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David Gerald Crabbe (Appelant) c.
L'honorable Donald C. Jamieson, ministre des Transports (Intimé)
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, les juges Thurlow et Pratte —Ottawa, le 30 novembre 1973.
Pratique—Dépens—Taxation—La Cour peut, à sa discré- tion, prescrire le paiement d'une somme globale dans le jugement—Règles de la Cour fédérale 334, 337(5) et (6), 344, 346.
REQUÊTE en vertu de la Règle 324 des Règles de la Cour fédérale.
PROCUREURS:
Langlois, Drouin et Laflamme, Québec, pour l'appelant.
Le sous-procureur général du Canada pour l'intimé.
Le jugement de la Cour a été prononcé par
LE JUGE EN CHEF JACKETT—I1 s'agit d'une requête présentée en conformité de la Règle 324, demandant que soit déterminé le montant des dépens adjugés par le jugement de la Cour prononcé le 9 juin 1972. Ce jugement ordonnait le paiement des dépens à l'appelant, «lorsqu'ils seraient taxés».
Le fait qu'une telle requête ait été présentée démontre qu'il est nécessaire d'expliquer quel- que peu l'économie des Règles relatives à l'allo- cation des dépens.
En premier lieu, les pouvoirs que possède la Cour de varier son propre jugement, en prescri- vant le paiement d'une somme globale au lieu de frais taxés, sont très limités. Un jugement doit toujours être consigné dans un document dis tinct signé par le juge qui a présidé à l'audition (Règle 337(2)a) et (3)) ou, dans le cas d'un jugement interlocutoire, il doit être inscrit par le juge sur un autre document. Un tel jugement est alors définitif (Règle 337(4)) mais
a) ses termes peuvent être examinés de nou- veau au motif que le prononcé n'est pas en accord avec les motifs ou qu'il y a eu une omission accidentelle (Règle 337(5)), et
b) les erreurs de rédaction et les omissions accidentelles, etc., peuvent être corrigées (Règle 337(6)).
En matière de dépens, la Cour dispose de trois moyens d'intervenir:
a) en adjugeant les dépens dans le jugement règlant une affaire,
b) en donnant des instructions ou en détermi- nant par ordonnance ce qui doit, ou ne doit pas, être accordé à titre de dépens, lorsque ces derniers doivent être taxés, et
c) en se prononçant sur un «appel» interjeté d'une taxation des frais par un officier taxateur.
Examinons d'abord la question de l'allocation des dépens.
La Règle 334(1) prévoit que les frais de toutes les «procédures» sont laissés à la discré- tion de la Cour et qu'ils suivent le sort de l'affaire, «sauf ordonnance contraire». Cela signifie qu'un jugement, interlocutoire ou défini- tif, tranchant une affaire doit expressément ou implicitement déterminer quels frais, s'il en est, devront être payés relativement aux procédures; en effet, si ce jugement ne traite pas expressé- ment des dépens, ceux-ci devront «suivre le sort de l'affaire». Si la Cour, dans son jugement, traite expressément des dépens, elle peut adju- ger soit une «somme globale» soit les «frais taxés» (dernière phrase de la Règle 344(1)) et, dans les deux cas, la Cour, dans l'exercice de sa discrétion, doit tenir compte des dispositions de la Règle 344(3).
Examinons en second lieu la question des instructions et ordonnances de la Cour relatives à ce dont les officiers taxateurs devront tenir compte.
En plus de son pouvoir discrétionnaire quant au prononcé du jugement relatif aux dépens (c.-à.-d., accorder une somme globale ou les dépens taxés pour tout ou partie des dépenses engagées), la Cour est autorisée à donner des instructions dont les officiers taxateurs devront tenir compte en procédant à la taxation des frais. La Règle 344(4), prise avec la Règle 344(5), prévoit des instructions portant qu'«il ne sera pas accordé de dépens» dans certains cas.
Le tarif B, paragraphe 3, prévoit la modifica tion, sur instructions de la Cour, de certaines sommes qui pourraient autrement être accor- dées en vertu dudit tarif. La Règle 346 énonce les règles qui s'appliquent à la taxation des frais, sauf ordonnance contraire de la Cour. La - Cour peut donner des instructions ou rendre des ordonnances particulières à tout moment appro- prié pendant les procédures ou dans les cas prévus à la Règle 344(7).
La Règle 346(1) confirme cette façon de con- cevoir le rôle de la Cour; elle se lit comme suit:
Règle 346. (1) Tous les frais entre parties doivent être déterminés aux termes ou en application du jugement et des instructions de la Cour et, sous réserve de ces derniers, le tarif B figurant à l'annexe A des présentes Règles, ainsi que la présente Règle, sont applicables à la taxation des frais entre parties.
Il faut enfin remarquer que le soi-disant appel à l'encontre d'une taxation est prévu à la Règle 346(2), qui dispose que les frais doivent être taxés par un officier taxateur «sous réserve d'être révisés par la Cour sur demande d'une partie insatisfaite de cette taxation». Il est évi- dent que la Cour, en procédant à cette révision, ne peut que déterminer si l'officier taxateur a commis une erreur dans l'exercice de ses fonc- tions. Cette procédure ne lui permet ni de modi fier son jugement ou ses instructions, ni de donner des instructions ou rendre une ordon- nance aux termes de la Règle 344(4) ou du paragraphe 3 du tarif B.
Dans l'affaire présente, le jugement fut pro- noncé à l'audience; la question de l'allocation d'une somme globale au lieu de frais taxés aurait donc pu être mentionnée avant que le jugement soit prononcé. Elle aurait aussi pu être soulevée par une requête présentée en vertu de la Règle 344(7), dans le délai accordé par la Règle 337(5), demandant un nouvel examen du prononcé pour une des raisons prévues dans les Règles 337(5) et 337(6), à savoir, au motif que (1) (Règle 337(5)) le prononcé n'est pas en accord avec les motifs du jugement ou qu'il y a une omission accidentelle, ou (2) (Règle 337(6)) il y a une erreur de rédaction ou une omission accidentelle qui exige une correction. Cepen- dant le jugement, tel que prononcé, n'ordonne pas le paiement d'une somme globale au lieu de frais taxés et le dossier soumis à la Cour dans la
présente requête ne fait ressortir aucun des cas prévus dans les Règles 337(5) et 337(6). Le seul motif présenté au dossier comme fondement d'une modification du jugement est le fait que l'appelant estime qu'il ne peut obtenir une taxa tion adéquate en vertu du tarif applicable. Si tel est le cas, la Règle 344(7) et le paragraphe 3 du tarif B offraient une procédure permettant de contester l'adéquation des sommes indiquées au tarif et, si une requête avait été présentée dans les délais prévus, l'appelant aurait pu obtenir une ordonnance modifiant lesdites sommes.
On pourrait aussi remarquer que le dossier soumis à la Cour ne présente aucun motif don- nant à penser que la présente requête devrait être accueillie hors des délais ou si longtemps après l'expiration des délais accordés par les Règles 344(7) et 337(5) pour présenter une demande de modification d'un jugement.
La requête doit donc être rejette.
La question de savoir quel tarif était applica ble a aussi été soulevée et discutée dans les plaidoiries, mais, au vu de ce qui précède, il n'est pas nécessaire de se prononcer sur ce point. Cependant, sans trancher la question, mais pour essayer de faciliter le règlement de l'affaire, on peut faire remarquer que le paragra- phe (3) de l'article 1 du tarif A montre claire- ment que l'appel ne relève pas des clauses a), b) ou c) mais de la clause d) et que la procédure était donc une démarche faisant partie de la classe III.
La requête est rejetée, sans dépens.
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