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A-335-74
In re La Loi antidumping et in re Sabre Interna tional Ltd., Minami Sangyo Limited, Takashima and Co. Ltd., Iwata Boeki Kabushiki Kaisha, Aoyama Trading, Sanyei Corporation, Chiyoda Album Manufacturing Co. Ltd. et Fuji Trading Company Ltd. ( Requérantes)
Cour d'appel, le juge en chef Jackett, le juge Pratte et le juge suppléant Hyde—Montréal, le 6 décembre 1974.
Examen judiciaire—Une déclaration préliminaire de dum ping est-elle susceptible d'examen—Loi antidumping, S.R.C. 1970, c. A-15, art. 13 et 14—Loi sur la Cour fédérale, art. 28.
Une détermination préliminaire de dumping faite par le sous-ministre en vertu de l'article 14(1) de la Loi antidum- ping est une décision ou ordonnance de nature administra tive qui n'est pas soumise à un processus judiciaire ou quasi judiciaire. Ce n'est donc pas une décision ou ordonnance susceptible d'examen en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale.
Arrêt suivi: La Reine c. Randolph [1966] R.C.S. 260. Comparaison avec l'arrêt Magnasonic Canada Ltd. c. Le tribunal antidumping [1972 . ] C.F. 1239.
DEMANDE d'examen judiciaire. AVOCATS:
P. Evraire pour le ministre du Revenu national.
R. Gottlieb pour les requérantes.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour le ministre du Revenu national.
Rappaport, Whelan, Bessner, Gottlieb, Agard & Feldman, Montréal, pour les requérantes.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement prononcés oralement par
LE JUGE EN CHEF JACKETT: Cette requête
vise à annuler la demande d'examen et d'annula- tion, présentée en vertu de l'article 28 1 , d'une détermination préliminaire de dumping faite en vertu de l'article 14(1) de la Loi antidumping. 2
1 L'article 28(1) de la Loi sur la Cour fédérale est ainsi rédigé:
28. (1) Nonobstant l'article 18 ou les dispositions de toute autre loi, la Cour d'appel a compétence pour enten- dre et juger une demande d'examen et d'annulation d'une décision ou ordonnance, autre qu'une décision ou ordon- nance de nature administrative qui n'est pas légalement soumise à un processus judiciaire ou quasi judiciaire, rendue par un office, une commission ou un autre tribunal fédéral ou à l'occasion de procédures devant un office, une commission ou un autre tribunal fédéral, au motif que l'office, la commission ou le tribunal
a) n'a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d'exercer sa compétence;
b) a rendu une décision ou une ordonnance entachée d'une erreur de droit, que l'erreur ressorte ou non à la lecture du dossier; ou
c) a fondé sa décision ou son ordonnance sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon absurde ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.
2 Les articles 13(1) et 14(1) de la Loi antidumping sont ainsi rédigés:
13. (1) Le sous-ministre fait ouvrir immédiatement une enquête concernant le dumping de marchandises, de sa propre initiative ou sur réception d'une plainte écrite portée par des producteurs de marchandises semblables au Canada ou en leur nom,
a) s'il est d'avis qu'il y a des éléments de preuve indiquant que les marchandises ont été ou sont sous- évaluées; et
b) si
(i) il est d'avis qu'il y a des éléments de preuve, ou
(ii) le Tribunal fait savoir qu'il est d'avis qu'il y a des éléments de preuve
indiquant que le dumping mentionné à l'alinéa a) a causé, cause ou est susceptible de causer un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises semblables ou a retardé ou retarde sensiblement la mise en production au Canada de marchandises semblables.
14. (1) Lorsqu'on n'a pas, en vertu du paragraphe 13(6), mis fin à une enquête concernant le dumping de marchandises et que le sous-ministre, par suite de l'en- quête, est convaincu,
a) que les marchandises ont été ou sont sous-évaluées, et
b) que la marge de dumping des marchandises sous- évaluées et le volume réel ou éventuel du dumping ne sont pas négligeables,
il fait une détermination préliminaire du dumping spéci- fiant les marchandises ou la sorte de marchandises aux- quelles cette détermination s'applique.
A mon avis, il n'y a dans la demande qu'un seul motif qui exige un examen, savoir une détermination préliminaire de dumping constitue une décision ou ordonnance de nature adminis trative qui n'est pas légalement soumise à un processus judiciaire ou quasi judiciaire.
Une telle détermination n'est manifestement pas soumise à un processus judiciaire et nulle part, il n'est expressément exigé qu'elle soit soumise à un processus qu'on pourrait qualifier de quasi judiciaire. Le seul problème est donc de déterminer si le caractère quasi judiciaire peut résulter implicitement de la nature de la détermination, compte tenu de l'économie de la Loi antidumping.
A ce que je sache, on ne peut invoquer de règle générale, valable dans tous les cas, pour décider si un tel processus peut être implicite quand il n'est pas expressément prévu. Le cri- tère courant, sinon unique, du caractère judi- ciaire exprès ou implicite d'une décision qui va entraîner qu'une catégorie donnée d'ordonnance ou de décision est soumise au processus quasi judiciaire, est un droit qu'ont les personnes, dont les intérêts sont en cause, de connaître les allégations visant leurs intérêts et d'avoir une possibilité équitable d'y répondre. A mon avis, le vrai problème en l'espèce est de savoir s'il faut considérer un tel droit comme une condi tion préalable à la validité d'une détermination préliminaire de dumping.
Il est difficile, à la simple lecture, de saisir l'économie de la Loi antidumping. En effet, elle impose un droit de dumping à l'occasion de l'importation de marchandises d'une certaine catégorie, quand le Tribunal antidumping cons- tate que certaines conséquences découlent de la «sous-évaluation» des marchandises de cette catégorie. La détermination préliminaire du Sous-ministre est une étape de la procédure normale conduisant à une telle constatation de la part du Tribunal. La constatation même du Tri bunal doit suivre un processus quasi judiciaire' et il existe une procédure, par importation, pour déterminer sur une base judiciaire ou quasi judi- ciaire s'il y a eu dumping et si les marchandises
3 Comparer avec l'arrêt Magnasonic Canada Limited c. Le Tribunal Antidumping, [1972] C.F. 1239.
importées sont visées par la décision du Tribu nal. Compte tenu des arrêts, tel que celui de la Cour Suprême du Canada dans l'affaire La Reine c. Randolph 4 , j'estime que la détermina- tion préliminaire du Sous-ministre ne doit pas être faite sur une base quasi judiciaire. Ce n'est pas sans de sérieux doutes sur sa justesse que je suis arrivé à cette conclusion. J'ai pris en consi- dération les exigences de l'article 13(5), concer- nant les avis d'enquête précédent la détermina- tion préliminaire et aussi le fait que le fabricant canadien dont la plainte a donné lieu à l'enquête du Sous-ministre, peut n'avoir aucun recours dans certaines circonstances qui lui sont préju- diciables. J'ai aussi tenu compte de la nature des éléments qui devaient faire l'objet de l'enquête du Sous-ministre et des conséquences contraires à l'économie de la Loi qu'entraînerait le type d'enquête qu'il aurait fallu mener si la détermi- nation préliminaire devait se faire selon un pro- cessus quasi judiciaire.
J'estime que la demande en vertu de l'article 28 doit être rejetée.
* * *
LE JUGE PRATTE y a souscrit.
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LE JUGE SUPPLÉANT HYDE y a souscrit.
[1966] R.C.S. 260.
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