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Le sous-ministre du Revenu national (douanes et accise) (Appelant)
c.
Danfoss Manufacturing Limited, Techumseh Products of Canada Limited et John Inglis Com pany Limited (Intimées)
Cour d'appel, le juge en chef Jackett et les juges suppléants Cameron et Sweet—Ottawa, les 9 et 10 mai 1972.
Douanes—Classification de pièces de glacières.
Un certain nombre de compresseurs ont été importés au Canada pour être vendus à un fabricant de glacières qui devait les utiliser dans la fabrication de glacières. Toutefois, les compresseurs pouvaient également être utilisés à d'au- tres fins, par exemple, dans la fabrication de déshydratants. La Commission du tarif a décidé que les compresseurs ne sont pas des «pièces de glacières» au sens de la position tarifaire 41507-1 du Tarif des douanes, mais des «machines, n.d.» au sens de la position tarifaire 42700-1.
Arrêt: l'appel est rejeté.
(1) La Commission était justifiée de tirer les conclusions de fait qu'elle a tirées.
(2) Le terme «glacières» employé dans la position tari- faire 41507-1, laquelle se trouve sous le titre «glacières, pour habitations ou magasins», ne peut pas être interprété comme comprenant toute la gamme des réfrigérateurs com- merciaux et il ne désigne que l'appareil du même nom qui est habituellement utilisé dans les résidences ou les commerces.
APPEL d'une décision de la Commission du tarif.
J. E. Smith pour l'appelant.
Gordon Henderson, c.r. et James Wlorrall, c.r. pour Danfoss Manufacturing Limited.
D. D. Diplock, c.r. pour Techumseh Products of Canada Limited.
Le jugement de la Cour a été rendu par
LE JUGE SUPPLÉANT SWEET—Le présent appel a été interjeté en vertu de l'article 45(1) de la Loi sur les douanes, chapitre 26 des Sta- tuts du Canada de 1958', et il porte sur une déclaration du ter juin 1971 de la Commission du tarif faisant droit à un appel interjeté par la Danfoss Manufacturing Limited, intimée en cette Cour, portant que certains compresseurs importés par ladite intimée (ci-après appelée la «Danfoss») pendant la période allant du 3 jan- vier 1968 au 22 mai 1968 ne sont pas des
«pièces de glacières», classées dans la position tarifaire 41507-1 du tarif des douanes, mais des «machines, n.d.», classées dans la position tari- faire 42700-1.
Aux termes de l'article 45(1), le présent appel est un appel «sur une question de droit».
Les compresseurs en question ont été impor tés par la Danfoss aux fins de les revendre à des tiers qui les ont utilisés dans la fabrication de glacières.
Les positions tarifaires en cause se lisent comme suit:
Tarif Tarif de pré- de la férence nation britan- la plus Tarif nique favorisée général
Glacières, pour habitations ou magasins, munies ou non de tous leurs accessoires:
41507-1 Pièces de glacières, en fer ou en acier ou dont le fer ou l'acier, ou les deux, do-
minent en valeur 7z p.c. 20 p.c. 35 p.c.
42700-1 Machines, n.d., et accessoi- res, dispositifs, appareil- lages de commande et outils devant servir avec ces ma chines; pièces de ce qui
précède 2 - p.c. 15 p.c. 35 p.c.
Les deux questions qui ont été soumises à l'adjudication de la Commission du tarif sont les suivantes:
1. Les compresseurs en question sont-ils des «pièces de glacières ...»; et
2. Dans l'affirmative, les compresseurs en question sont-ils des pièces «... dont le fer ou l'acier, ou les deux, dominent en valeur».
La Commission du tarif a décidé que les com- presseurs en cause n'étaient pas des pièces de glacières et, par conséquent, elle ne s'est pas prononcée sur la seconde question. Dans la détermination du bien-fondé de la décision
rendue sur la première question, on ne considé- rera que les faits qui se rapportent à ladite question.
Aux termes de la décision de la Commission, les compresseurs en cause ne sont pas des «articles qui sont conçus et fabriqués unique- ment pour servir comme des pièces de glacières et qui sont achetés et vendus seulement à cette fin». Ce sont plutôt des «articles conçus et fabriqués pour une utilisation qui ne se limite pas aux glacières, quoiqu' ... ils soient conçus et fabriqués d'une manière qui permet de les utiliser dans des glacières—ce que l'on fait— aussi bien que dans d'autres appareils». La Commission a de plus décidé que, bien que la nature des compresseurs en question en restrei- gne l'utilisation, «ce désavantage n'empêcherait pas ces compresseurs de servir avec des distri- buteurs automatiques, des refroidisseurs de lait utilisés par les cultivateurs, des refroidisseurs de bornes-fontaines, des refroidisseurs de rivets utilisés dans les usines d'avions ou avec des déshydratants».
De l'avis de la Commission, l'expression «pièces de glacières», employée dans la position tarifaire 41507-1, «représente des articles qui sont soit des pièces de glacières à cause de leur nature même, soit des parties déjà intégrées à une glacière ou emballées avec les autres pièces de cette glacière». La Commission souligne que les termes utilisés ne sont pas l'équivalent des termes «devant servir comme des pièces de glacières» et elle déclare que «c'est un numéro qui décrit les articles au lieu de définir l'usage qu'on en fait». La Commission donne, comme exemples de «pièces de glacières» au sens de la position tarifaire en cause, «certains côtés ren- fermant des matériaux isolants, certaines poi- gnées de porte, certains compartiments frigorifi- ques, certaines tablettes et d'autres articles qui, par leur nature et leurs caractéristiques, sont des pièces de glacières et sont en fait générale- ment utilisés ainsi».
En appliquant sa définition des termes «pièces de glacières» aux faits qu'elle a consta- tés, la Commission conclut que les compres- seurs en cause ne sont pas des «pièces de glacières» au sens que donne à ces termes la position tarifaire 41507-1 et qu'ils sont des
«machines, n.d.», au sens de la position tarifaire 42700-1.
Les conclusions de fait de la Commission du tarif susmentionnées ne sont pas contestées et, par conséquent, nous devons les accepter comme exactes.
Le premier argument de l'appelant, si je l'ai bien compris, est que les termes «pièces de glacières» comprennent, en plus des pièces qui sont tellement spéciales qu'elles ne peuvent être utilisées dans autre chose, [TRADUCTION] «un grand nombre de pièces qui sont généralement conçues et fabriquées pour être utilisées dans des glacières, mais qui ne le sont pas toujours». Au cours des plaidoiries, l'avocat a soutenu avec vigueur que, lorsque des pièces d'une caté- gorie donnée sont importées pendant plusieurs années aux fins d'être utilisées dans la fabrica tion de glacières, il s'ensuit qu'elles sont des «pièces de glacières».
Si l'on considère cet aspect particulier de l'appel, on trouve une difficulté que l'avocat de l'appelant n'a pas réussi à surmonter, savoir, le fait que lorsque le Parlement désire que l'appli- cation d'une position tarifaire soit basée sur l'utilisation réelle en vue de laquelle un bien est importé, il manifeste son intention en utilisant ce qui est généralement appelé une «position tarifaire basée sur l'utilisation effective». La position tarifaire 41435-1 en constitue un exemple.
Tarif Tarif
de pré- de la férence nation
britan- la plus Tarif nique favorisée général
41435-1 Pièces achevées de caisses enregistreuses, importées par les fabricants de caisses enregistreuses, pour être employées à la fabrication de ces caisses enregistreuses
dans leur propre fabrique 121 p.c. 122 p.c. 25 p.c.
GATT 10 p.c
C'est la différence entre cette position tarifaire et la position tarifaire 41507-1 qui a fait dire à la Commission du tarif:
Le numéro tarifaire n'emploie pas des termes voulant dire «devant servir comme des pièces de glacières» ou «utilisé pour fabriquer des glacières». C'est un numéro qui décrit les articles au lieu de définir l'usage qu'on en fait.
Également, l'argument invoqué contre la déci- sion de la Commission ne peut pas être retenu pour le motif qu'en l'absence de dispositions législatives précises au contraire, les articles doivent être classés, aux termes de la Loi sur les douanes, tels qu'ils sont au moment de leur arrivée. Voir: Le sous-ministre du Revenu natio nal, douanes et accise c. MacMillan & Bloedel (Alberni) Limhted [1965] R.C.S. 366, appliqué dans Le sous-ministre du Revenu national, douanes et accise c. Ferguson Industries Ltd. (1972) décision du juge Pigeon (non publiée).
Considérant les faits constatés par la Com mission du tarif, et, même en supposant que les compresseurs du genre en cause ici n'ont jamais été utilisés au Canada à des fins autres que la fabrication de glacières (il ne semble pas que la Commission du tarif ait constaté ce fait ou que la preuve l'établisse), cette Cour est d'avis que la Commission du tarif était en droit de con- clure que les compresseurs en cause ne sont pas des «pièces de glacières». Tels qu'ils étaient au moment de leur importation, rien ne permettait de classer les compresseurs en cause dans les «pièces de glacières» plutôt que dans les «pièces de déshydratants» ou dans les pièces des autres appareils énumérés par la Commis sion, mis à part le fait reconnu que l'acheteur qui, selon ce qui était prévu, devait prendre ces pièces à l'importateur était un fabriquant de glacières et qu'il avait l'intention de les utiliser dans la fabrication de glacières. Il est possible que, dans un autre cas, des compresseurs identi- ques à tous points de vue à ceux en cause soient importés et que la Commission décide, sur la base des faits qui lui seraient présentés, que le but était de les utiliser dans la fabrication de déshydratants. Il n'est pas possible de justifier que les compresseurs soient classés dans une catégorie ou une autre sur la base de l'utilisation que l'on doit en faire. Quelque séduisant que soit l'argument portant que, jusqu'à maintenant, lesdits compresseurs ont été importés pour la fabrication de glacières et que, par conséquent, ils doivent être considérés comme des «pièces de glacières», la Loi doit être interprétée par rapport à l'ensemble de son champ d'application
et non par rapport aux cas particuliers dans lesquels il peut avoir été nécessaire de l'appliquer.
Jusqu'à maintenant, la question a été étudiée en prenant pour acquis que le terme «glacière», employé dans la position tarifaire qui nous inté- resse, ne comprend que les appareils qui sont généralement considérés comme des glacières, ce qui exclut les distributeurs automatiques, les refroidisseurs de lait utilisés par les cultiva- teurs, les refroidisseurs de bornes-fontaines, les refroidisseurs de rivets utilisés dans la construc tion d'avions et les déshydratants. L'appelant présente comme suit, dans son exposé, le second argument à l'encontre de la décision de la Commission:
[TRADUCTION] Il se dégage du contexte dans lequel le mot est utilisé que le législateur a voulu viser également toute la gamme des appareils de refroidissement commerciaux, y compris les refroidisseurs de lait et les refroidisseurs de bornes-fontaines, dans lesquels la Commission est d'avis qu'il est possible d'utiliser des compresseurs comme ceux en cause.
Cet argument est facilement écarté: il suffit de noter que la position tarifaire en cause se trouve sous le titre:
Glacières, pour habitations ou magasins .. .
Même si le mot «glacière», considéré en lui- même, peut, dans certains contextes, désigner un appareil réfrigérant quelconque, les mots «glacières pour habitations ou magasins» ne peuvent pas désigner autre chose que l'appareil du même nom habituellement utilisé dans les résidences ou les commerces. De plus, à notre avis, dans le langage usuel, tout appareil réfrigé- rant n'est pas une glacière. Les divers genres d'appareils ont reçu des noms qui reflètent leurs caractéristiques dominantes. Le terme «glaciè- re», dans le langage usuel, au Canada, a le sens restreint dans lequel la Commission l'a utilisé.
L'appel est rejeté.
Puisque les procédures devant la Commission du tarif et la décision qui en a résulté sont antérieures à l'entrée en vigueur des Statuts revisés du Canada de 1970 (le 15 juillet 1971), j'applique la loi qui était en vigueur avant cette date.
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