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     IMM-3814-98

Arshad Mahmood Chaudhry (demandeur)

c.

Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (défendeur)

     IMM-3813-98

Zafar Iqbal Shouq (demandeur)

c.

Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (défendeur)

Répertorié: Chaudhryc. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)(1re inst.)

Section de première instance, juge Evans"Winnipeg, 15 janvier; Ottawa, 8 mars 1999.

Citoyenneté et Immigration Exclusion et renvoi Personnes non admissibles Le demandeur, un citoyen du Pakistan, a été reconnu coupable de trafic de stupéfiants et une mesure d'expulsion a été prise contre luiIl a sollicité une ordonnance enjoignant à la section d'arbitrage d'examiner les motifs de prolongation de la garde en application de l'art. 103(6) de la LoiLa personne qui est visée par l'ordre prévu à l'art. 105(1) peut êtregardéeau sens de l'art. 103(6) de la Loi sur l'immigrationL'art. 103(6) accorde des protections procédurales importantes lorsque l'interrogatoire, l'enquête ou le renvoi ne peuvent avoir lieu à bref délaiIl devrait être interprété de façon à protéger la liberté de la personne et à prévoir l'examen par la section d'arbitrage des motifs qui pourraient justifier la prorogation de l'ordre prévu à l'art. 105(1)L'examen de l'ordre n'est requis qu'au moment où le détenu devient admissible à la semi-liberté ou à des sorties sans surveillance.

Droit constitutionnel Charte des droits Garanties juridiquesLe fait de priver un détenu de son admissibilité à la semi-liberté ou aux sorties sans surveillance constitue-t-il un emprisonnement au sens de l'art. 9 de la Charte?Une personne visée par l'ordre prévu à l'art. 105(1) est gardée conformément à la Loi sur l'immigration et est égalementdétenue ou emprisonnéeen application de l'art. 9 de la CharteAfin d'établir que l'art. 9 a été violé, le demandeur doit démontrer que la détention ou l'emprisonnement était arbitraireLe détenu qui est visé par l'ordre prévu à l'art. 105(1) serait arbitrairement détenu si les motifs justifiant la prorogation de l'ordre ne pouvaient pas être examinés par la section d'arbitrage.

Libération conditionnelle Le détenu, un citoyen du Pakistan dont le visa de visiteur était expiré, purgeait une peine pour trafic de stupéfiantsUne mesure d'expulsion a été prise contre luiUn mandat d'arrestation a été délivré en vertu de l'art.  103(1) de la Loi sur l'immigrationL'ordre fondé sur l'art. 105 de remettre le détenu à un agent d'immigration en vue de son placement sous garde à l'expiration de sa peine l'empêche d'être admissible à la semi-liberté ou d'être autorisé à sortir sans surveillanceLe législateur a reconnu l'admissibilité à la libération conditionnelle et la dénégation du droit d'un détenu de faire examiner son cas aux fins de la libération conditionnelle peut être assimilée à la détention parce que le détenu doit purger sa peine dans des conditions plus strictes que celles qui s'appliquent d'une façon générale aux autres détenusLa détention est arbitraire si la section d'arbitrage de la CISR ne procède pas à un examen fondé sur l'art. 103(6).

Il s'agit de demandes de contrôle judiciaire de la décision de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié dans laquelle l'arbitre a déclaré qu'il n'avait pas compétence "pour ordonner unilatéralement l'examen des motifs de la garde" en vertu du paragraphe 103(6) de la Loi sur l'immigration en l'absence d'une demande d'un agent principal. Le demandeur, qui est citoyen pakistanais, est entré au Canada en juillet 1993 à titre de visiteur sans documents. En octobre 1994, il a été reconnu coupable de deux chefs de trafic de stupéfiants et a été condamné sous les deux chefs à une peine d'emprisonnement de 14 ans. En mars 1995, une mesure d'expulsion a été prise contre lui et, un mois plus tard, un mandat d'arrestation a été délivré en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l'immigration. Simultanément, il a été ordonné, en vertu du paragraphe 105(1) de la Loi, au directeur de l'établissement où le demandeur était incarcéré de continuer à détenir celui-ci jusqu'à l'expiration de sa peine et de le remettre à un agent d'immigration en vue de son placement sous garde. Cet ordre vise à empêcher le détenu de se dérober à son renvoi du Canada après sa mise en liberté. Le défendeur prétend que le demandeur n'a pas le droit de faire examiner les motifs de la prorogation de l'ordre prévu au paragraphe 105(1) par la section d'arbitrage ou par un autre organisme quasi judiciaire indépendant. Les questions suivantes ont été soulevées en l'espèce: 1) un non-citoyen qui purge une peine et qui est visé par un ordre prévu au paragraphe 105(1) de la Loi sur l'immigration et dont le cas ne peut donc pas être examiné aux fins de la semi-liberté ou d'une sortie sans surveillance est-il gardé aux fins du renvoi conformément à la Loi sur l'immigration de sorte qu'il a droit à une révision des motifs de la garde en vertu du paragraphe 103(6) de la Loi? 2) si tel n'est pas le cas, cette personne est-elle arbitrairement détenue en violation de l'article 9 de la Charte et privée du droit à l'égalité sans discrimination fondée sur sa nationalité garanti par l'article 15 de la Charte? 3) une personne qui est visée par l'ordre prévu à l'article 105 tel qu'il existait avant d'être modifié en 1995 est-elle admissible à la semi-liberté ou peut-elle être autorisée à sortir sans surveillance?

Jugement: les demandes sont accueillies.

1) La première question litigieuse était de savoir s'il est possible de dire que par suite de l'ordre visé au paragraphe 105(1) de la Loi sur l'immigration, le demandeur est "gardé" au sens du paragraphe 103(6). Le fait que le demandeur est détenu à cause de la peine qui lui a été infligée lorsqu'il a été reconnu coupable de l'infraction criminelle ne l'empêche pas nécessairement d'être également gardé en vertu de la Loi sur l'immigration. L'ordre prévu au paragraphe 105(1) a uniquement pour effet d'empêcher l'examen du cas du demandeur aux fins de la semi-liberté ou des sorties sans surveillance. Même si cela n'est pas aussi accablant que l'isolement (examiné dans les décisions portant sur les "prison[s] dans [les] prison[s]"), le fait d'être inadmissible à la semi-liberté et aux sorties sans surveillance est une question sérieuse, étant donné que ces mesures sont des outils favorisant la réadaptation des délinquants et leur réinsertion sociale. La conclusion selon laquelle un ordre prévu au paragraphe 105(1) entraîne la garde de la personne visée est étayée par le libellé de la disposition, en ce sens qu'on ordonne au directeur de l'établissement "de continuer à la détenir". Par conséquent, la personne concernée est "gardée" aux fins du paragraphe 103(6) de la Loi. Ce paragraphe accorde des protections procédurales importantes lorsque l'interrogatoire, l'enquête ou le renvoi ne peuvent pas avoir lieu à bref délai. Le fait qu'il a été édicté avant l'article 105 ne veut pas nécessairement dire qu'il ne peut pas maintenant être interprété comme prévoyant un examen dans le cas des personnes gardées en vertu du paragraphe 105(1). Le paragraphe 103(6) devrait être interprété de façon à prévoir l'examen par la section d'arbitrage des motifs qui pourraient justifier la prorogation de l'ordre et par conséquent de la garde. Garder une personne "en prison dans une prison" sans tenir d'audience soit avant soit après que l'ordre a été donné constituerait une violation de l'article 9 de la Charte. Toute ambiguïté à laquelle donne lieu le paragraphe 103(6) devrait être résolue de façon à rendre la disposition constitutionnelle. L'examen de l'ordre prévu au paragraphe 105(1) ne serait effectué qu'au moment où l'individu devient admissible à la semi-liberté ou à des sorties sans surveillance. La réparation accordée est une ordonnance déclaratoire portant qu'une personne visée par l'ordre prévu au paragraphe 105(1) est gardée conformément au paragraphe 103(6) de la Loi sur l'immigration et que les dispositions de ce paragraphe relatives à l'examen s'appliquent aux ordres prévus au paragraphe 105(1).

2) Il est soutenu que le fait de priver un détenu de son admissibilité à la semi-liberté ou aux sorties sans surveillance équivaut à une détention ou à un emprisonnement au sens de l'article 9 de la Charte. L'interprétation des droits reconnus par la Charte devrait être éclairée, sinon toujours déterminée d'une façon concluante par la common law. Le droit protégé par l'article 9 ne devrait pas être moins étendu que le droit protégé par le bref d'habeas corpus, qui a été si étroitement lié à l'idée selon laquelle les individus ne doivent pas illicitement être privés de leur liberté que son ancien statut quasi constitutionnel a été officiellement reconnu sur le plan constitutionnel par l'alinéa 10c) de la Charte. Une personne visée par l'ordre prévu au paragraphe 105(1) est gardée conformément à la Loi sur l'immigration et est également "détenue ou emprisonnée" aux fins de l'article 9 de la Charte. Afin d'établir que l'article 9 a été violé, le demandeur doit également démontrer que la détention ou l'emprisonnement était arbitraire. Le détenu qui est visé par l'ordre prévu au paragraphe 105(1) serait arbitrairement détenu si les motifs justifiant la prorogation de l'ordre ne pouvaient pas être examinés par la section d'arbitrage. Même si le législateur n'est peut-être pas constitutionnellement tenu de prévoir la libération conditionnelle, une fois qu'il a reconnu l'admissibilité à la libération conditionnelle, la dénégation du droit légal d'un détenu de faire examiner son cas aux fins de la libération conditionnelle peut constituer une détention parce que la personne concernée doit purger sa peine dans des conditions beaucoup plus strictes que celles qui s'appliquent d'une façon générale aux autres détenus. Et si ce droit est annulé sans qu'une audience soit tenue ou sans qu'un examen soit effectué, la détention est arbitraire. Par conséquent, pour que la détention ne soit pas arbitraire, il suffirait que la section d'arbitrage effectue un examen aussitôt que possible après l'ordre entraînant l'inadmissibilité du détenu, et tous les six mois par la suite. Étant donné que le droit d'entrer et de demeurer au Canada et le droit de quitter le Canada s'applique uniquement aux citoyens canadiens en vertu de l'article 6 de la Charte, les tribunaux n'ont pas assujetti les dispositions de la Loi sur l'immigration à un contrôle en vertu de l'article 15 de la Charte pour le motif que ces dispositions constituent de la discrimination fondée sur la nationalité. Le paragraphe 105(1) de la Loi vise à faire en sorte que les personnes visées par un ordre comparaissent à un interrogatoire ou à une enquête susceptibles d'entraîner leur renvoi du Canada, ou obtempèrent à la mesure de renvoi elle-même. Cette disposition fait donc partie d'"un régime d'expulsion" et n'est pas assujettie à un contrôle en vertu de l'article 15.

3) L'ordre auquel le deuxième demandeur, M. Shouq, était assujetti en vertu de l'ancien article 105 de la Loi n'a pas été automatiquement remplacé par un nouvel ordre par suite de l'adoption de la version actuelle du paragraphe 105(1), et en fait aucun nouvel ordre n'a été donné. Pour ces motifs, M. Shouq est admissible à la semi-liberté et aux sorties sans surveillance. Des questions ont été certifiées conformément au paragraphe 83(1) de la Loi.

    lois et règlements

        Charte canadienne des droits et libertés, qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44], art. 1, 6, 9, 10c), 15.

        Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, art. 18.1 (édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5).

        Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20, art. 100, 102 (mod. par L.C. 1995, ch. 42, art. 27), 115 (mod., idem, art. 31, 71; 1997, ch. 17, art. 19), 116 (mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 58; 1995, ch. 42, art. 32, 71), 119 (mod. par L.C. 1995, ch. 22, art. 13, 18; ch. 42, art. 33; 1997, ch. 17, art. 20), 128(3) (mod. par L.C. 1995, ch. 42, art. 42).

        Loi sur les prisons et les maisons de correction, L.R.C. (1985), ch. P-20.

        Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, art. 37 (mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 26), 50(2), 83(1) (mod., idem, art. 73), 103(1) (mod., idem, art. 94; 1995, ch. 15, art. 19), (3) (mod. par L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 28, art. 27; L.C. 1992, ch. 49, art. 94), (6) (mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 94; 1995, ch. 15, art. 19), (7) (mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 94), 105 (mod. par L.C. 1994, ch. 26, art. 35), (1) (mod. par L.C. 1995, ch. 15, art. 20), (2) (mod., idem).

        Loi sur l'immigration de 1976, S.C. 1976-77, ch. 52, art. 104(3)b).

        Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172, art. 19(4)k)(iv) (mod. par DORS/84-849, art. 1).

    jurisprudence

        décisions appliquées:

        Renvoi relatif au Régime d'assistance publique du Canada (C.-B.), [1991] 2 R.C.S. 525; (1991), 83 D.L.R. (4th) 297; [1991] 6 W.W.R. 1; 58 B.C.L.R. (2d) 1; 127 N.R. 161; Webb v. British Columbia (Director, Lower Mainland Regional Correction Centre) (1988), 51 D.L.R. (4th) 726; 26 B.C.L.R. (2d) 354; 42 C.C.C. (3d) 267; 35 C.R.R. 173 (C.A.); Chiarelli c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1992] 1 R.C.S. 711; (1992), 90 D.L.R. (4th) 289; 2 Admin. L.R. (2d) 125; 72 C.C.C. (3d) 214; 8 C.R.R. (2d) 234; 16 Imm. L.R. (2d) 1; 135 N.R. 161; Cardinal et autre c. Directeur de l'établissement Kent, [1985] 2 R.C.S. 643; (1985), 24 D.L.R. (4th) 44; [1986] 1 W.W.R. 577; 69 B.C.L.R. 255; 16 Admin. L.R. 233; 23 C.C.C. (3d) 118; 49 C.R. (3d) 35; 63 N.R. 353.

        décisions citées:

        R. c. Gamble, [1988] 2 R.C.S. 595; (1988), 31 O.A.C. 81; 45 C.C.C. (3d) 204; 66 C.R. (3d) 193; 89 N.R. 161; Symes c. Canada, [1993] 4 R.C.S. 695; (1993), 110 D.L.R. (4th) 470; 19 C.R.R. (2d) 1; [1994] 1 C.T.C. 40; 94 DTC 6001; 161 N.R. 243; R. c. Swain, [1991] 1 R.C.S. 933; (1991), 75 O.R. (2d) 388; 71 D.L.R. (4th) 551; 63 C.C.C. (3d) 481; 5 C.R. (4th) 253; 3 C.R.R. (2d) 1; 125 N.R. 1; 47 O.A.C. 81.

DEMANDES de contrôle judiciaire de la décision par laquelle la section d'arbitrage de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a déclaré qu'elle n'avait pas compétence "pour ordonner unilatéralement l'examen des motifs de la garde" en vertu du paragraphe 103(6) de la Loi sur l'immigration en l'absence d'une demande d'un agent principal. Demandes accueillies.

    ont comparu:

    David Matas pour les demandeurs.

    Joel Katz pour le défendeur.

    avocats inscrits au dossier:

    David Matas, Winnipeg, pour les demandeurs.

    Le sous-procureur général du Canada pour le défendeur.

Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance et l'ordonnance rendus par

Le juge Evans:

A.  INTRODUCTION

[1]Ces demandes de contrôle judiciaire, qui sont fondées sur l'article 18.1 [édicté par L.C. 1990, ch. 8, art. 5] de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, dans sa forme modifiée, ont été entendues ensemble conformément à une ordonnance rendue par le juge MacKay le 18 novembre 1998. Il y a de légères différences entre les faits importants et les questions de droit se rapportant à chaque affaire. Pour simplifier les choses, ces motifs sont fondés sur les faits qui se rapportent à la demande de M. Chaudhry (ci-après le demandeur), mais ils s'appliquent aux deux affaires. J'examinerai subséquemment le point propre à l'affaire de M. Shouq.

[2]La demande découle d'une décision prise par M. Tetreault, de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (section d'arbitrage) (ci-après la section d'arbitrage), figurant dans une lettre datée du 14 juillet 1998. Cette lettre, qui était adressée à l'avocat du demandeur, a été rédigée en réponse à une lettre que celui-ci avait envoyée le 2 juin 1998. Dans sa lettre, M. Tetreault déclarait qu'il n'avait pas compétence [traduction] "pour ordonner unilatéralement l'examen des motifs de la garde" en vertu du paragraphe 103(6) de la Loi sur l'immigration , L.R.C. (1985), ch. I-2, dans sa forme modifiée [par L.C. 1992, ch. 49, art. 94; 1995, ch. 15, art. 19] , en l'absence d'une demande d'un agent principal. Étant donné qu'aucune demande n'avait été faite à l'égard du demandeur, l'arbitre a déclaré qu'il ne pouvait pas examiner les motifs de prolongation de la garde.

[3]Le demandeur sollicite une ordonnance enjoignant à la section d'arbitrage d'effectuer pareil examen, comme l'exige la loi selon lui, ainsi qu'une ordonnance accessoire enjoignant au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (ci-après le défendeur) de demander à la section d'arbitrage d'examiner les motifs de prolongation de la garde. L'avocat du demandeur, Me Matas, maintient que le paragraphe 103(6) de la Loi sur l'immigration, s'il est interprété de la façon appropriée, exige cet examen, ou subsidiairement que les articles 9 et 15 de la Charte canadienne des droits et libertés [qui constitue la Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.) [L.R.C. (1985), appendice II, no 44]] l'exigent.

B.  HISTORIQUE

[4]Le demandeur, qui est citoyen pakistanais, est entré au Canada en juillet 1993 à titre de visiteur sans documents; il est demeuré au Canada sans autorisation lorsque son visa a expiré en décembre de cette année-là. En octobre 1994, il a été reconnu coupable de deux chefs de trafic de stupéfiants et a été condamné sous les deux chefs à une peine d'emprisonnement de 14 ans qu'il purge au pénitencier de Stony Mountain.

[5]Compte tenu de ces faits et à la suite d'une enquête, une mesure d'expulsion a été prise contre le demandeur le 29 mars 1995. Le 19 avril 1995, un mandat d'arrestation a été délivré en vertu du paragraphe 103(1) [mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 94] de la Loi sur l'immigration. Selon une lettre datée du 29 septembre 1997, rédigée par C. Marchand, du Centre d'Immigration du Canada (Winnipeg), le mandat a été délivré parce que l'on craignait que le demandeur n'obtempère pas à la mesure de renvoi.

[6]Le jour où le mandat a été délivré, il a également été ordonné, en vertu de l'article 105 [mod. par L.C. 1994, ch. 26, art. 35] [maintenant le paragraphe 105(1) (mod. par L.C. 1995, ch. 15, art. 20)] de la Loi sur l'immigration, au directeur de l'établissement où le demandeur était incarcéré, de continuer à détenir celui-ci jusqu'à l'expiration de sa peine, compte tenu des éventuelles réductions légales de peine ou des mesures de clémence et de le remettre à un agent d'immigration en vue de son placement sous garde. Ce dernier ordre vise à faire en sorte qu'une personne qui fait l'objet d'une mesure d'expulsion et qui est assujettie à un mandat d'arrestation ne soit pas mise en liberté après avoir purgé sa peine, mais qu'elle soit remise à un agent d'immigration de façon à l'empêcher de se dérober à son renvoi.

[7]Toutefois, dans ce cas-ci, l'aspect le plus important de l'ordre prévu au paragraphe 105(1) est qu'en prévoyant que "[p]ar dérogation à la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition" la personne concernée continue à être incarcérée jusqu'à l'expiration de sa peine, le paragraphe 105(1) empêche cette personne d'être admissible à la semi-liberté ou d'être autorisée à sortir sans surveillance conformément aux articles 102 [mod. par L.C. 1995, ch. 42, art. 27] et 116 [mod. par L.C. 1993, ch. 34, art. 58; 1995, ch. 42, art. 32, 71] de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition , L.C. 1992, ch. 20, dans sa forme modifiée. La chose est confirmée dans une lettre du 18 septembre 1997 que la Commission nationale des libérations conditionnelles a envoyée au demandeur. En outre, et c'est le nœud du litige, le demandeur n'a pas le droit, selon le défendeur, de faire examiner les motifs de la prolongation ordonnée en vertu du paragraphe 105(1) par la section d'arbitrage ou par un autre organisme quasi judiciaire ne relevant pas du défendeur.

C.  LE CADRE LÉGISLATIF

[8]Les dispositions suivantes de la Loi sur l'immigration sont essentielles au règlement de la présente demande de contrôle judiciaire. J'ai souligné les passages de ces dispositions qui sont les plus pertinents [art. 103(1) (mod. par L.C. 1995, ch. 15, art. 19), (3) (mod. par L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 28, art. 27; L.C. 1992, ch. 49, art. 94), (6) (mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 94; 1995, ch. 15, art. 19), (7) (mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 94), 105(1) (mod. par L.C. 1995, ch. 15, art. 20), (2) (mod., idem)]:

103. (1) Le sous-ministre ou l'agent principal peut lancer un mandat d'arrestation contre toute personne qui doit faire l'objet d'un interrogatoire, d'une enquête ou d'une décision de l'agent principal aux termes du paragraphe 27(4), ou qui est frappée par une mesure de renvoi ou de renvoi conditionnel, lorsqu'il croit, pour des motifs raisonnables, qu'elle constitue une menace pour la sécurité publique ou qu'elle ne comparaîtra pas, ou n'obtempérera pas à la mesure de renvoi.

    [. . .]

(3) Dans le cas d'une personne devant faire l'objet d'une enquête ou d'une enquête complémentaire ou frappée par une mesure de renvoi ou de renvoi conditionnel, l'arbitre peut ordonner:

    a) soit de la mettre en liberté, aux conditions qu'il juge indiquées en l'espèce, notamment la fourniture d'un cautionnement ou d'une garantie de bonne exécution;

    b) soit de la faire garder, s'il croit qu'elle constitue vraisemblablement une menace pour la sécurité publique ou qu'à défaut de cette mesure, elle se dérobera vraisemblablement à l'enquête ou à sa reprise ou n'obtempérera pas à la mesure de renvoi;

    c) soit de fixer les conditions qu'il juge indiquées en l'espèce, notamment la fourniture d'un cautionnement ou d'une garantie de bonne exécution.

    [. . .]

(6) Si l'interrogatoire, l'enquête ou le renvoi aux fins desquels il est gardé n'ont pas lieu dans les quarante-huit heures, ou si la décision n'est pas prise aux termes du paragraphe 27(4) dans ce délai, l'intéressé est amené, dès l'expiration de ce délai, devant un arbitre pour examen des motifs qui pourraient justifier une prolongation de sa garde; par la suite, il comparaît devant un arbitre aux mêmes fins au moins une fois:

    a) dans la période de sept jours qui suit l'expiration de ce délai;

    b) tous les trente jours après l'examen effectué pendant cette période.

(7) S'il est convaincu qu'il ne constitue vraisemblablement pas une menace pour la sécurité publique et qu'il ne se dérobera vraisemblablement pas à l'interrogatoire, à l'enquête ou au renvoi, l'arbitre chargé de l'examen prévu au paragraphe (6) ordonne la mise en liberté de l'intéressé, aux conditions qu'il juge indiquées en l'espèce, notamment la fourniture d'un cautionnement ou d'une garantie de bonne exécution.

    [. . .]

105. (1) Par dérogation à la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et à la Loi sur les prisons et maisons de correction et à toute loi provinciale, si le mandat ou l'ordre prévus aux paragraphes 103(1) ou (3) visent une personne incarcérée dans un lieu de détention en application de l'ordonnance d'un tribunal ou d'un autre organisme, le sous-ministre peut ordonner au gardien, directeur ou responsable de ce lieu:

    a) d'une part, de continuer à la détenir jusqu'à l'expiration de sa peine ou de la durée de sa détention, compte tenu des éventuelles réductions légales de peine ou des mesures de clémence;

    b) d'autre part, de la remettre par la suite à un agent d'immigration en vue de son placement sous garde.

(2) Le paragraphe (1) n'a pas pour effet d'empêcher toute personne autorisée en vertu des lois qui y sont mentionnées à autoriser la sortie sous surveillance de personnes incarcérées conformément à ces lois. [Soulignements ajoutés.]

[9]Deux dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés peuvent également être pertinentes aux fins du règlement de la demande.

9. Chacun a droit à la protection contre la détention ou l'emprisonnement arbitraires.

    [. . .]

15. (1) La loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques.

D.  LES QUESTIONS EN LITIGE

[10]Comme je l'ai déjà mentionné, l'avocat du demandeur fonde sa cause sur l'interprétation des dispositions pertinentes de la Loi sur l'immigration et subsidiairement sur les articles 9 et 15 de la Charte canadienne des droits et libertés. Les questions soulevées sont les suivantes:

1.    Un non-citoyen incarcéré à la suite d'une condamnation au criminel qui est visé par l'ordre prévu au paragraphe 105(1) de la Loi sur l'immigration et dont le cas ne peut donc pas être examiné par la Commission nationale des libérations conditionnelles aux fins de la semi-liberté ou d'une sortie sans surveillance est-il gardé aux fins du renvoi conformément à la Loi sur l'immigration de sorte qu'il a droit à un examen des motifs de prolongation de la garde en vertu du paragraphe 103(6) de la Loi?

2.    Si pareille personne n'a pas droit à un examen en vertu du paragraphe 103(6), est-elle

    a) arbitrairement détenue en violation de l'article 9 de la Charte; et

    b) privée du droit à l'égalité sans discrimination fondée sur sa nationalité garanti par l'article 15 de la Charte?

3.    Une personne qui est visée par l'ordre prévu à l'article 105 tel qu'il existait avant d'être modifié en 1995 est-elle admissible à la semi-liberté ou peut-elle être autorisée à sortir sans surveillance?

E.  ANALYSE

Première question

[11]Me Matas a soutenu que la personne visée par l'ordre prévu au paragraphe 105(1) est dans la même situation que la personne emprisonnée dans une cellule dont la porte a deux serrures, une clé différente devant être utilisée pour chaque serrure et personne n'ayant les deux clés à la fois. Ainsi, la Commission nationale des libérations conditionnelles a une clé: elle peut accorder la semi-liberté et autoriser des sorties sans surveillance; cependant, elle ne peut pas examiner le cas du demandeur à l'égard de ces formes de mise en liberté temporaire parce que le paragraphe 105(1) interdit expressément la libération du demandeur avant l'expiration de sa peine, et ce, malgré la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Il importe de noter ici que l'article 105 cesse de s'appliquer lorsqu'une personne bénéficie d'une libération conditionnelle totale parce qu'elle a fini de purger sa peine: paragraphe 128(3) [mod. par L.C. 1995, ch. 42, art. 42] de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. D'autre part, la section d'arbitrage a la seconde clé, lorsqu'il s'agit de mettre une personne en liberté en vertu de la Loi sur l'immigration. Toutefois, le défendeur a soutenu qu'un détenu qui est visé par l'ordre prévu au paragraphe 105(1) n'a pas droit à un examen des motifs de la garde par la section d'arbitrage en vertu du paragraphe 103(6) parce qu'il n'est pas "gardé" conformément à la Loi sur l'immigration.

[12]Il s'agit de savoir s'il est possible de dire que par suite de l'ordre visé au paragraphe 105(1), le demandeur est "gardé" au sens du paragraphe 103(6). Bien sûr, même si l'ordre était annulé, le demandeur serait encore détenu à Stony Mountain jusqu'à l'expiration de sa peine, compte tenu des éventuelles réductions de peine, ou jusqu'à ce que la Commission nationale des libérations conditionnelles exerce son pouvoir discrétionnaire pour lui accorder la semi-liberté ou l'autoriser à sortir sans surveillance en vertu des articles 102 et 116 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Toutefois, le fait que le demandeur est détenu à cause de la peine qui lui a été infligée lorsqu'il a été reconnu coupable de l'infraction criminelle ne l'empêche pas nécessairement d'être également gardé en vertu de la Loi sur l'immigration.

[13]On trouve une analogie utile dans l'arrêt Cardinal et autre c. Directeur de l'établissement Kent, [1985] 2 R.C.S. 643, où il a été statué qu'un détenu de l'établissement qui avait été mis en isolement préventif pouvait contester la légalité de cette mesure au moyen d'un bref d'habeas corpus, ordonnant la libération d'une personne qui est illégalement détenue, même si, dans le cas où le bref serait délivré, le demandeur serait simplement libéré parmi la population générale du pénitencier. La question de savoir si une mesure a pour effet de mettre un détenu "en prison à l'intérieur d'une prison" de façon que sa liberté soit suffisamment limitée pour donner lieu à la délivrance d'un bref d'habeas corpus dépend de la mesure dans laquelle l'ordre rend encore plus dures les conditions auxquelles le détenu est emprisonné par rapport aux conditions auxquelles les autres détenus purgent leur peine. Dans l'arrêt Cardinal, il a été statué que l'isolement préventif de l'appelant était suffisamment dur pour considérer celui-ci comme étant détenu et que la légalité de la mesure autorisant l'isolement était donc susceptible de révision au moyen d'un bref d'habeas corpus.

[14]En principe, il est donc possible de dire qu'une personne qui est visée par l'ordre prévu au paragraphe 105(1) est "gardée" au sens du paragraphe 103(6) de la Loi sur l'immigration. La question de savoir si pareil ordre doit être ainsi caractérisé dépend de l'évaluation de l'importance des avantages dont le demandeur est privé et de la mesure dans laquelle les conditions auxquelles il est tenu de purger sa peine ont été rendues plus dures que celles auxquelles les autres détenus sont assujettis.

[15]D'une part, il est possible de dire qu'étant donné que l'ordre a uniquement pour effet d'empêcher l'examen du cas du demandeur aux fins de la semi-liberté ou des sorties sans surveillance, cet ordre ne peut pas être assimilé, par exemple, à la révocation de ces avantages ou même au refus d'accorder ces avantages: somme toute, la simple admissibilité ne garantit pas que les sorties seront de fait autorisées. D'autre part, bien sûr, l'inadmissibilité assure qu'elles ne peuvent pas l'être.

[16]En outre, même si cela n'est pas aussi manifestement accablant que l'isolement, le fait d'être inadmissible à la semi-liberté et aux sorties sans surveillance est une question sérieuse, étant donné que ces mesures sont considérées comme des outils importants facilitant la réalisation des objectifs de la loi, soit la réadaptation des délinquants et leur réinsertion sociale. Une personne est normalement admissible à ces formes de mise en liberté temporaire bien avant d'être admissible à la libération totale: voir les articles 115 [mod. par L.C. 1995, ch. 42, art. 31, 71; 1997, ch. 17, art. 19], 119 [mod. par L.C. 1995, ch. 22, art. 13, 18; ch. 42, art. 33; 1997, ch. 17, art. 20] de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.

[17]Le fait pour un individu d'être privé de la possibilité de passer du temps à l'extérieur de l'établissement en vue de se préparer à la libération totale est certainement suffisamment grave pour qu'il soit possible de dire qu'il est "gardé", compte tenu du fait en particulier que l'ordre prévu au paragraphe 105(1) peut continuer à s'appliquer jusqu'à l'expiration de la peine. Ici encore, il peut être pertinent de faire remarquer par analogie que la Cour suprême du Canada a statué que la légalité d'un refus de permettre à une personne de demander la libération conditionnelle est susceptible de contrôle au moyen d'un bref d'habeas corpus : R. c. Gamble, [1988] 2 R.C.S. 595. D'autre part, les sorties sous surveillance ont un but plus restreint, et il importe peu aux fins qui nous occupent que les personnes visées par un ordre prévu au paragraphe 105(1) y soient néanmoins admissibles en vertu du paragraphe 105(2).

[18]La conclusion selon laquelle un ordre prévu au paragraphe 105(1) entraîne la garde de la personne visée est également étayée par le libellé de la disposition, en ce sens qu'on ordonne au directeur de l'établissement "de continuer à la détenir" [soulignement ajouté]. Par conséquent, la personne concernée est "gardée" aux fins du paragraphe 103(6) de la Loi. Continuer à détenir une personne après qu'elle aurait par ailleurs cessé d'être détenue et détenir une personne, c'est, comme Me  Matas l'a maintenu, faire une distinction qui n'existe pas. Quoi qu'il en soit, ce sont "[l]es motifs qui pourraient justifier une prolongation de sa garde" [soulignement ajouté] qui sont examinés en vertu du paragraphe 103(6).

[19]De plus, le fait que l'ordre prévu au paragraphe 105(1) peut uniquement viser une personne qui a fait l'objet d'un mandat d'arrestation en vertu du paragraphe 103(1) ou d'un ordre de détention donné par un arbitre en vertu de l'alinéa 103(3)b) crée un lien crucial entre les paragraphes 103(6) et 105(1), et ce, parce que les mandats d'arrestation et les ordres de détention prévus dans ces dispositions visent des personnes qui sont frappées par une mesure de renvoi ou qui doivent faire l'objet d'un interrogatoire ou d'une enquête qui peuvent entraîner leur renvoi. Le paragraphe 103(6) prévoit l'examen des motifs qui pourraient justifier une prolongation de la garde aux fins d'un "interrogatoire, [d'une] enquête [ou d'un] renvoi".

[20]Néanmoins, comme Me Katz l'a soutenu pour le compte du défendeur, le paragraphe 103(6) semblerait se rapporter à des situations fort différentes de celle de la personne faisant l'objet d'une mesure d'expulsion qui purge déjà une peine d'emprisonnement après avoir été condamnée au criminel. Les dispositions en question s'appliquent manifestement à la personne qui serait par ailleurs en liberté, mais qui est gardée parce qu'il existe des motifs de croire qu'elle constitue une menace pour la sécurité publique ou qu'elle se dérobera à un interrogatoire ou à une enquête ou n'obtempérera pas à la mesure de renvoi.

[21]Le paragraphe 103(6) accorde des protections procédurales importantes lorsque l'interrogatoire, l'enquête ou le renvoi ne peuvent pas avoir lieu à bref délai. Ainsi, s'ils n'ont pas lieu dans les quarante-huit heures, l'intéressé a droit à un examen "dès l'expiration de ce délai" et, si l'examen est retardé, dans les sept jours qui suivent et par la suite tous les trente jours. Des dispositions aussi complexes sembleraient permettre de contrôler d'une façon appropriée l'exercice d'un pouvoir pour le moins inhabituel, soit le pouvoir des fonctionnaires administratifs de garder sans audience une personne qui n'a pas été accusée ou reconnue coupable d'une infraction criminelle et qui serait par ailleurs en liberté.

[22]L'historique de ces dispositions de la Loi sur l'immigration confirme qu'initialement, le législateur ne voulait pas que le paragraphe 103(6) s'applique aux personnes qui étaient déjà incarcérées à la suite d'une condamnation au criminel. C'est ce qui ressort clairement du fait que le paragraphe 103(6), sous sa forme actuelle, a été édicté par l'article 94 de L.C. 1992, ch. 49, une modification mineure ayant été apportée par le paragraphe 19(2) de L.C. 1995, ch. 15, alors que l'article 105 actuel a été ajouté par la suite par l'article 20 de L.C. 1995, ch. 15, y compris la condition voulant que cette disposition s'applique malgré la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et la Loi sur les prisons et les maisons de correction [L.R.C. (1985), ch. P-20].

[23]Toutefois, à mon avis, le fait que le paragraphe 103(6) a été édicté avant l'article 105 ne veut pas nécessairement dire qu'il ne peut pas maintenant être interprété comme prévoyant un examen dans le cas des personnes gardées en vertu du paragraphe 105(1), et ce, parce que la mention au paragraphe 103(6) des personnes gardées conformément à la Loi sur l'immigration qui sont visées par un ordre prévu au paragraphe 103(1) ou à l'alinéa 103(3)b) devrait être interprétée comme s'appliquant aux personnes qui sont gardées par suite de l'exercice de pouvoirs conférés par la Loi sur l'immigration telle qu'elle existait en 1992 et telle qu'elle est modifiée de temps en temps.

[24]Dans le Renvoi relatif au Régime d'assistance publique du Canada (C.-B.), [1991] 2 R.C.S. 525, le juge Sopinka a dit ceci (à la page 552):

[. . .] dans une loi fédérale, toute mention de lois du Parlement fédéral doit être interprétée comme visant les lois en vigueur: voir l'art. 10 de la Loi d'interprétation [L.R.C. (1985), ch. I-21].

Cette présomption devrait également s'appliquer en l'espèce, étant donné que la loi fédérale mentionnée, soit la Loi sur l'immigration, est la loi même dans laquelle figure cette mention.

[25]Interpréter le paragraphe 103(6) comme se rapportant uniquement à la Loi sur l'immigration telle qu'elle existait au moment où elle a été édictée serait beaucoup trop strict et la loi comporterait alors une lacune importante. Si leur libellé et leur structure le permettent, les dispositions législatives devraient être interprétées de façon à protéger la liberté de la personne.

[26]Par conséquent, le fait que l'étendue du bref d'habeas corpus est suffisamment large pour permettre à une personne de contester la légalité de l'ordre prévu au paragraphe 105(1) constitue une indication additionnelle que le paragraphe 103(6) devrait être interprété de façon à prévoir l'examen par la section d'arbitrage des motifs qui pourraient justifier la prolongation de l'ordre et par conséquent de la garde. En outre, j'estime que garder une personne "en prison dans une prison" sans tenir d'audience soit avant soit après que l'ordre a été donné constituerait une violation de l'article 9 de la Charte: voir les paragraphes 37 à 47. Toute ambiguïté à laquelle donne lieu le paragraphe 103(6) devrait donc être résolue de façon à rendre la disposition constitutionnelle: Symes c. Canada , [1993] 4 R.C.S. 695, aux pages 751 et 752.

[27]Selon l'interprétation de la Loi que je retiens, l'examen de l'ordre prévu au paragraphe 105(1) ne serait effectué qu'au moment où l'individu devient admissible à la semi-liberté ou à des sorties sans surveillance, parce qu'avant ce moment-là, l'ordre n'aurait pas nui aux conditions d'incarcération de l'individu en question.

[28]L'avocat du défendeur a soutenu que l'article 103 devrait être interprété comme un code complet et que le fait qu'un tel examen n'est pas expressément prévu à l'article 105 montre que le législateur ne voulait pas qu'un tel examen soit effectué. Toutefois, le fait que toutes les personnes qui sont visées par l'ordre prévu au paragraphe 105(1) sont également assujetties à une mesure administrative en vertu du paragraphe 103(1) ou de l'alinéa 103(3)b) crée un lien avec l'article 103. Quoi qu'il en soit, le libellé du paragraphe 103(6) n'est clairement pas limité aux personnes qui sont gardées en vertu de l'article 103.

[29]Me Katz a également soutenu qu'étant donné que la semi-liberté et les sorties sans surveillance visent à faciliter la réadaptation des délinquants et leur réinsertion sociale (voir l'article 100 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition), cela s'applique difficilement aux personnes qui risquent d'être renvoyées du Canada lorsqu'elles auront fini de purger leur peine. Me Katz a soutenu qu'il est donc peu sensé d'interpréter le paragraphe 103(6) comme assurant une protection sur le plan procédural contre le retrait d'un droit (à savoir, l'admissibilité à la semi-liberté ou aux sorties sans surveillance) dans le cas de personnes qui n'étaient jamais destinées à en bénéficier.

[30]Je ne trouve pas cet argument convaincant. Premièrement, les dispositions de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition ne laissent pas entendre qu'en l'absence de l'ordre prévu au paragraphe 105(1), la personne faisant l'objet d'une mesure d'expulsion n'est pas admissible à l'une ou l'autre de ces formes de mise en liberté. De fait, si elle n'était pas admissible, l'aspect du paragraphe 105(1) ici en cause serait probablement redondant.

[31]Deuxièmement, comme Me Matas l'a signalé, les personnes qui font l'objet de mesures d'expulsion ne sont pas toutes exclues de la société canadienne. Ainsi certaines personnes peuvent rentrer au Canada si le ministre délivre un permis pour des raisons d'ordre humanitaire en vertu de l'article 37 [mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 26] de la Loi sur l'immigration. De plus, certaines mesures de renvoi peuvent s'avérer inexécutables: voir l'alinéa 19(4)k)(iv) [mod. par DORS/84-849, art. 1] du Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172, dans sa forme modifiée. Par conséquent, dans la mesure où la semi-liberté et les sorties sans surveillance visent à s'appliquer uniquement aux individus qui doivent réintégrer la société canadienne, cette catégorie comprendra du moins certaines personnes visées par l'ordre prévu au paragraphe 105(1).

[32]Troisièmement, même les personnes visées par l'ordre prévu au paragraphe 105(1) ont droit à la libération conditionnelle totale (alinéa 105(1)a)) bien qu'une personne faisant l'objet d'une mesure d'expulsion qui bénéficie d'une libération conditionnelle totale, soit une autre mesure de réadaptation et de réinsertion, puisse alors être renvoyée du Canada: paragraphe 128(3) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et paragraphe 50(2) de la Loi sur l'immigration.

[33]L'avocat du défendeur a également soutenu que l'on ne peut pas dire que le pouvoir conféré par le paragraphe 105(1) puisse être exercé à sa guise ou d'une façon arbitraire, étant donné que l'ordre prévu au paragraphe 105(1) peut uniquement être donné à l'égard d'une personne faisant l'objet d'un mandat délivré en vertu du paragraphe 103(1) ou d'un ordre de garde donné en vertu de l'alinéa 103(3)b). Pour que l'une ou l'autre de ces mesures puisse être prise, le sous-ministre, l'agent principal ou l'arbitre doit avoir des motifs raisonnables de croire que la personne en cause constitue une menace pour la sécurité publique ou qu'elle ne comparaîtra peut-être pas à l'interrogatoire ou à l'enquête ou n'obtempérera peut-être pas à la mesure de renvoi. En outre, les mandats ou ordres prévus à l'article 103 sont susceptibles d'examen devant la Cour fédérale et seront jugés invalides s'il est conclu que le pouvoir discrétionnaire y afférent a été exercé d'une façon abusive.

[34]Toutefois, compte tenu des motifs restreints de contrôle qui s'appliquent à la demande de contrôle judiciaire et du temps nécessaire au règlement de la demande, ce recours est beaucoup moins efficace qu'un examen rapide au fond par l'arbitre de l'ordre prévu au paragraphe 105(1). Je remarque également que l'avocat du défendeur n'a pas soutenu que, si le paragraphe 103(6) était interprété de façon à s'appliquer à l'examen des ordres prévus au paragraphe 105(1), cela nuirait à l'application de la Loi sur l'immigration ou créerait de graves problèmes administratifs.

[35]Par conséquent, à mon avis, l'interprétation que le demandeur donne au paragraphe 103(6) est correcte. Quant à la question du recours, je ne crois pas qu'il soit nécessaire de délivrer des ordonnances mandatoires à l'intention de la section d'arbitrage ou du défendeur pour donner effet à ma décision. Il suffit d'accorder une ordonnance déclaratoire portant qu'une personne visée par l'ordre prévu au paragraphe 105(1) est gardée conformément au paragraphe 103(6) de la Loi sur l'immigration et que les dispositions de ce paragraphe relatives à l'examen s'appliquent aux ordres prévus au paragraphe 105(1).

Deuxième question

[36]Étant donné la conclusion que j'ai tirée au sujet de l'interprétation de la Loi sur l'immigration, il n'est pas strictement nécessaire que j'examine à fond les arguments détaillés que Me Matas a avancés, à savoir que si les ordres prévus au paragraphe 105(1) ne sont pas assujettis au paragraphe 103(6), ces ordres sont invalides en l'absence d'un examen des motifs justifiant la prolongation de la garde. Cette conclusion doit être tirée de l'article 9 de la Charte, parce que la garde serait par ailleurs arbitraire, ainsi que de l'article 15 de la Charte, parce que seuls les non-citoyens peuvent faire l'objet de l'ordre prévu au paragraphe 105(1) de sorte que le pouvoir de donner pareil ordre constitue de la discrimination fondée sur la nationalité du demandeur, soit un "motif analogue" à ceux qui sont énumérés à l'article 15: Andrews c. Law Society of British Columbia , [1989] 1 R.C.S. 143.

Article 9

[37]Il est ici soutenu que le fait de priver un détenu de son admissibilité à la semi-liberté ou aux sorties sans surveillance, droit reconnu par la loi aux autres détenus, équivaut à une détention ou à un emprisonnement au sens de l'article 9 de la Charte. La détention ou l'emprisonnement à des fins constitutionnelles devrait certainement être déterminé par rapport à l'étendue de la liberté personnelle protégée par le bref d'habeas corpus. L'interprétation des droits reconnus par la Charte devrait être éclairée, sinon toujours déterminée d'une façon concluante par la common law. Je ne vois pas pourquoi le droit protégé par l'article 9 devrait être moins étendu que le droit protégé par le bref d'habeas corpus, qui a toujours été si étroitement lié à l'idée selon laquelle les individus ne doivent pas illicitement être privés de leur liberté que son ancien statut quasi constitutionnel a été officiellement reconnu sur le plan constitutionnel par l'alinéa 10c) de la Charte.

[38]Puisque j'ai décidé, en me fondant sur les arrêts qui portent sur l'étendue du bref d'habeas corpus, qu'une personne visée par l'ordre prévu au paragraphe 105(1) est gardée conformément à la Loi sur l'immigration, il ne m'est pas difficile de conclure en outre que le demandeur est également "détenu ou emprisonné" aux fins de l'article 9.

[39]Toutefois, afin d'établir que l'article 9 a été violé, le demandeur doit également démontrer que la détention ou l'emprisonnement était arbitraire. Il s'agit donc de savoir si une personne est arbitrairement détenue lorsque le sous-ministre donne un ordre et que la personne en question risque de continuer à être gardée jusqu'à l'expiration de sa peine ou jusqu'à ce que la libération conditionnelle totale lui soit accordée, sans que les motifs justifiant la prolongation de la garde soient examinés dans le cadre d'une audience tenue par un tribunal indépendant.

[40]À mon avis, malgré l'exigence légale voulant que le sous-ministre, l'agent principal ou l'arbitre aient des motifs raisonnables de croire, en vertu des paragraphes 103(1) ou (3), que la personne en cause ne comparaîtra pas à l'interrogatoire ou à l'enquête ou qu'elle n'obtempérera pas à la mesure de renvoi, le détenu qui est visé par l'ordre prévu au paragraphe 105(1) serait arbitrairement détenu si l'interprétation du paragraphe 103(6) préconisée par le défendeur était correcte et si les motifs justifiant la prolongation de la garde ne pouvaient donc pas être examinés par la section d'arbitrage.

[41]Dans l'arrêt Webb v. British Columbia (Director, Lower Mainland Regional Correction Centre) (1988), 51 D.L.R. (4th) 726 (C.A. C.-B.), on a statué que le pouvoir prévu alors à l'alinéa 104(3)b) [S.C. 1976-77, ch. 52] de délivrer un mandat d'arrestation contre une personne qui constitue une menace pour la sécurité publique ou qui ne comparaîtra pas à l'interrogatoire ou à l'enquête ou n'obtempérera pas à la mesure de renvoi n'autorise pas une garde arbitraire parce que ce pouvoir peut être objectivement exercé et, comme l'a dit le juge Macfarlane à la page 729, parce qu'il:

[traduction] [. . .] protège le détenu en assurant un examen régulier de son cas, les motifs de la détention devant être examinés de nouveau et des motifs justifiant la prolongation de la détention devant être donnés dans le cadre de cet examen.

Ces motifs permettent raisonnablement d'inférer que si la loi ne permettait pas un examen indépendant des motifs justifiant la prolongation de la garde, la Cour aurait conclu que le paragraphe 103(3) est contraire à l'article 9 de la Charte. Compte tenu des faits de l'espèce, telle est la conclusion que je tirerais en ce qui concerne les paragraphes 103(6) et 105(1).

[42]L'avocat du défendeur a soutenu qu'étant donné que l'article 9 ne garantit pas le droit à la libération conditionnelle, une disposition législative qui empêche une personne de faire examiner son cas aux fins de la libération conditionnelle sans que les motifs justifiant la prolongation de la garde soient examinés ne peut pas violer l'article 9.

[43]Je ne trouve pas cet argument convaincant. Même si le législateur n'est peut-être pas constitutionnellement tenu de prévoir la libération conditionnelle, une fois qu'il a reconnu l'admissibilité à la libération conditionnelle, qu'il s'agisse d'une semi-liberté ou d'une libération conditionnelle totale, la dénégation du droit légal à un examen peut être assimilée à la détention parce que la personne concernée doit purger sa peine dans des conditions beaucoup plus strictes que celles qui s'appliquent d'une façon générale aux autres détenus. Et si ce droit est annulé sans qu'une audience soit tenue ou sans qu'un examen soit effectué, la détention est certainement arbitraire: comparer R. c. Swain, [1991] 1 R.C.S. 933, aux pages 1012 et 1013.

[44]Comme je l'ai déjà dit, j'ai utilisé l'article 9 pour résoudre une ambiguïté possible du paragraphe 103(6) et j'ai interprété cette disposition de façon à inclure un examen périodique des ordres prévus au paragraphe 105(1). Si je commets une erreur sur ce point, pour que la loi soit conforme à l'article 9, il n'est peut-être pas nécessaire d'exiger que les motifs justifiant la prolongation de la garde soient examinés aussi fréquemment que les motifs justifiant la garde des individus détenus uniquement en vertu de l'article 103 ou d'autres dispositions de la Loi.

[45]Sur le plan constitutionnel, il existe différents genres de détention, et le fait d'être privé du droit de faire examiner son cas aux fins de la semi-liberté ou des sorties sans surveillance constitue une dénégation moins importante de la liberté de la personne que le fait d'être détenu alors que l'on devrait par ailleurs être en liberté. Par conséquent, pour que la détention ne soit pas arbitraire, il suffirait que la section d'arbitrage effectue un examen aussitôt que possible après l'ordre entraînant l'inadmissibilité du détenu, et tous les six mois par la suite tant que l'ordre continue à s'appliquer.

[46]L'avocat du défendeur n'a pas soutenu que si les dispositions pertinentes de la Loi sur l'immigration violaient l'article 9 de la Charte, elles étaient par ailleurs justifiables en vertu de l'article premier.

[47]Si la chose était nécessaire aux fins du règlement de cette demande, je serais prêt à remédier au défaut constitutionnel du texte de loi en incorporant dans le paragraphe 105(1) les mots soulignés suivants:

105. (1) [. . .] le sous-ministre peut ordonner au [. . .] responsable, [sous réserve d'un examen effectué en vertu du paragraphe 103(6) aussitôt que possible après que la personne a cessé d'être admissible à la semi-liberté ou aux sorties sans surveillance, et tous les six mois par la suite, tant que l'ordre est en vigueur] [. . .]

Article 15

[48]Étant donné que le droit d'entrer et de demeurer au Canada et le droit de quitter le Canada s'applique uniquement aux citoyens canadiens en vertu de l'article 6 de la Charte, les tribunaux n'ont pas assujetti les dispositions de la Loi sur l'immigration à un contrôle en vertu de l'article 15 pour le motif que ces dispositions constituent de la discrimination fondée sur la nationalité. Comme le juge Sopinka l'a dit dans l'arrêt Chiarelli c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1992] 1 R.C.S. 711, à la page 736:

Ne constitue donc pas une discrimination interdite par l'art. 15 un régime d'expulsion qui s'applique aux résidents permanents, mais non aux citoyens.

[49]Le paragraphe 105(1) vise à faire en sorte que les personnes visées par un ordre comparaissent à un interrogatoire ou à une enquête susceptibles d'entraîner leur renvoi du Canada, ou obtempèrent à la mesure de renvoi elle-même. Cette disposition fait donc partie d'"un régime d'expulsion". Elle n'est donc pas assujettie à un contrôle en vertu de l'article 15, même si l'ordre prévu au paragraphe 105(1) peut priver uniquement les détenus qui ne sont pas citoyens du droit de faire examiner leur cas aux fins de la semi-liberté ou des sorties sans surveillance.

Troisième question

[50]Enfin, en ce qui concerne la demande de M. Shouq, l'avocat du défendeur a signalé que l'ordre prévu à l'article 105 avait été donné avant que la version actuelle de cette disposition ait été édictée. L'ancienne version n'empêchait pas la personne visée par l'ordre d'être admissible à la semi-liberté ou aux sorties sans surveillance.

[51]L'ordre auquel M. Shouq était assujetti en vertu de l'ancien article 105 n'a pas été automatiquement remplacé par un nouvel ordre par suite de l'adoption de la version actuelle du paragraphe 105(1), et en fait aucun nouvel ordre n'a été donné. Me Katz a donc soutenu que M. Shouq est déjà admissible à la semi-liberté ou aux sorties sans surveillance sur la même base que tout autre détenu et qu'il n'est donc pas nécessaire que cette Cour rende une ordonnance pour que son cas puisse être examiné à l'égard de l'une ou l'autre de ces formes de libération temporaire.

[52]Toutefois, pour dissiper tout doute, je rendrai à l'égard de M. Shouq une ordonnance déclaratoire portant que, pour les motifs énoncés dans le paragraphe qui précède, il est admissible à la semi-liberté et aux sorties sans surveillance.

[53]Pour ces motifs, les demandes de contrôle judiciaire sont accueillis. Les réponses aux questions que j'ai énoncées au paragraphe 10 sont les suivantes:

1.  Oui

2.  a)  Oui    b)  Non

3.  Oui

[54]Les avocats des parties ont présenté leurs observations après avoir examiné le projet d'ordonnance; j'ai certifié les questions suivantes conformément au paragraphe 83(1) [mod. par L.C. 1992, ch. 49, art. 73] de la Loi sur l'immigration en ce qui concerne le demandeur Chaudhry:

1.    Un non-citoyen, incarcéré à la suite d'une condamnation au criminel, qui est visé par l'ordre prévu au paragraphe 105(1) de la Loi sur l'immigration et dont le cas ne peut donc pas être examiné par une commission des libérations conditionnelles aux fins de la semi-liberté ou d'une sortie sans surveillance est-il gardé aux fins du renvoi conformément à la Loi sur l'immigration de sorte qu'il a droit à un examen des motifs de prolongation de la garde en vertu du paragraphe 103(6) de la Loi?

2.    Si le paragraphe 103(6) de la Loi sur l'immigration ne s'applique pas aux ordres prévus au paragraphe 105(1), la Loi viole-t-elle l'article 9 de la Charte canadienne des droits et libertés?

3.    Si l'article 9 est violé, est-il possible d'y remédier d'une façon appropriée en incorporant dans le paragraphe 105(1) immédiatement après les mots "le sous-ministre peut ordonner" les mots "sous réserve d'un examen effectué en vertu du paragraphe 103(6) aussitôt que possible après que la personne a cessé d'être admissible à la semi-liberté ou aux sorties sans surveillance, et tous les six mois par la suite, tant que l'ordre est en vigueur"?

Malgré les arguments habiles des avocats, je ne suis pas convaincu qu'une question grave de portée générale se pose en l'espèce en ce qui concerne l'article 15 de la Charte.

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