modificateur puisse raisonnablement soulever la possibilité que le gouverneur en conseil a effectivement délégué au Comité trilatéral la fonction de désigner les espèces surabondantes, il n'y a pas d'autre preuve qui permette d'appuyer une telle hypothèse et encore moins une telle conclusion. Je suis convaincu que les demandeurs avaient le fardeau d'établir qu'il y a eu sous-délégation et qu'ils ne s'en sont pas acquittés.

Même si j'avais conclu que les demandeurs avaient prouvé qu'il y a eu sous-délégation, je ne suis pas convaincu qu'une conclusion selon laquelle il y a eu sous-délégation au Comité trilatéral, dans les circonstances de l'espèce, ferait échec au Règlement modificateur. Il ne faut pas oublier que ce qui est contesté en l'espèce est une crise imminente qui transcende les frontières nationales. L'existence de la Convention en est une preuve suffisante. Les oies des neiges ne respectent pas les frontières. Leur préservation et, en fait, le contrôle de leurs populations surabondantes, si tel est le cas, est un sujet de préoccupation directe à tout le moins pour le Canada et les États-Unis et apparemment aussi pour le Mexique. Donc, ce n'est rien de plus que de faire preuve de bon sens que de s'assurer qu'il y a un consensus entre les pays intéressés sur la question de l'existence de "conditions extraordinaires", en l'espèce les populations surabondantes. Le Comité trilatéral a permis d'établir ce consensus. La Cour n'est manifestement pas saisie d'une preuve tendant à établir que le gouverneur en conseil a d'une quelconque façon été obligé d'accepter la décision ou la recommandation du Comité trilatéral. De même, le gouverneur en conseil n'aurait guère été justifié d'agir unilatéralement en l'absence d'un consensus.

Par conséquent, je conclus qu'il n'y a pas eu de sous-délégation portant atteinte à la validité du Règlement modificateur.

La sixième question est formulée dans les termes suivants:

L'omission de suivre la politique d'Environnement Canada concernant la réglementation de la faune et la politique de réglementation fédérale du Conseil du Trésor du Canada contrevient à la loi et à la doctrine des attentes légitimes.

Dans l'arrêt Travailleurs des pâtes, des papiers et du bois du Canada, Section locale 8 et al. c. Canada (Ministre de l'Agriculture) et al.16, Mme le juge Desjardins, de la Cour d'appel fédérale, écrit à la page 49:

Comme je l'ai déclaré plus haut, puisque le ministre doit procéder à l'enregistrement "sous réserve de l'article 18", il ne jouit pas d'une liberté absolue pour ce qui est de se former une opinion. Il doit examiner les renseignements qu'il possède, et il doit le faire en fonction des critères énoncés à l'article 18 du Règlement . En l'occurrence, le ministre a annoncé dans la brochure en quoi consiste, en gros, le processus consultatif par lequel il parviendrait à cette décision. Les mots "participent aux prises de décision" ne sauraient viser une décision collective étant donné que le ministre est le seul qui soit habilité par la loi à prendre la décision finale. Dans les faits, il a annoncé qu'il demanderait à des ministères spécialisés de l'aider de leurs lumières. Aucune loi ne l'empêchait de faire connaître la façon dont il pourrait décider de procéder pour prendre sa décision. Lorsqu'il a fait cette annonce, son geste a uniquement pu avoir pour effet de créer, chez les personnes dont l'attention est éveillée aux dangers de l'utilisation des pesticides, en particulier celles qui sont les plus exposées aux effets possibles du produit antiparasitaire, une expectative raisonnable que certaines procédures seraient suivies afin de garantir la santé de la population.

Dans les cas où le ministre commet une omission, la présente Cour est en droit, comme l'a déclaré la Cour suprême du Canada dans l'affaire Assoc. des résidents du Vieux St-Boniface Inc. c. Winnipeg (Ville), de suppléer à l'omission lorsqu'une partie a été amenée à croire que son droit à un environnement sûr serait lésé si la consultation appropriée n'avait pas lieu.

Ce qui précède est un énoncé de la doctrine des attentes légitimes déjà décrite par Mme le juge Desjardins.

Au nom des demandeurs, on fait valoir que le Règlement modificateur contrevient à la politique du ministre concernant la réglementation de la faune que l'on retrouve dans les [traduction] Objectifs et directives pour l'établissement de règlements nationaux concernant la chasse aux oiseaux migrateurs considérés comme gibier, version révisée de septembre 1997, figurant à l'annexe A du rapport [traduction] "Les oiseaux migrateurs considérés comme gibier au Canada"Propositions relatives au règlement de chasse de 1999/2000"; 31 décembre 199817 (les Directives ministérielles). Les "principes directeurs" publiés dans les Directives ministérielles prévoient ce qui suit:

" premièrement, le maintien de stocks viables de faune naturelle a préséance sur leur utilisation;

" deuxièmement, les Canadiens sont les gardiens temporaires de leur patrimoine faunique;

" troisièmement, les Canadiens sont libres de jouir et de faire usage de la faune du Canada, pourvu qu'ils respectent les lois ayant pour but de les en faire profiter à long terme;

" quatrièmement, les frais de gestion essentiels à la préservation de populations viables de la faune doivent être assumés par tous les Canadiens;

" cinquièmement, la faune a des valeurs socio-économiques intrinsèques, malgré certains problèmes qui exigent une saine gestion; et

" finalement, la conservation de la faune dépend de l'information du public.

Des objectifs ont été établis relativement au règlement de chasse aux oiseaux migrateurs. Ce sont les suivants:

" premièrement, donner aux Canadiens la possibilité de chasser;

" deuxièmement, limiter les prises d'oiseaux migrateurs à des niveaux compatibles avec leur capacité de maintenir des niveaux de population appropriés aux habitats disponibles au sein de leur aire de distribution;

" troisièmement, protéger la diversité génétique au sein des populations d'oiseaux migrateurs considérés comme gibier;

" quatrièmement, fournir des possibilités de chasse dans différentes régions du Canada, moyennant certaines restrictions;

" cinquièmement, limiter l'abattage accidentel d'espèces protégées; et

" finalement, aider à l'occasion et dans certains endroits, à la prévention des dommages causés à l'habitat naturel et à la dégradation des récoltes.

Bien que la Cour ait été saisie d'éléments de preuve tendant à établir que la politique précitée était violée à plusieurs égards, je conclus que ces éléments de preuve tiennent davantage de la nature de l'argumentation que de la nature d'une preuve d'expert.

Je conclus que l'adoption du Règlement modificateur et le processus utilisé pour procéder à cette adoption ne contreviennent pas aux directives ministérielles.

L'avocat des demandeurs fait en outre valoir que le Règlement modificateur et le processus suivi pour son élaboration et son adoption ne respectent pas la "politique de réglementation fédérale" du Conseil du Trésor du Canada et, en particulier, la "norme de gestion du processus de réglementation" dont il est question dans la politique de réglementation fédérale. Certaines normes sont soulignées:

" tout d'abord, les autorités de réglementation, en l'espèce le ministre de l'Environnement, qui proposent des changements à la réglementation doivent avoir la preuve qu'il existe un problème, que l'intervention gouvernementale est nécessaire et que les changements au règlement s'imposent. Lorsqu'il y a des risques pour l'environnement, et on fait valoir que tel est le cas en l'espèce, des personnes comme le ministre doivent examiner si les risques relatifs et absolus sont tels qu'une intervention s'impose au moment proposé;

" deuxièmement, le problème doit être décrit et documenté en termes clairs et concis, le problème doit être analysé, et les parties intéressées doivent être consultées sur les diverses façons de régler le problème;

" troisièmement, il faut qu'il soit démontré que la modification au règlement aidera à résoudre le problème. D'autres solutions réglementaires doivent être analysées de façon à retenir la solution la plus efficace;

" quatrièmement, il faut qu'il soit démontré que les avantages des modifications au règlement sont supérieurs à leur coût et, lorsqu'il a pour but de limiter les risques pour l'environnement, il faut également qu'il soit démontré que l'effort de réglementation sera consacré là où il sera le plus efficace, et une analyse avantages/coûts doit être effectuée pour évaluer les effets potentiels, par exemple les répercussions sur l'environnement et d'autres secteurs de la société;

" cinquièmement, le programme de réglementation conçu doit inclure les objectifs du programme, les normes d'application du programme et les modalités de contrôle; et

" finalement, le résumé de l'étude d'impact de la réglementation doit expliquer les procédures et les ressources qui seront utilisées pour assurer la conformité au règlement et son application.

Bien que, de nouveau, il y ait des éléments de preuve tendant à établir que les exigences précitées n'ont pas été respectées, je ne suis pas convaincu d'après l'ensemble de la preuve dont la Cour est saisie que les demandeurs ont prouvé qu'il y a eu contravention à la doctrine des attentes légitimes. Dans ses propos cités ci-dessus, Mme le juge Desjardins parle d'une "omission" de la part du ministre. Je ne trouve aucune omission en l'espèce, mais plutôt une profonde différence d'opinion sur la qualité ou le degré de conformité de la part du ministre. La doctrine des attentes légitimes ne donne pas à la présente Cour le pouvoir de s'assurer que les attentes personnelles des intéressés les plus défavorisés au sujet du processus seront respectées. Il suffit qu'il n'y ait pas "d'omission" de la part du ministre. Je n'en trouve aucune.

La septième question soulevée par les demandeurs est la suivante:

Le règlement se fonde sur des conclusions de faits erronées tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments disponibles.

Je reviens une fois encore à l'arrêt Inuit Tapirisat18. À la page 756, le juge Estey, s'exprimant au nom de la Cour, écrit ceci:

Bref, le gouverneur en conseil a entière discrétion dans la mesure où il respecte les limites fixées à sa compétence [. . .]

Le juge Estey poursuit en ces termes à la page 757:

Ma conclusion [. . .] est étayée par l'opinion du juge Megarry dans l'arrêt Bates v. Lord Hailsham (cité dans l'opinion de la majorité de cette Cour dans l'arrêt Nicholson) [. . .] En refusant d'intervenir, le juge Meggary a dit à la page 1378:

    [traduction] Admettons que dans le domaine de ce qu'on appelle le quasi-judiciaire, on applique les règles de justice naturelle et, dans le domaine administratif ou exécutif, l'obligation générale d'agir équitablement. Mais cela ne me paraît pas s'appliquer au processus législatif, qu'il s'agisse de lois ou de législation déléguée. Plusieurs de ceux que la législation déléguée concerne, et souvent de façon très importante, ne sont jamais consultés au cours de son processus d'adoption; et pourtant, ils n'ont aucun recours. [. . .] Il n'existe, que je sache, aucun droit implicite d'être consulté ou de présenter des objections, ni aucun principe en vertu duquel les tribunaux peuvent donner des ordres au pouvoir législatif à la demande de ceux qui prétendent qu'il n'a pas consacré un temps suffisant à la consultation et à l'étude de la question19.

Une fois de plus, sauf pour ce qui a été noté précédemment concernant les oies de Ross et "autres espèces difficiles à distinguer des oies des neiges", je ne trouve aucune erreur susceptible de contrôle qui serait de la nature d'une conclusion de fait erronée tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments disponibles.

La huitième question est formulée dans les termes suivants:

En supposant que le règlement contesté ait un fondement légalement valide, il n'en va pas de même des dispositions du règlement qui autorisent la chasse aux oies de Ross comme espèce en dehors du temps prohibé.

Comme je l'ai indiqué précédemment, je partage entièrement l'opinion des demandeurs sur ce point.

Finalement, la dernière question est formulée comme suit:

(i)    Les mesures prises par le ministre et le gouverneur en conseil dans la formulation et la prise de ces règlements ont contrevenu aux droits des autochtones, protégés par la Constitution, d'être consultés au sujet des mesures, des programmes et des activités autorisés par le gouvernement concernant les ressources fauniques, à l'égard desquelles les autochtones ont des droits ancestraux, issus de traités et protégés par la Constitution, et de participer à ces mesures et programmes, et constituent un déni fondamental permanent de ces droits.

(ii)    Le ministre et le gouverneur en conseil ont ignoré et contrevenu à leur obligation de fiduciaire à l'égard des autochtones, qui les oblige, notamment, à obtenir des renseignements quant aux répercussions probables que le règlement aura sur les autochtones, les collectivités autochtones et la faune dont ils dépendent pour leur subsistance ou à l'égard de laquelle ils ont des droits, à examiner objectivement ces renseignements avant de formuler et de recommander des propositions semblables, et à s'abstenir de prendre ces mesures en cas de répercussions négatives probables.

La Nation dénée faisait partie des demandeurs devant la Cour et elle avait manifestement qualité pour soulever ces questions. Malheureusement, elle n'a déposé aucune preuve, bien qu'il ait été indiqué dans la demande de contrôle judiciaire que cette preuve allait bientôt être déposée. Je n'accorde aucune importance aux pièces jointes à un affidavit déposé au nom d'un autre demandeur qui sont présentées comme étant des copies de lettres de la Nation dénée au ministre de l'Environnement et à d'autres personnes dans lesquelles la Nation dénée exprime ses préoccupations concernant les propositions relatives au Règlement modificateur et demande que des consultations aient lieu ou que celles-ci soient plus exhaustives.

Il ne fait aucun doute que le Règlement modificateur a des répercussions sur les intérêts ancestraux des Premières nations protégés par la Constitution et, peut-être même aussi, sur les intérêts issus de traités. La preuve dont je suis saisi démontre qu'il y a eu des consultations, comme il en a été question précédemment, même si ces consultations n'ont pas toutes été de même niveau dans les différentes régions du pays et avec les différentes populations visées, y compris les Premières nations.

Il n'a pas été contesté devant moi que les Premières nations comptent sur les oies des neiges pour se nourrir et peut-être pour d'autres fins. Bien qu'il soit clair que l'objectif de la chasse du printemps soit de réduire de façon importante, peut-être considérablement, les "populations surabondantes", il est difficile de concevoir que le résultat aura vraisemblablement, du moins à court terme, pour effet d'influer négativement sur les intérêts ancestraux, issus de traités et protégés par la Constitution des Autochtones. Par ailleurs, la preuve dont je suis saisi n'établit pas clairement que ces intérêts ont été traités directement.

Depuis quelques années, un certain nombre de jugements ont traité des obligations de la Couronne à l'égard des Premières nations dans des situations où il s'agissait de droits ancestraux ou issus de traités. Je ferai brièvement référence à certains de ces jugements.

Dans l'arrêt R. c. Sparrow20, traitant de mesures de conservation du poisson dans la province de la Colombie-Britannique, le juge en chef et le juge La Forest, qui ont prononcé le jugement de la Cour, indiquent ceci à la page 1119:

Nous reconnaissons que la norme de justification à respecter est susceptible d'imposer un lourd fardeau à Sa Majesté. Toutefois, la politique gouvernementale relativement à la pêche en Colombie-Britannique commande déjà, et ce, indépendamment du par. 35(1), que, dans l'attribution du droit de prendre du poisson, le droit des Indiens de pêcher à des fins d'alimentation ait la priorité sur les intérêts d'autres groupes d'usagers. Le droit constitutionnel énoncé au par. 35(1) exige que Sa Majesté assure que Ses règlements respectent cette attribution de priorité. Cette exigence ne vise pas à miner la capacité et la responsabilité du Parlement de créer et d'administrer des plans globaux de conservation et de gestion concernant la pêche au saumon. L'objectif est plutôt de garantir que ces plans réservent aux peuples autochtones un traitement qui assure que leurs droits sont pris au sérieux.

Il y a, dans l'analyse de la justification, d'autres questions à aborder, selon les circonstances de l'enquête. Il s'agit notamment des questions de savoir si, en tentant d'obtenir le résultat souhaité, on a porté le moins possible atteinte à des droits, si une juste indemnisation est prévue en cas d'expropriation et si le groupe d'autochtones en question a été consulté au sujet des mesures de conservation mises en Å“uvre. On s'attendrait certainement à ce que les peuples autochtones, traditionnellement sensibilisés à la conservation et ayant toujours vécu dans des rapports d'interdépendance avec les ressources naturelles, soient au moins informés relativement à la conception d'un régime approprié de réglementation de la pêche21.

La dernière phrase citée s'applique certainement aussi à la conception d'un régime approprié de préservation des populations d'oiseaux migrateurs ou à la modification de ce régime, y compris au besoin à la réglementation.

Dans l'arrêt R. c. Badger22, le juge Cory écrit à la page 812:

Il ne fait pas de doute que les droits ancestraux et les droits issus de traités diffèrent, tant de par leur origine que de par leur structure. Les droits ancestraux tirent leur origine des coutumes et des traditions des peuples autochtones. Pour paraphraser les propos du juge Judson dans l'arrêt Calder [. . .] ils expriment le droit des peuples autochtones de continuer à vivre de la même façon que leurs ancêtres. [Citation omise.]

Il poursuit dans les termes suivants à la page 813:

En outre, les droits ancestraux et les droits issus de traités ont en commun un caractère sui generis particulier [. . .] Dans chaque cas, l'honneur de la Couronne est en jeu dans le cadre de ses rapports avec les peuples autochtones. [Citations omises.]

Et encore plus loin dans la même page, il ajoute:

Le texte du par. 35(1) de la Loi constitutionnelle de 1982 appuie l'application d'une analyse commune aux atteintes à des droits ancestraux et à des droits issus de traités.

Finalement, à la page 814, le juge Cory conclut de la façon suivante:

Bref, il est manifeste qu'une loi ou un règlement portant atteinte prima facie à des droits ancestraux doit être justifié.

D'après la preuve dont je suis saisi, je ne peux tout simplement pas conclure que le Règlement modificateur constitue une atteinte prima facie aux droits des Autochtones.

Dans l'arrêt Halfway River First Nation v. British Columbia (Minister of Forests)23, une affaire traitant des mesures de conservation en Colombie-Britannique, le juge Dorgan écrit ceci à la page 312:

[traduction] Le ministère des Forêts soutient que l'obligation de consultation ne se pose pas tant que les groupes d'autochtones n'ont pas établi qu'il y a eu une atteinte prima facie à leurs droits, dont il est question dans l'arrêt Sparrow, lorsque la consultation n'est pas considérée comme étant la deuxième étape du critère de l'atteinte aux droits. À mon avis, cette interprétation n'est pas compatible avec la jurisprudence citée et elle est inappropriée compte tenu de la relation qui existe entre la Couronne et les peuples autochtones.

D'après les arrêts Jack, Noel et Delgamuukw, la Couronne a l'obligation de tenir des consultations raisonnables avec une Première nation qui peut être visée par sa décision. Pour que l'on puisse conclure que la Couronne a tenu des consultations raisonnables, elle doit s'informer complètement des pratiques et des opinions de la nation visée. En agissant ainsi, elle doit aussi s'assurer que le groupe touché dispose de tous les renseignements au sujet de la législation ou de la décision proposée et de ses répercussions potentielles sur les droits ancestraux.

J'ai été saisi de certains éléments de preuve, assez limités, indiquant que les défendeurs avaient rempli leurs obligations au regard de cet élément du critère. Bien qu'il soit malheureux que la preuve fournie par les défendeurs à cet égard n'ait pas été plus complète, en l'absence de toute autre preuve déposée au nom de la Nation dénée, ou en fait au nom de toute autre Première nation, je suis convaincu qu'il n'y a tout simplement pas de fondement à partir duquel je pourrais conclure, à l'encontre des défendeurs, qu'ils ont manqué à leurs obligations à l'égard de la Première nation dans l'élaboration et l'adoption du Règlement modificateur24.

8)  CONCLUSION ET DISPOSITIF

Comme je l'ai indiqué plus tôt dans les présents motifs, j'ai réglé cette affaire à l'audience le 15 avril 1999. De même, comme je l'ai indiqué ci-dessus, voici quel était le dispositif de mon jugement:

[traduction]

LA COUR DÉCLARE PAR LES PRÉSENTES:

1.    Que le Règlement modifiant le Règlement sur les oiseaux migrateurs, C.P. 1999-526, en date du 25 mars 1999, est ultra vires dans la mesure où il entend autoriser la chasse aux oies de Ross et à d'autres espèces difficiles à distinguer des oies des neiges, au cours des périodes et dans les régions énumérées au tableau 1.2 du Règlement.

2.    Qu'à tous autres égards, la demande de contrôle judiciaire des demandeurs est rejetée.

En outre, comme aucun des avocats des demandeurs ou des défendeurs n'a demandé les dépens, je n'ai prononcé aucune ordonnance à ce sujet.

1 Enregistrement DORS/99-147, 25 mars 1999.

2 L.C. 1994, ch. 22.

3 133 Gazette du Canada, Partie I, à la p. 227 (30 janvier 1999).

4 [1980] 2 R.C.S. 735.

5 [1990] 3 C.F. 410 (C.A.).

6 [1983] 1 R.C.S. 106.

7 L.C. 1994, ch. 22.

8 Au moment où il a déposé son affidavit sous serment, M. Wendt était chef de la Division de la conservation des oiseaux migrateurs du Service canadien de la faune d'Environnement Canada.

9 Dossier des demandeurs, vol. V, à la p. 45.

10 Loi de la Convention concernant les oiseaux migrateurs, S.C. 1917, ch. 18, proclamée le 29 août 1917.

11 Affidavit de John Stephen Wendt, établi sous serment le 26 mars 1999, par. 44; dossier des défendeurs, vol. I, à la p. 138.

12 (1976), 12 O.R. (2d) 164 (C. div.).

13 Ruth Sullivan, 3e éd. Toronto: Butterworths, 1994, à la p. 397.

14 À l'appui des propositions énumérées dans cette citation, en plus de l'arrêt Schavernoch c. Commission des réclamations étrangères et autres qui est publié à [1982] 1 R.C.S. 1092, les causes jurisprudentielles suivantes sont citées: Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689, à la p. 733; National Corn Growers Assn. c. Canada (Tribunal des importations), [1990] 2 R.C.S. 1324, aux p. 1371 et 1372; Salomon v. Commissioners of Customs & Excise, [1967] 2 Q.B. 116 (C.A.), aux p. 143 et 144.

15 [1959] R.C.S. 58.

16 (1994), 174 N.R. 37 (C.A.F.).

17 Pièce 8 jointe à l'affidavit de M. Vernon G. Thomas, établi sous serment le 1er mars 1999, dossier des demandeurs, vol. II.

18 Précité, note 4.

19 Bates v. Lord Hailsham, [1972] 1 W.L.R. 1373 (Ch. D.); et Nicholson c. Haldimand-Norfolk Regional Board of Commissionners of Police, [1979] 1 R.C.S. 311.

20 [1990] 1 R.C.S. 1075.

21 L'art. 35(1) dont il est question ci-dessus figure à la partie II de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44]. Cet art. est rédigé dans les termes suivants:

    35. (1) Les droits existants"ancestraux ou issus de traités"des peuples autochtones du Canada sont reconnus et confirmés.

22 [1996] 1 R.C.S. 771.

23 [1998] 4 W.W.R. 283 (C.S.C.-B.).

24 Dans la décision Makivik Corp. c. Canada (Ministre du Patrimoine canadien), [1999] 1 C.F. 38 (1re inst.), une cause ayant trait à la négociation de droits fonciers autochtones dans le contexte d'un traité, le juge en chef adjoint Richard, en faisant référence à un certain nombre de causes que j'ai déjà citées et à d'autres, aux p. 79 et 80, a énoncé un certain nombre de "principes généraux" qui peuvent être tirés de ces causes. En outre, les par. 107 à 109 figurant aux mêmes pages énoncent certaines affirmations générales qui pourraient très bien s'appliquer dans le contexte de la présente espèce.

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